• Aucun résultat trouvé

Un ordre régional sécuritaire et des frontières militarisées

LOGIQUE DE MOBILITÉ ?

2.1 Un ordre régional sécuritaire et des frontières militarisées

Comme le dit Gildas Simon, « plus largement, l’espace Schengen vise à la mise en place d’un ordre régional sécuritaire qui exprime fortement la volonté de séparer, d’isoler, dans une sorte de logique impériale, l’espace migratoire commun, le “dedans”, du “dehors”, c’est-à-dire des “pays tiers” » (Simon, 2008 : 225). L’établissement d’une liste commune des États soumis à visa témoigne de la création d’une « police des ressortissants issus des pays tiers et pauvres » (ibid.).

Cet ordre régional sécuritaire concerne également une militarisation des frontières extérieures. Le cas espagnol est en ce sens particulièrement illustratif. Nous avons déjà évoqué le système de surveillance mis en place sur la rive nord du détroit de Gibraltar en 1998 (le SIVE, système intégré de surveillance extérieure) et la construction de barrières métalliques autour de Ceuta (1997) et Melilla (1998) (Blanchard et Wender, 2007 : 212). Depuis 2002, le SIVE s’appuie sur une technologie particulièrement développée : radars, caméras thermiques et à infrarouges. Le dispositif met également en œuvre des moyens d’intervention maritimes et aériens uniques en Europe (Simon, 2008 : 226). D’abord entré en fonction à Algésiras, ville située à l’entrée du détroit de Gibraltar, le SIVE s’applique aujourd’hui sur le long des côtes espagnoles, les îles Canaries incluses (Amnesty International, 2005). &ŽŶĐƚŝŽŶŶĞŵĞŶƚĚƵ^/s  ͨŶ ƚĞƌŵĞƐ Ě͛ĠĐŽŶŽŵŝĞ ƉŽůŝƚŝƋƵĞ͕ ůĞ ^/s ĞƐƚ ƵŶ ĚŝƐƉŽƐŝƚŝĨ ĚĞ ƐƵƌǀĞŝůůĂŶĐĞ ƉŽůŝĐŝğƌĞ ĚŽŶƚ ůĂ ůŽŐŝƋƵĞ ĞƐƚ ƉŽƵƐƐĠĞ ă ƐŽŶ ĐŽŵďůĞ ƉƵŝƐƋƵ͛ŝů Ɛ͛ĂŐŝƚ ĚĞ ƋƵĂĚƌŝůůĞƌ ůĞ ƚĞƌƌŝƚŽŝƌĞ ůĞ ƉůƵƐ ĨŝŶĞŵĞŶƚ ƉŽƐƐŝďůĞ Ğƚ ĚĞ ĐŽŶƚƌƀůĞƌ ĂƵ ƉůƵƐ ƉƌğƐ ůĞƐ ĐŽƌƉƐ Ğƚ ůĞƵƌƐ ŵŽƵǀĞŵĞŶƚƐ ĂƵdž ĨƌŽŶƚŝğƌĞƐ Ͳůă Žƶ ůĂ ƉƵŝƐƐĂŶĐĞ ĚĞ ů͛ƚĂƚ ĞƐƚ ĚĞ ĨĂŝƚ ůĂ ƉůƵƐ ƐĠƌŝĞƵƐĞŵĞŶƚ ŵŝƐĞ ĂƵ ĚĠĨŝ͘  ŽŶĐƌğƚĞŵĞŶƚ͕ ůĞ ƐLJƐƚğŵĞĚĞďůŝŶĚĂŐĞĠůĞĐƚƌŽŶŝƋƵĞĚĞƐĨƌŽŶƚŝğƌĞƐĞƐƉĂŐŶŽůĞƐƐ͛ĂƌƚŝĐƵůĞĞŶƚƌŽŝƐƚĞŵƉƐ͘>ĞĚŝƐƉŽƐŝƚŝĨĂƉŽƵƌďĂƐĞĚĞƐƐƚĂƚŝŽŶƐ ĚĞ ĚĠƚĞĐƚŝŽŶ ƋƵŝ ĐŚĂĐƵŶĞ ƉĞƌŵĞƚƚĞŶƚ ĚĞ ĐŽŶƚƌƀůĞƌ ƵŶ ƉĠƌŝŵğƚƌĞ ĚĞ ϮϬ Ŭŵ͘ ŚĂƋƵĞ ƐƚĂƚŝŽŶ ĞƐƚ ĠƋƵŝƉĠĞ Ě͛ƵŶ ƌĂĚĂƌ͕ ĚĞ ĐĂŵĠƌĂƐ ƚŚĞƌŵŝƋƵĞƐ Ğƚ ă ŝŶĨƌĂƌŽƵŐĞ͘ ĞƉƵŝƐ ůĂ ĨŝŶ ĚĞ ů͛ĂŶŶĠĞ ϮϬϬϯ͕ ůĂ 'ĂƌĚĞ ŝǀŝůĞ Ă ĐŽŵƉůĠƚĠ ĐĞƚ ĠƋƵŝƉĞŵĞŶƚ ƉĂƌ ĚĞƐ ĐĂƉƚĞƵƌƐƐĞŶƐŽƌŝĞůƐƉŽƵǀĂŶƚĚĠƚĞĐƚĞƌĚĞƐďĂƚƚĞŵĞŶƚƐĚĞĐƈƵƌăĚŝƐƚĂŶĐĞ͘hŶĞĂŶƚĞŶŶĞƐĂƚĞůůŝƚĞĞŶǀŽŝĞĞŶƚĞŵƉƐƌĠĞůůĞƐ

