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Les violences post électorales de 2007

Section I : La comparution des dirigeants kenyans à la CPI

A- Les violences post électorales de 2007

La comparution du Président kenyan devant la CPI et le vice-président a été précédée d’une phase d’enquête sur les évènements tragiques qui se sont déroulés dans ce pays, à la suite de l’élection présidentielle du 27 décembre 2007. Pour mieux saisir la situation, il importe de rappeler le contexte qui a justifié l’enquête du Procureur et qui valut aux dirigeants kenyans d’être cités à comparaître devant la CPI, pour répondre de cinq chefs de crimes contre l’humanité. Le Président Uhuru Kenyatta et son vice-président William Ruto étaient accusés d’avoir participé à l'organisation des violences postélectorales de 2007-2008 qui ont

418 ICC-01/09-02/11, para.21

419 Meurtre (article 7-l-a) ; Déportation ou transfert forcé de population (article 7-l-d) ; Viol (article 7-l-g) ; Persécution (article 7-l-h) ; et autres actes inhumains (article 7-l-k) ; ICC-01/09-02/11, para.21.

suivi le scrutin présidentiel au Kenya, pays situé à l’Est du continent africain. Ces violences auraient occasionné la perte en vies humaines de 1100 personnes environs et provoqué des milliers de déplacés. Au moment des faits, M. Kenyatta était un homme politique occupant les fonctions de député proche du Président sortant Mwaï Kibaki, dont la victoire sera contestée par l’opposition dirigée par Raïla Odinga qui lui avait le soutien de M. William Ruto, lui aussi député. Cette remise en cause de l’élection déclenchera des affrontements inter ethniques. Le 22 janvier 2008, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union Africaine demande une enquête approfondie afin que soient déterminés puis traduits devant la justice les responsables des violences. Le lendemain, une médiation est entreprise par l’ancien SGNU, Kofi Annan qui se solde par une rencontre entre les protagonistes de la crise. Le 1e février un accord est signé entre le président Kibaki et l’opposant R. Odinga prévoyant en plus du calendrier des négociations pour un partage du pouvoir, des mesures concrètes devant mettre fin aux violences. Les négociations pour l’accord de partage du pouvoir se tiennent du 15 janvier au 28 février et terminent par un accord sous la houlette du médiateur Kofi Annan.

L’accord de partage du pouvoir voit les trois principaux protagonistes des élections présidentielles que sont Mwaï Kibaki du Parti de l’unité nationale (Party for National Unity, PNU), Raïla Odinga du Mouvement Démocratique Orange (Orange Democratic Movement, ODM) et Kalonzo Musyoka, candidat du Mouvement démocratique Orange-Kenya (ODM-K), participer au gouvernement, respectivement comme président, premier ministre et vice-président, mettant ainsi fin à une parenthèse de quatre mois d’une crise sanglante qui avait mis ce pays sous le feu de l’actualité internationale. Même si la crise a pu prendre fin, les auteurs de crimes n’avaient toujours pas répondu des conséquences de leurs actes devant la justice kenyane, amenant le Procureur à demander à la Chambre préliminaire l’ouverture d’une enquête sur la crise postélectorale de 2007. C’est dire que les faits qui leur sont reprochés relèvent d’une période antérieure à leur prise de fonction en tant que Président et vice-président de cet État partie au Statut de Rome420. Le soutien apporté par M. Uhuru Kenyatta au président sortant lors de l’élection de décembre 2007 est récompensé ; dans la mesure où il sera nommé au mois d’avril 2008 au poste de vice premier ministre du Kenya. Sous l’égide de l’ex-SGNU, tous les protagonistes de la crise cohabitent au sein de ce gouvernement durant cinq ans (2008-2013). En février 2008 sous les auspices de l’ex-SGNU, une Commission d’enquête sur les violences post-électorales présidée par le juge

