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Un principe d’inspiration, de caractère non juridique

Conclusion du chapitre préliminaire

Chapitre 2 : Fraternité : principe premier fondant la prise en compte

B. Un principe d’inspiration, de caractère non juridique

146. Le Vocabulaire juridique Cornu441 précise trois définitions distinctes du

principe442 :

1. Règle ou norme générale, de caractère non juridique d’où peuvent être déduites des normes juridiques. (…)

439 P. Morvan, Le principe de droit privé, op. cit., no 2 p. 3.

440 A.-A. Al-Sanhoury, Le standard juridique, in Mélanges François Gény, Vol. 2, éd. Sirey, Paris,

1935, spéc. p. 146, cité in M. Mekki, L'intérêt général et le contrat, Contribution à une étude de la

hiérarchie des intérêts en droit privé, LGDJ, Paris, 2004, no 1226, p. 771. V. égal. sur ce point F.

Terré, Introduction générale au droit, précis Dalloz, 9e éd., 2012, n° 340, p. 277 : « Le mot principe a

plusieurs sens dans l’ordre juridique, les uns et les autres se rattachant plus ou moins étroitement à une idée de généralité ».

441 G. Cornu (sous la dir. de), Vocabulaire juridique, op. cit., Vo Principe.

442 V. égal. M. Kamto, Les nouveaux principes du droit international de l’environnement, Rev. jur.

2. Règle juridique établie par un texte en termes assez généraux destinée à inspirer diverses applications et s’imposant avec une autorité supérieure. (...)

3. Maxime générale juridiquement obligatoire bien que non écrite dans un texte législatif. Ex. fraus omnia corrumpit. (…)

À quelle catégorie de principes, celui de fraternité peut-il être rattaché ? 147. Si la troisième de ces définitions peut être exclue, la question principale qui se pose est, en d’autres termes, celle de savoir si la fraternité constitue un principe « juridique », donc directement applicable par le juge, ou un principe d’inspiration de normes juridiques.

L’essence de la fraternité étant essentiellement un principe éthico-politique, ou d’aspiration philosophique443, et la dimension insaisissable et vague que celle-ci lui

accole, empêchent celle-ci, malgré sa définition, d’être un principe juridique directement applicable. C’est ce caractère qui est la différence spécifique du principe de fraternité parmi les autres espèces de principes.

Le caractère distinctif du principe de fraternité permettra de la faire relever de l’espèce des principes démonstratifs (1), et de la différencier des principes-normes notamment du principe général de droit (2). L’examen de son mode de fonctionnement en droit public permettra enfin de vérifier qu’elle a effectivement joué comme principe démonstratif (3).

1. Principe démonstratif

148. La fraternité serait une proposition descriptive, un principe-source (a), et plus particulièrement une affirmation première tenant place d’axiome (b).

a. Proposition descriptive, principe-source

149. La distinction entre les deux premières définitions mises en avant par le Vocabulaire juridique Cornu correspondrait à celle avancée entre principe démonstratif et normatif444, ou encore entre d’un côté les principe-proposition

descriptive ou principe-source et, de l’autre, le principe-règle.

443 V. supra no 60.

444 V. sur ce point la trilogie de Lalande chez P. Morvan, Le principe de droit privé, op. cit., n°3, p. 4,

cité in A.-S. Courdier-Cuisinier, Le solidarisme contractuel, op. cit., p. 249, note 984. V. en général sur l’exposé du principe démonstratif et son application au solidarisme contractuel, A.-S. Courdier- Cuisinier, eod. loc., pp. 249 s., nos 382 s.

150. M. Jeammeaud indique par exemple, que dans « le système français, (…) il conviendrait de distinguer, au minimum, les principes juridiques qui sont des règles occupant une place privilégiée dans l’ordre juridique et les principes, extérieurs à ce système, qui sont des propositions descriptives (et non pas normatives) au moyen desquelles les juristes dogmaticiens rendent compte de manière synthétique du contenu et des grandes tendances de l’ensemble de normes composant le droit positif »445. M. Collart Dutilleul établit lui la distinction entre principe-source et

principe-règle : « On peut concevoir un ‘‘principe’’ comme une norme-guide, abstraite et de portée générale, qui, pour assurer le respect d’une ‘‘valeur’’ socialement admise, vise à orienter des décisions et des comportements ainsi qu’à les apprécier. Le principe ainsi entendu est destiné à être juridiquement mis en œuvre de manière indirecte (principe-source), lorsqu’il fédère des règles concrètes convergentes »446. Il existe aussi une modalité de principe « susceptible de fonder

directement (principe-règle) des solutions dans des situations non régies par des textes spécifiques »447.