ŝŶĨŽƌŵĂƚŝŽŶƐăƵŶĐĞŶƚƌĞĚĞĐŽŶƚƌƀůĞĚĞůĂ'ĂƌĚĞŝǀŝůĞ͘ĂŶƐƵŶĚĞƵdžŝğŵĞƚĞŵƉƐ͕ĐĞĐĞŶƚƌĞƚƌĂŝƚĞů͛ŝŶĨŽƌŵĂƚŝŽŶƋƵ͛ŝůƌĞĕŽŝƚ͘ >ĞƐŝŵĂŐĞƐƉĞƌŵĞƚƚĞŶƚĚĞƐĂǀŽŝƌĚĞƋƵĞůƚLJƉĞĚ͛ĞŵďĂƌĐĂƚŝŽŶŝůƐ͛ĂŐŝƚ͕ĐŽŵďŝĞŶĚĞƉĞƌƐŽŶŶĞƐƐĞƚƌŽƵǀĞŶƚăďŽƌĚ͕ĞƚĐ͘ĞƐ ůŽŐŝĐŝĞůƐ ĐĂůĐƵůĞŶƚ ůĞƐ ƚƌĂũĞĐƚŽŝƌĞƐ ƉŽƐƐŝďůĞƐ͘ ^Ƶƌ ůĂ ďĂƐĞ ĚĞ ĐĞƐ ĚŽŶŶĠĞƐ͕ ůĞ ĐĞŶƚƌĞ ĚĞ ĐŽŶƚƌƀůĞ ƉĞƵƚ ĚĠĐŝĚĞƌ ĚĞ ů͛ĞŶǀŽŝ ĚĞ ƚƌŽƵƉĞƐĚ͛ŝŶƚĞƌǀĞŶƚŝŽŶŵŽďŝůĞƐͲŚĠůŝĐŽƉƚğƌĞƐ͕ďĂƚĞĂƵdž͕ĂƵƚŽŵŽďŝůĞƐ͕ĞƚĐ͘ĞƐĚĞƌŶŝğƌĞƐŽŶƚƉŽƵƌŵŝƐƐŝŽŶĚ͛ŝŶƚĞƌĐĞƉƚĞƌůĞƐ ƉĂƚĞƌĂƐϱϬ͘>ŽƌƐƋƵĞĐĞůůĞƐͲĐŝƐŽŶƚĞŶĚŝĨĨŝĐƵůƚĠ͕ĞůůĞƐƉƌŽĐğĚĞŶƚăůĞƵƌƐĂƵǀĞƚĂŐĞ͛͘ĞƐƚĐĞƚĂƐƉĞĐƚĚƵƉƌŽŐƌĂŵŵĞ^͘/͘s͘͘ƋƵĞ ŵĞƚĂƵũŽƵƌĚ͛ŚƵŝĞŶĂǀĂŶƚůĞŐŽƵǀĞƌŶĞŵĞŶƚĞƐƉĂŐŶŽůƉŽƵƌĞŶũƵƐƚŝĨŝĞƌů͛ĞdžŝƐƚĞŶĐĞͩ͘  ǁǁǁ͘ŵŝŐƌĞƵƌŽƉ͘ŽƌŐϱϭ

Une autre mesure de contrôle des frontières est la création en 2004 de Frontex, l’agence européenne des frontières chargée de la coordination de patrouilles maritimes en Méditerranée et dans l’Atlantique. Le dispositif, des « gardes-côtes euro-africains », est opérationnel depuis 2005 et déplace continuellement la surveillance vers des espaces de plus en plus éloignés. Nous y reviendrons.

2.1.1 Le détroit de Gibraltar, laboratoire d’application des conventions de Schengen

Dans les années 1990, le détroit de Gibraltar, marge naturelle de l’Europe, s’affirme comme le point central de l’immigration irrégulière vers l’Espagne. Suite à l’instauration des visas pour les Marocains en 1991, le nombre de pateras augmente nettement et un premier centre pour migrants irréguliers ouvre à Tarifa, ville située dans la province de Cadix en Andalousie (Driessen, 1996, in Carling, 2007 : 22). Aussi, à cette période on note une diversification des flux d’arrivées, avec un nombre croissant de migrants Sub-sahariens (Carling, 2007 : 22). Une première tragédie de l’immigration clandestine a lieu en 1998, lorsque plusieurs migrants marocains meurent quand leur embarcation s’échoue près de Tarifa.