Philip Waki (Commission Waki) est mise en place. La Commission Waki enquête et produit un rapport qui est remis en août de la même année à M. Kofi Annan. La Commission pointe du doigt l’usage excessif de la force par la police qui est accusée d’être responsable de 405 des 1113 décès recensés. En outre, la Commission Waki établit une liste confidentielle de personnalités qu’elle soupçonne d’avoir commandité ces violences et lance en octobre 2008 un appel à la création d’un tribunal spécial pour juger tous les auteurs de crimes. Cette solution ne trouve pas d’échos auprès des autorités gouvernementales malgré les nombreuses promesses faites en ce sens. Devant l’immobilisme des autorités kenyanes et face à ce qui s’apparente manifestement à un manque de volonté pour mettre fin à l’impunité, l’ancien Secrétaire général de l’ONU s’en remettra au Procureur de la CPI, en lui transmettant au mois de juillet 2009 la liste confidentielle de la Commission Waki421. Au regard de la situation, le Procureur de la CPI est contraint d’ouvrir au mois de mars 2010 une enquête de sa propre initiative dans ce pays422. La procédure aboutit à l’émission de citations à comparaître adressées à six personnalités parmi lesquels figuraient Uhuru Kenyatta et William Ruto423.

Parmi les accusés, trois figurent au sein de la majorité présidentielle424 et trois autres de l’opposition425. Sentant sûrement l’étau se refermer autour de lui, Uhuru Kenyatta décide de se présenter à l’élection présidentielle de 2013 qui, à la différence de la précédente, se déroule sans heurt. Entrevoyait-il dans la fonction de chef d’État un moyen de protection efficace contre la procédure à venir devant la Cour pénale internationale ? Le cas du président soudanais empêtré dans une procédure avec une CPI impuissante à obtenir son arrestation était-il vu comme une voie à explorer devant le risque d’une arrestation future ? Difficile de le savoir exactement. Toujours est-il que la candidature à l’élection présidentielle à venir sera payante puisque Uhuru Kenyatta sera élu à la tête du Kenya le 4 mars 2013 grâce à l’alliance qu’il va former entre temps avec William Ruto son adversaire d’hier et coaccusé comme lui de crimes contre l’humanité par la CPI. Devenu président de la République après avoir prêté serment le 9 avril 2018, Kenyatta nomme à la vice-présidence William Ruto.

421 DECHERF D., « Le Kenya et la Cour Pénale Internationale », Études 2013/11 (Tome 419), p. 453.

422 Voir le site de la CPI, « https://www.icc-cpi.int ».

423 Avant l’émission des citations à comparaître, le Procureur avait rendu public le 15 décembre 2010 le nom des six personnalités kenyanes qu’il entendait poursuivre. Dans cette liste, ne figurait ni le nom du président Kibaki, ni celui de Raila Odinga.

424 Le vice premier ministre Uhuru Kenyatta, le secrétaire général de la présidence, Francis Muthaura, et le chef de la police, Hussein Ali.

