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Vers une transparence des pratiques digitales

Conceptualisation de la transparence perçue des pratiques digitales

2.1.3. Vers une transparence des pratiques digitales

Après avoir détaillé les objets nécessitant de la transparence en ce qui concerne l’organisation et le marché, nous nous intéressons aux attentes de transparence relationnelle. Celle-ci fait clairement penser à la transparence dynamique ou à la transparence technologique mentionnées par Vaccaro et Madsen (2009b) en Systèmes d’Information. La transparence relationnelle concerne la relation entre fournisseur et client et s’avère être une source potentielle d'avantages concurrentiels (Bliemel et Eggert, 1998).

Dans un contexte B2B, la transparence relationnelle consiste à prendre en compte la transparence du vendeur et celle de l’acheteur. Le vendeur perçoit un certain degré de transparence de la part de l’acheteur et réciproquement. Le degré de transparence perçue par chacun des deux acteurs peut différer. Ce qui peut amener à une perception symétrique ou asymétrique de la transparence (les deux parties ne perçoivent pas le même degré de transparence). D’après Eggert et Helm (2003), la transparence relationnelle en B2B correspond à la perception subjective de l'individu d'être informé sur les actions et les propriétés qui lui semblent pertinentes à propos de l'autre partie dans l'interaction. Cette étude en B2B constitue une piste de recherche sur la transparence relationnelle en B2C. Hakansson (1982), Hallen et Sandström (1991) et Sutton-Brady (2001) expliquent que les situations de transparence relationnelle peuvent en partie être expliquées par l’atmosphère de la relation. Cela concerne les paramètres émotionnels dans lesquels les deux parties interagissent. Il existe cinq dimensions clés afin de décrire l’atmosphère de la relation (Hakansson, 1982 ; Hallen et Sandström, 1991 ; Sutton- Brady, 2001) :

(1) Le pouvoir / la dépendance, (2) La confiance / l’opportunisme, (3) La coopération / le conflit,

(4) Les attentes vis-à-vis de la relation, (5) Le sentiment de proximité / distance.

La dépendance mutuelle, la confiance, la coopération et la proximité semblent être les caractéristiques d’une relation à long terme. Une atmosphère de domination, de méfiance, de conflit, de dure négociation et de distance sont quant à elles, les caractéristiques d’une relation de marché (Hakansson, 1982).

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Des recherches ont prouvé que la transparence de la relation offre une certaine valeur au client et contribue à la satisfaction car elle minimise le besoin perçu de constamment rechercher des informations pour de meilleures alternatives. Ce type de transparence permet également plus d’engagement de la part des clients et plus de recommandations d’après Eggert et Helm (2003).

La transparence relationnelle propose ainsi des pistes afin de déterminer la transparence des pratiques digitales à l’heure du digital.

Encadré 2 : Définition de la transparence des pratiques digitales

La transparence des pratiques digitales comme nous l’entendons ne s’intéresse pas seulement à la transparence générale de la relation entre un client et un fournisseur, mais s’intéresse à la transparence de toutes les pratiques, de toutes les stratégies de gestion de la relation tout au long du parcours client. Cela inclut la transparence de la collecte, de l’utilisation, de la combinaison et de la diffusion des données mais aussi la transparence sur les pratiques liées aux programmes de fidélité, au CRM ou bien encore à l’utilisation de stratégies omnicanal. La transparence des outils, des méthodes, des technologies et des processus utilisés dans la gestion de la relation sont prises en compte. Finalement, cela implique tous les contacts entre une entreprise et un client, sur n’importe quel canal ou terminal, à n’importe quel moment de la relation (pré-achat, achat, post-achat).

La transparence des pratiques digitales est étroitement liée à l’idée de donner l’accès aux clients à leurs données collectées et de leur stipuler l’usage des informations qui vont être utilisées tout au long de la relation (Awad et Krishnan, 2006). Toutefois, la transparence de la relation digitale ne tient pas compte précisément de tous les aspects marketing liés aux données, ce qui relève plutôt du domaine de la Privacy. En effet, le respect de la vie privée des clients est avant tout issu du domaine de la Privacy en marketing (Culnan, 1995 ; Nowak et Phelps, 1992 ; Lancelot-Miltgen, 2006).

La transparence des pratiques digitales quant à elle diffère de la Privacy dans le sens où elle est bien plus liée aux usages des données et aux pratiques digitales qui en découlent (et non pas à la collecte et à l’accès aux données).

65 2.2. Synthèse des objets de la transparence

Après cette revue de littérature, trois grands objets de la transparence sont identifiés : la transparence de l’organisation, du marché et des pratiques digitales. Les objets de la transparence abordés dans la littérature et qui retiennent particulièrement notre attention sont synthétisés dans le Tableau 4 ci-dessous.

Tableau 4 : Synthèse des objets de la transparence

Objets de la transparence Définitions de l’objet de la

transparence Auteurs

Transparence de l’organisation

Transparence de l’entreprise

Siège social, historique, évolution, management, fiscalité. Dapko (2012), Christensen (2002), Murphy et al (2007), Pirson et Maholtra (2007, 2008), Nielsen et Madsen (2009) Transparence financière

Chiffre d’affaires, croissance,

investissements. Bushman et Smith (2003)

Transparence sociale Engagements sociétaux, économiques, environnementaux, RSE, éthique, responsabilités. Carroll (1979) ; Vaccaro et Madsen (2007, 2009) Transparence du marché Origine, conception, composition, traçabilité, qualité, stocks, marges, fixation du prix , coûts de production et de distribution.

Hofstede (2003), Zhu (2004)

Transparence de la relation digitale

Récolte, utilisation et diffusion des données, protection et sécurisation des données, livraison, prises de contact, service client, programmes de fidélité.

Vaccaro (2006), Awad et Krishnan (2006), Tapscott et Ticoll (2003), Vaccaro et Madsen (2009)

L’évolution des technologies et des process, devenus invisibles aux yeux des clients, a impliqué un fort développement des recherches liées à la transparence des data (intégrée dans la transparence relationnelle). La transparence des data permet d’informer les clients à propos des informations collectées par l’entreprise, de la façon dont elles sont utilisées et quels partenaires y ont accès (Awad et Krishnan, 2006 ; Martin et al., 2017).

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La transparence des data est souvent traitée dans le domaine de la privacy (avec par exemple l’essor du marketing de la permission issue de la mise en place de l’opt-in dans un premier temps puis de la gestion des cookies plus récemment). La transparence des pratiques digitales a, quant à elle, été abordée par quelques auteurs en termes de programmes de fidélité ou de politique de livraison par exemple. Mais, elle reste toutefois encore très peu étudiée en ce qui concerne les pratiques digitales (suggestion produit, personnalisation produit, retargeting publicitaire). Or, cette dernière apparaît comme essentielle depuis les progrès liés à l’automatisation du CRM mais aussi depuis que les utilisateurs revendiquent davantage le besoin de comprendre les processus marketing.

La transparence est donc un sujet largement abordé dans la littérature, cela à travers l’étude de différents objets. Le concept est appréhendé sous divers angles d’approche ; toutefois, l’objet d’étude qu’est celui des pratiques digitales n’est, jusque-là, que peu étudié et peu défini. Il apparaît primordial dans un premier temps de déterminer les différentes perspectives et les différentes définitions de la transparence issues de la littérature avant de réaliser une proposition de définition de la transparence des pratiques digitales.