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ANNEXES 2 LES POLITIQUES COMMUNALES

2. Ville-La-Grand (avec le concours de Laure W EBER )

Nous sommes partis du canevas des entretiens menés à Puplinge, pour interviewer quelques élus, techniciens et promoteurs opérant sur l’agglomération d’Annemasse et plus particulièrement sur la commune de Ville-La-Grand. Les réponses qui nous ont été fournies n’ont pourtant pas du tout porté sur les mêmes thématiques que celles abordées à Puplinge, révélant par là même un monde de références et de préoccupations largement éloigné.

Il nous est apparu à travers le dépouillement des interviews que la question de l’aménagement était posée prioritairement en termes d’économie de marché de la construction, avec un souci prédominant portant sur le soutien de ce secteur d’activité dans une période de crise.

L’influence des schémas de pensée des promoteurs-constructeurs est telle qu’elle arrive à structurer le discours des élus et des techniciens aménagistes de façon quasi exclusive.

2.1. Contexte de l’agglomération d’Annemasse

Une des caractéristiques de ces dernières années dans le secteur locatif de logements dans l’agglomération annemassienne, est que le stock de petits appartements est élevé. Les trois pièces+cuisine répondent largement à la demande, par contre le déficit en 4 pièces+cuisine et 5 pièces+cuisine est indéniable. La loi Méhaignerie de 1986, qui a facilité l'acquisition d'un logement avec des abattements fiscaux et sous condition de le louer pendant six ans minimum à autrui, serait à l'origine de cette offre excédentaire de petits appartements. La construction de logements s’est ainsi concentrée sur les petits appartements pour bénéficier d’abattements fiscaux: en effet, l’abattement était de 10% pour une tranche d'achat allant de Ff. 300'000.- à 600'000.-. Les futurs propriétaires ont alors investi massivement dans les petits logements et

Par différence à bon nombre de villes françaises, les crises économiques de 1973 et 1981 n'ont pas été ressenties fortement à Annemasse car la ville dépend plus étroitement de l'économie genevoise. La crise actuelle ayant atteint Genève, Annemasse en fait aussi les frais. Le Crédit Agricole en Haute-Savoie, détient 50% du parc immobilier local. Les prix du bâti en ville ayant récemment chuté de 25 à 30%, les SCI (sociétés civiles immobilières) ont été rachetées par le Crédit Agricole.

Cette crise se traduit par un début de repli intra-muros. Les demandeurs de logements cherchent à se rapprocher ou à retourner au centre-ville, ou encore dans les communes jouxtant la commune d’Annemasse et bénéficiant de tous les services communs. La demande de villas ne s'étale plus dans un rayon de 20 km, mais plutôt de 10 km par rapport au centre-ville. La demande se caractérise par le désir d’habiter au calme, dans un cadre riche en espaces verts, situé de préférence en périphérie de la ville, mais avec tous les avantages du centre: commerces de première nécessité, transports en commun. D’où la multiplication des petits lotissements de villas dans ces communes proches. Au sein de l'agglomération, Ambilly (terrain = Ff. 800.-/m2), Vétraz-Monthoux (terrain = Ff. 450.-/m2) et Ville-La-Grand sont les vedettes de la demande. Gaillard rime plus avec cité-des-frontaliers ou cité-dortoirs, elle est la commune qui accueille une majorité de frontaliers.

Le marché de vente de villas est issu pour la majorité de la revente, si le client désire du neuf, il se tourne à 90% vers le « clef en main ». Selon le directeur d’une agence immobilière importante du secteur, le profil du futur propriétaire de villa est un couple de quarante ans, dont l'un des deux au moins travaille en Suisse. Il désire une maison de 150 m2, clé en main ou issue d'une revente, pour un million de francs français, avec un sous-sol. Le couple est déjà tributaire d'une revente d'appartement, mais il cherche à habiter dans un rayon de 10 km par rapport à son lieu de travail. Ce rayon se limite aux communes de Bonne-sur-Menoge, Lossy, Saint-Cergues.

