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Reconversion professionnelle volontaire : le cas de trois jeunes en début de carrière

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Academic year: 2022

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Master

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Reconversion professionnelle volontaire : le cas de trois jeunes en début de carrière

SAN JUAN, Angela

Abstract

Quels éléments conduisent les personnes vers une réorientation professionnelle en début de carrière ? Quelle est la place de la reprise d'études dans une telle démarche ? Notre recherche a pour ambition de comprendre quels sont les facteurs qui interviennent dans un processus de reconversion professionnelle volontaire. Nous avons constitué le corpus sur la base de trois entretiens auprès de jeunes femmes ayant radicalement changé de domaine professionnel. L'analyse porte sur les événements, les sources et les types de tensions identitaires qui impulsent un tel processus et sur la place de la reprise d'études pour réguler ces tensions. A partir du repérage des processus identitaires en jeu au cours de la réorientation professionnelle volontaire, nous avons pu mettre en évidence l'importance ; de l'intérêt porté à un secteur professionnel, des autrui significatifs et des interactions entre les différentes sphères de la vie.

SAN JUAN, Angela. Reconversion professionnelle volontaire : le cas de trois jeunes en début de carrière. Master : Univ. Genève, 2016

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:81815

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Reconversion professionnelle volontaire Le cas de trois jeunes en début de carrière

MEMOIRE REALISE EN VUE DE L’OBTENTION DE LA

MAÎTRISE UNIVERSITAIRE EN SCIENCES DE L'ÉDUCATION - FORMATION DES ADULTES

PAR

Angela San Juan

DIRECTRICE DU MEMOIRE France Merhan Rialland

JURY

Etienne Bourgeois Aurélie Dirickx

France Merhan Rialland

Genève, février 2016

UNIVERSITE DE GENEVE

FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L'EDUCATION SECTION SCIENCES DE L'EDUCATION

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Résumé :

Quels éléments conduisent les personnes vers une réorientation professionnelle en début de carrière ? Quelle est la place de la reprise d’études dans une telle démarche ? Notre recherche a pour ambition de comprendre quels sont les facteurs qui interviennent dans un processus de reconversion professionnelle volontaire. Nous avons constitué le corpus sur la base de trois entretiens auprès de jeunes femmes ayant radicalement changé de domaine professionnel.

L’analyse porte sur les événements, les sources et les types de tensions identitaires qui impulsent un tel processus et sur la place de la reprise d’études pour réguler ces tensions. A partir du repérage des processus identitaires en jeu au cours de la réorientation professionnelle volontaire, nous avons pu mettre en évidence l’importance ; de l’intérêt porté à un secteur professionnel, des autrui significatifs et des interactions entre les différentes sphères de la vie.

Concepts-clés : Reconversion professionnelle volontaire, dynamiques identitaires, tensions identitaires, stratégie identitaire, engagement en formation.

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Mes premiers remerciements vont à ma directrice de mémoire Mme France Merhan pour sa disponibilité, son soutien et pour m’avoir guidée tout au long de ce travail. Son expertise et ses conseils furent précieux dans ma démarche.

Je souhaite également remercier Aurélie Dirickx, nos échanges animés ont alimenté mes réflexions sur les questions de reconversion professionnelle.

Je remercie mes interviewées qui en m’accordant leur confiance et leur temps m’ont donné la possibilité de constituer un corpus m’ayant permis de mener à bien ce travail.

J’aimerais remercier mes chers relecteurs : Eline, Charlotte, Sara, Andrea et Tibert.

Enfin, j’aimerais exprimer ma reconnaissance à mon entourage proche pour avoir compris les priorités qui étaient les miennes ces dernier mois.

A Matias, pour m’avoir soutenue et encouragée dans toutes ces étapes.

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Reconversion professionnelle volontaire Le cas de trois jeunes en début de carrière

INTRODUCTION... 1

PREMIERE PARTIE : APPROCHE THEORIQUE 1. LES PROCESSUS DE RECONVERSION PROFESSIONNELLE ... 3

1.1. Les crises et les transitions ... 3

1.2. Reconversion professionnelle volontaire ... 5

1.2.1. La gestion des parcours... 5

1.2.2. Les cinq étapes de la reconversion professionnelle volontaire selon Négroni ... 7

La vocation contrée : ... 7

Le désengagement : ... 8

La latence : ... 9

La bifurcation : ... 10

Le réengagement : ... 12

2. LA PROBLEMATIQUE IDENTITAIRE ... 14

2.1. Les dynamiques identitaires ... 14

2.2. Les composantes identitaires ... 16

2.2.1. Les trois axes des dynamiques identitaires ... 16

2.2.2. Les composantes identitaires selon Kaddouri ... 17

2.3. Les tensions identitaires ... 18

2.4. Les stratégies identitaires ... 19

2.5. Eléments de synthèse et typologie des dynamiques identitaires ... 20

2.5.1. Eléments de synthèse ... 20

2.5.2. Typologie des dynamiques identitaires ... 22

3. ENGAGEMENT EN FORMATION ... 25

3.1. Présentation du concept ... 25

3.2. Dynamiques identitaires et rapports à la formation... 26

3.2.1. Typologie des modes d’engagement ... 26

3.3 Fonction motivationnelle des tensions identitaires ... 27

3.3.1. Types de régulation ... 27

3.3.2. Les agents identitaires ... 27

3.3.3. Les instances du soi ... 27

3.4. Types d’enjeux existentiels ... 28

3.4.1. Les pratiques professionnelles ... 28

3.4.2. Les relations interpersonnelles ... 29

3.4.3. Les communautés de pratique ... 30

DEUXIEME PARTIE : PARTIE EMPIRIQUE 4. QUESTION DE RECHERCHE ET HYPOTHESES ... 31

5. METHODOLOGIE DE RECHERCHE ... 32

5.1. Approches biographiques ... 32

5.2 Population à l’étude... 33

5.3. Outil utilisé ... 34

5.3.1. Guide pour les entretiens semi-directifs ... 34

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5.4. Analyse des entretiens ... 35

6. PRESENTATION DES RESULTATS... 38

6.1. Marisa ... 38

6.1.1. Parcours biographique ... 38

Reconstruction du parcours ... 38

Un premier contact universitaire déstabilisant ... 38

Un statut familial d’ « intellectuels » non reconnu ... 39

6.1.2. Evénements, sources et types de tensions identitaires ... 41

Des collègues peu ambitieux ... 41

Moins de recherche et plus d’analyses ... 42

6.1.3. Régulation des tensions identitaires et engagement en formation ... 44

L’Université libératrice ... 44

Quête de culture académique ... 45

6.1.4. Synthèse et retour vers les hypothèses ... 46

6.2. Elise ... 49

6.2.1. Parcours biographique ... 49

Reconstruction du parcours ... 49

Réagir après l’échec ... 49

6.2.2. Evénements, sources et types de tensions identitaires ... 50

Des études télécommandées ... 50

Une année de latence bénéfique : « RE-FLE-CHIS ! » ... 52

Dire « Ce qui ne me plaît pas »... 53

6.2.3. Régulation des tensions identitaires et engagement en formation ... 55

Un autrui révélateur de soi : « La dame des énergies » ... 55

Connaître le système pour reprendre les rênes ... 56

« Je me vois à L’Arcade » ... 57

6.2.4. Synthèse et retour vers les hypothèses ... 59

6.3. Zulema ... 61

6.3.1. Parcours biographique ... 61

Reconstruction du parcours ... 61

Des débuts hésitants ... 61

Projet paternel ... 63

Formation initiale ... 64

6.3.2. Evénements, sources et types de tensions identitaires ... 65

Désillusion du terrain professionnel ... 65

Un projet d’accueil ... 66

6.3.3. Régulation des tensions identitaires et engagement en formation ... 68

Deux mondes à associer ... 68

6.3.4. Synthèse et retour vers les hypothèses ... 69

7. DISCUSSION DES RESULTATS DE RECHERCHE ... 72

7.1. Type de régulation et projet identitaire ... 72

7.2. Motifs d’engagement en formation et de désengagement professionnel ... 74

7.3. Le schéma de la bifurcation selon Bidart ... 76

7.4. Autodétermination et caractère volontaire de la bifurcation ... 78

8. CONCLUSION ... 80

9. BIBLIOGRAPHIE ... 84

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Reconversion professionnelle volontaire:

Le cas de trois jeunes en début de carrière.