Avec seulement 14 kilomètres qui séparent les deux continents, le détroit de Gibraltar se présente comme un point de passage attractif. Néanmoins, depuis l’installation des dispositifs SIVE, on le rappelle, en 2002, les routes se sont diversifiées des deux côtés du détroit (mer atlantique ou méditerranéenne), avec des passages de plus en plus longs : 1) départs depuis la côte entre Tanger et Rabat vers la province de Cadiz, 2) départs depuis la côte entre Tétouan et Oued Laou vers la province de Malaga, et 3) départs près de Melilla  >Ğ ŵŽƚ ƉĂƚĞƌĂƐĚĠƐŝŐŶĞ ĞŶ ĞƐƉĂŐŶŽů ůĞƐ ĞŵďĂƌĐĂƚŝŽŶƐ ĚĞ ĨŽƌƚƵŶĞ ;ďĂƌƋƵĞƐ͕ ĐŽŶƐƚƌƵĐƚŝŽŶƐ ă ďĂƐĞ ĚĞ ƉŶĞƵŵĂƚŝƋƵĞƐ͕njŽĚŝĂĐƐ͕ĞƚĐ͘ͿƋƵŝƐĞƌǀĞŶƚĂƵdžŵŝŐƌĂŶƚƐăƚƌĂǀĞƌƐĞƌůĞƐŵĞƌƐăĚĞƐƚŝŶĂƚŝŽŶĚĞů͛ƵƌŽƉĞ͘  DŝŐƌĞƵƌŽƉ ĞƐƚ ƵŶ ƌĠƐĞĂƵ ĞƵƌŽƉĠĞŶ ĚĞ ŵŝůŝƚĂŶƚƐ Ğƚ ĐŚĞƌĐŚĞƵƌƐ ĚŽŶƚ ů͛ŽďũĞĐƚŝĨ ĞƐƚ ĚĞ ĨĂŝƌĞ ĐŽŶŶĂŠƚƌĞ ůĂ ŐĠŶĠƌĂůŝƐĂƚŝŽŶ ĚĞ ů͛ĞŶĨĞƌŵĞŵĞŶƚ ĚĞƐ ĠƚƌĂŶŐĞƌƐ ĚĠƉŽƵƌǀƵƐ ĚĞ ƚŝƚƌĞ ĚĞ ƐĠũŽƵƌ Ğƚ ůĂ ŵƵůƚŝƉůŝĐĂƚŝŽŶ ĚĞƐ ĐĂŵƉƐ͕ ĚŝƐƉŽƐŝƚŝĨ ĂƵ ĐƈƵƌ ĚĞ ůĂ ƉŽůŝƚŝƋƵĞ ŵŝŐƌĂƚŽŝƌĞ ĚĞ ů͛hŶŝŽŶ ĞƵƌŽƉĠĞŶŶĞ͘ >Ğ ƌĠƐĞĂƵ Ă ƉƵďůŝĠ ůĞ ůŝǀƌĞ 'ƵĞƌƌĞ ĂƵdž ŵŝŐƌĂŶƚƐ͘>ĞůŝǀƌĞŶŽŝƌĚĞĞƵƚĂĞƚDĞůŝůůĂĞŶϮϬϬϳ͘>͛ĂƌƚŝĐůĞĐŝƚĠƉůƵƐŚĂƵƚĂĠƚĠŵŝƐĞŶůŝŐŶĞƐƵƌůĞƐŝƚĞĚƵƌĠƐĞĂƵ ůĞϭϲƐĞƉƚĞŵďƌĞϮϬϬϰĞƚĂĠƚĠĐŽŶƐƵůƚĠůĞϮϳŽĐƚŽďƌĞϮϬϬϴ͘

vers les provinces de Grenade et celle d’Almeria. Cette troisième catégorie correspond à la traversée la plus longue. En 2004, ces deux provinces ont accueilli presque trois quarts des embarcations arrêtées (Secretaría de Estado de Inmigración y Emigración, 2005, in Carling, 2007 : 22). En 2004 on note également, pour la première fois, des embarcations sur les côtes des îles Baléares (Arab, 2007 : 93) 52.

Suite aux contrôles des frontières de plus en plus sophistiqués, ce sont alors les

manières de migrer qui ont changé dans le détroit. Comme le dit Chadia Arab (2007), « le

migrant actuel doit se doter d’un "savoir-migrer" et élaborer des stratégies migratoires pour contourner la forteresse Schengen qui se trouve aux portes du Maroc. Ainsi, le migrant fait souvent appel à la clandestinité et brûle les frontières en pratiquant le hrague53 pour atteindre ses objectifs. Ces passages signifient alors une transgression possible d’une condition économique sociale et d’un interdit territorial » (Arab, 2007a : 83). Dispositifs politiques de fermeture certes, mais aussi des capacités des migrants à les contourner donc. Le détroit de Gibraltar est alors ce que Guillaume Le Bodec (2007) décrit comme « l’espace modèle de la “frontérisation” de l’espace Schengen, mais aussi le symbole de son inefficacité » (Le Bodec, 2007) : si les passages du détroit ont diminué, d’autres se sont développés.

Citons également un article paru dans le journal El País en novembre 2008, selon lequel on note cette année une augmentation des pateras arrivées sur la côte gaditane (Cadix). Le quotidien résume ainsi les tendances de la migration actuelle dans le détroit de Gibraltar : plus d’embarcations, mais moins de migrants, et un retour des pateras en bois de mauvaise qualité, et ce alors que l’on pensait que les embarcations pneumatiques de type Zodiac avaient pris le relai. Ce dernier point s’expliquerait, toujours selon le journal, par le fait que les organisateurs de la traversée n’investissent plus dans les embarcations : les migrants ne payent pas leur billet, mais transportent plutôt avec eux de la drogue (du haschich), où ont été recrutés pour travailler de manière informelle dans les serres ou dans un club (prostitution) une fois en Espagne (El País, le 2 novembre 2008, EE).

