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Chapitre 4 - 1 ère étape (exploratoire) : Caractérisation de la diversité des

6. Typologie des stratégies d’élevage

Nous avons identifié six types de stratégies correspondant à des combinaisons spécifiques des

modalités des six variables (annexe 3). Les caractéristiques des exploitations et les

performances zootechniques sont rassemblées par type dans leTableau 8.

Tableau

8

: Caractéristiques et performances zootechnique des EA par stratégie d’élevage (min-max / moyenne)

Stratégie d’élevage d’EA Nbre

Types d’activités extérieures du ou des pluriactifs60 Taille des

EA (ha) Nbre de brebis

Age de l’activité agricole (années) Productivités numériques (agneau / brebis / an) S1 Le troupeau amortisseur 4 2 SI 1 I 1 S 40-60 / 46 75-225 / 160 12-38 / 26 0,8-0,9 / 0,9 S2 Forte productivité selon le modèle promu localement 8 4 M 3 S 1 SI 13-120 / 70 105-620 / 399 1-36 / 21 0,9-1,6 / 1,4 S3 Les passionnés ambitieux 7 5 S 1I 1 SI 13-28 / 18 70-400 / 175 1-30 / 9 1-1,4 / 1,2 S4 Les passionnés faiseurs de compromis 3 3 S 20-45 / 30 80-110 / 92 15-17 / 16 1,1-1,5 / 1,3 S5 Faire simple, en famille 11 6 I 3 S 2 SI 16-100 / 45 50-600 / 199 6-21 / 15 0.7-1.2 / 1.1 S6 Les incertains 2 1 SI 1 S 16-18 / 17 46-90 / 68 6-17 / 12 /

6.1. « Le troupeau conduit comme l’amortisseur du système d’activités »

Cette stratégie repose sur 3 principes d’action. Le premier est l’absence d’objectif de

production et de revenu car les ménages vivent des revenus issus des activités extérieures à

l’exploitation. Le deuxième est la volonté forte de conserver le troupeau, quels que soient les

résultats économiques, et la disponibilité pour réaliser le travail d’élevage. Le troisième

consiste à choisir de ne faire dans le travail d’élevage que ce qui semble très important à

l’éleveur et de reporter les autres tâches ou de faire des impasses sur les autres tâches.

La stratégie consiste à donner la priorité aux activités extérieures aussi bien dans le revenu

pour le ménage que dans l’emploi du temps. Les activités extérieures ont souvent été ajoutées

à l’activité agricole suite à des difficultés économiques rencontrées sur l’exploitation. La

plupart du temps, les deux membres du couple ou le chef d’exploitation lui-même combinent

le travail d’élevage et une ou plusieurs activités extérieures. La réalisation des tâches relatives

à la conduite du troupeau est ajustée conjoncturellement, parfois au jour le jour, à la

disponibilité de l’éleveur. Plus concrètement les éleveurs reportent des tâches sur le troupeau

ou les surfaces ou font des impasses. Ces éleveurs conduisent tous les animaux de la même

60 SI = 1 activité exercé à titre salarié, 1 à titre indépendant, I = 1 activité exercée à titre indépendant, S = 1 activité exercée à titre salarié

façon quels que soient leurs états physiologiques et maximisent la durée de pâturage. Les

décisions de vente et de réforme sont plutôt prises au gré des opportunités du marché et selon

les besoins de trésorerie et non selon des règles de gestion de la démographie du troupeau.

Les performances zootechniques sont modestes, inférieures à un agneau sevré par brebis et

par an.

6.2. « Le troupeau conduit dans l’état d’esprit du modèle technique local visant

une forte productivité»

Cette stratégie vise à atteindre un niveau élevé de productivité technique et économique du

troupeau, tel qu’on en rencontre chez des éleveurs à temps plein. Elle consiste à mettre en

œuvre une conduite de la reproduction et de l’alimentation qui permettent d’atteindre une

productivité importante : la conduite en trois agnelages en deux ans, la différenciation des

rations en fonction des besoins des animaux et du type de produit visé. Les éleveurs sont très

impliqués dans les démarches qualité et sont engagés à fournir un nombre et un type d’agneau

en période de contre saison auprès des groupements de producteurs. Ils vendent aussi des

reproducteurs. Cette stratégie repose sur le fait de consacrer beaucoup de temps à l’élevage

selon deux modalités : l’activité extérieure leur laisse une disponibilité importante car elle a

lieu la nuit, ou seulement les week-ends), ou bien ils mobilisent une main-d’œuvre importante

familiale ou salariée pour pallier les absences liées aux activités extérieures. Le rythme et les

objectifs de production du troupeau sont prioritaires. Ce groupe rassemble l’ensemble des

responsables professionnels mais pas seulement. Les performances zootechniques sont

globalement de bon niveau (PN = 1,4) mais très variables.