INTRODUCTION

Certains jeunes récemment entrés dans l’emploi envisagent un changement de secteur d’activité et songent à la reprise d’études. Le choc de cultures entre l’université et la réalité du milieu professionnel est-il suffisant pour expliquer les phénomènes de désengagement professionnel en début de carrière? Quels éléments conduisent les personnes à envisager une reconversion professionnelle ? Cette recherche a pour ambition de tenter de comprendre les raisons qui amènent des personnes à se désengager professionnellement et à entreprendre de nouvelles études, alors qu’elles sont déjà formées et présentes sur le marché du travail.

Nous avons récolté le récit de vie de trois jeunes femmes ayant bifurqué en début de carrière.

La spécificité de notre étude réside sur le jeune âge des personnes qui décident de changer d’activité. Les réorientations ayant suscité notre intérêt s’effectuent à l’issue d’une première insertion professionnelle en lien avec la formation initiale. Nos interviewées ont entre 26 et 28 ans au moment de la reconversion et ont expérimenté un premier ancrage professionnel de minimum une année dans la première insertion. Elles ont vécu un changement radical d’activité dans la mesure où le premier univers professionnel et le second ne relèvent pas de la même filière de connaissances. Ces reconversions sont des situations préparées, choisies et souhaitées. Nous nous intéressons à des jeunes ayant fait exclusivement le choix de reprendre des études ce qui implique un changement significatif de vie quotidienne. Cela suppose qu’au-delà de la réorientation strictement professionnelle, la reconversion professionnelle est un tournant par rapport au choix de vie des personnes concernées.

Les enquêtes de terrain menées dans divers champs professionnels ont montré qu’une partie importante des participants envisage de changer d’emploi. L’enquête sur le bonheur au travail menée par C. Baudelot montre que les changements d’emploi touchent plus d’un tiers des personnes: 35,4% des hommes et 33,6% de femmes ont changé d’emploi en cinq ans entre 1988 en 19991. Les raisons de ces réorientations de trajectoire professionnelle peuvent être

1 Ces chiffres proviennent de l’enquête INSEE « formation qualification professionnelle de 1993

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contextuelles. En effet, il est important de tenir compte des mutations du monde du travail telles que le chômage structurel, l’appauvrissement des sphères d’identification (Osty, 2001) et le manque de perspectives. Les conversations menées avec nos trois interviewées nous amènent à penser que les reconversions résultent d’une initiative personnelle guidée par des aspirations renvoyant notamment à la trajectoire biographique. Il nous semble donc que pour comprendre l’émergence de reconversions professionnelles sur la scène sociale il faut passer par un questionnement sur les dimensions individuelles et l’identification des facteurs contextuels qui pèsent sur ces dynamiques.

Nous faisons l’hypothèse que le passage d’un champ professionnel à un autre n’a pas pour finalité l’élévation du statut salarial, mais un besoin de redéfinition de soi. Il s’agit donc d’une quête de sens et plus largement d’une quête identitaire. D’après les travaux de Bourgeois (2006) et sur la base de son hypothèse, nous pouvons dire que les reconversions professionnelles peuvent être impulsées par le besoin de retrouver un sentiment de cohérence par rapport à des enjeux existentiels concernant des pratiques, des relations interpersonnelles et des communautés de pratique. Ces éléments nous amènent à penser la question des réorientations professionnelles en lien avec la construction identitaire des sujets.

L’objet de notre étude est d’analyser les récits des personnes qui dans les premières années de vie active ont changé d’univers professionnel. Nous nous intéresserons d’abord à la question des transitions professionnelles pour comprendre plus précisément la reconversion professionnelle volontaire et appréhender quels facteurs influencent ce double mouvement : désengagement professionnel et engagement en formation. Nous croyons trouver des outils d’intelligibilité au sein de la problématique identitaire puisqu’un changement de trajectoire professionnelle génère d’importantes modifications de valeurs et de perceptions de soi. Nous explorerons donc diverses théories sur les questions identitaires dans le but de repérer ce qui impulse le besoin de repenser son futur professionnel. Nous tenterons également de comprendre quels sont les facteurs qui poussent les personnes à s’engager en formation et quelle est la fonction des tensions identitaires pour l’engagement en formation. Enfin, nous nous questionnerons sur la place de l’engagement en formation dans un processus de reconversion et identifierons les enjeux existentiels qui sous-tendent un tel processus. En effet, l’engagement en formation semble être le moyen de faire face à un désir de changement professionnel. Ces différents points, nous amènent à la question suivante: « Quelles dynamiques identitaires sont à l’œuvre chez les sujets ayant vécu ou vivant une reconversion

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PREMIERE PARTIE : APPROCHE THEORIQUE

Le travail comme espace de socialisation secondaire a montré sa place dans la construction des identités. La transaction entre d’une part, les individus, leurs désirs d’identification et de reconnaissance et d’autre part, les offres institutionnelles peut être source de conflit (Dubar, 1992). Le passage par une formation à l’occasion du processus de reconversion professionnelle permet de sauvegarder le maintien de la cohérence ou de la réajuster, c’est-à- dire d’assurer l’orientation identitaire que l’individu souhaite pour lui. Afin d’interpréter les données recueillies, nous élaborons une approche théorique s'appuyant sur le paradigme de l'identité. Tout d’abord, nous présentons le processus de reconversion professionnelle volontaire. Dans un deuxième temps, nous approfondissons la problématique identitaire, pour enfin dans un troisième temps, effectuer une présentation de la place de l’engagement en formation dans les trajectoires.

1. LES PROCESSUS DE RECONVERSION PROFESSIONNELLE

1.1. Les crises et les transitions

Notre recherche a pour intention de comprendre ce qui se passe en termes identitaires chez les personnes ayant vécu ou vivant une reconversion professionnelle volontaire. Ces parcours professionnels sont marqués par des discontinuités, des crises et des transitions.