 /ů ĨĂƵƚ ĐĞƉĞŶĚĂŶƚ ŶŽƚĞƌ ƋƵĞ ůĂ ŵĂũŽƌŝƚĠ ĚĞƐ ŵŝŐƌĂŶƚƐ ŵĂƌŽĐĂŝŶƐ ƐĞŵďůĞ ƐĞ ƌĞŶĚƌĞ ĞŶ ƐƉĂŐŶĞ ŶŽŶ ƉĂƐ ĞŶ ƉĂƚĞƌĂ͕ ŵĂŝƐ ĞŶ ƐĞ ĚŝƐƐŝŵƵůĂŶƚ ƐŽƵƐ ŽƵ ă ů͛ŝŶƚĠƌŝĞƵƌ ĚĞƐ ĐĂŵŝŽŶƐ ŽƵ ĐĂƌƐ͕ ƉƌŝŶĐŝƉĂůĞŵĞŶƚ ă ƉĂƌƚŝƌ ĚƵ ƉŽƌƚ ĚĞ dĂŶŐĞƌ;ƌĂď͕ϮϬϬϳĂ͗ϴϯͿ͘ >ĞŚƌĂŐƵĞĞƐƚƵŶŵŽƚƵƚŝůŝƐĠĞŶĂƌĂďĞĞƚĞŶďĞƌďğƌĞƋƵŝůŝƚƚĠƌĂůĞŵĞŶƚƐŝŐŶŝĨŝĞͨĐĞƵdžƋƵŝďƌƸůĞŶƚͩ͛͘ĞƐƚƵŶ ŶĠŽůŽŐŝƐŵĞƋƵŝĚĠƐŝŐŶĞƚŽƵƐĐĞƵdžƋƵŝƚĞŶƚĞŶƚĚĞƉĂƌƚŝƌĞŶƵƌŽƉĞƐĂŶƐƉĂƉŝĞƌƐ͕ĐĞƵdžƋƵŝďƌƸůĞŶƚůĞƐĨƌŽŶƚŝğƌĞƐ ;ƌĂď͕ϮϬϬϳĂͿ͘

2.1.2 La migration irrégulière via Ceuta et Melilla et les événements à l’automne 2005

Les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla représentent les seules frontières terrestres de l’Europe avec le continent africain. Ceuta (77 320 habitants au 01.01.2008 dont 3 082 étrangers54) est situé tout près du détroit de Gibraltar et possède huit kilomètres de frontières communes avec le Maroc. Melilla (71 339 habitants au 01.01.2008 dont 6 422 étrangers55) est située tout près de la ville marocaine de Nadore et la frontière qui sépare l’enclave du pays africain est de 10 kilomètres. Les résidents marocains des provinces voisines des deux villes espagnoles peuvent s’y rendre librement, ce que 50 000 personnes font chaque jour (Carling, 2007 : 23). Les départs vers la péninsule sont néanmoins restreints (les enclaves font partie de l’espace Schengen, mais les contrôles d’identité aux ports maritimes et aériens sont maintenus).

Carte 1 : La situation géographique des enclaves espagnoles Ceuta et Melilla

Source : www.lemonde.fr/europe/infographie/2005/10/06/les-enclaves-de-ceuta-et-melilla_696221_3214.html.

La migration sub-saharienne vers les enclaves commence vers la fin de l’année 1991 et ces premiers migrants y sollicitent l’asile (Fayrén et Adell, 2000, in Carling, 2007 : 23). La majorité n’a pas vu leur demande approuvée, mais il est apparu difficile de les rapatrier. Le même scénario se produit à Ceuta quelques années plus tard. Suite à un nombre de plus en plus important de migrants irréguliers, et des centres d’accueil surchargés, les autorités

^ŽƵƌĐĞ͗WĂĚƌſŶ͘ ^ŽƵƌĐĞ͗ŝďŝĚ͘

décident alors d’effectuer des transferts vers le continent espagnol. Entre 1996 et 1999, près de 10 000 migrants sont transférés vers la péninsule (Barros et al. 2002, in Carling, 2007 : 23). Parallèlement, comme déjà évoqué, les frontières des enclaves sont drastiquement renforcées (construction de barrières métalliques autour de Ceuta en 1997 et autour de Melilla en 1998) afin de réduire le nombre d’entrées.

Si les Algériens se débrouillent pour entrer avec des papiers marocains, les Asiatiques, eux, sont assistés par des passeurs (Carling, 2007 : 23). Quant aux Sub-sahariens, ils tentent généralement le passage par les deux barrières métalliques, séparées de cinq mètres et hautes de trois à cinq mètres et surmontées de fil barbelé. Arab décrit ainsi le passage : « Ces barrières sont équipées de postes d’observation, de caméras de sécurité et de sondes à fibres optiques de la garde civile. Les personnes escaladent la première barrière, font passer des échelles par-dessus les barbelés pour tenter de franchir la seconde barrière, avant que l’alarme ne retentisse et que la garde civile ne descende entre les deux barrières » (Arab, 2007a : 83). Pour ceux qui arrivent à passer, la stratégie est de s’enregistrer au commissariat le plus rapidement possible et, ainsi, espérer un jour être transféré dans la péninsule. Le processus est long et incertain, mais il est arrivé plusieurs fois que le gouvernement ait transféré des personnes non-expulsables, mais possédant un avis à quitter le territoire, vers le continent européen dans l’hypothèse de les voir quitter le pays par leur propre initiative. Néanmoins, une fois en Espagne, plusieurs de ces migrants ont pu trouver du travail et bénéficier d’une régularisation (Carling, 2007 : 24).

