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(C - LES inKANSACTIONS FONCMÈRES DANS LA WELAYA DE GONSTANTUNE

Dans le document Droit foncier étatique et stratégies locales (Page 147-157)

Établies à partir des registres de dépôt des actes soumis à la publicité foncière. Théoriquement tous les actes translatifs de propriété y sont portés .

Le dépouillement porte sur la période comprise entre 1989 (veille des restitutions de terres) et 1992 (date de la décentralisation vers les communes de la Conservation foncière).

Sur le 10 927 actes dépouillés : 72 actes sont relatifs à des terres à vocation agricole (les terres à vocation urbaine étaient encore frappées par le gel des mutations).

Sur les 72 actes :

- 35 ventes

- 24 attestations de succession - 5 donations

- le reste des actese partagent entre les échanges, les partages, les jugements homologuant les ventes.

Les mutations portent là aussi sur des petites superficies, les attestations de succession et les partages sont automatiquement suive de ventes, pour la plupart.

Ces chiffres constituent deux indicateurs :

- Les terres qui circulent à travers ces actes sont des terres à vocation agricole mais situées à la périphérie des villages et de la ville et à la

limite du PUD. Leur morcellement au-delà du seuil de viabilité est théoriquement interdit (Loi d'orientation foncière). Dés lors la question se pose pour savoir comment leur morcellement a été régularisé , et entériné , dans ce cas précis, par la publication foncière , après autorisation des services de l' agriculture .

- Le nombre réduit des actes publiés en matière de mutation de propriété foncière et la prolifération des cités et des lotissements illicites nous renvoient naturellement à l'observation et à l'analyse des processus d'émergence de l'illicite qui seront observés dans le titre II.

- LES EFFETS DUE 1BaASSAGE DE L'ESPACE FONCIER Entamés par les politiques foncières coloniales, et poursuivis par les politiques agraires nationales, les effets du brassage de l'espace foncier s' observent à des niveaux différents.

Ils sont, en premier lieu, perceptibles au niveau physique parce que plus visibles. Ils se manifestent par une pluralité de statuts fonciers et la multiplication des textes d'encadrément de la propriété foncière.

Mais ils s'expriment surtout, dans l'évolution des rapports à la terre, où l' on passe des stratégies d'accumulation / préservation des patrimoines observés dans la période coloniale, à des stratégies de préservation de plus en plus réduite par le nouvel environnement politique et juridique, depuis l' indépendance .

Les premiers effets du processus de domanialisation / étatisation / redistribution, se traduisent par le remodelage de l'espace.

En 1962, la situation se présentait comme suit :

- Un secteur public d'une superficie de 1 000.000 d'hectares, constitué des terres des colons sur lesquelles étaient installés 2 000 domaines autogérés.

- Un patrimoine foncier agricole collectif et Melk collectif, d'une superficie de 800.000 hectares

Un patrimoine foncier communal d'une superficie de 100 000 ha. Un patrimoine foncier pastoral

- arch d'environ 5 000.000 d'hectares - domanial d'environ 15 000.000 d'hectares

- Un patrimoine foncier agricole privé d'une superficie de 4 500 000 hectares sur lequel vivaient 500 000 propriétaires ayant plus de 1 hectare.

- En 1971, avec l'application de la Révolution Agraire, nous retrouvons : - un secteur public agrandi et constitué de :

- 2 100 000 hectares de terres de l'autogestion

- 400 000 hectares de terres nationalisées dans le cadre de la Révolution Agraire

- 800 000 hectares de terres archs

100 000 hectares de terres communales versées au FNRA dans le cadre de la première phase de la Révolution Agraire

- 20 000.000 d'hectares de terres de parcours et domanial versés au FNRA.

- un secteur privé constitué de 4 100 000 hectares restants après les opérations de nationalisation de la Révolution Agraire

- En 1983: Dans le cadre de la Loi relative à l'accession de la propriété foncière agricole :

- 300 000 hectares de terres sahariennes relevant du domaine public sont attribués à 80 000 personnes.

- En 1990: La Loi d'Orientation foncière (90 / 25) procède à la

restitution des 400 000 hectares nationalisés dans le cadre de la deuxième phase de la Révolution Agraire.