151. La différence spécifique du principe de fraternité, à savoir son caractère non directement applicable juridiquement, le fait correspondre aux définitions des principes-propositions descriptives, et des principes-sources448. Il n’est pas une règle

juridique occupant une place de choix, une place privilégiée, mais il assure le respect d’une valeur, oriente et apprécie les comportements à l’aune de cette valeur, et opère donc juridiquement de manière indirecte.

À défaut d’être un principe-norme juridique, il est donc une « norme générale de caractère non juridique » qui peut inspirer d’autres normes juridiques, pour revenir à la première des définitions du Vocabulaire Juridique Cornu. Elle est donc un

445 A. Jeammaud, Les principes dans le droit français du travail, Dr. Soc. 1982, no 9-10, p. 618, spéc.

no 1.

446 F. Collart Dutilleul, Quelle place pour le contrat dans l’ordonnancement juridique ?, in La

nouvelle crise du contrat, C. Jamin et D. Mazeaud (sous la dir. de), Dalloz, Paris, 2003, p. 225, spéc. p. 238.

447 Ibid.

448 La fraternité constituerait aussi un des « ‘‘principes directeurs’’, ‘‘cadre’’ ou ‘‘valeurs

supérieures’’, selon les auteurs » (C. Thibierge-Guelfucci, Libres propos sur la transformation du

droit des contrats, RTD. civ. 1997, p. 357, note 16). Mme Thibierge-Guelfucci relève respectivement

les expressions de M Ghestin (La formation du contrat, LGDJ, nº 156 et s. et not. n° 172 et s.), de M. Aubert (L'acte juridique, éd. Colin, n° 128) et de MM. Terré, Simler et Lequette (Droit des

principe démonstratif non applicable directement par le juge, qui participe de l’activité de « rationalisation et de systématisation du droit »449. D’ailleurs en appliquant sa distinction entre principe-source et principe-règle au principe de fraternité, M. Collart Dutilleul confirme cette qualification et se demande, en droit de la concurrence : « ne pourrait-on concevoir cette litanie d’abus de pouvoir comme une manifestation ponctuelle d’une exigence plus générale et tout autant républicaine de fraternité ? »450 Il lui reconnaît ensuite la place, à part entière, de principe premier,

à l’instar de la liberté et de l’égalité ; « que signifient, appliquées à l’ensemble des contrats, la liberté, l’égalité et la fraternité, une fois qu’on a cessé de privilégier la première, de ne protéger la deuxième qu’ici ou là et de faire fi de la troisième ? Ces trois ‘‘valeurs’’ sont déjà des grilles de lecture, et dans cet ordre, des trois alinéas de l’article 1134 du code civil comme de nombreuses autres dispositions contractuelles. À cet égard, elles fondent des principes-sources »451.

152. Une remarque s’impose pourtant à cet égard. Il ne faut pas croire que la distinction entre principe premier extérieur au droit, et principe juridique directement applicable est absolue452. Les principes extérieurs peuvent certes être introduits, si

une volonté politique existe dans ce sens, et fonder des principes-règles directement applicables453. Ce peut être le cas pour la fraternité si le législateur, le constituant, plus probablement que le juge, décident de définir plus clairement le principe de fraternité et de le consacrer au nombre des principes directement applicables en droit. Les principes-sources de liberté, d’égalité ou de fraternité « sont tout autant des guides disponibles pour fonder les solutions nouvelles qu’appelle l’évolution des

449 P. Morvan, Le principe de droit privé, op. cit., 1999, nos 31-36, pp. 35-37.

450 F. Collart Dutilleul, Quelle place pour le contrat dans l’ordonnancement juridique ?, op. cit., spéc.

p. 239.

451 Ibid.

452 En ce sens, A. Jeammaud, Les principes dans le droit français du travail, op. cit., spéc. no 1 :

« Pour essentielle qu’elle soit, cette distinction ne procure cependant pas tous les éclaircissement liminaires souhaitables. D’abord parce qu’elle est relative : un principe-description, forgé par des dogmaticiens pour rendre compte d’éléments épars ou d’une tendance remarquable du droit positif à un moment donné de son existence, peut fort bien être repris par une autorité appelée à créer ou consacrer des règles de droit, qui le transformera ainsi en principe-norme et en élément explicite du système juridique ».