La migration « par les barrières » s’est surtout développée suite à la mise en place du SIVE. La communauté internationale ne la découvre cependant qu’après les événements de l’automne 2005. Dans les lignes qui suivent, je vais brièvement rappeler le contexte dans lequel ces événements ce sont déroulés.

Gourougou et Bel Younech, des ghettos dans la forêt ou « le peuple des clandestins »

La forêt de Gourougou est située à proximité de Melilla alors que celle de Bel Younech se trouve à proximité de Ceuta. Durant les années précédant les événements de 2005, plusieurs centaines de migrants se réfugient ici dans l’espoir de passer un jour de l’autre côté des grilles. Certains attendent des mois, d’autres des années. Les migrants eux-mêmes nomment ces campements de fortune leurs « ghettos ». Ces derniers sont apparus au Maroc à la fin des

années 1990 (Laacher, 2007 : 131), période qui correspond à la mise en place des barrières autour des enclaves espagnoles56.

Comme le montrent Blanchard et Wender (2007), les conditions de vie dans la forêt sont difficiles et la police marocaine n’hésite pas à s’y rendre, avec comme résultat le saccage des cabanes, la réquisition des biens, des arrestations et des violences. À partir de la fin de l’année 2004, suite aux répressions exercées par l’Europe sur le Maroc afin de contraindre le pays à aider ses partenaires européens dans la « lutte contre l’immigration clandestine », ces répressions policières se durcissent considérablement dans les campements, dans un premier temps dans ceux de Gourougou (Melilla). Selon un rapport de Médecins sans frontières, la rafle la plus importante dans cette forêt se déroule entre le 12 et le 14 janvier 2005, impliquant « 1200 membres des forces sécuritaires marocaines, 25 véhicules tout terrain, trois hélicoptères et la garde de la cavalerie » (in Blanchard et Wender, 2007 : 16). La forêt de Gourougou se vide ainsi petit à petit. Pour empêcher les migrants d’y revenir, des représentants des forces de l’ordre sont de garde à proximité des ghettos. Les migrants continueront cependant de tenter le passage à Melilla. À partir de février 2005, c’est la forêt de Bel Younech (Ceuta) qui est la cible de la police marocaine, et des rafles plus fréquentes et plus violentes que celles de Gourougou se succèdent. Les forces de l’ordre se placent à l’entrée de la forêt, où se trouve notamment la principale source d’eau des migrants.

C’est ainsi que, durant des mois, la tension et le désespoir augmentent dans la forêt. En août, plusieurs tentatives de passages massifs ont lieu à Melilla. Lors de la tentative du 29 août, un migrant camerounais décède57. En septembre 2005, la répression policière augmente de nouveau : les arrestations de migrants dans les quartiers populaires des grandes villes comme Rabat, Casablanca, Fès et Tanger se font plus nombreuses et les descentes de la police dans la forêt de Bel Younech sont plus fréquentes. En septembre et en octobre 2005, les migrants décident alors à nouveau d’attaquer massivement les grillages. Plusieurs d’entre eux décèdent lors de leur tentative de passer de l’autre côté de la frontière.

C’est alors à ce moment-là que commence l’importante couverture médiatique du phénomène. Parallèlement, la répression policière persiste : forêts contrôlées, arrestations et refoulement en masse vers la zone désertique entre le Maroc et l’Algérie. 1 500 personnes sŽŝƌů͛ŽƵǀƌĂŐĞĚĞ^ŵĂŢŶ>ĂĂĐŚĞƌ;ϮϬϬϳͿ͕>ĞWĞƵƉůĞĚĞƐĐůĂŶĚĞƐƚŝŶƐ͕ƉŽƵƌůĂƌĞŵĂƌƋƵĂďůĞŽƌŐĂŶŝƐĂƚŝŽŶĚĞůĂ ǀŝĞĚĞƐŵŝŐƌĂŶƚƐĞŶĨŽƌġƚ͘  >Ğ ŵŝŐƌĂŶƚ ĞƐƚ ŵŽƌƚ ƐƵŝƚĞ ĂƵdž ǀŝŽůĞŶĐĞƐ ĐŽŵŵŝƐĞƐ ƉĂƌ ůĂ 'ƵĂƌ̺à ŝǀŝů ;ŶŽƚĂŵŵĞŶƚ ů͛ƵƚŝůŝƐĂƚŝŽŶ ĚĞƐ ĂƌŵĞƐ ŵƵŶŝĞƐ ĚĞ ďĂůůĞƐ ĞŶ ĐĂŽƵƚĐŚŽƵĐͿ͘ hŶ ĚĞƵdžŝğŵĞ ŵŝŐƌĂŶƚ ƐĞƌĂŝƚ ŵŽƌƚ ĚĂŶƐ ĚĞƐ ĐŽŶĚŝƚŝŽŶƐ ŝĚĞŶƚŝƋƵĞƐ͘ EĠĂŶŵŽŝŶƐ͕ƐĞůŽŶůĞƐĂƵƚŽƌŝƚĠƐĞƐƉĂŐŶŽůĞƐĞƚŵĂƌŽĐĂŝŶĞƐ͕ůĂŵŽƌƚĚĞĐĞƚƚĞƉĞƌƐŽŶŶĞƉŽƵƌƌĂŝƚġƚƌĞĂĐĐŝĚĞŶƚĞůůĞ ĞƚŶĞƐĞƐĞƌĂŝƚƉĂƐĨŽƌĐĠŵĞŶƚƉƌŽĚƵŝƚĞĞŶƚĞƌƌŝƚŽŝƌĞĞƐƉĂŐŶŽů͕ŶŝƉƌğƐĚƵŐƌŝůůĂŐĞ;tĞŶĚĞƌ͕ϮϬϬϳ͗ϭϳͿ͘