Selon Boutinet (2005), parler de crise c’est indiquer que le temps vécu n’est pas linéaire ; il ne se développe pas sur un continuum monotone. D. Riverin-Simard (1984) parle d’une temporalité en spirale avec des moments de structuration de l’expérience, des moments de déstabilisation, des moments de rupture impliquant à leur suite des prises de décision opportunes. Il semble pertinent de s’intéresser à leur nature : « ces crises sont identitaires, parce qu’elles perturbent l’image de soi, l’estime de soi la définition même que la personne donnait de soi à soi-même. L’ancienne configuration identitaire est devenue intenable, invivable, corporellement insupportable » (Dubar, 2000, p.167). Pour Boutinet (2005), lorsqu’il y a intégration de la « crise », la recomposition s’opère sur un mode assurant à l’adulte une autonomie renouvelée, parce que devenue plus subtile en prenant en compte les aléas du trajet réalisé jusqu’ici. Autrement dit, il y a un dépassement de la crise qui passe par un désengagement et qui impulse l’élaboration de nouveaux projets en adéquation avec un futur désiré.

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Pour Kaddouri (2014), la notion de « transition » renvoie avant tout à un « entre-deux. ».

L’individu est pris entre deux situations : l’une passée ou en voie de dépassement et jugée de manière plus ou moins satisfaisante et l’autre future, jugée de manière plus ou moins nette. La notion s’est généralisée dans le domaine des sciences de l’éducation : passage de l’école à l’emploi, de l’enfance à l’adolescence, période de changement d’emploi, mais aussi transition en lien avec des périodes de changement sociétal. Cohen-Scali rappelle que les chercheurs ayant traité ces questions s’accordent pour parler d’ « une intrication permanente des facteurs individuels et des facteurs de contexte comme constituant le cœur même du processus transitionnel. » (2001, p.43)

Perret-Clermont et Zittoun (2002, cité par Masdonati & Zittoun, 2012), considèrent qu’il existe trois niveaux dans le processus de transition : des transformations identitaires, l’acquisition de nouvelles compétences et des activités de construction de sens qui vont dans le sens d’une démarche de continuité de soi. La perspective psychosociale ou socioculturelle (Dupuy, 1998 ; Lawrence & Valsiner, 2003 ; Parkes,1971 ; Valsiner 1998 ; Zittoun, 2012) considère que « les parcours des personnes s’inscrivent dans une pluralité de réseaux et de cadres sociaux, dans un champ social et historique donné ». Cette pluralité d’inscription de réseaux et de cadres sociaux nous permet de questionner le lien entre les différentes sphères d’investissement d’un individu. Le modèle du « système des activités » (Curie & Hajjar, 1987 ; Curie & Dupuy, 1994 ; Baubion. Broye & Hajjar 1998) est fondé sur deux idées principales. La première est qu’il y a une autonomie relative des sous-systèmes. Chaque sous- système, qu’il soit familial, professionnel, personnel ou social, est organisé selon une logique interne. La deuxième est qu’il y a une interdépendance de ces sous-systèmes. En effet, certaines ressources ou contraintes dans un domaine peuvent avoir des effets sur d’autres domaines. Ce travail d’ « intersignification » implique que les valeurs accordées, par exemple dans le domaine professionnel à certaines activités ou aspirations de travail ou de formation sont définies relativement à d’autres sphères d’activité et de projets de vie (Le Blanc, 1993;

Dupuy & Le Blanc, 1997) comme à des autrui significatifs en ces différentes sphères.

Rappelons que la perspective interactionniste place l’individu comme faisant partie du changement social : il fait des choix dans un environnement changeant. Entre contraintes et opportunités du contexte : « il décide, s’engage et se met en projet » (Balleux & Perez-Rouz, 2013, p.106). En effet, selon Perez-Roux (2014), la transition devient une chance de développement de carrière ou un moyen de renforcer ou de retrouver ses valeurs. La

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contextes socio-économiques et culturels, mais également aux stratégies singulières intégrant représentations, valeurs et modes d’implications professionnelles (Rouz-Perez, 2006). C’est pourquoi, « la transition active de la part des individus et des groupes, la mise en œuvre de stratégies vitales de régulation, de conduites de faire-face, de projet, d’innovation » (Celestino, 1987). Les transitions ne sont pas uniquement appréhendées comme génératrices de crise et de rupture chez les sujets, mais comme des phases de reconstruction active des valeurs et des normes fondant la reconnaissance et la valorisation de soi et d’autrui dans les différentes sphères de la vie. Elles sont d’ailleurs souvent consécutives aux crises et ruptures en raison des réagencements qu’elles supposent. Pour Baubion-Broye et Hajjar (1998), ce travail psychique d’intersignification appelle la mise en œuvre de stratégies socio-cognitives et affectives de construction (ou de maintien) d’une identité personnelle et sociale positive.

C’est ce que nous avons trouvé chez nos interviewées pour qui la reprise d’études permet de restaurer une identité déstabilisée aux yeux de leur entourage et de retrouver un sentiment de cohérence de soi. Nous y reviendrons.

Plusieurs auteurs (Boutinet, 2013 ; Schlossberg, 2005) ont montré que chaque transition est singulière, mais qu’il est possible de les classer suivant qu’il s’agisse d’une transition anticipée (souhaitée ou non souhaitée), d’une transition non anticipée ou d’une transition non- évènement. Notre corpus nous situe dans la première catégorie; le changement de domaine d’activité est anticipé et souhaité. Il est entrepris sur une initiative individuelle dans la mesure où il n’est pas issu des plans sociaux de reconversion, suite à des licenciements ou des restructurations. Le caractère préparé de la transition nous amène à penser ces parcours en lien avec la notion de reconversion professionnelle volontaire au sens de Négroni (2007). Ces éléments nous permettent de poser l’hypothèse suivante : pour comprendre les processus de reconversion professionnelle volontaire, il faut passer par un questionnement sur les dimensions individuelles à partir des trajectoires biographiques et l’identification des facteurs contextuels qui pèsent sur ces dynamiques de transition.

1.2. Reconversion professionnelle volontaire

1.2.1. La gestion des parcours

Notre approche théorique, nous permet de situer le passage d’un domaine d’activité à un autre comme étant une transition. Pour Zimmermann (2011), les parcours sont faits de chemins transversaux et de changements de directions. La notion de parcours permet de penser

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l’individu dans sa globalité et de prendre en compte les différents espaces d’investissement de la personne. Cela renvoie à l’« axe spatial » de l’identité élaboré par Kaddouri (2011) que nous aborderons dans la suite de notre approche théorique. Il y a une interférence dans les parcours professionnels, des éléments renvoyant au parcours de vie : «désormais, les cours de vie débordent le cadre normatif de l’appartenance de classes ou de groupe social pour suivre le cours tumultueux des biographies individuelles » (Négroni, 2007). Pour cette auteure, les reconversions professionnelles s’inscrivent dans des logiques à la fois individuelles et sociales. Pour Négroni toujours, la reconversion professionnelle volontaire est « individuelle parce que propre à l’individu, elle reste une démarche volontaire dont il est le seul initiateur.

Mais aussi, elle est une expérience sociale, la société valorisant le changement en le plaçant au centre des questions sur l’emploi et la formation » (2007, p.13).

