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C’est en octobre 2012 que mon travail doctoral a commencé. Après quelques mois de recherches bibliographiques et de lectures, je lançais en janvier 2013 les premières négociations pour accéder à des terrains. L’essentiel de mon enquête de terrain a été mené au long cours de 2013 à 2016, en parallèle de mes activités institutionnelles, de recherche et d’enseignement, soutenues par un contrat doctoral financé par la Région Nord–Pas-de-Calais et l’Université de Lille1 durant 3 ans, puis par un contrat d’ATER à mi-temps pendant 2 ans. Lorsque j’ai débuté cette recherche j’ignorais tout de la maladie cancéreuse, de son expérience, des modalités de sa prise en charge, des acteurs gravitant autour ou encore des traitements. Afin de découvrir cet univers difficile en douceur j’ai décidé, dans un premier temps, de me tourner vers l’associatif. Je savais en effet, de par mes travaux et expériences précédents, ce terrain plutôt facile d’accès. Je cherchais plus spécifiquement à observer des groupes de parole. Je souhaitais pouvoir « écouter » des personnes ayant été touchées par cette pathologie afin de me familiariser avec cet univers. J’avais déjà participé à des groupes de parole pour mon mémoire de recherche de Master 2 dans le cadre d’une autre pathologie

(la fibromyalgie) et avais trouvé en ces espaces une riche source d’informations. J’appréciais tout particulièrement le fait d’écouter les acteurs s’exprimer sans orienter, par mon intervention ou mes questions, leurs discours. Je me suis ainsi tournée, en premier lieu, vers la Ligue contre le cancer.

2.1 - La Ligue nationale contre le cancer et ses groupes de parole

En France, c’est durant l’entre-deux-guerres que le cancer est érigé en fléau social (Pinell, 1992). C’est à cette période que naît la lutte contre le cancer et qu’est créée le 14 mars 1918, par Justin Godart, avocat et homme politique, la Ligue contre le cancer. Association loi 1901, elle comptait, fin 2013, plus de 650 000 adhérents et 13 000 bénévoles réguliers96.

La Ligue défend l’idée d’une approche globale du cancer. Pour ce faire, elle agit autour de trois missions sociales fondatrices : la recherche, la prévention et l’aide aux malades. Elle représente actuellement le premier financeur indépendant de la recherche contre le cancer en France. Enfin, elle agit aux côtés des personnes malades et des proches, pendant et après la maladie, à travers une offre diverse (aides financières, groupes de parole, ateliers de relaxation, de sophrologie, socio-esthétique, etc.) ainsi qu’en soutenant le travail des professionnels de santé et des acteurs sociaux.

La Ligue contre le cancer occupe aujourd’hui, dans l’espace associatif du cancer en France, une position centrale et dominante tant sur le plan financier qu’en termes de notoriété. Cette domination tient notamment à sa présence sur l’ensemble du territoire français grâce à un maillage associatif très dense de comités départementaux (Knobé, 2009). Elle fédère, en effet, 103 comités départementaux qui ont pour mission de relayer ses actions au plus près des populations. Chaque comité développe des actions de lutte au niveau local ou régional et contribue au financement des équipes et des programmes de recherche.

La Ligue dispose de deux comités départementaux dans le Nord et le Pas-de-Calais. Chacun de ces comités propose des actions diverses à destination des malades et de leurs proches. Tous deux proposent, en particulier, des groupes de parole mensuels. Ces groupes ont été mis en place suite aux premiers États généraux du cancer organisés par La Ligue en 1998 afin de « donner la parole aux malades ». Ils ont permis à l’association de se placer en relais des

96 La Ligue repose sur la générosité du public et sur l’engagement de ses bénévoles : 93% du total de ses ressources proviennent des dons et des cotisations des adhérents. En 2013, elle disposait ainsi de 104,9 M€. Source : site internet de la Ligue : https://www.ligue-cancer.net/article/tout-sur-la-ligue/missions.

besoins des personnes malades et de leurs proches et, par là même, de s’instituer comme l’interlocuteur privilégié des pouvoirs publics en tant que porte-parole des malades (Knobé, 2009).