environ sont découvertes par des ONG et des journalistes près d’un petit village non loin de la frontière algérienne et dans une zone totalement désertique. Parmi les refoulés figurent également des demandeurs d’asile, au moins un réfugié statutaire et des migrants en situation régulière (comme les migrants dispensés de visa pour entrer au Maroc et qui disposent d’un droit de séjour de trois mois). Les obligations internationales en matière de protection des réfugiés ne sont donc pas respectées. Suite à ces refoulements, le Sénégal et le Mali organisent rapidement le rapatriement de leurs ressortissants. Les autres migrants et demandeurs d’asile passeront des semaines dans des bases militaires avant d’être soit rapatriés (Sénégalais, Maliens, Camerounais, Guinéens et Gambiens) soit refoulés à la frontière algérienne (principalement des demandeurs d’asile).

En décembre 2005, c’est l’Algérie qui, à son tour, procède à des arrestations et refoulements massifs de migrants. Ces derniers sont soit renvoyés par avion (principalement vers le Mali), soit refoulés dans le désert près de la frontière malienne.

Les enclaves après les événements en 2005

Même si le nombre d’entrées de migrants irréguliers à Ceuta et Melilla a diminué depuis 2005 (5 566 entrées), des migrants parviennent toujours à entrer dans les enclaves (1994 entrées en 2006, 1 553 en 2007). En octobre et novembre 2008, suite aux pluies importantes entraînant des trous dans les clôtures qu’entourent Melilla, plusieurs tentatives d’entrées, dont certaines sont réussies, ont lieu en l’espace de quelques jours. Voilà ce que l’on peut lire dans la presse espagnole : « L’inondation ouvre Melilla aux migrants » (El País, le 28 octobre 2008, édition électronique) ou « La rumeur selon laquelle la frontière est brisée court dans le Maroc entier » (El Mundo, le 2 novembre 2008, édition électronique).

Tableau 11 : Migrants irréguliers entrés à Ceuta et à Melilla 2005-2007

2005 2006 2007

Ceuta 2 324 1 351 -

Melilla 3 242 643 -

Total 5 566 1 994 1 553

Source : ministère de l’Intérieur espagnol.

Quant à la répression policière des migrants au Maroc, elle semble toujours être d’actualité. Le refoulement à la frontière algérienne de 400 migrants en 2006 en constitue un

premier exemple. Cet événement n’attire pas l’attention médiatique, désormais tournée vers les îles Canaries58.

2.1.3 De Ceuta et Melilla aux îles Canaries

Depuis les événements survenus à Ceuta et Melilla en 2005, les points de passage vers l’Europe ont changé. Les départs en bateau vers les îles Canaries semblent désormais être privilégiés, avec des points de départs de plus en plus lointains.

La première patera à débarquer sur les îles Canaries depuis le continent africain arrive en 1994. Il s’agit d’une embarcation de sept Sahraouis. Durant les années suivantes viennent plusieurs membres du Polisario59 et autres figures de l’opposition sahraouie. À partir de 1997, ce sont principalement les Marocains qui empruntent cette voie. Ils sont remplacés par les Sub-Sahariens à partir de 2000 (Carling, 2007 : 24). Ces derniers constituent aujourd’hui le premier groupe de migrants à arriver par voie maritime sur les îles.

Jusqu’en 1999, la Guardia Civil n’a qu’un bateau de patrouilles aux Canaries (Rodríguez, 1999 in Carling 2007 : 24). À cette époque, l’organisation des départs se fait principalement à partir de Laayoune, la ville la plus importante du Sahara Occidental. Les départs se concentrent sur une zone d’une centaine de kilomètres, entre Saguia el–Hamra (non loin de Laayoune) et Tarifa (sud du Maroc). Puis, les départs se déplacent plus vers le sud et la Mauritanie et le Sénégal deviennent des pays de départ des embarcations.