453 Sur ce point V. M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public français…, op. cit., p. 624 : il

s’agit de savoir si « la notion en cause – en l’occurrence la notion de fraternité – d’une part constitue en droit positif un principe juridique, c’est-à-dire un principe immédiatement applicable par le juge, d’autre part – dans l’hypothèse où ce n’est pas le cas – peut éventuellement devenir ou être érigée au rang d’un tel principe ».

pratiques contractuelles, à la manière de principes-règles »454.

Toujours est-il qu’en l’état actuel, la fraternité correspond à un principe démonstratif. Mais à quel type particulier de principe démonstratif appartient-elle ?

b. Axiome

153. À son tour, le principe démonstratif comporte deux acceptions, d’une part une affirmation première ayant force de vérité observable dans la nature, d’autre part une construction intellectuelle et logique. Il désigne donc d’un côté, des « normes présentant un caractère d’axiomes, de propositions universelles et premières, dont se déduisent théoriquement toutes les autres »455. Or l’axiome « n’a pas besoin d’être

démontré »456, c’est un principe évident, une forme de vérité absolue inscrite dans la

nature. D’un autre côté, il désigne « des règles issues d’une élaboration méthodique et réfléchie disposées dans un ordre systématique »457, qui correspond à la double

dynamique en sens opposés décrite par François Gény : « il faut, d’abord, de la loi, ou des règles de droit qui s’en dégagent, remonter au principe supérieur, et de celui-ci ensuite déduire les conséquences »458. Cependant, cette double opération d’induction

et de déduction conduit ici à l’élaboration non d’un principe général, mais d’un principe démonstratif.

La question se posant donc à ce stade est la suivante : la fraternité peut-elle être considérée comme l’une de ces affirmations premières inscrites dans la nature ? Ou au contraire est-elle un principe induit par une élaboration logique des règles de droit positif et permettant d’en déduire d’autres conséquences ?

L’exposé conceptuel de la notion, son essence, nous permettent d’affirmer qu’elle n’est pas une construction logique, mais qu’elle devrait être conçue comme l’une de ces affirmations premières axiomatiques, de ces fondements dont se déduirait une série d’autres normes ou principes au nombre desquels, par exemple, la

454 F. Collart Dutilleul, Quelle place pour le contrat dans l’ordonnancement juridique in La nouvelle

crise du contrat, op. cit., p. 225, spéc. p. 239.

455 P. Morvan, op. cit., p. 13, cité in A.-S. Courdier-Cuisinier, Le solidarisme contractuel, op. cit., p.

251.

456 A.-S. Courdier-Cuisinier, Le solidarisme contractuel, op. cit., p. 251, et note 996.

457 P. Morvan, op. cit., p. 17, cité in A.-S. Courdier-Cuisinier, Le solidarisme contractuel, op. cit., p.

252.

458 F. Gény, Méthodes d’interprétation et sources en droit privé positif. Essai critique, t.1, LGDJ,

solidarité, le refus de l’exclusion ou, en droit du contrat, la prise en compte de l’intérêt du cocontractant.

Le caractère distinctif de la fraternité, son caractère non directement applicable au droit, permet de la distinguer donc des principes-règles, notamment du principe général de droit.

2. Distinction avec le principe général de droit

154. Le caractère distinctif du principe de fraternité le différencie du principe général de droit.

En effet, Les principes généraux du droit459 sont des règles générales non écrites, dont la loi renferme des applications, et qui peuvent être dégagés par un raisonnement inductif460 à partir de ces applications, permettant dans un deuxième

temps, par un raisonnement déductif, d’en proposer de nouvelles461. Ils sont en suspension au-dessus de la loi et peuvent être dégagés par la Raison au terme d’un raisonnement inductif; il « arrive tout d’abord que les principes opèrent secundum

legem : ils coexistent avec des textes de loi ou sont induits de ceux-ci »462. Mais ils

peuvent aussi intervenir contra legem ce qui montre qu’ils demeurent une source du droit distincte de la loi463.

