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Dans le document Droit foncier étatique et stratégies locales (Page 157-165)

5 - Zone industrielle.

A - Le rocher. B - La colline du Coudiat. C - La plaine du Mansourah. D - La colline de t3ellevue. E - La vallée de Boufriha.

A l'indépendance les quartiers européens, abandonnés par leurs occupants, sont vite saturés par les nouveaux arrivants (de la médina principalement). Ils n' ont pas la capacité de répondre à ce qui constitue déjà les prémices d'une crise de logements qui ira en s'amplifiant au rythme de l'afflux des ruraux vers la ville et du croit urbain. Ce phénomène de l'exode rural, à l'origine entraîné par les effets de la guerre, prend une nouvelle dimension avec les nouvelles

facilité« qu'offrent , à l'indépendance , la ville - démocratisation de l'enseignement, universités, médecine gratuite. L'application de la révolution agraire et les débuts de l'industrialisation contribuent à continuer ce processus de départ vers la ville.

Dans les campagnes, la nationalisation des terres des absentéistes a pour effet de rompre le lien avec la terre, alors que les limitations de surfaces conjuguées à la marginalisation du secteur privé et à la crise que vit l'

agriculture algérienne font que la terre n'arrive plus à nourrir une population que les progrès de la médecine et la faiblesse d'une politique de planification .4 titt.'»ar tend à accroître . L'industrialisation favorise à partir des années 1970 ce phénomène de départ vers les villes par les possibilités d'emploi et de promotion qu'elles offrent . Les grandes villes sont vite saturées

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Alger, Oran, Annaba

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avec quelques variantes, mais où Constantine apparaît comme un cas particulier du fait de 3 facteurs essentiels

- La production coloniale des logements a été relativement peu importante, la ville n'ayant pas été un centre de grosse colonisation à l' instar d'Oran ou de Annaba. C'était une ville administrative de petite colonisation, fonctionnaires et artisans. La politique d'urbanisation s'est traduite par un enfermement de la médina dans le tracé de grandes artères d' encadrement et de démarcation avec une ville européenne.

- Capitale de l'est et ville administrative, Constantine a été "l' avaloir" naturel des flux migratoires successifs . Seule grande ville située à proximité des noyaux de résistance. à la colonisation ellea été naturellement le point de chute de l'exode entraîné par les effets de la guerre, terres brûlées, zones interdites et déplacements de populations.

- Le troisième facteur relève de la topographie du paysage, très escarpé avec des ravins et des gorges très profondes, l'extension de la ville est de ce fait très limitée, vers ie sud et le sud ouest en empiétant sur les terres agricoles, théoriquement protégées depuis l'application de la révolution agraire.

Ces trois facteurs expliquent, en partie, les problèmes de l'urbanisation de la ville et la pression qui s'exerce sur les terres constructibles. Rares, elles constituent des enjeux de pouvoirs qui vont se traduire dans des espaces de confrontation / négociation , autour d'un Droit urbain et d'une politique urbaine qui apparaissent sans efficacité jace à des droits à la ville d'abord et au logement dans un deuxième temps qui inscrivent spatialement leur présence dans les bidonvilles et les cités illicites. Des stratégies divers vont être développées, elles sont à périodiser et à différencier par les modes d' occupation et par les attentes qu'elles expriment face à l'État et face à un pouvoir local pris en tenailles entre les injonctions du pouvoir central et une pression sociale, articulée autour d'une demande de logement de plus en plus difficile à résorber.

Dans cet esprit l'ordonnance portant constitution des réserves foncières au profit des communes (1) peut être considérée comme le texte fondateur d'un véritable code de l'urbanisme, elle est suivie de 28 textes d' application. Faisant suite à l'ordonnance de 1974 portant révolution agraire, elle apparaît comme un texte d'encadrement du foncier urbain. Les deux ordonnances constituent , dans cet espace temporel qui a marqué la politique foncière nationale, les deux piliers de l'encadrement du processus appropriation publique /maîtrise du foncier .

Par commodité nous emploierons l'expression politique foncière) en réalité le processus d'appropriation publique a procédé à une intégration des terres et à leur répartition sans agir sur les statuts traditionnels, cette absence d'action sur les statuts fonciers se manifestera lors des opérations de restitution des terres par de nombreux litiges. Il apparaît ainsi que l'appropriation publique a

été un simple conservateur des statuts traditionnels.