L’année 2006 est l’année record en termes de nombre de migrants venus par voie maritime aux Canaries. 31 678 migrants sont arrivés sur les îles cette année-là. Depuis lors, le nombre d’arrivées s’est réduit, ce qui s’expliquerait par une surveillance des côtes africaines plus méthodique, notamment par le déploiement de Frontex, opérationnel sur les côtes africaines depuis août 2006. Entre cette date et décembre 2007, le dispositif de Frontex a intercepté 155 embarcations et 12 8647 migrants au large de l’Afrique. La baisse des arrivées pourrait également s’expliquer par une politique de reconduite plus systématique : alors qu’entre 2006 et 2007 l’immigration irrégulière (détectée) baisse de 54%, les rapatriements, eux, augmentent de 6%. En fait, parmi les 50 318 migrants étant entrés en Espagne de manière irrégulière en 2007, 46 471 sont rapatriés, soit 92.3% (ministère de l’Intérieur

WŽƵƌĂůůĞƌƉůƵƐůŽŝŶƐƵƌů͛ĂƉƌğƐĞƵƚĂĞƚDĞůŝůůĂ͕ǀŽŝƌůĞƐĂĐƚĞƐĚĞůĂũŽƵƌŶĠĞĚƵϮϬŵĂƌƐϮϬϬϲŽƌŐĂŶŝƐĠĞƉĂƌ 'ŝƐƚŝ Ğƚ ŝŶƚŝƚƵůĠĞ͗ ͨdžƚĞƌŶĂůŝƐĂƚŝŽŶ ĚĞ ů͛ĂƐŝůĞ Ğƚ ĚĞ ů͛ŝŵŵŝŐƌĂƚŝŽŶ͘ ƉƌğƐ ĞƵƚĂ Ğƚ DĞůŝůůĂ͕ ůĞƐ ƐƚƌĂƚĠŐŝĞƐ ĚĞ ů͛hŶŝŽŶĞƵƌŽƉĠĞŶŶĞͩ͘ĐƚĞƐƉĂƌƵƐĚĂŶƐ'ŝƐƚŝ͕ŚŽƌƐƐĠƌŝĞĚĞWůĞŝŶƌŽŝƚ͕ũƵŝŶϮϬϬϲ͘

espagnol). Une hypothèse est que suite à cette « nouvelle tendance », certains candidats seraient plus réticents à tenter leur chance. Néanmoins, des rencontres lors de mon séjour au Sénégal l’été 2007 vont à l’encontre de cette hypothèse, car des personnes rapatriées m’ont dit vouloir retenter la traversée. Par exemple, un informateur, habitant du village des pêcheurs à Saint-Louis, point stratégique des départs du nord du Sénégal, m’a dit avoir été renvoyé des Canaries à deux reprises, mais qu’il était actuellement en train d’économiser pour tenter une troisième traversée (carnet de terrain, juin 2007).

Ainsi, malgré « la lutte contre l’immigration clandestine », les migrants continuent de tenter leur chance. Selon un article de El País, paru en octobre 2008, des milliers de “sans-papiers” attendent à Nouadhibou (Mauritanie) pour aller aux Canaries. Au moment de la parution de cette article, le centre de détention des immigrés de la ville, autre dispositif dans la « lutte contre l’immigration clandestine », d’ailleurs pointé du doigt par Amnesty International pour ses conditions de détention, compte 620 détenus, soit le double des chiffres

habituels (El País, le 1er octobre 2008, parution électronique)60. En septembre 2008,

un supercayuco (expression utilisée par la presse espagnole) arrive aux Canaries. Il s’agit du plus grand nombre de migrants arrivés dans la même embarcation, soit 230 personnes.

L’année 2009 marque un tournant considérable en ce qui concerne le nombre de migrants arrivés aux Canaries. Lors de cette année, 2 242 migrants arrivent dans l’archipel canarien depuis le continent africain, soit le chiffre le plus bas depuis dix ans (El Mundo, le 2 janvier 2010, parution électronique). Aussi, et toujours en 2009, aucune pirogue ne part du Sénégal. Lors des trois premiers mois de l’année 2010, seules deux pirogues atteignent les îles Canaries (Canarias 7, le 30 mars 2010, parution électronique). Pour certains, les cayucos canariens, c’est « déjà de l’histoire »61. Si cette constatation est relative, elle témoigne toutefois de la rapidité de l’évolution des dynamiques liées aux routes migratoires.

Tableau 12: Nombre d’embarcations et de personnes arrivées par voie maritime en Espagne

ŶŶĠĞ ŵďĂƌĐĂƚŝŽŶƐĚĠƚĞĐƚĠĞƐ DŝŐƌĂŶƚƐŝŶƚĞƌĐĞƉƚĠƐ ϭϵϵϵ ϰϳϱ ϯϱϲϵ ϮϬϬϬ ϴϬϳ ϭϱϭϵϱ ϲϬ  sŽŝƌ ů͛ĠƚƵĚĞ ƌĠĂůŝƐĠĞ ƉĂƌ ůĂ ƌŽŝdž ZŽƵŐĞ ĞƐƉĂŐŶŽůĞ Ğƚ ůĞ ƌŽŝƐƐĂŶƚ ZŽƵŐĞ ŵĂƵƌŝƚĂŶŝĞŶ Žƶ ƉůƵƐ ĚĞ ϱϬϬϬ ŵŝŐƌĂŶƚƐ ĞŶ DĂƵƌŝƚĂŶŝĞ͕ ƉƌġƚƐ ă ƉĂƌƚŝƌ ƉŽƵƌ ůĞƐ ĂŶĂƌŝĞƐ͕ ŽŶƚ ĠƚĠ ŝŶƚĞƌǀŝĞǁĠƐ ĞŶƚƌĞ ϮϬϬϲ Ğƚ ϮϬϬϴ ;ǁǁǁ͘ƌĞǀŝƐƚĂƉƵĞďůŽƐ͘ŽƌŐͬƐƉŝƉ͘ƉŚƉ͍ĂƌƚŝĐůĞϭϴϰϴͿ͘ ϲϭ  :Ğ ŵĞ ƌĠĨğƌĞ ŝĐŝ ă ĚĞƐ ĚŝƐĐƵƐƐŝŽŶƐ ŝŶĨŽƌŵĞůůĞƐ ĂLJĂŶƚ ĞƵ ůŝĞƵ ĞŶ ŵĂŝ ϮϬϭϬ ĂǀĞĐ ĚĞƐ ĐŚĞƌĐŚĞƵƌƐ Ğƚ ĠƚƵĚŝĂŶƚƐ ƐƵŝǀĂŶƚĚĞƉƌğƐĐĞƚƚĞĠǀŽůƵƚŝŽŶ͘