La Ligue a mis en place ces groupes, « lieux d’écoute et de partage », afin de « sortir de leur isolement les malades, leurs proches et [pour] briser le tabou qui plane encore sur le cancer »97. Les séances sont mensuelles, gratuites et durent entre 1h30 et 2h. Elles se déroulent dans un « cadre convivial et extra-hospitalier » et sont animées par un psychologue clinicien. Le comité du nord en propose deux : un à Lille, l’autre à Tressin. Le comité du Pas- de-Calais en propose, quant à lui, sept : à Arras, Calais, St Omer, Béthune, Saint-Pol-sur- Ternoise, Lens, Bruay-la-Buissière.

Le 16 janvier 2013, j’ai donc envoyé un premier e-mail aux comités de la Ligue contre le cancer de la région présentant ma recherche et demandant l’autorisation d’assister à ces groupes de parole. Rapidement, le responsable d’un comité m’a répondu et m’a informée de sa réponse favorable. Le 06 février, j’ai rencontré au préalable, à l’occasion d’un entretien, le psychologue en charge de certains groupes. Le 18 février, j’observais mon premier groupe de parole. L’accès à ce premier terrain a donc été rapide et facile. Seul un mois s’est écoulé entre ma demande et le début de mes observations.

Au total, deux groupes de parole ont été intégrés entre février 2013 et octobre 2014. Dix-huit réunions ont pu être observées. Ces deux groupes de parole se tenaient dans deux villes distinctes de la région. L’une que nous appellerons Ville A, une commune de 5 000 habitants. Et l’autre, que nous nommerons Ville B, une ville de taille plus importante puisqu’elle compte plus de 40 000 habitants.

Si ces groupes de parole ont constitué mon premier terrain d’observation, ils n’ont toutefois pas été le seul. Il m’est en effet rapidement apparu que la population qui y était présente n’était, pour ainsi dire, pas représentative des malades du cancer. La population recourante présente, en effet, une faible hétérogénéité sociale. J’en traiterai plus spécifique dans mon dernier chapitre (Chapitre 8). Précisons toutefois que la quasi-totalité des recourants était des femmes98 atteintes d’un cancer du sein99 et issues des classes moyennes et supérieures100. Chose que je pressentais initialement et qui, par ailleurs, avait déjà été soulignée dans la

97 Source : site internet de la Ligue : https://www.ligue-cancer.net/article/tout-sur-la-ligue/missions.

98 Au cours des 18 réunions de la Ligue observées nous avons rencontré 33 adhérents. 29 étaient des femmes. 99

Parmi les 29 adhérentes rencontrées, 21 avaient un cancer du sein.

littérature. Sandrine Knobé remarque que « le bénévolat en matière de lutte contre le cancer est […] incontestablement une affaire de femmes ». Dans les associations les plus anciennes, ces femmes sont majoritairement « sans profession ou [ont] mis fin à leur activité professionnelle » et leurs « maris […] exerç[ent] généralement une profession de cadre ». Dans les associations plus récentes, le recrutement est différent puisqu’il s’agissait essentiellement de bénévoles exerçant une activité professionnelle. Elle note toutefois, comme dans le monde associatif en général (Barthélémy, 1994 cité par Knobé, 2009), « une sur- représentation des catégories moyennes salariées, avec des bénévoles exerçant surtout des professions intermédiaires, quelques fois des professions d’employé ou de cadre » (Knobé, 2009). La population présente dans le milieu associatif est donc, la plupart du temps, féminine et issue des catégories moyennes et supérieures. Il a donc été nécessaire d’intégrer d’autres terrains afin d’accéder à une population diversifiée.

2.2 – Un Espace Ressources Cancers (ERC)

Parallèlement, en février 2013, j’ai donc contacté un Espace Ressources Cancers (ERC) de la région. Les ERC sont des lieux spécifiques à la région Nord–Pas-de-Calais cofinancés par le Conseil Régional et l’Agence Régionale de Santé (ARS). Mis en place en 2008, ils sont implantés en ville101 et s’adressent aux malades et à leurs proches. Ils visent, selon l’INCa102

, à : accueillir les personnes atteintes d’un cancer et leurs proches dans un espace convivial pour les informer ; les conseiller, en fonction des besoins repérés et de l’offre existante, sur les aides matérielles, sociales économiques, juridiques, et à la réinsertion professionnelle et sociale ; écouter et permettre d’échanger et enfin accompagner sur le plan psychologique ou social, en fonction des besoins repérés et de l’offre existante : entretiens psychologiques individuels, groupes de parole, soins de socio-esthétique, ateliers d’expression, etc.. À ce jour, on en dénombre 9, mais à terme 15 ERC devraient couvrir le territoire régional (ARS & Région Nord–Pas-de-Calais, 2012).