459 V. sur cette notion M. Mekki, L'intérêt général et le contrat, Contribution à une étude de la

hiérarchie des intérêts en droit privé, op. cit., no 1226, pp. 771-772 : le principe général répond à un

« souci de rationalité qu’il recouvre en réunissant de manière cohérente et constructive un ensemble indéfini d’applications ». Pour cet auteur l’induction ne suffit pas pour mettre en évidence l’existence d’un principe général, « la consécration d’un principe général est une œuvre axiologique. Il est l’expression formelle de l’esprit d’un système et d’un ensemble de valeurs. Il est la traduction juridique d’un authentique ‘‘droit naturel’’». V. égal. A. Jeammaud, Les principes dans le droit

français du travail, op. cit., spéc. no 10 p. 623.

460 V. sur ce point J. Ghestin, G. Goubeaux, M. Fabre-Magnan, Traité de droit civil. Introduction

générale, LGDJ, Paris, 4e éd., 1994, spéc. no 492 p. 461 : « En fait, ce qui caractérise essentiellement

les principes généraux du droit c’est leur application par la jurisprudence. Mais celle-ci ne les crée pas. Elle les extrait de la loi ou de la coutume savante, avec l’aide de la doctrine ». Les auteurs y mettent aussi « les décisions qui visent une maxime traditionnelle de portée générale » (eod. loc. no

491, p. 461). V. égal. A. Jeammaud, Les principes dans le droit français du travail, op. cit., spéc. no

11 p. 623 : « Démarche classique, consistant à induire une solution plus générale du rapprochement de dispositions particulières concordantes, afin d’appliquer le principe ainsi dégagé à une hypothèse échappant à toute prévision légale ».

461 J. Ortscheidt, La réparation du dommage dans l'arbitrage commercial international, Dalloz, Paris, 2001,

no 202, p. 99 : « en découlent des solutions positives elles-mêmes exprimées sous forme de règles » n 203 p.

101.

462 F. Terré, Introduction générale au droit, op. cit., no 344, p. 281.

463 V. cependant, J. Ghestin, G. Goubeaux, M. Fabre-Magnan, Traité de droit civil. Introduction

générale, op. cit., spéc. no 494 p. 462 : « L’apport particulier de la jurisprudence est beaucoup plus

important lorsque celle-ci, raisonnant par ‘‘induction amplifiante’’, dégage le principe, sous-entendu, qui inspire une série de règles écrites plus ou moins disparates (…) En fait, le plus souvent, la jurisprudence se sert de la systématisation qui a été opérée par la doctrine, et des idées maîtresses

Or la fraternité n’est pas un principe dégagé par une construction logique, mais fait œuvre d’axiome. Ensuite les principes généraux du droit sont directement invoqués et appliqués par le juge464, en droit privé comme dans les autres branches du droit. Ils constituent donc des principes normatifs, des règles de droit à part entière.

Le principe de fraternité n’est donc pas un principe général du droit.

Le mode de fonctionnement de la fraternité en droit public nous accorde l’ultime vérification de sa nature de principe démonstratif.

3. Vérification par le mode de fonctionnement du principe en droit public

155. M. Borgetto opère aussi une distinction entre le principe général juridique sanctionné et directement applicable par le juge, et le principe général-affirmation première, distinction qui renvoie à celle mise en avant par les deux premières définitions données du « principe » par le Vocabulaire Juridique Cornu.

Il montre, en revenant dans un essai de systématisation465 sur la manière dont a été employée la fraternité en droit public, qu’elle a pu être conçue de deux façons différentes : un principe d’inspiration ou une catégorie de rattachement, ce qu’il désigne respectivement par ‘‘fraternité-principe’’ et ‘‘fraternité-catégorie’’466. Dans les deux cas, elle n’est pas un principe général juridique directement applicable par le juge. Elle n’est donc pas une règle de droit, mais un support ou un fondement d’inspiration pour ces règles.

La fraternité-principe, d’une part, indique une conception où la fraternité est considérée comme le principe de base, l’explication première – ou le fondement premier médiat ou immédiat – rendant compte d’une politique juridique, notamment qu’elle a dégagées de la législation. Mais si l’origine intellectuelle de ces principes est ainsi fréquemment doctrinale, c’est seulement leur consécration par la jurisprudence qui en fait une source du droit positif. La force obligatoire de ces principes se rattache encore à la loi ».