Inscrites toutes deux dans ce mouvement de récupération par l' Algérie indépendante de sa souveraineté et de ses richesses nationales ( nationalisation des banques et des mines en 1966, nationalisation des hydrocarbures en 1971) elles n'ont ni les mêmes logiques ni les merns finalités.

Alors que l'ordonnance de 1971 s'accompagne d'une charte idéologique et tend à modifier les rapports sociaux dans les campagnes l'ordonnance de 1974 est conçue comme un instrument neutre de gestion du foncier urbain . Déchargée formellement de l'idéologie socialiste, qui marque les textes de l' autogestion de la révolution agraire et de la gestion des entreprises, elle est en réalité le vecteur d'une idéologie implicite qui occulte les enjeux réels de la constitution et de la distribution des réserves foncières .

La justice sociale , le développement et le droit à un logement décent pour tous, inscrits dans la charte de Tripoli et, réitérés dans les discours du président Boumédienne, constituent en fait les fondements de la politique des réserves foncières. De nombreux textes, indépendants de l' armature de la législation des réserves foncières précitée, viendront en préciser les enjeux politiques et sociaux - textes sur les quotas de logements construits par secteur d'activité, sur le logement social, le relogement des sinistrés, conditions d'attributions de terrains, interdiction de cumuler logement et lot de terrain etc....

Conçue et présentée comme un texte technique de gestion et d'encadrement, l'ordonnance de 1974 fait de la commune le seul agent de l'urbanisation. Elle s'accompagne en amont et en aval de mécanismes de contrôle de la mobilité foncière, de la validité des actes de mutations des lotissements et des constructions et de mesures de répression des infractions. Mais "l'efficacité" de cet encadrement d'une urbanisation contrôlée par la commune est mise en échec .par les bidonvilles et les cités illicites qui continuent d'essaimer et tendent à augmenter ( se reporter au chapitre IV ).

Les premiers traduisent les difficultés pour l'État et les pouvoirs locaux à assurer un développement harmonieux et à loger décemment toute la population. Les seconds en s'inscrivant dans la durée, constructions en durs sur des terrains acquis auprès des propriétaires, se situent de manière tangente à la loi et à la réglementation . Ils utilisent et profitent des failles du système mis en place , des silences de la loi et traduisent les difficultés d' application du Droit .

En se présentant ainsi comme des agents concurrents à une urbanisation contrôlée et officielle, ils nous renvoient à l'observation de ce que nous pouvons dés lors qualifier d'espaces d'autonomie et de liberté à l'intérieur de l'encadrement mis en place par l'État. Ils sont identifiables à travers certaines pratiques notariales, tels les actes antidatés ou judiciaires comme les jugements homologuant ventes . Ils sont plus particulièrement observables à travers la reconstitution des processus et des cas d'émergence des cités illicites .

Les conséquences de cet anachronisme entre une armature juridique qui n' a rien à envier aux pays les plus développés et une situation d'illicite de plus en plus importante, sont intéressantes à observer. Ainsi depuis 1974 la production normative est partagée entre les logiques répressives et les logiques de régularisation. Alternativement le législateur et les pouvoirs publics passent de l' ignorance et du refus de la prise en charge du phénomène à sa viabilisation et sa régularisation.

« l'existence d'un nombre important de problèmes au sein des bidonvilles ne donne cependant pas lieu à des revendications collectives verbales ou écrites. Les quelques réclamations formulées et adressées à la mairie sont individuelles et transmises par voie postale». Cette déclaration faite en 1977

par un élu communal exprime le refus des institutions officielles de voir les occupants des bidonvilles se transformer en mouvement structuré et organisé. Cette attitude est à mettre en parallèle, au cours de la même période, avec le refus de procéder à des aménagements dans ces sites, en conformité avec une politique de non reconnaissance des bidonvilles appelés à être éradiqués.

1979 (1) et la pression sociale et politique exercée ( notamment vers la fin des années 1970 et durant les années 1980 ) - routes principales coupées par des " contestataires" , manifestations devant les sièges de la mairie et la wilaya -incitent les pouvoirs locaux d'abord et centraux ensuite à nuancer leurs approches.

Une circulaire du ministère des travaux publics du 3 juin 1975 définit une politique de résorption des bidonvilles avec le choix de Constantine comme ville pilote du projet. L'objectif de la circulaire est double :

- Disparition des habitations précaires.