J’ai contacté cet ERC après avoir eu connaissance d’une action qu’il menait afin de favoriser le repérage précoce des cancers des VADS pour les populations en situation de précarité. Ce projet visait à augmenter les diagnostics précoces pour une localisation souvent diagnostiquée

101 Contrairement aux AIRE-Cancers qui sont implantés à l’hôpital. 102

http://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Ressources-utiles/Lieux-d-accompagnement-et-ou-d-info/ERC- Nord-Pas-de-Calais.

trop tardivement. En effet, 70% des ces cancers sont diagnostiqués à des stades avancés, dits « T3 » ou « T4 » (Launay & al., 2011). Ce projet avait ainsi pour objectif de construire un parcours de prise en charge adapté aux personnes en situation de précarité en s’appuyant sur l’intervention d’une infirmière. Celle-ci organisait des « points santé » dans des structures partenaires (CHRS, centres de distribution des Restos du cœur) et allait à la rencontre des utilisateurs. Elle « repérait » des personnes présentant des signes d’alerte des cancers des VADS103 et leur proposait une consultation ORL et un accompagnement personnalisé tout au long du parcours de prise en charge. Elle aidait dans les démarches, accompagnait aux rendez- vous et assurait un suivi104.

Ce projet a attiré mon attention, car il était l’un des rares proposé par un ERC, à s’adresser à une population vulnérable. J’ai donc contacté la responsable de l’ERC en charge du projet. Je souhaitais, d’une part, bénéficier de l’expérience des personnes responsables et j’y voyais, d’autre part, une éventuelle porte d’entrée pour rencontrer une population différente de celle à laquelle j’avais accès à la Ligue, ce qui m’était indispensable pour appréhender mon objet. J’ai pu rencontrer en entretien la coordinatrice du projet (fin février). Suite à cet entretien, cette dernière m’a conviée à une réunion avec des usagers de l’ERC (mars 2013). Cette responsable m’a également permis de rencontrer l’infirmière en charge des actions de repérage précoce avec laquelle j’ai réalisé un entretien (décembre 2013). Cette infirmière m’a ensuite proposé de l’accompagner sur le terrain durant ses actions de « repérage ». Chose que je n’ai finalement pu faire que deux fois, en décembre 2013 et en juin 2014 à l’occasion de distributions alimentaires organisées par le Secours Populaire. J’aurais souhaité investir davantage ce terrain et accompagner plus souvent cette infirmière, mais entre le premier accompagnement et le second il m’a fallu la relancer à de nombreuses reprises : en janvier, en février et en mai 2014. Suite au second accompagnement, la même situation s’est reproduite. J’ai finalement abandonné face à son manque d’ardeur à me répondre. Ces quelques observations (une réunion avec les utilisateurs, deux accompagnements sur le terrain, deux entretiens professionnels et un entretien patient sur lequel je reviendrai dans la partie consacrée) ont constitué mon second terrain qui, finalement, a avorté précocement sans

103 Par exemple : otalgie, dysphagie, toux chronique, dyspnée, gène pharyngée, adénopathie cervicale et/ou une exposition à des facteurs de risque identifiés (tabac/cannabis, alcool, hygiène bucco-dentaire).

104 En 2010, ce dispositif a permis de « repérer » 99 personnes et de les orienter vers une consultation ORL dans un délai réduit (15 jours). Une lésion cancéreuse a été diagnostiquée chez 12 de ces personnes. Neuf à un stade précoce (T1-T2) et 3 à un stade avancé (T3-T4).

m’avoir fourni autant de données que ce que j’espérais. Celles recueillies furent néanmoins intéressantes.

