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CHOIX DU TERRAIN D'OBSERVATION

Dans le document Droit foncier étatique et stratégies locales (Page 174-180)

ET MODES D'AJPJPROCHE DE L'HILLICHTE

1) CHOIX DU TERRAIN D'OBSERVATION

L'approche de l'illicite s'est orientée vers les lotissements illicites et les constructions illicitesen dur r. Les bidonvilles occupant exclusivement des terres publiques ont été écartés de notre champ d'observation en raison de deux facteurs .

- le rapport des occupants à l'espace - le rapport de l'État aux bidonvilles

Le bidonville est un habitat précaire fait de tôles et de parpaings. Il s'inscrit dans une occupation temporaire et calculée d'un espace public . Cette affirmation est valable à partir des années 1970, où aux plans de logements collectifs ont correspondu une prolifération des bidonvilles . En s'installant dans la précarité sur des terres publiques, l'occupant se pose en demandeur de

Décret 85-211 du 18 août 1985

2 Tchalabi (EH) -"Monstruosité sur une variation juridique : l'illicéité ratifiée par la loi" - in RASJEP, N° 3 -1989

logements que l'État construit. C'est dans cet esprit que son installation est calculée. C'est une interpellation de l'État par des communautés, sur la question du logement et de la justice sociale. Les occupants des bidonvilles se regroupent par origine géographique, alors que les occupants de cités illicites se regroupent par groupes sociaux. Progressivement, du fait de la politique alternée entre les démolitions, les relogements) . les reconduites aux villages d' origine et du manque de terrains publics)les bidonvilles se précarisent de plus en plus. Au début des années 1990, à la faveur des communes FIS , puis de leur dissolution suivie par l'absence de pouvoir local leur présence se manifeste par une affirmation insolente.

A Constantine ils s'installent ostensiblement sur les berges même du Rhummel, espérant ainsi être relogés dés les premières pluies. Mais la crise économique) le désengagement progressif de l'ÉtatAa politique sécuritaire pour endiguer le terrorisme urbain modifient l'approche des pouvoirs publics de la gestion des bidonvilles. C'est ainsi qu'à Constantine s'alternent depuis 1994 deux politiques

- Une politique de viabilisation des anciens bidonvilles ( renforcée depuis 1995 par un financement de la banque mondiale ).

- Une politique de démolitions des bidonvilles récents accompagnée de vente de lots de terrains et de prêts à la construction.

Il apparaît à l'observation et à la faveur de cette nouvelle donne que le phénomène bidonville tend pour l'instant à s'estomper au profit des constructions en dur .

Le choix des lotissements et des constructions en dur sur des terres privées, comme champ d'observation des processus d'émergence de l'illicite et de ses rapports au Droit et à l'État nous a semblé plus pertinent, pour de multiples raisons

- C'est un phénomène qui s'inscrit dans la durée et dans le définitif. L'occupant n'est plus en position d'attente. l'État n'ayant pas été en mesure de répondre à son besoin, il y pourvoit par ses propres moyens. Le terrain est acquis auprès d'un propriétaire par acte sous seing privé. Les

constructions sont en dur avec R+1, +2 ou même +3 . Elles ne sont pas homogènes et vont du type populaire "Benchergui" avec 100 m2 ou 60 m2 -au type résidentiel "Bentchicou" - entre 200 à 350 m2.

- Le phénomène s'inscrit dans un rapport de confrontation et de défi à l'État. Il met en relief des voies particulières de confrontation . Le

propriétaire en vendant illégalement son terrain s'expose seul à la

responsabilité pénale. Mais l'acte de vente et le début des constructions, pendant que le propriétaire purge sa peine, déporta confrontation et l'

élargi>eur. Elle a lieu désormais entre des services municipaux chargés de veiller au respect de la réglementation et un collectif de propriétaires de lots qui entame un processus de production de logements- armé du Droit

inextinguible au logement.

Les modalités d'exécution de la construction par les solidarités et les complicités qu'elles impliquent sont autant de coups portés à l'État et à ses services. L'exemple le plus frappant réside dans les facilités d' approvisionnement en matériaux de construction dont le monopole de distribution est assuré par l'État et soumis au permis de construire .

L'observation des processus d'illicéité est placée dans le cadre spatio -temporel de la commune de Constantine entre 1971 (promulgation de la révolution agraire et apparition des premiers lotissements illicites ) et 1995, fin de notre enquête, qui correspond aux effets de la nouvelle politique en matière d'urbanisation, avec restitution. de terres, désengagement des communes et abrogation de l'ordonnance portant constitution de réserves foncières à leur profit.

Elle inclut également la période mouvementée qui a caractérisé la gestion locale depuis 1990, avec la montée des islamises lors des élections municipales leur confrontation avec le pouvoir central, les dissolutions de assemblées municipales après l'arrêt du deuxième tour des législatives en 1992. L'absence depuis cette date d'un pouvoir local élu remplacée par les DEC (1).

2) L'APPROCHE

Elle s'est faite à des niveaux diversifiés :

- L'observation de visu , avec visites sur les sites illicites.

- La consultation d'une presse nationale, qui se fait l'écho des inquiétudes des pouvoirs publics, face à un phénomène qui s'accompagne déjà à partir des années 1980 des éléments d'une contestation de la légitimité du pouvoir qui ira en s'amplifiant, et dont une partie finira par se structurer dans le mouvement islamiste.

Cette presse se faisait aussi l'écho des "déviances" observées dans l' application des textes, notamment en matière d'attribution de lots de terrains pour la construction.