- Rénovation de certains quartiers en tenant compte des PUD

La prise en charge du phénomène et la manière de le juguler soe caractérisées par cet ambivalence qui se traduit par une double attitude des pouvoirs locaux et centraux. Elle est partagée entre les opérations coups de poings/ démolition , transfert de populations vers leur région d'origine et des opérations de viabilisation, relogement, régularisation . Elle est en réalité l'

indicateur d'une recherche de solutions . Elle prendra au fil des politiques suivies les contours d'une négociation autour d'un Droit v.oulu de plus en

plus répressif toujours en vigueur et un espace disputé . La négociation/confrontation est entamée entre un pouvoir local, voulu et présenté comme le seul agent de l'urbanisation qui se dégage progressivement dés le début des années 1980, et des acteurs ignorés sanctionnés mais qui finissent toujours par s'imposer.

Ils s'imposent par leur nombre (se reporter à la carte du chapitre IV) et par les formes d'occupation de l'espace qui passent de l'occupation par l' habitat précaire sur des terrains publics à la construction en dur sur des terrains privés, pour se présenter au début des années 1990 à des constructions en durs sur des terrains publics.

Ils s'imposent à une reconnaissance par le législateur et les pouvoirs publics, c'est ainsi que dans l'ordonnance du 26 septembre 1975(relative au

permis de lotir et au permis de lotir ), sont prévus les comités de propriétaires de lots défectueux . Les comités de quartiers selon l'art.27 des associations syndicales de propriétaires de lots défectueux en vue «d'

aménager des ensembles de lots défectueux, crées ou entrepris antérieurement à la publication de ladite ordonnance...». Ces comités sont autorisés ou "«./e cas échéant crées d'office par arrêté du Wali....»

L'on pourrait gloser à l'infini sur ces comités crées d'office par l' administration . En réalité nous sommes face à un processus de reconnaissance et de recherche d'interlocuteurs, organisés et structurés , pour la mise en place d'un espace de médiation face à une situation qui n'est pas encore qualifiée explicitement et officiellement d'illicite. Ce texte constitue une innovation par rapport à la législation antérieure, articulée autour d'une

répression des infractions. Il libère les initiatives locales, plus pragmatiques, qui procèdent à l'intégration des sites illicites aux périmètres urbains. C'est le premier pas du législateur pour "intégrer " des pratiques sociales par une approche encore très "timide". La subtilité du langage administratif et juridique prend alors toute sa signification, il est question de lots défectueux mais pas d' illicite. Il faudra attendre la loi de 1985, considérée comme le premier texte législatif sur les régularisations, pour voir le terme d'illicite intégré au vocabulaire institutionnel .

Ce processus de reconnaissance / médiation se précisera dans les années 1990, avec la contestation islamiste et les crises du pouvoir et de l'État, par l' installation par l'administration de " comités de proximité":

Ces comités dont l'installation a été rapportée par la presse nationale (1) sont (selon toute réserve) régis par une circulaire ou une instruction du ministère de l' intérieur qui n'a pas paru au journal officiel.

Cette recomposition du phénomène dans le temps et par les modes d' occupation, à l'intérieur d'un espace juridicoinstitutionnel changeant, sous -tendu par la double politique éradication / reconnaissance pose la problématique d'une réflexion sur la notion de l'illicite et de l'illiceité.

En s'inscrivant dans un rapport de confrontation / négociation le phénomène de l'illicite nous interpelle sur le rapport de la société algérienne au Droit et à l'État.

Sa permanence , ses capacités de résistance et de recomposition et l' incapacité de l'État par les mécanismes de contrôle , de répression et de régulation mis en place pour y mettre fiyous renvoieZnfin à la question de la nature de l'État algérien et à sa capacité à assurer l'application du Droit qu'il produit. Dés lors deux questions s'imposent!

A quoi sert le Droit ? A qui il sert ?

Des questions auxquelles nous tenterons de répondre à travers la reconstitution des cas d'illicéité , la reconstitution des effets des procédures de régularisations engagées par la loi de 1985 et, les mécanismes de régulations mis en place depuis 1990 par la loi d'orientation foncière et la loi sur l'Urbanisme.

CHAPITRE 1[

Dans le document Droit foncier étatique et stratégies locales (Page 157-165)