- En 1993: La situation se présente de la manière suivante pour le secteur privé :

- 4 600 000 hectares de terres Melk titrées et non titrées.

-300 000 hectares de terres titrées acquises dans le cadre 6.g la Loi de 1983 (accession à la propriété privée des terres sahariennes) .

Ces chiffres recueillis auprès des services départementaux de l'agriculture et des domaines ne sont qu'approximatifs en l'absence d'une généralisation et d' un suivi des opérations de cadastre déjà entamées. Ils sont illustratifs du mouvement de brassage de l'espace depuis la colonisation et poursuivis par la révolution agraire. Ils expliquent, en partie, les instabilités et le sentiment d' insécurité engendrés dans le rapport des familles à la terre.

Des effets sur le paysage juridique

Le processus d'appropriation publique si l'on excepte les terres possédées par les Européens - n'a pas opéré au préalable, d'identification et de redéfinition des titres ou des modes d'occupation des terres. De ce fait, il est à l' origine de bon nombre de conflits et de litiges entre l'État et les propriétaires restitués, et entre l'État et les bénéficiaires de terres publiques, puis entre les bénéficiaires de terres publiques et les propriétaires initiaux.

C'est en ce sens que sera restitué le débat sur la privatisation entamé sur fond de recommandations du FMI et que seront analysés les effets des " nouveaux droits" et des luttes générées par ces brassages de l'espace et les manipulations diverses des droits anciennement obtenus sur la terre, dans le titre III .

A la dichotomie Secteur traditionnel / Secteur moderne de la période coloniale, se substitue à l'indépendance celle de Secteur public / Secteur privé.

Un secteur public, installé sur les meilleures terres et soumis depuis 1962 aux différentes restructuration et à différents régimes : biens vacants (1963), biens de l'État (1966), FNRA (1971),domaine public (1984), domaine économique (1987), domaine national (1991).

En principe inaliénable, il est démembré successivement en 1983 avec la Loi portant cession des terres sahariennes, et en 1985 avec la loi portant sur

l'occupation des sols (reprise dans le titre II ) qui entérine, par la régularisation, les transactions et les lotissements illicites.

Aujourd'hui, dans le cadre de la politique d'ajustement structurel, la privatisation de ce secteur public pose un double problème :

- Juridiquement, pour la consistance physique et juridique à donner à cette notion de terres publiques.

- Politiquement et socialement, pour l'équilibre à établir entre des logiques souvent contradictoires. Celles des institutions internationales bailleurs de fonds, celles de l'État qui se désengage dans un contexte difficile de crise de légitimité, celles des acteurs multiples (tribus, familles, individus, unions paysannes ) qui en revendiquent, à des titres divers, l'appropriation ou la réappropriation, en se présentant comme les propriétaires ou les possesseurs légitimes.

Le dernier aspect de cette question est à replacer dans les conditions même de constitution de ce secteur public , et sera plus longuement étudié dans le titre III, consacré aux processus de domanialisation et l'étude de cas.

Le secteur privé dont les terres à statuts très différenciés, comme nous avons pu l'observer, est soumis à plusieurs textes .

Au code civil de 1975 pour la définition et les limites du droit de propriété. Au Code de la famille de 1984, pour les successions, les hobous, les donations et les testaments. Aux usages et coutumes en matière de fermage et de location.

Cette différence de statut se heurte aujourd'hui à l'acte notarié et le titre de propriété voulus comme seul mode de preuve par les banques, l' administration et les tribunaux.

La révolution agraire dont l'objectif annoncé était de mettre fin à la diversité et à la complexité des statuts fonciers a, de ce point de vue, échoué. Tout comme la politique de francisation des terres pour la période coloniale.

l'importance du parcellaire. C'est ainsi qu'une même propriété composée de plusieurs parcelles, peut être traversée horizontalement par cette pluralité de statuts, l'acquisition progressive des parcelles selon des modalités différentes. Elle est traversée verticalement .par les strates des législations successives et des partages successoraux.