Il est possible d’expliquer ces reconversions en les contextualisant aux carrefours de différentes tensions. Il y a d’abord les mutations de l’emploi et du travail. Un chômage devenu structurel fait prendre conscience aux personnes de l’instabilité de leur emploi. De ce fait, les carrières linéaires sont de plus en plus rares. Il y a également une incitation des pouvoirs publics à l’adaptabilité et au changement avec comme effet, le développement d’une multitude de dispositifs veillant à « la sécurisation des parcours professionnels » (Négroni, 2007, p.27). Citons le congé de formation2, les procédures de validation d’acquis d’expérience (VAE) ainsi que la possibilité dans le secteur public suisse, de faire une année « sabbatique » sans rupture des liens contractuels avec l’employeur. Suivant cette même logique, les personnes sont de plus en plus sensibilisées à la question de la formation tout au long de la vie (Lifelong Learning « LLL »). Mais c’est surtout un nouveau paradigme du changement qui a envahi l’espace social ayant de fortes répercussions au plan individuel. Il apparaît comme une valeur porteuse, associée à l’épanouissement de soi. Les personnes ne se reconvertissent pas dans une logique de promotion ascensionnelle, mais se reconvertissent pour une quête de sens. En effet, changer c’est avoir la possibilité de s’épanouir dans son travail. Même après seulement quelques années d’activité dans un domaine, les personnes éprouvent le besoin de redonner un sens à leur activité professionnelle. Négroni parle d’un nouveau «système de valeurs de l’individuation qui recèle l’amorce d’une nouvelle éthique fondée sur le principe des «devoirs vis-à-vis de soi » ». (2007, p.35)

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Les personnes de notre étude ont dû faire un choix pour changer d’emploi. Elles ont anticipé et choisi cette décision. Nous parlons donc de reconversion professionnelle volontaire. Les décalages, entre les dispositions individuelles et les contraintes organisationnelles, qu’ils soient initiaux ou qu’ils s’installent et se creusent progressivement, amènent les personnes à repenser leur trajectoire professionnelle. Les discontinuités se présentent comme l’expression d’une subjectivité nouvelle, subjectivité justement mise à l’épreuve dans leur première insertion professionnelle.

1.2.2. Les cinq étapes de la reconversion professionnelle volontaire selon Négroni

A partir d’un travail de terrain approfondi, Négroni (2007) présente les processus de reconversion professionnelle volontaire en cinq étapes qui mettent en évidence le travail de l’acteur sur soi.

La vocation contrée :

Il s’agit de la première étape du processus de reconversion professionnelle volontaire. La

«vocation contrée » fait référence au premier choix professionnel initialement formulé qui est ensuite « passé à la trappe » au profit d’une autre orientation professionnelle. Le discours de la vocation contrée exprime que les désirs et les possibilités sont contrariés dans l’emploi occupé. La personne a été empêchée de mettre en œuvre ses désirs et aspirations pour un secteur professionnel particulier. Cela rejoint l’idée de « vocation de soi » contrée pour différentes raisons : les aléas de la vie, une mauvaise orientation professionnelle et scolaire, la non-poursuite d’études à cause de problèmes financiers, des contraintes du marché ou un choix de formation imposé, sont caractéristiques des discours de la vocation contrée. A ce sujet, Négroni fait référence à De Gaulejac (1991) qui met en évidence « la place prépondérante du projet parental dans l’orientation scolaire et professionnelle du jeune » (Négroni, 2007, p. 65). Le jeune peut être chargé d’une mission de réussite, là où ses parents ont échoué. Selon cette auteure, certains événements peuvent également changer la direction du cours de vie et marquer la biographie de telle sorte qu’ils empêchent la réalisation de certains projets. Dans chacun des récits de vie, des événements marquants sont racontés et participent au processus de reconversion. Nous reviendrons sur cette notion afin de peser son implication dans les trajectoires de nos interviewées.

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Le désengagement :

Négroni (2007) définit le désengagement comme « un processus qui renvoie à la distanciation et à la désidentification avec des valeurs, des idées et des attentes, mais aussi avec l’univers relationnel » (p.79). A l’origine du désengagement, il y a un sentiment d’insatisfaction par rapport à la situation professionnelle initiale. Ainsi, des éléments propres à l’organisation du travail vont dans la plupart des cas impulser la décision du changement. Un rapport positif au travail dépend de différentes conditions. Négroni s’est interrogée sur ces conditions pour mieux comprendre les phénomènes de désinvestissement professionnel. Mauvaise ambiance au travail, routine, manque de reconnaissance et absence de perspective sont des facteurs susceptibles de conduire au désengagement professionnel.

Au regard de notre corpus, trois facteurs semblent particulièrement pertinents pour comprendre les processus de désengagement professionnel.

- L’absence de perspective: La perception que l’on a de son univers de travail peut avoir une incidence sur la manière dont on s’implique. Lorsqu’il y a une inadéquation entre les valeurs des individus et celles de l’entreprise, il n’est pas évident de se projeter. En effet, construire une professionnalité sans identification aux valeurs dont l’univers de travail est porteur est difficile: « Ces individus se trouvent en crise identitaire avec des sentiments de non professionnalisation, de non reconnaissance et de globale insatisfaction » (p.98).

- La routine : Elle peut être source de désengagement et est évoquée dans l’ensemble des domaines professionnels.

- La non-reconnaissance : Si les efforts des individus pour mener à bien leur travail ne sont pas reconnus, ils sont vains. Négroni (2007) fait référence à Dejours (1998) pour qui l’impossibilité d’accéder « au sens de son rapport vécu au travail » renvoie le sujet à la souffrance. Sans reconnaissance de son travail, sans la gratitude d’avoir contribué à l’organisation, le travail n’est pas en mesure de s’inscrire dans une « dynamique de l’accomplissement de soi» (p.92).

La deuxième étape montre des discours qui mettent en évidence un vécu négatif du travail. Le

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influence également les processus de désengagement.

La latence :

Il s’agit d’abord d’une période d’anticipation de nouveaux possibles, puis d’estimation sur le risque du changement. Sur la base de ces travaux, Négroni (2007) distingue trois temps dans l’étape de latence. La phase de latence est la troisième étape du processus de reconversion professionnelle volontaire, elle est différente en fonction des personnes. Les temporalités varient et certaines étapes du processus peuvent se chevaucher

1) Tension et mise à distance « streben » :

Les personnes reconnaissent que leur situation professionnelle ne leur permet pas de vivre correctement, se projeter dans un futur acceptable permet de se sentir mieux.

L’énonciation de la souffrance au travail conduit une prise de conscience de laquelle résulte une volonté affichée de sortir de la situation. Cet état d’incertitude est source de mal-être, car il correspond à une remise en cause de son engagement professionnel Le désengagent est d’autant plus difficile lorsque dans l’insertion initiale, l’individu occupe une position stable, un statut et un revenu, appréhendés positivement par l’entourage.

2) Attente et anticipation « sehen » :

Pour Négroni (2007), cette étape est caractérisée par la multitude de projections que l’acteur s’autorise de faire. L’individu se situe dans un état latent dans la mesure où il est « en attente » d’autre chose (p.118). D’après ses recherches, Négroni a pu mettre en évidence chez certains interviewés, la revendication d’un système de croyances et d’un positionnement éthique en rapport avec une volonté d’engagement dans le monde. C’est un temps où les individus se demandent ce qu’ils vont faire et cherchent toutes les possibilités exploitables, notamment en réinterprétant la réalité ou en remontant dans des pistes lointaines, la trajectoire est alors revisitée pour mieux anticiper le futur.