Au centre-ville d'Annemasse, le « plan masse » est une institution. Face à la demande de calme et de verdure, les promoteurs essaient de jouer le jeu, mais les contraintes du POS -

construction d'un immeuble de logement, limitent l'implantation importante de végétation. Pour un immeuble de logement, le promoteur crée un premier sous-sol, puis un deuxième pour répondre au quota de places de parkings, quota fixé par le POS Le deuxième sous-sol coûte cher à la construction et le financement tourne à perte. Le promoteur qui ne rentre pas dans le quota, paie une taxe par place de parking manquante, ce qui semble être un moindre risque, mais reporte le stationnement en surface. La surface hors oeuvre nette dite SHON est alors saturée et la végétation se réduit alors à quelques plates-bandes et des bacs à fleurs.

Annemasse est à la recherche de commerces pour le centre afin de le redynamiser. La politique d'ex-centralisation des grandes surfaces n'est plus en vigueur. Les projets de commerces en périphérie de la ville devraient être systématiquement refusés par la mairie. Le HLM, lui, n'a pas de souci à se faire. 6'000 personnes sont sur la liste d'attente. Les logements y sont environ FF.

1'000.- moins chers que le logement traditionnel. Les organismes HLM, comme Halpades et l’OPAC ont de beaux jours devant eux.

2.2. Ville-La-Grand

Commune agricole de polyculture céréalière, il y moins de cent ans, Ville-La-Grand s’est à l’origine urbanisée en suivant l’évolution qu'Annemasse. La création du chemin de fer en 1880 a été déterminante pour son développement. Une population de cheminots largement syndicalisée s'y est logée à l’entre-deux guerres. Après la seconde guerre mondiale, la tendance politique, majoritairement de gauche, a évolué vers une tendance centriste. Durant les années 1960, la commune s’est dotée d’un projet de grande zone industrielle jouxtant celle d’Annemasse. La création d’une ZAC de logements et d’activités ont transformé la physionomie de la commune aux cours de ces deux dernières décennies. Aujourd'hui, la commune reflète un équilibre politique. En 1990, Ville-La-Grand comptait 6474 habitants.

Dans les années 70, une deuxième vague de population nouvelle s'installe dans le lotissement de Pré-les-Plans. Les villageois ont une attitude de recul par rapport à ces nouveaux arrivants, mais l'intégration se fait par le biais de l'école.

Les frontaliers constituent un peu plus de 10% de la population, soit environ 750 personnes.

Beaucoup de personnes souhaitent s'installer à Ville-La-Grand pour les raisons suivantes :

 ces personnes veulent de moins en moins loger dans des lotissement avec 800 m2 de terrain;

 celles qui sont éloignées, isolées et âgées préfèrent revenir en ville, dans du locatif;

 Ville-La-Grand se rapprocherait de l'image de l'urbanisme villageois.

La demande en espace vert est un cliché des revendications collectives tout comme la demande d’habitat individuel. Dans l’esprit de la municipalité, aménager des espaces verts nécessite une politique active d'acquisition foncière, ce qui réduit de fait l’aménagement des espaces naturels à une acquisition publique.

2.2.1. Politique de l’urbanisme et objectifs de développement

D’après son Maire, Ville-La-Grand évolue selon une « bonne idée de l'urbanisme » héritée de ses prédécesseurs. La conception d'un groupe d'immeubles résidentiels types se définit par trois ou quatre bâtiments de R+6 environ, disposés autour d'un espace rectangulaire composé

de végétation et de parkings. L'idée du village est retrouvée avec une toiture à deux pans. Ces logements sont plutôt voués à la vente ou à la location pour des classes moyennes (une des personnes étant frontalière).

Après l’illusion d’avoir voulu créer une nouvelle centralité à partir d’un centre administratif moderne, la réhabilitation du centre ancien de la commune est un objectif récent pour la municipalité. Le centre de la commune est en cours de réaménagement : réhabiliter à partir de ses ressources patrimoniales, créer des commerces afin de redynamiser son image, lui donner vie et attirer de la population. Actuellement, le centre est méconnu par les gens qui traversent la commune. Son accessibilité est limitée par l’importance du trafic routier qui le coupe en deux et rend l’arrêt et le stationnement difficiles.

Face aux problèmes de trafic routier incessant sur la commune - 12'000 véhicules par jour qui traversent le centre - un détournement de la circulation est présenté comme une opération indispensable.