2.3 - Deux services prenant en charge des cancers du sein et des cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS)

En mars 2013, j’ai été conviée, grâce à l’intervention de ma directrice de thèse, à une réunion, dans un Centre Hospitalier de la région qui portait sur les inégalités sociales d’accès aux soins chez les personnes âgées atteintes d’un cancer. À l’occasion de cette réunion, j’ai rencontré des oncologues. L’un d’entre eux, le Dr P qui prend en charge des patientes atteintes d’un cancer du sein dans la région, a manifesté de l’intérêt pour mon travail. Nous avons pu discuter et le Dr P m’a donné ses coordonnées pour que nous nous rencontrions de nouveau. Nous sommes convenus d’une date pour un entretien en avril 2013. A cette occasion, j’ai exprimé le souhait d’observer ses consultations et le Dr P a répondu favorablement à ma requête. C’est ainsi que j’ai accédé à mon troisième et dernier terrain, celui où je suis finalement restée le plus longtemps et où j’ai recueilli un nombre conséquent de données : un terrain hospitalier. Plus spécifiquement, un établissement rattaché au Centre de Référence Régional en Cancérologie (C2RC) et relevant d’un Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) crée en 2005105. Ce dernier terrain se situe donc dans un des établissements de recours régional et interrégional pour certaines prises en charge complexes des cancers. Afin de préserver l’anonymat des professionnels et des centres hospitaliers qui m’ont accueillie, je ne mentionnerai pas le nom des établissements intégrés. « La préservation de l’anonymat des “informateurs” afin de nepas leur nuire est une règle de l’éthique de la recherche en sciences sociales ». Elle implique néanmoins comme contrepartie l’impossibilité de rendre compte de certains éléments de contexte (Cohen, Sarradon-Eck, Rossi, Schmitz & Legrand, 2015, p. 44).

Ce terrain hospitalier a donc été intégré en observant, dans un premier temps, les consultations du Dr P. Pour ce faire, il m’a été demandé de mettre en place une convention de stage entre mon Université et le Centre Hospitalier. Cela m’a pris un mois. Cette convention

105 L’objectif de ce GCS est de mutualiser les expertises et les ressources afin d’améliorer la prise en charge des patients atteints d’un cancer. Le C2RC développe des axes de recherche et de soins visant « l’excellence médicale ». Il a ainsi pu mettre en place de nombreux projets innovants à destination de l’ensemble des patients du Nord-Pas-de-Calais à travers le développement de plateaux techniques de pointe (chirurgie mini-invasive assistée par robot, radiothérapie intra cérébrale par gamma knife, radiothérapie robotisée par Cyberknife®, tumorothèque et biologie moléculaire, etc.) et la mutualisation des compétences sur des sujets spécialisés (sarcomes, métastases osseuses, métastases cérébrales, oncopédiatrie, oncogériatrie, génétique).

m’a contrainte à réaliser mes premières observations sur une période de deux mois. Il s’agit, en effet, de la limite temporelle pour un stage non rémunéré. Ainsi, mes observations de consultations en sénologie ont été réalisées entre la mi-mai et la mi-juillet 2013. Au total, 93 consultations ont été observées en sénologie.

Ces observations ont été très intéressantes. Elles m’ont permis de découvrir la prise en charge biomédicale du cancer et de « voir » et « d’entendre » une population diversifiée dans le cadre de l’interaction médecin-malade, à des temps divers de la trajectoire de maladie. J’ai pu observer des consultations d’annonce, de mise en place et de suivi de traitement et de surveillance post-thérapeutique. Néanmoins, ces observations ayant pris place dans un service de sénologie, si j’ai diversifié les catégories sociales côtoyées je n’avais toujours pas été en contact avec un public d’hommes. Or, nous l’avons vu, les hommes sont plus touchés que les femmes par les cancers et les inégalités sociales face à la pathologie cancéreuse sont bien plus marquées en ce qui les concerne. J’ai donc souhaité poursuivre ces observations dans d’autres services.

Le Dr P m’a donc mise en relation avec le Dr U qui prend en charge des cancers des VADS. Le Dr U a accepté que j’observe des consultations dans son service, sous couvert, toujours, d’une convention de stage. J’ai pu commencer cette seconde vague d’observation à la mi- janvier 2014. Cinq professionnels m’ont ouvert les portes de leurs consultations et 193 consultations ont été observées. Ces observations ont été complétées par deux entretiens avec des chirurgiens.