3) La phase active « suchen » :

Ce dernier temps correspond à la recherche d’un but. L’individu passe en revue toutes les modalités de changement qui lui semblent possibles. Ce temps est tourné vers le projet dès que la personne est en mesure d’identifier ce qu’il est effectivement en mesure de faire. Négroni (2007) parle d’une résolution des conflits internes entre

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aspirations et possibilités d’insertion. En lien avec le deuxième temps de l’anticipation, il s’agit « de la confrontation d’un passé de désirs contrés à un présent- futur où les possibilités de devenir sont ouvertes » (Négroni, 2007, p.122). La distinction entre la deuxième et la troisième phase n’est pas toujours visible : « le temps de la recherche désordonnée et le temps de la recherche formelle se font de manière souvent quasi-simultanée » (Négroni, 2007, p.121)

La bifurcation :

Selon Négroni (2007), la bifurcation se caractérise par la prise de décision qui fait définitivement sortir l’individu de l’état de latence à la construction d’un projet. Les bifurcations peuvent se présenter sous diverses formes : un projet, une crise, un choix ou un évènement. L’imbrication plurielle de ses différents éléments construise la prise de décision.

Selon Négroni (2007), comprendre la bifurcation demande de se pencher sur les événements biographiques et sur les constructions de sens qui les accompagnent. Il apparaît important de faire un détour pour présenter la définition de la bifurcation selon Grossetti (2006, cité par Bidart, 2006) pour qui la part d’imprévu produit de l’irréversibilité. « Le terme de

«bifurcation» est apparu pour désigner des configurations dans lesquelles des événements contingents, des perturbations légères peuvent être la source des réorientations importantes dans les trajectoires individuelles ou les processus collectifs » (Bessin, Bidart & Grossetti, 2010, p. 9 cité par Dupray & Epiphane, 2014). Ainsi, la bifurcation est définie comme l’apparition d’une crise ouvrant un carrefour biographique imprévisible dont les voies sont elles aussi au départ imprévues, au sein desquelles sera choisie une issue qui induit un changement important d’orientation » (Bidart, 2006, p.32). Certains d’éléments, dont des événements biographiques, peuvent se cumuler, s’imbriquer et interférer dans les reconversions professionnelles volontaires.

Il nous semble donc opportun de nous pencher sur la notion d’événement, afin d’en définir les différentes formes et de peser leur implication dans les trajectoires. Les événements sont des faits qui prennent une importance particulière. Leurs qualités intrinsèques ne bouleversent pas le cours des choses, mais ce sont « leurs interactions avec un contexte particulier » (Denave, 2006) qui peuvent être déterminantes ou non. Ainsi, selon le moment et l’endroit où il se produit, un événement n’aura pas la même portée sur les biographies. Pour Leclerc-Olive (1997, cité par Négroni 2007), la trame des récits biographiques est un recueil

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d’enchaînement d’événements. Nous supposons donc que certains événements, s’ils ne sont pas déclencheurs, interviennent tout de même dans la décision d’engager une reconversion professionnelle.

L’événement marquant est celui qui « vient frapper » l’individu. Négroni (2007) fait référence à Leclerc-Olive (1998) pour qui l’événement marquant « vient se propager dans l’ensemble de la biographie, il impose de revisiter toute la biographie à la lumière de ce qui vient de se passer. » L’événement marquant ou catastrophe demande donc à l’individu de se réapproprier ce passé pour que le futur puisse être à nouveau mis en perspective. Bien différent de l’événement catastrophe, le turning point décrit un « parcours sémantique » en lien avec l’événement qui va permettre à la personne de tourner la page. La bifurcation peut être assimilée à un turning point au sens de Hareven et Masoka (1988) pour qui « ces marqueurs de vie représentent des évaluations subjectives des continuités et des discontinuités dans la vie. » (Hareven & Masoka, cité par Négroni, 2007, p.135). Ils sont des changements critiques, des éléments correcteurs de parcours. D’après les travaux de Zarifian (2001), Négroni parle de « contre-effectuation ». Selon cet auteur, les événements ne prennent sens que si l’individu leur associe un regard subjectif. En effet, pour Deleuze : « Contre-effectuer l’évènement, c’est trouver le sens de notre propre devenir par rapport à lui » (Deleuze, cité par Négroni, 2007, p.135). La réinterprétation de l’événement vient bousculer la trajectoire, elle a une influence sur la reconversion.

D’après ses travaux, Négroni a pu mettre en évidence un certain nombre d’événements étant identifiés comme déclencheurs de la bifurcation et amenant l’individu dans le temps du projet.

Ces événements n’ont pas tous le même statut. Il peut s’agir de naissances, de divorces ou de rencontres amoureuses. Sur la base de ses entretiens, l’auteure montre avec beaucoup de perspicacité les différences notables entre hommes et femmes au cours d’une reconversion professionnelle volontaire. Des événements peuvent également prendre la forme d’opportunité « à saisir ». Ces opportunités semblent être généralement révélées par des autrui significatifs. C’est précisément ce que nous avons trouvé dans notre corpus. Une des interviewées nous explique comment une personne de son entourage l’a aidée à investir d’un sens privilégié un événement. La puissance du déclanchement de ces événements peut marquer la bifurcation. A l’inverse, certains événements peuvent prendre la forme d’empêchements négatifs : il peut s’agir d’un refus d’entrée en formation ou la non-réussite d’un diplôme.

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Le réseau relationnel influence les choix qui vont être faits. Le rôle des autrui est prépondérant, car généralement ils soutiennent le passage d’un état d’indécision à la construction du projet. Ils peuvent être à la fois soutiens et déclencheurs de la reconversion.

Qu’ils soient des modèles à suivre ou au contraire à éviter, les autrui ont un impact sur les parcours biographiques. L’entourage proche peut avoir un rôle important : parents, enfants, collègues, conjoint, mais aussi passeurs ou rencontres fortuites peuvent prendre une importance imprévue en fonction des réinterprétations du réel des individu. En effet, certains événements ne prennent sens qu’au contact d’autrui : « la fonction de révélation est assurée par une personne qui, par une position différente, invite à percevoir la biographie d’une autre manière » (Négroni, 2005, p.323). Rappelons que l’événement en soi n’a pas un caractère déclencheur, c’est « la coloration que l’individu donne à l’événement, plus encore c’est le rôle moteur que l’acteur fait jouer à l’évènement. » (Négroni, 2007, p.146). En ce sens l’événement est déclencheur, mais il ne fait que s’inscrire dans une configuration préexistante puisque la personne avait déjà envisagé la reconversion auparavant.

Le réengagement :

Nos trois interviewées nous expliquent leur reprise d’études comme une période d’investissement réel du nouveau projet. Cette dernière étape du processus cognitif est celle du réengagement. Selon Négroni (2007), il consiste à mettre en œuvre le projet dans la nouvelle voie choisie par l’individu. Il suppose pour la personne « une attitude ouverte sur les opportunités de son environnement, une attitude créative qui cherche à exploiter les possibles de son environnement » (2007, p.161). Il s’agit de la mise en cohérence des projets dans le réel. Autrement dit, la personne va poser des actes concrets vers la réalisation de son projet, en fonction de ce qu’elle peut faire compte tenu de son environnement. Affirmer son projet dans le réel peut s’inscrire de différentes manières : un bilan de compétences, un congé de formation ou une année sabbatique peuvent être l’occasion d’instaurer des espaces-temps nécessaires pour aller vers la nouvelle insertion.

La plupart des projets de reconversion passe par un temps de formation plus ou moins long.