Les espaces dits de détente et sportifs du site de Verchères se prolongent par un parc de loisirs de 2,2 hectares composé dans un souci d'amélioration de la qualité de vie et de mise à disposition d’un espace vert accessible à tous.

A part le développement des projets actuels tel que le Village d’entreprises, un ou deux petits lotissements sont à l'étude. Le quartier localisé près de la gare fait l’objet d’un plan masse. La stratégie d'acquisition foncière est indispensable pour orienter le développement. Les terrains nécessaires à la construction de la route de contournement sont en cours d'acquisition, mais les crédits font actuellement défaut. Les terrains reliquats continuent d’être mis en réserve foncière.

L'idée d'intégration de la végétation sur le territoire de la commune est de plus en plus importante, c'est comme une redécouverte des atouts du végétal au niveau décoratif et comme élément urbain structurant. Les nouveaux groupes d'immeubles de logements au lieu-dit «Les Courroux», s’entourent d'espaces verts qui se résument à quelques pelouses agrémentées d’arbres.

Cette prise de conscience de l'intérêt de végétaliser l'espace urbain mise à part, les principales ressources en espace naturel se résument à la vallée du Foron, espace protégé, et aux terrains agricoles n’étant plus affecté à la que la viticulture, fierté des habitants de la commune.

Il y a cinquante ans, on dénombrait encore trente exploitations réparties principalement entre élevage et culture maraîchères.

Les révisions du POS de Ville-La-Grand ont surtout touché les gabarits des routes (élargissement de la voirie, implantation de l'itinéraire de contournement), l’augmentation de la densité du COS pour les secteurs pavillonnaires. Ce réglage des COS vise à une uniformisation de la densité dans cette zone.

Les terrains contigus à la gare d'Annemasse sont déclassés en une zone NA, c'est-à-dire «zone d'urbanisation future». Mais aucun projet n’a encore vu le jour..

2.2.2. L’image forte de Ville-La-Grand: la zone industrielle:

Les personnes de l'extérieur voient en Ville-La-Grand une commune d'activités industrielles, mais la commune désire rompre avec cette image en créant ses fameux espaces de détente, noyaux de sauvegarde de l'environnement.

La zone industrielle a été créée vers 1970 par une société canadienne SOFCAR. Les îlots ont été surdimensionnés à cause de l'euphorie économique de l'époque et du modèle américain de la démesure de l'espace. La SOFCAR ayant fait faillite, la commune a racheté la société afin de terminer la mise en place de la zone. Son implantation est à cheval sur les deux communes d’Annemasse et de Ville-La-Grand, et s'est étendue jusqu'aux limites du territoire à bâtir disponible, en empiétant largement sur des terrains forestiers.

Le développement et le concept de la ZAC du Village d’entreprises débuté en 1990 est difficile à maintenir. Le projet visait à regrouper diverses activités sur un même terrain de 35 hectares.

Les activités se répartissent en espaces commerciaux et d'entreprises, en lieu de détente, et encore en logements privés en individuel groupé et du logements social. Le but de la création du Village d’entreprises était de neutraliser un développement anarchique de l'urbanisme, mais aussi d'imposer des règles d'équilibre entre le nombre d'habitants et le nombre d'emplois sur la commune. La mise en oeuvre du projet devait répondre à deux nécessités : installer le système de voirie et attirer les entreprises. La concrétisation du Village d'entreprises s’est révélée plus longue que ce qui était prévu. Les grands axes routiers sont réalisés, mais les parcelles ont du mal à se remplir.

Enfin, a été évoquée la politique d’élimination des ordures ménagères. Celles-ci sont envoyées dans une décharge de Saône et Loire. Une usine d’incinération est en construction à Bellegarde. Il y a vingt ans, la commune avait elle-même sa propre décharge, puis le SIVMAA a pris en charge les déchets de l'agglomération et des communes environnantes. Des négociations avec le conseiller d'Etat genevois, Mr. Grobet, avait été entreprises pour incinérer les déchets dans l'usine du canton de Genève, mais cette requête ne reçut pas de réponse. Par la suite, son successeur, Mr. Haegi, aurait été ouvert à cette proposition mais la construction de l'usine à Bellegarde est déjà entamée.