- La consultation des travaux de recherche sur la question (1).

- La consultation des textes législatifs et réglementaires, à partir du journal officiel avec les difficultés inhérentes à tout chercheur travaillant sur le Droit positif algérien dues à une raison fondamentale: L'existence de circulaires, d'instructions présidentielles et ministérielles et même de décisions locales qui modifient parfois le texte de manière substantielle ou en précisent la portée, sans qu'ils ne soient publiés au journal officiel .

Certains auteurs , travaillant sur lo Droit économique (2) y voient là une vitrine de textes et une réalité, la vraie contenue dans les textes qui ne sont pas publiés. Et ce qui est observé dans le Droit économique l'est également dans le Droit de la famille (3).

Ainsi la question des quotas dans les attributions de terrains ou de logements neufs sont des décisions locales prises sous l'impulsion des responsables du parti unique qui siègent aux assemblées locales et qui parfois ne figurent même pas dans les P.V de délibérations. Il en est ainsi du quota de logementsou de lots de terrains laissés à la discrétion du colonel de la région

'Cités dans le chapitre préliminaire sur les avertissements méthodologiques

2 Zouaimia (R ) - "Le Droit économique dans la régulation en Algérie"- in RADIC, 1990

3 Bendjaballah (S) - "Le Droit positif à l'épreuve du sacré : cas du code algérien de la famille" - in bulletin de liaison du LAJ , Paris I , 1995

ou du Wali . Elle modifie de manière substantielle la logique des réserves foncières mais clarifie les enjeux fonciers" neutralisés" par l'aspect technique des textes, Enfin elle permet de mieux saisir le rapport complexe, des occupants des sites illicites, à la légalité et d'arriver à expliquer cette " incapacité", tant décriée, (Jet communes à veiller au respect de la réglementation. Ces difficultés nous renvoie% nouveau au questionnement de notre problématique sur la fonction du Droit en Algérie. nous tenterons d'y répondre à travers le démontage des mécanismes juridiques et institutionnels qui encadrent le foncier urbain.

La reconstitution des processus d'illicéité a été complexe, une complexité due au manque de centralisation des données et parfois à leur absence à la période de notre enquête 1990- 1995 ( difficultés de déplacement et problèmes de sécurité ) . Plusieurs acteurs ont été sollicités pour nous raconter l'histoire de l'illicite ; l'habitant, la commune, les services de la publicité foncière, les notaires et les magistrats. Cette reconstitution s'est faite au gré des événements et des disponibilités de chacun, ce qui explique les lacunes de l'information.

CHAPITRE l[][

]L'ENCADR1EMENT

-

ÉTATKeUE

DE L'U[R]BANISATDON

L'encadrement étatique de l'urbanisation est assuré par la commune avec la constitution, à son seul profit, Cie réserves loiiciCItjydunt elle est le seul

redistributeur. De ce fait les mutations de propriété sont gelées et contrôlées en amont et en aval par le notaire et le conservateur foncier qui deviennent ainsi avec la commune les seuls agents officiels de l'encadrement de l' urbanisation. Selon l'article 156 de l'ordonnance portant code communal (1).

«Dans le cadre du plan national d'aménagement du territoire, l'APC établit le plan directeur d'urbanisme de la commune. Ce plan est soumis à l' approbation du ministre chargé de la construction».

Ces compétences de la commune en matière de développement urbain sont élargies par l'ordonnance portant constitution des réserves foncières au profit des communes (2) « Il est institué ,au profit des communes, des réserves foncières dans le cadre du périmètre d'urbanisation fixé par le PUD et établi selon l'art. 156 précité».

L'établissement d'un PUD (plan d'urbanisme directeur) pour les grandes agglomérations, d'un PUP ( plan d'urbanisme provisoire ) pour les communes de moindre importance et la

qui>

constitution de réserves foncières sont

ts:e4.1,1

-obligatoires. Toutes les communes quelque soit leur importance, leurs moyens ou leurs besoins y sont tenues. A cet effet une aide de l'État est prévue pour les communes n'ayant pas les capacités de mobiliser les fonds nécessaires à

Ordonnance 67-24 du 18/1/1967 portant code communal

2 Ordonnance74-26 du 20/2/1974 portant constitution des réserves foncières au profit des communes

l'acquisition des terrains . Un décret d'application (1) institue un système d' avancei du trésor public pour l'acquisition et l'aménagement des terrains devant être intégrés dans les réserves foncières communales . Il est suivi par un arrêté interministériel du 23 juin 1979 portant liste des communes devant bénéficier de la cession au dinar symbolique, des terrains domaniaux faisant partie de leurs réserves foncières.

Ces mesures uniformisantes ont un caractère d'injonction qui ne permet pas une appréciation locale des besoins effectifs de chaque commune. tett.>

expliquent, en partie, la précipitation qui a prévalu lors des procédures d'

élaboration des plans d'urbanisme et d'intégration des terrains. Ces précipitations ont entraîné des mobilisations inutiles de terrains, une consommation souvent anarchique avec une manipulation des statuts et des droits sur la terre.

De nombreusgsvoies de fait, par l'absence de respect des procédures d' intégration, absence d'études juridiques préalables sur la nature juridique des terrains sont aujourd'hui , consécutivement à la restitution des terres depuis 1990(2) , à l'origine de nombreux litiges fonciers et amènent à se demander si l' origine du phénomène delillicéité n'est pas à chercher à un premier niveau du coté de l'État (3)

A - L'ÉLABORATION DIU[ PLAN IMUIRBANISMIE

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