L’engagement en formation participe à formaliser le nouveau projet, cela permet de légitimer la démarche de reconversion aux yeux des autres. La formation est à l’origine de transformations identitaires importantes, il s’agit d’« un sas entre ancienne et nouvelle insertion professionnelle » (Négroni, 2007, p.166). Cette transition comme nous l’avons vu,

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la nouvelle filière de connaissance et des activités de construction de sens qui vont dans le sens d’une démarche de continuité de soi. Ce que nous avons vu dans les discours et qui nous a beaucoup marqué est le fait que les personnes ne se reconvertissent pas pour une quête de statut, mais bien pour une quête de sens et une quête identitaire.

Il y a donc une rupture de la dynamique précédente jugée insatisfaisante pour poser des actes concrets vers le nouvel emploi. La place de l’engagement en formation est au cœur de cette étape. La formation fait office de passage transitionnel entre le premier univers de travail et le second. Le réengagement amène vers une nouvelle situation professionnelle qui va bouleverser l’état actuel de la situation. Pour ces raisons, nous ouvrons le prochain chapitre de notre étude sur la problématique identitaire. Cela va nous permettre de comprendre quels éléments entrent en jeu dans la reconversion et de quelle manière ces éléments sont mobilisés, consciemment ou inconsciemment, pour guider, soutenir ou justifier la discontinuité dans la trajectoire. Nous chercherons plus précisément à répondre à la question suivante: Quelles dynamiques identitaires sont à l’œuvre dans des processus de reconversion professionnelle volontaire ?

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2. LA PROBLEMATIQUE IDENTITAIRE

2.1. Les dynamiques identitaires

Divers auteurs se sont accordés pour parler de l’identité non comme d’un état de soi permettant d’exprimer son individualité à un moment déterminé, mais comme un processus dynamique. Dans la voie des travaux de Mokhtar Kaddouri, nous parlerons en termes de dynamiques identitaires, car nous tiendrons compte de l’identité non comme d’une instance fixée de définition de soi, mais comme un étant de soi et un étant de soi en devenir se modifiant perpétuellement. Kaddouri, présente la définition des dynamiques identitaires suivante : «Il s’agit d’une totalité complexe, jamais stabilisée puisque soumise de façon permanente à un travail identitaire de construction, de destruction et de reconstruction de soi » (2006, p.129).

Selon une idée largement diffusée, l’identité serait ce que l’on « est ». Elle serait un état de définition de soi regroupant une liste de caractéristiques propres à l’individu. Cette approche est dangereusement réductrice des réelles relations entre le sujet et l’action puisque l’action serait conditionnée par l’identité sociale des individus. Parler en termes d’ « identité » risquerait de réifier la notion, de la substantialiser, ce qui ne nous permettrait pas de comprendre la notion comme un processus dynamique et constructif, dit Kaddouri (2006).

Une telle vision est peu pertinente pour analyser les parcours biographiques de nos interviewées puisqu’elle ne reconnaît pas le travail de l’acteur sur soi dans un processus de reconversion professionnelle volontaire.

Kauffman (2006) décrit l’identité comme ne pouvant être résumée : « elle est insaisissable, changeante, multiple et contradictoire ». Elle se dessine comme un processus dynamique,

« relevant d’un cheminement et non d’une clôture, l’identité n’est pas la somme juxtaposée ou le résultat cumulatif de l’ensemble des expériences d’une vie » (Lipiansky, 1992). Elle n’est pas un assemblage linéaire des éléments identitaires, mais un tissage plus ou moins tendu entre les différentes dimensions de l’identité. Les dynamiques identitaires possèdent donc un caractère multidimensionnel. La recherche d’unicité prend également son sens dans la temporalité. Le sujet se reconnaît comme un être singulier capable de porter un regard sur ce qu’il est à un moment donné. Parallèlement, il porte un regard global sur les expériences qui ont marqué sa vie et qui sont constitutives de ce qu’il est aujourd’hui. Erikson (1964, cité par Barbier, 2006) expliquait déjà le sentiment d’identité comme une construction

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représentationnelle : « d’une unité personnelle et d’une continuité temporelle ». Pour Dubar (2000), il s’agit d’une quête constante entre une certaine unité synchronique, réflexive de soi- même et une continuité diachronique, narrative de soi. Ainsi, le sujet est à la fois conscient de son unicité et des changements identitaires qui ont structuré sa trajectoire. « L'unité et la continuité ne sont jamais acquises, mais elles constituent des sortes d’espaces-temps virtuels, des formes symboliques plus ou moins repérables » (Merhan, 2009, p. 19).

Afin de synthétiser ces premiers apports sur la notion d’identité, nous choisissons de reprendre les points de convergences de plusieurs auteurs issus d'horizons disciplinaires différents. En effet, ils se retrouvent autour d'un certain nombre de bases épistémologiques et théoriques communes pour définir l’identité. (Lipiansky, Taboada-Leonetti & Vasquez, 1990, p. 22-24).

 Le premier point de consensus réside dans le caractère dynamique de l'identité inscrivant les changements identitaires comme faisant partie du processus de construction identitaire.

 Comme deuxième point apparaît l'importance accordée à l'interaction entre le sujet et le monde qui l'environne (autres individus, des groupes ou des structures sociales). A travers les interactions, se construit et se reconstruit inlassablement l'ensemble de traits qui définit un individu, par lequel il se définit face aux autres et est reconnu par eux.

 Le troisième point concerne l'aspect multidimensionnel et structuré de l'identité. Les situations d'interactions infèrent sur différentes dimensions de l’identité. Pour Lipiansky, il s’agit d’un travail de remaniement plus ou moins cohérent « une recherche de l’unicité de soi en réaction à la multiplicité des rôles et des places et à la diversité des perceptions de soi » (1992, p.37).

 Le quatrième point est l'acceptation d’une unité diachronique. Le sujet garde une conscience de son unité et de sa continuité. Malgré les changements identitaires, il est reconnu par les autres comme étant lui-même.

 Le dernier point est l'approche de l'identité en termes de stratégies identitaires. Elle défend l’idée selon laquelle les individus ont une certaine capacité d'action sur le choix de leur groupe d'appartenance et de référence, c'est-à-dire sur une part de la définition

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de soi. Ce terme reconnaît donc le travail de l’acteur sur soi.

2.2. Les composantes identitaires

2.2.1. Les trois axes des dynamiques identitaires

La théorisation de l’identité s’inscrit dans différents axes. Pour Dubar, la double transaction sert à réduire les écarts entre les aspirations propres ; les projets faisant directement référence à l’histoire de vie de la personne et les projets prescrits par autrui. Cet auteur dirige ses réflexions essentiellement sur les dimensions professionnelles de l’identité, sans rendre compte de la pluralité des domaines dans lequel le sujet s’engage. Mègemont (1998) et Kaddouri (2006) reconnaissent la complexité des dynamiques identitaires sur trois axes.

Guidés par leur approche théorique, nous considérons qu’il faut prendre en compte à la fois des dimensions biographiques, sociales et systémiques de l’identité pour comprendre les dynamiques identitaires à l’œuvre dans les processus de reconversion professionnelle volontaire.

Sur l’axe temporel, nous identifions les identités héritées, actuelles et les identités visée. Afin de rendre compte de l’axe « biographique » de Dubar, Bourgeois (2006) par des différentes

« instances du soi » que nous développerons par la suite.