Les accusations du Procureur contre les deux personnalités sont sérieuses. Elles sont accusées d’être les instigatrices de violences qui ont de forts relents ethniques dans un pays où l’appartenance tribale détermine par ailleurs l’appartenance politique. Uhuru Kenyatta (Kikuyu) est accusé d’avoir mis en œuvre un « plan commun » en s’appuyant sur une secte kikuyu (Mungiki) pour perpétrer les violences postélectorales. Les mêmes faits sont reprochés à William Ruto dans ses bastions ou régions considérés comme tels, avec le soutien des groupes politiques et ethniques qui lui sont fidèles. Devenus président et vice-président du Kenya, ces deux dirigeants savaient qu’ils devaient répondre dans les jours à venir des accusations de crimes contre l’humanité devant les juges de La Haye. Les procédures engagées contre les dirigeants kenyans sont une première à plusieurs égards. En effet, pour la première fois, un chef d’État et un chef de gouvernement en exercice poursuivis par la CPI devaient se présenter in personam devant les juges de la Cour pénale internationale. Pour la première fois encore, des dirigeants en exercice étaient poursuivis par une juridiction pénale internationale pour des faits commis à un moment où ils n’occupaient pas les fonctions qu’ils occupent aujourd’hui, au contraire des procédures soudanaise et libyenne. Kenyatta occupe maintenant les fonctions de chef d’État depuis la date du 9 avril 2013, après sa victoire obtenue lors des dernières élections présidentielles qui se sont déroulées elles, sans heurts majeurs. En dépit des massacres consécutifs aux évènements post-électoraux, la justice kenyane n’a pu déterminer et poursuivre les auteurs des crimes qui ont été commis, alors que le Statut dispose qu’il est avant tout de la compétence des Etats parties au Statut de Rome de poursuivre les auteurs de crimes graves commis sur leur territoire. C’est seulement en cas de défaillance de leur part que la Cour peut s’auto saisir pour examiner ladite situation. Le Kenya ayant ratifié le Statut de Rome ; c’est prenant pour justification l’inertie des juridictions kenyanes devant les crimes résultant des violences post électorales de 2007 que le Procureur c’est auto-saisi à l’effet d’ouvrir une enquête au mois de mars 2010. Mais l’exercice par le Procureur de cette prérogative n’est pas sans limite, il obéit à un cadre juridique bien déterminé par le Statut dont il serait intéressant de relever les points saillants des discussions qu’elle a suscité lors de la conférence de Rome en 1998.

B- La compétence proprio motu du Procureur

Cette faculté de s’auto-saisir ou compétence proprio motu confère au Procureur une certaine indépendance vis-à-vis du désir de contrôle qui pourrait animer les Etats parties. Cette question a fait l’objet d’intenses discussions lors de la conférence plénipotentiaire de Rome

en 1998. Il est important de relever les différentes positions des délégations face à la question de l’indépendance de cette autorité qui demeure l’autorité centrale de la politique criminelle de la Cour pénale internationale. Le Statut de Rome confère au Procureur la place centrale pour la réalisation de la politique de répression criminelle de la Cour pénale internationale. Mais la réalisation de cet objectif devait impérativement passer par la redéfinition des prérogatives reconnues à cette autorité. Il s’agissait pour les rédacteurs du Statut de Rome de ne pas reproduire les erreurs qu’avaient faites les juridictions pénales

ad’hoc. Pour que la nouvelle juridiction envisagée soit forte, il était nécessaire de doter l’autorité chargée de mettre en œuvre sa politique, des moyens non seulement efficaces et cela devait passer par son autonomie. L’objectif recherché était avant tout d’octroyer des pouvoirs autonomes au Procureur qui lui permettent de résister à toute pression ou influence provenant des Etats et de certains de leurs chefs d’État426 soupçonnés de crimes graves, dont certains comptent parmi les plus influents de la communauté internationale, et bénéficient d’immunité qui les rendent in justiciables des juridictions nationales des Etats.

Comment doter le futur Procureur de pouvoirs autonomes, qui le rendent indépendant de toute influence de personnes morales et physiques tout aussi influentes et protégées ? Telle est la question principale dont les rédacteurs du statut s’attelaient à trouver une réponse afin que la CPI à peine en constitution ne soit déjà une institution mort- née ; car, les polémiques relatives au manque de partialité des TPI et TMI, ont laissé des marques profondes dans les esprits, que la CPI se devait d’effacer. La réalisation du pari de l’impartialité visait par ailleurs un autre objectif beaucoup plus vaste. Celui d’arriver à une universalité, gage de pérennité de l’institution. Ainsi, l’impartialité recherchée était le moyen d’attraction du plus grand nombre d’Etats, étant entendu qu’à la différence des juridictions

ad’hoc, l’adhésion au Statut de la Cour devait se faire sur une base volontaire.