Le troisième effet du brassage de l'espace apparaît à travers l' immobilisme dans lequel a été cantonné le secteur privé et les entraves apportées à la circulation des droits sur les terres qui déplacent les enjeux et les stratégies foncières. Le mouvement amorcé pendant la période coloniale d'émergence et de constitution d'une grosse propriété privée individuelle ou

familiale est bloqué à partir de 1954 consécutivement au déclenchement de la Guerre de libération nationale aux discours qui l'accompagnent() et, aux limites apportées aux transactions foncières. Malgré la libéralisation des transactions foncières Ce blocage persiste jusqu'à aujourd'hui (1994, fin de l'enquête). et apparaît sur les tableaux relatifs à l'évolution de la propriété.

La mobilité foncière, encore visible entre 1966 et 1969, mais à une petite échelle, sur des petites surfaces et dans le sens propriétaires citadins - petits paysans, apparaît davantage comme une stratégie de reconversion face aux menaces de nationalisations. Cet immobilisme, imposé et apparent, va donc se traduire, à partir de 1971, par le déplacement des enjeux fonciers et le redéploiement des stratégies individuelles - familiales et tribales - autour :

- De l'intensification des exploitations , amorcée dès 1981 par l'injection de capitaux publics pour l'investissement en équipements et grâce à l'aide de l' émigration, particulièrement dans les régions à forte émigration. Les efforts se portent, grâce aux stratégies d'affectation et de reconversion des "Frères" (1), vers une intensification des exploitations moyennes et grâce à la mitoyenneté d' un secteur public.

- Du grignotage de l'espace public, par ce qui a été qualifié en terme administratif, les "indus-occupants" . Le phénomène se manifeste par l' installation sur des terres publiques des anciens pasteurs ou anciens occupants de terres tribales, et par la prolifération des bidonvilles.

Aujourd'hui, à la faveur des restitutions des terres nationalisées et du débat sur la privatisation des terres publiques, le phénomène s'amplifie par des " ventes" de terres publiques des bénéficiaires ( possesseurs, au titre de la Loi de 1991, sur le domaine national) au profit des anciens possesseurs.

- La vocation des terrains , leur proximité des centres urbains, des réseaux de communication et des PUD. a été à l'origine de nombreux litiges et de partages entre les cohéritiers. Les restitutions des terres nationalisées (en 1990) ont été automatiquement suivies, dans la wilaya de Constantine, par des

Se rapporter, à ce propos, aux Textes doctrinaux du mouvement de libération nationale, Charte de Tripoli, Charte d' Alger...

lotissements et ventes illicites. Le nombre croissant de placards publicitaires insérés dans les journaux, d'opposition de certains cohéritiers à la vente de ces biens, non encore partagés, est significative de cette "insécurité" créée par l' État, et ses interventions successives sur le tissu foncier. Une insécurité qui se traduit aujourd'hui par l'immobilisme et l'attentisme dans le foncier rural, une frénésie de ventes et de lotissements illicites dans le foncier urbain et des luttes pour la réappropriation ou l'appropriation des terres publiques , avant leur privatisation.

TITRE 1[][

J E U X E T E N J E U X A U T O U R D E S

T E R R E S C O N S T R U C T U B L E S

Les brassages de l'espace entamés par les politiques coloniales modifient profondément les rapports de l'homme à la terre. Les nouveaux rapports à la terre sont à replacer dans le mouvement global de l'exode rural . Un exode vers la ville, qui commence dés la période coloniale, engendré autant par la paupérisation que par les effets de la guerre de libération nationale et les effets de l'indépendance

A Constantine, la médina passage obligé des nouveaux venus est vite saturée, en 1945 le premier bidonville est signalé. En 1960, le plan de Constantine est lancé, il a pour but d'assurer un développement moins anarchique et plus harmonieux de la ville, mais il n'arrive pas à endiguer le phénomène des bidonvilles qui s'étend. Une ville illicite finit par se greffer à la ville licite comme cela apparaît dans les cartes de Constantine en 1937 et 1962, ci jointes, établies par F. Arbaoui(1)

ARBAOUI (F) - De l'exode rural à l'intégration urbaine : cas de Constantine - Thèse de 3° cycle ,Aix en Provence, 1989

4 - Espace d'entrepôt. 5 - Tissu urbain de 1875.

A - Le rocher. 13 - La colline du Coudiat. C' - Le plateau du Mansourah. 1) - La colline de Bellevue.

E - La vallée de Bourriha.

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