Le deuxième est l’axe relationnel. Ce deuxième axe est relatif aux dimensions sociales de l’identité. Il met en lumière la question de l’altérité et de la relation à autrui. Kaddouri distingue le projet identitaire de soi pour soi (projet envisagé) et le projet identitaire de soi pour autrui (projet identitaire prescrit). Cet axe identifié par Dubar (1998) comme l’axe relationnel, concerne pour Bourgeois (2006) les agents identitaires.

Le troisième est l’axe spatial ou systémique. Il est possible de comprendre ce dernier axe à partir des différents champs dans lesquels s’investit un individu. C’est pourquoi nous avons demandé à nos interviewées de nous parler de leurs intérêts extra-professionnels. Ces champs ne sont pas forcément tous présents chez chaque personne et ne sont pas tous sources d’engagement: l’espace familial, l’espace professionnel, l’espace politique ou l’espace de formation. Ces divers espaces intersubjectifs requièrent, selon les individus, une mobilisation plus ou moins importante et agissent les uns sur les autres. Nous allons voir que le projet de reconversion volontaire d’une des jeunes filles est exclusivement basé sur son besoin

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importantes puisque les dynamiques identitaires sont à l’œuvre dans chacune d’elles.

S’intéresser aux dynamiques identitaires veut dire que l’on reconnaît les diverses composantes de l’identité d’une personne et donc les divers espaces d’engagement d’une personne comme ayant des effets les uns sur les autres. Nous présentons maintenant les composantes identitaires selon Kaddouri (2006).

2.2.2. Les composantes identitaires selon Kaddouri

Tableau 1. Les composantes identitaires

La colonne de gauche représente l’axe temporel, sur lequel se trouvent les identités héritées et les identités acquises. Sur celle de droite, l’axe relationnel où Kaddouri distingue le projet de « soi pour soi » et le projet « de soi pour autrui ».

Nous pensons donc que pour comprendre les dynamiques identitaires à l’œuvre dans un processus de reconversion professionnelle volontaire, il est important de tenir compte du parcours biographique, de s’intéresser aux autrui significatifs, mais également de considérer les diverses sphères d’engagement comme susceptibles d’agir sur le processus en cours. Nous terminons cette partie en insistant sur la diversité des interactions entre les différentes composantes identitaires. Les interactions fondent le système et constituent la dynamique.

Dans certains cas, ces interactions sont complémentaires et s’accordent pour renforcer le sentiment de cohérence identitaire. Inversement, ces interactions peuvent être vécues de

AXE TEMPOREL AXE RELATIONNEL

Les identités héritées Le projet de soi pour soi

Ce bagage identitaire provient de la naissance et des origines sociales. Il n’est pas choisi et a été transmis à l’insu des individus. Il peut s’agir de caractéristiques physiques, de valeurs, du nom, mais aussi d’appartenances socio-culturelle (religieuses ou d’un rang social inféré).

La gestion identitaire des écarts entre la représentation de du soi actuel et du soi idéal établie par le sujet. L’individu construit une réflexion attributive de valeur sur ce qu’il considère comme étant un objectif désirable pour lui.

Les identités acquises Le projet de soi pour autrui

Ces constructions identitaires sont le fruit des différents espaces intersubjectifs dans lesquels le sujet est acteur.

En fonction des rôles qu’il adopte et des valeurs qui sont siennes. Ces identités construites principalement en résonnance avec le milieu socioprofessionnel peuvent créer des tensions avec les identités héritées.

Ce projet identitaire n’est pas voulu par le sujet, mais il est imposé à lui à travers les intentions d’un autrui significatif. Il peut donc s’agir de projets prescrits provenant du cadre familial ou du cadre professionnel. L’offre identitaire au travail peut également devenir un projet prescrit par l’institution.

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manière conflictuelle et être sources de tension.

2.3. Les tensions identitaires

Nous rappelons que étude porte sur des personnes qui souhaitent changer d’activité de manière radicale. A l’origine de la reconversion, les personnes peuvent éprouver des tensions entre la situation actuelle et des objectifs plus désirables à leurs yeux. Elles peuvent se sentir écartelées entre des attentes familiales, amicales ou professionnelles divergentes. Ces différents éléments ont une influence directe sur les projets de réorientation.

Pour Kaddouri (2006), la configuration identitaire des individus est complexe, car elle est composée d’une multiplicité de facettes pouvant être en désaccord. Ces dimensions concernent divers champs d’activités (social, professionnel, culturel, familial, etc.). Un travail de gestion des diverses composantes identitaires est fait pour tenter de rendre cohérente plusieurs dimensions identitaires contradictoires : « chaque dynamique identitaire comme une totalité constituée de composantes indissociablement complémentaires et interactivement conflictuelles» (Kaddouri, 2006, p.122). Dans l’interaction sociale, une tension identitaire est éprouvée lorsque deux parties constitutives d’un individu sont sollicitées et créent un lien discordant. La personne doit trancher entre deux parties intégrantes d’elle-même ; cela peut susciter un sentiment de crise ou de difficulté psychologique : « il y a activation simultanée, mais incompatible, de deux ou plusieurs dimensions identitaires par un événement biographique, dans une situation d’interaction intersubjective à enjeux pour la personne concernée. » dit Kaddouri (2011, p.76)

Les tensions identitaires requièrent la subjectivité des individus de deux manières différentes.

Les tensions identitaires intrasubjectives touchent de manière consciente l’individu. Elles sont révélatrices d’une incohérence entre deux composantes identitaires. L’axe temporel et l’axe spatial sont les secteurs principaux des tensions éprouvées de soi avec soi-même. Les tensions intersubjectives sont générées dans des situations d’interaction sociale entre l’individu et un autrui significatif (Kaddouri p.127). Ainsi, les différentes composantes identitaires peuvent coexister tant qu’elles ne sont pas impliquées dans une situation où l’une d’elles demande l’exclusivité et où une décision pouvant être vécue comme antinomique doit être prise.

Autrement dit, leur inscription multiple peut être à l’origine de tensions inter ou intra subjectives.

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Nous le verrons dans la typologie des dynamiques identitaires de Kaddouri (2006), certaines tensions se révèlent être positives dans les parcours, car elles sont à l’origine d’actions mobilisatrices. A l’inverse, des tensions peuvent être néfastes et destructrices si les individus n’ont pas les ressources nécessaires pour les gérer. Ajoutons que les tensions identitaires, bien que vécues comme des moments de rupture entre plusieurs composantes de l’existence, font partie intégrante de la vie.

2.4. Les stratégies identitaires

Face aux tensions identitaires menaçant le sentiment de cohérence interne, les personnes tentent de trouver des moyens pour maintenir leur équilibre et sauvegarder leur intégrité, « la recherche de la cohérence de ses différents « soi » [les conduisent] à mettre en place des stratégies identitaires » (Camelleri et al., 1990 cité par Kaddouri 2011).

Pour Dubar (1991), les stratégies identitaires constituent des voies résolutoires des tensions générées sur l’axe relationnel et temporel. Qu’il s’agisse de faire face à une souffrance ou à maintenir un plaisir éprouvé, les stratégies s’orientent en fonction du projet identitaire des individus. Selon Barbier et Kaddouri (2006), ces stratégies se traduisent par des actes comportementaux ou des actes discursifs qui visent à rétablir un équilibre et à réduire l’écart entre l’ « identité pour soi » et l’ « identité pour autrui » et entre l’ « identité héritée » et l’

« identitée visée ». Pour Perez-Roux (2011), les stratégies identitaires mobilisent représentations, valeurs et pratiques. Elles se situent à l’articulation entre continuité́ et changement, entre soi et autrui, entre cohérence de l’individu et diversité́ de ses appartenances ou registres d’action.