464 Par exemple, le plus important entre eux demeurant le « principe d’équité qui défend de s’enrichir

aux dépens d’autrui », Req. 15 juin 1892, Dr et patr. 1892, I, 596 ; S. 1993, I, p. 281, note Labbé ; Les

grands arrêts de la jurisprudence civile, par H. Capitant, F. Terré et Y. Lequette, t. 2, éd. Dalloz,

Paris, 12e éd., 2008, n° 239.

465 M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public français…, op. cit., p. 124.

466 D’ailleurs, « Philippe Ardant [est] parmi ceux qui reconnaissent dans la notion de fraternité une de

ces ‘‘idées-forces’’ ou ‘‘notions de synthèse’’ capables de rendre compte d’un certain nombre de règles ou situations juridiques données » (M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public

celle de la solidarité en droit public467. À défaut d’être le fondement direct de solutions, elle a fonctionné comme « notion de synthèse (…), principe général guidant déjà ou devant guider à l’avenir le législateur (…) base ou [affirmation] première sur laquelle reposent ou de laquelle découlent [certains] principes [dont] la notion revêt ici valeur explicative »468.

La fraternité-catégorie, d’autre part, est entendue par M. Borgetto dans le sens de point de rattachement entre différentes idées, de notion servant à la classification des situations y reliées. La catégorie, pour lui, n’est pas entendue comme catégorie juridique469, étant établi que les situations régies ou qui pourraient

potentiellement l’être par la fraternité sont très diverses – comme nous avons pu le voir dans le titre premier –, et n’ont pas une nature et un régime suffisamment défini ou commun. C’est simplement une fonction de classement ou de rangement qui est mise en avant par l’idée de catégorie470, indépendamment de son action juridique. Ce

mode de fonctionnement de la fraternité retenu par certains auteurs, est non sans rappeler la distinction opérée par le Doyen Vedel entre « notions conceptuelles » et « notions fonctionnelles »471, même si cette distinction est à relativiser. La fraternité

467 Dans cet ordre d’idée, peu importe que la fraternité soit considérée comme ayant inspiré

directement des dispositions juridiques, ou par le biais de principes intermédiaires tels la solidarité par exemple ; « à défaut de constituer le fondement direct de ce droit ou de ce devoir (de solidarité), la fraternité constitue à tout le moins ‘‘la base générale’’ ou l’idée qui est à l’origine soit de leur conceptualisation, soit de leur proclamation » (M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public

français…, op. cit., p. 126).

468 M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public français…, op. cit., p. 142. Dans ce sens la

notion est aussi conçue comme « principe général » non au sens d’un principe juridique susceptible d’être sanctionné à l’instar de toute règle juridique, et dont l’application directe s’impose au juge ; « par principe général, il s’agira d’entendre l’une de ces affirmations premières dont ‘‘on tire un

certain nombre de conséquences’’ (…) l’une de ces idées-forces qui sont à la base de l’organisation

sociale et qui, en tant que leur fonction ou leur finalité essentielle est surtout d’inspirer le législateur voire le constituant, apparaissent davantage comme des principes d’action politique que comme des principes juridiques ayant force contraignante et obligatoire » (M. Borgetto, La notion de fraternité

en droit public français…, op. cit., p. 136).

469 Cette dernière évoque en effet un rassemblement « ‘‘sous une rubrique distincte (…) des notions

qui régissent immédiatement des situations nettement définies quant à leur nature et quant aux effets juridiques inclus dans ces situations’’ » (R. Latoumerie, Essai sur les méthodes juridictionnelles, p.

197, cité in M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public français…, op. cit., p. 127). V. aussi la définition donnée par M. Waline, Empirisme et conceptualisme dans la méthode juridique : faut-il

tuer les catégories ?, in Mélanges Jean Dabin, éd. Sirey E. Bruylant, Paris Bruxelles, 1963, t. 1, p. 365.

470 V. égal. M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public français…, op. cit., p. 128 : « La

fraternité constitue (…) une idée-catégorie, c’est-à-dire une idée qui à elle seule résume et rend compte, en tant qu’idée, de toute une série de droits particuliers et qui, par là-même fonctionne (…) comme catégorie ». Celle-ci est une « notion de synthèse générale [de part] sa capacité effective à rendre compte de certaines règles, principes ou notions donnés » (M. Borgetto, eod. loc., p. 613), notamment ceux d’entraide, de solidarité, de respect d’autrui ou de rejet de l’exclusion, tous dégagés ou déduits du contenu conceptuel de la notion de fraternité tel qu’exposé dans le titre premier.

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