ϮϬϬϭ ϭϬϲϬ ϭϴϱϭϳ ϮϬϬϮ ϭϬϮϬ ϭϲϲϳϬ ϮϬϬϯ ϵϰϮ ϭϵϭϳϲ ϮϬϬϰ ϳϰϬ ϭϱϲϳϱ ϮϬϬϱ ϱϲϳ ϭϭϳϴϭ ϮϬϬϲ Ͳ ϯϵϭϴϬ ϮϬϬϳ Ͳ ϭϴϬϱϳ

Source : Sevilla Pérez et Suarez Robles (2006) pour la période 1999-2005, ministère de l’Intérieur espagnol pour la période 2006-2007.

Tableau 13: Nombre de migrants arrivés par voie maritime en Espagne par lieu d’arrivée

 ϮϬϬϰ ϮϬϬϱ ϮϬϬϲ ϮϬϬϳ

WĠŶŝŶƐƵůĞ ϳϮϰϳ ϳϬϲϲ ϳϬϱϮ ϱϱϳϵ

ĂŶĂƌŝĞƐ ϴϰϮϲ ϰϳϭϱ ϯϭϲϳϴ ϭϮϰϳϴ

dŽƚĂů ϭϱϲϳϮ ϭϭϳϴϭ ϯϴϳϯϬ ϭϴϬϱϳ

Source : ministère de l’Intérieur espagnol.

Tableau 14: Embarcations et migrants arrêtés par Frontex (août 2006-décembre 2007)

 :ĂŶ &Ġǀ DĂƌ ǀƌ DĂŝ :Ƶŝ :Ƶŝ Žƚ ^ĞƉ KĐƚ EŽǀ ĠĐ dŽƚĂů    ϮϬϬϲ  dž   dž  dž  dž  dž  dž  dž  ϵ  ϭϳ  ϭϯ  ϭϭ  ϭϮ  ϲϮ  ϮϬϬϳ  Ϯ  ϰ  ϳ  ϴ   ϭϬ  ϵ  ϭϮ  ϴ  ϭϱ  ϵ  Ϯ  ϳ  ϵϯ    ϮϬϬϲ  dž  dž  dž  dž  dž  dž  dž  ϴϬϳ  ϭϰϳϲ  ϱϭϵ  ϰϳϬ  ϭϬϭϴ  ϰϮϵϬ  ϮϬϬϳ  ϯϳϱ  ϱϴϱ  ϵϬϱ  ϲϭϯ  ϴϬϱ  ϱϱϲ  ϳϱϯ  ϴϬϬ  ϭϯϭϬ  ϵϲϱ  ϯϴϭ  ϱϮϲ  ϴϱϳϰ Source : ministère de l’Intérieur espagnol.

À propos de l’immigration vers les Canaries, nous pouvons citer les travaux de Godeneau et Zapata Hernández (2007) sur l’immigration irrégulière à Tenerife. Cette étude montre que 92 % des migrants en situation irrégulière sur l’île s’y sont rendus par voie aérienne, la plupart de manière régulière (généralement avec un visa de tourisme de trois

mois). Concernant les migrants venus par voie maritime62, les Africains sont les plus

nombreux. 51,5 % des Marocains et 36,6 % des Algériens en situation irrégulière sur l’île se

>ĞƐĚŽŶŶĠĞƐŝŶĐůƵĞŶƚůĞƐŵŝŐƌĂŶƚƐĂLJĂŶƚĞĨĨĞĐƚƵĠůĞǀŽLJĂŐĞƉĂƌǀŽŝĞŵĂƌŝƚŝŵĞĚĞƉƵŝƐůĞĐŽŶƚŝŶĞŶƚĂĨƌŝĐĂŝŶǀĞƌƐ ůĂƉĠŶŝŶƐƵůĞ͕ĂǀĂŶƚĚĞƐĞƌĞŶĚƌĞĂƵdžĂŶĂƌŝĞƐ͘

Embarcations

sont rendus à Tenerife par cette voie. Pour les autres nationalités africaines, le pourcentage est de 36,6 %. Ainsi, pour les Africains d’origine subsaharienne en situation irrégulière à Tenerife, seulement un migrant sur trois s’est rendu sur l’île par voie maritime. Cette observation va à l’encontre de l’image que l’on peut avoir, notamment dans la presse, de l’immigration subsaharienne aux Canaries.

Carte 2: L’évolution des routes migratoires clandestines dans le détroit de Gibraltar et par les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla

Source : Carling, 2007 (les données concernent la période 2000-2005).

Carte 3: L’évolution des routes migratoires clandestines vers les îles Canaries