Le Procureur, en tant que personnalité clef de la politique criminelle de la Cour pénale internationale était envisagé avec une certaine autonomie. Les rédacteurs du Statut de 1998 se sont inspiré des travaux préparatoires et des statuts des juridictions pénales internationales

426 Rappelons à toutes fins utiles que, la raison principale de mise sur pied des juridictions pénales internationales est la poursuite des grands criminels de guerre qui comptaient parmi eux des chefs d’État comme premiers accusés. Et Si les chefs d’État font l’objet de poursuite devant ces juridictions, c’est parce que de façon générale, au niveau interne ces derniers bénéficient des immunités durant l’exercice de leur mandat. Cette règle immunitaire qui implique l’inviolabilité rend quasi impossible toute mesure de contrainte liée à la mise en œuvre de toute procédure juridictionnelle. L’article 67 de la Constitution française issue de la loi constitutionnelle du 23 février 2007, parlant du chef de l’État dit : « Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que de faire d'objet d'une action, d'un acte d'information, d'instruction ou de poursuite ».

précédentes pour l’essentiel. Le Projet de code des crimes de la CDI de 1994427

fut à cet égard d’un apport appréciable et une référence. Pour la première fois dans le Projet de 1994, il était fait référence à un Procureur indépendant, dont les fonctions comportent des similitudes avec celles qui sont reconnues au Procureur de la CPI par le Statut de 1998. L’article 12 du Projet de code de la CDI de 1994 faisait mention d’un Procureur et de ses adjoints au sein d’un Parquet. Ce « parquet » était placé sous la direction du Procureur faisant office d’« organe indépendant au sein de la Cour, chargé d'enquêter sur les plaintes présentées conformément au présent statut et d'exercer les poursuites » et dont « les membres ne sollicitent ni n’appliquent d’instructions d’aucune source extérieure ». Mais comment réussir le pari d’aboutir à un Procureur indépendant, sans un minimum d’autonomie ? Comment aboutir à une indépendance, quand notre pouvoir d’initiative être dicté par un organe politique dont les préoccupations sont parfois à l’opposé de celle de la Cour ?

Le souci de procurer une indépendance au futur Procureur constituait l’objectif principal de la CDI. Il s’agissait par ce moyen de le mettre à l’abri de toute sorte de pression ou influence, afin qu’il ne serve d’alibi à une politique criminelle dont il ne serait pas l’initiateur et qui lui échapperait complètement. Il ne fallait cette fois réitérer les erreurs du passé, pour ne pas aboutir aux échecs qu’ont connus les TMI et TPI ; car, il n’est pas inutile de rappeler à toutes fins utiles qu’à la fin de la seconde guerre mondiale, la poursuite des officiers des forces de l’Axe s’est faite par des magistrats nommés par les dirigeants des Etats vainqueurs du conflit. Cet acte n’a pas manqué d’entacher la crédibilité des procès qui découleront, qualifiés de justice des vainqueurs, en dépit des garanties et des droits de la défense accordés aux accusés. La CPI parviendra-t-elle à éviter cette connotation qui risquerait de lui être préjudiciable ? Pour ce faire, l’élection du Procureur par l’ensemble des Etats parties au Statut428 fut l’une des voies utilisées pour désigner cette autorité et ses collaborateurs. Avec le Statut de la Cour pénale internationale, il s’agissait d’éviter de prime abord toute suspicion sur l’impartialité du Procureur. Et, cela devait passer par une certaine autonomie à reconnaître au Procureur. Le fait qu’il ne provienne pas d’un quelconque pouvoir politique devait lui assurer cette autonomie d’où découlerait l’indépendance nécessaire pour résister à toute pression. Ce procédé visait à terme à donner un cachet moins suspicieux aux

427

CDI, 1994, article 12.