Les individus mettent en œuvre ces procédures de façon consciente ou inconsciente. Pour Lipiansky, Taboada-Leonetti & Vasquez (1990), ces procédures sont élaborées en fonction de la situation d'interaction, c’est-à-dire, en fonction des différentes déterminations (socio- historiques, culturelles, psychologiques) de cette situation. C’est pourquoi, les discours de nos interviewées ont montré la mise en place de stratégies identitaires différentes selon le parcours biographique et les ressources qui sont à leur disposition.

Ces différentes stratégies semblent donc être un des éléments de compréhension pour saisir la place de l’engagement dans une reconversion professionnelle volontaire. En effet, penser les processus de reconversion professionnelle volontaire en lien avec les dynamiques identitaires

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en jeu, va nous permettre de comprendre la place de l’engagement en formation comme stratégie identitaire. La mise en œuvre de stratégies identitaires dans un processus de reconversion professionnelle volontaire, se traduit par un travail de régulation des différentes composantes identitaire. Dans le prochain chapitre dédié à l’engagement en formation, nous développerons les différents mécanismes et types de régulation mis en place par les individus.

Avant cela, nous décidons de présenter une synthèse de cette partie théorique et d’exposer la typologie des dynamiques identitaires de Kaddouri.

2.5. Eléments de synthèse et typologie des dynamiques identitaires 2.5.1. Eléments de synthèse

Pour comprendre quelles dynamiques identitaires sont à l’œuvre dans des processus de reconversion professionnelle volontaire, il est important d’identifier les sources et les types de tensions identitaires éprouvées. Ces éléments vont nous permettre de comprendre quels enjeux identitaires sous-tendent le processus de désengagement professionnel et d’engagement en formation. Les changements abrupts dans une reconversion professionnelle volontaire affectent le sentiment de cohérence identitaire ce qui nous permet d’identifier plus distinctement les tensions identitaires et de repérer les dynamiques identitaires en cours.

Les différents éléments que nous avons exposés dans ce chapitre, nous permettent d’appréhender les dynamiques identitaires comme des processus dynamiques regroupant différentes composantes. D’après la typologie des dynamiques identitaires présentée en ci- dessous, nous nous attacherons aux éléments suivants pour comprendre quelles dynamiques identitaires sont à l’œuvre dans les processus de reconversion de nos trois interviewées.

 Les identités héritées, acquises et visées

 Le projet de soi pour soi et le projet de soi pour autrui

 Les tensions intra inter subjectives

 Les stratégies identitaires : la régulation des tensions identitaires conduit à la mise en place de stratégies identitaires.

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Les différentes composantes de la dynamique identitaire

Le schéma suivant nous semble particulièrement pertinent, car il reprend les éléments énoncés ci-dessus et présente les différents liens entre les composantes de la dynamique identitaire étant sources de tension.

Schéma 1. Les différentes composantes de la dynamique identitaire (Kaddouri, 2006)

Les identités actuelles

Ressources permettant le passage des identités actuelles au projet identitaire

Projet identitaire Projet de soi sur soi

Projet de soi à destination d’autrui

Représentations du projet d’autrui sur soi TENSIONS

IDENTITAIRES

Projet d’autrui sur soi (projet de soi pour autrui) Attitude d’autrui à

l’égard de l’identité héritée Les identités héritées

Rapport entre identité actuelle

et identité héritée

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2.5.2. Typologie des dynamiques identitaires

Ce tour d’horizon nous permet à présent de présenter la typologie des dynamiques identitaires élaborée par Kaddouri (2006) à partir de divers travaux de recherche dans différents secteurs socioprofessionnels. Ces dynamiques ne sont pas segmentées dans le temps et sont dépendantes les unes des autres. En effet, en fonction des engagements d’un individu, il peut être pris dans plusieurs dynamiques identitaires à la fois. Cette typologie est développée dans un but d’intelligibilité des dynamiques identitaires à l’œuvre chez les individus en formation, ce sont : « des outils susceptibles de permettre l’établissement de liens entre les observations touchant des comportements très variés de sujet à un moment donné de leur trajectoire » (Barbier, 2006, p.46). Elle ne constitue pas un outil de résolution de problème ou de catégorisation des individus. En effet, nous ne mobiliserons pas cet outil dans un but d’action, mais nous l’utiliserons dans l’analyse de notre corpus pour repérer les processus identitaires en jeu au cours de la réorientation . A l’aide d’un tableau, nous avons réuni les informations relatives à la typologie des dynamiques identitaires, ainsi qu’un schéma illustrant l’écart entre identité actuelle et identité visée dans une dynamique de transformation identitaire à l’œuvre.

Schéma 2. Dynamique de transformation identitaire (Kaddouri, 1999)

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Typologie des dynamiques identitaires

Dynamique de continuité identitaire

Le projet d’entretien

du Soi Le sujet est satisfait de son activité professionnelle et de l’image que celle-ci lui renvoie de lui-même. Il ne présente aucun décalage entre l’identité actuelle et l’identité visée puisque son projet de soi pour soi et le projet organisationnel sont complémentaires. Ce projet implique une disponibilité totale des ressources affectives, matérielles et cognitives.

Le projet de préservation du Soi

Le sujet éprouve cette même satisfaction et poursuit ce même désir de continuité identitaire sauf que la préservation identitaire ne dépend pas de lui, mais d’un autrui significatif. Il est tributaire d’autrui quant au maintient de son identité actuelle. Son statut est fonctionnel et non institué, il est donc fragile.

1. La préservation conflictuelle : Stratégie d’affrontement individuel ou collectif avec autrui significatif 2. La préservation collaborative : Stratégie d’arrangement explicite ou tacite d’alliance ou de subordination

3. La préservation par repliement : Stratégie d’isolement, sans ressources d’alliance ou d’affrontement, le sujet se voit obligé de se retirer ou de se soumettre.

Dynamique de changement ou transformation identitaire

Le projet de

transformation Le sujet éprouve un décalage entre identité actuelle et identité visée provoquant un sentiment d’insatisfaction. La quête d’une nouvelle identité inscrit le sujet dans un processus de changement constructif et dynamique. Il y a deux types de transformation identitaire

1) Du point de vue spatial :

- Les transformations exogènes : passage d’un champ de pratiques à un autre

- Les transformations endogènes : changement de statut au sein du même champ d’activité

2) Du point de vue temporel

- Les transformations identitaires planifiées : passage d’un statut socioprofessionnel planifié préparé selon les moyens jugés adéquats dans le temps.

Cela implique de la persévérance puisque le sujet admet la nécessité d’accorder à ce changement une temporalité longue.

- Les transformations identitaires impérieuses : le sujet désire quitter de manière urgente et par tous les moyens l’identité actuelle.

Les stratégies de concrétisation de la quête identitaire peuvent être :

- Soutenues par autrui significatif : Complémentarité du projet de soi pour soi et du projet de soi pour autrui - Refusées par autrui significatif : Inadéquation du projet de soi pour soi et du projet de soi pour autrui

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