Au fur et à mesure de ces observations, des liens de confiance et d’amitié se sont créés avec les acteurs de ce terrain. Le partage d’activités communes contribue en effet « à réduire la distance » et « à instaurer une relation de confiance » qui rend l’enquête possible (Arborio & Fournier, 1999, p. 86). La relation ethnographique est également « une relation interpersonnelle » (Bouillon, 2006, p. 76) et le terrain « un ensemble de relations qui supposent la présence et l’engagement personnel du chercheur » (Agier, 2006, p. 178). Pour qu’une enquête soit possible, il est nécessaire que des « marques d’intérêt » et de « respect mutuels » s’échangent et que « des liens d’amitié et de confiance » se construisent (Bouillon, 2006, p. 91). Loïc Wacquant (1996, p. 64 & 65) remarque par conséquent que « l’amitié est une condition sociale de possibilité de la production de données qui ne soient pas complètement artefactuelles ». Elle « autorise une présence de longue durée sur le terrain,

avec des interactions fréquentes et rapprochées qui permettent à l’enquêteur de “vaincre les résistances et les préventions de tous ordres” » (Arborio & Fournier, 1999, p. 87).

La présence longue sur le terrain favorise ainsi la mise en place de rapports de confiance et permet à certaines résistances de tomber. Comme d’autres, à force de présence et sans que cela ne soit calculé, j’ai pu négocier de nouveau l’accès à d’autres lieux d’observation (Bué, 2010, p. 85). Le préciser me semble important car cela permet de rendre compte « du caractère complexe et construit des enquêtes », en particulier en terrain « sensible » (Bouillon, Frésian & Tallio, 2006, p. 22). Si « les circonstances ne dictent pas l’objet au chercheur », elles « l’autorisent ou non ». Par conséquent, il faut sans cesse s’adapter (Tillard, 2011, p. 40). Le chercheur doit « faire sa place, négocier les termes de sa présence et trouver les termes de l’échange adéquats » (Bouillon, 2006, p. 76). Ce qui, dans le contexte d’un terrain hospitalier est tout particulièrement requis.

Il m’a ainsi été possible de négocier en complément de l’observation des consultations, l’observation de Réunions de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) à partir d’octobre 2014. L’idée d’observer ces réunions est venue suite à mes échanges avec quelques praticiens. Ils m’ont, en effet, permis de mesurer l’importance de celles-ci dans les trajectoires thérapeutiques des soignés. Les RCP réunissent des professionnels de différentes disciplines afin de discuter la situation d’un patient et d’établir la stratégie thérapeutique. Les traitements possibles y sont discutés en fonction des référentiels disponibles, de l’analyse de la balance entre les bénéfices attendus et les risques encourus, ainsi que de l’évaluation de la qualité de vie qui va en résulter. Tous les nouveaux patients atteints d’un cancer et ceux présentant une rechute doivent bénéficier d’un avis en RCP106 (HAS, 2014). Les RCP traitent, en moyenne, 455 dossiers par an, soit 25 à 30 dossiers par réunion (ARS & Région Nord–Pas-de-Calais, 2012).

Au total, j’ai pu observer, entre octobre 2014 et novembre 2015, 31 RCP en cancérologie des VADS au cours desquelles les dossiers de 510 patients ont été traités.

Il faut savoir qu’il existe deux types de RCP : les RCP dites « dossier » et les RCP dites « patient ». Au cours des « RCP-dossier », seul le dossier du patient est étudié et la décision

106 En oncologie, la RCP est obligatoire pour la prise de décision de tous les malades. Néanmoins, pour les situations cliniques faisant l’objet d’une prise en charge standard de validité incontestable, celle-ci peut être mise en route sans attendre une réunion de concertation, mais le dossier devra être ultérieurement présenté pour être entériné et cette prise en charge enregistrée et archivée (HAS, 2014).

de traitement est prise par les praticiens sur la base de ce dossier. Le patient n’est pas présent. Les « RCP-patient » sont différentes et se déroulent en deux temps. Dans un premier, comme