428 L’élection du Procureur et ses adjoints est le fait de l’Assemblée des Etats parties (AEP) qui est le principal corps législatif de la CPI composé des représentants des Etats ayant ratifié le Statut. Chaque État membre dispose d’une voix. Il s’agissait pour les rédacteurs du Statut de se démarquer de la pratique antérieure, qui a consisté pour les forces Alliées de la Seconde Guerre à nommer comme juges, seuls les magistrats ressortissants de leurs Etats.

décisions des juges in fine. Cependant, l’élection ne pouvait être déterminante, prise isolement. En effet, quel peut être le moyen d’action d’un Procureur, si même élu, ses moyens d’action ou sa conduite devait uniquement être déterminés par le bon vouloir d’autres entités dont les intérêts pourraient s’avérer différents des siens ou de ceux des victimes réelles ? Ces interrogations dont les réponses devaient déterminer la viabilité de la future Cour ont été l’objet de controverses vives. Le Procureur de la Cour pourrait-t-il effectivement poursuivre tous les auteurs de crimes de sa compétence, si le déclenchement de son action devait dépendre uniquement de la volonté d’une entité tierce susceptible d’être elle-même impliquée dans les crimes en question ? Il n’est pas étonnant d’ailleurs que, le point le plus controversé fut la question de savoir si le Procureur devait être investi du pouvoir de déclencher de sa propre initiative la compétence de la Cour en l’absence d’un renvoi par un État partie ou par le Conseil de sécurité429. La réponse à cette question revêtait une importance capitale d’autant plus que ; s’il ne faisait aucun doute que les Etats reconnaissaient la nécessité d’accorder au Procureur une certaine autonomie, pour autant, « il n’était nullement question de lui accorder un droit quelconque de saisir par lui-même la future juridiction »430. Pourtant cette faculté d’auto saisine pouvait constituer un élément déterminant dans la poursuite des objectifs de cette juridiction. Les statuts431 des TPI de Yougoslavie et du Rwanda ont été une source à laquelle ont puisé les rédacteurs du Statut de Rome.

Ces textes donnaient des latitudes au Procureur pour l’examen des situations portées devant lui pour accomplir ses missions sans interférence extérieure. Rechercher une juridiction indépendante alors que sa compétence est liée, s’avérait de prime abord un obstacle non négligeable à surmonter par la future Cour. C’est pour surmonter cette contradiction qui pouvait à terme constituer un gros handicap pour la CPI que, lors de la conférence diplomatique, l’idée fut émise d’accorder au Procureur de la Cour des pouvoirs d’action propres ou compétence proprio motu. La volonté des négociateurs était de lui accorder un pouvoir d’action propre ou la faculté de se saisir d’une situation sans qu’il ne soit forcement actionné par une source extérieure. Cette prérogative avait pour but de le rendre non dépendant des Etats ou du Conseil de sécurité. Pour la plupart des délégations invitées à la conférence diplomatique de Rome, cette autonomie était une nécessité, si l’on voulait

429 Rapport du Comité préparatoire pour la création d’une Cour criminelle internationale, documents officiels de l’Assemblée générale des Nations Unies, cinquantième session, Supplément n° 22, A/50/22 (1995), par. 113-114

430

TINE A., op.cit., p. 615.

431 Statut du TPIY, Article 18-1, « Le Procureur ouvre une information d’office sur la foi des renseignements obtenus de toutes sources, notamment des gouvernements, des organes de l’Organisation des Nations Unies, des organisations intergouvernementales. Il évalue les renseignements reçus ou obtenus et se prononce sur l’opportunité ou non d’engager les poursuites. »

parvenir à une juridiction forte et impartiale qui ne soit pas à la remorque d’un État ou du CSNU. Malgré les bonnes intentions, la perspective ne faisait pas l’unanimité, et les discussions feront vite apparaître des points de divergence. Ces points de divergences entre les délégations porteront pour l’essentiel sur l’étendue de la compétence proprio motu à accorder au Procureur de la future Cour432. Les Etats réfractaires étaient frileux à l’idée d’accorder une trop grande indépendance qui permette au Procureur une autonomie vis-à-vis des Etats. En réalité, cette peur était due au fait que les Etats étaient jaloux de leur souveraineté433 et ne voulaient pas en céder une partie à un Procureur dont il devenait de plus en plus évident qu’il serait impossible de maîtriser les initiatives. Pour ces derniers, l’État devait être non seulement le filtre ou le passage obligatoire pour saisir la Cour, mais aussi le