6.3. « Le troupeau conduit avec passion et ambition technique »

Cette stratégie vise à maximiser la productivité technique du troupeau en se fixant une taille

de troupeau modeste (moins de 250 brebis) sauf exception. Ces éleveurs ont commencé

l’activité agricole bien après leur activité extérieure, cette dernière étant souvent de nature

salariée et/ou para agricole. Ils ont souvent repris une petite EA familiale diversifiée, à

laquelle ils sont très attachés. Ils ont choisi de se spécialiser en élevage ovin. Leur activité

extérieure leur laisse une disponibilité en temps importante pour l’exploitation agricole,

notamment durant la semaine. Ils assument seuls l’activité d’élevage même s’ils vivent en

couple. La stratégie consiste à limiter la taille du troupeau et à mettre en œuvre une conduite

du troupeau orientée par l’obtention d’un niveau élevé de productivité. Soit ils étaient en train

de monter leur troupeau, tout en visant un maximum de 250 brebis, soit ils ne voulaient pas

augmenter la taille de leur troupeau. Ils organisent plusieurs périodes de reproduction dans

l’année, ils produisent des agneaux à contre saison sous contrat, et approvisionnent les filières

qualité. Cette stratégie était adoptée par deux sortes d’éleveurs : ceux qui se sont installés très

récemment et qui affirment ne pas attendre de revenu dans l’immédiat et limiter les déficits,

ceux qui, déjà installés depuis plus longtemps et qui visent un modeste revenu

complémentaire. Les performances zootechniques sont de bon niveau (PN = 1,3) et assez

homogènes.

6.4. « Le troupeau conduit avec passion et compromis »

Cette stratégie vise à concilier le mieux possible le travail à l’extérieur de l’exploitation, celui

sur l’exploitation et la vie de famille. Elle consiste à adapter d’une année sur l’autre à la fois,

la structure de l’exploitation, la conduite du troupeau et la disponibilité laissée par l’activité

extérieure. Les éleveurs considèrent l’élevage comme une passion, et ils l’assument seuls

même quand ils sont en couple, avec une motivation technique importante. Ils déclarent ne

vouloir ni perdre, ni gagner d’argent avec l’activité agricole.

La plupart du temps ils adaptent à la fois le rythme de l’activité extérieure, le rythme de

l’activité agricole, en particulier le calendrier de production du troupeau, et la taille de leur

structure agricole. Ils ont des attentes de production exprimées en termes de nombre, de type

et de périodes de vente d’agneaux, mais dans le même temps, ils ne veulent pas que l’activité

d’élevage contraigne l’activité extérieure. Par exemple, ils optent souvent pour une seule

période d’agnelage limitée dans le temps et correspondant à un moment où ils peuvent

prendre des congés ; ils adaptent la taille du troupeau à leur disponibilité en temps, prenant en

compte leurs activités extérieure et familiale. La taille du troupeau peut ainsi être divisée par

deux d’une année sur l’autre. Les performances zootechniques sont de bon niveau (PN = 1,3)

et assez homogènes.

6.5. « Le troupeau conduit simplement, en famille »

Cette stratégie vise à combiner plusieurs revenus pour couvrir les besoins du ménage et ou

permettre aux femmes d’avoir un statut social en étant officiellement chef d’exploitation,

même si elles ne prennent pas les décisions importantes concernant l’exploitation. Tous les

membres du ménage contribuent à la réalisation du travail agricole et parfois aux différentes

activités extérieures. Cette stratégie consiste à éviter les tensions dues à la combinaison

d’activités. Les activités extérieures sont réalisées de manière saisonnée, ou à temps partiel,

en tant qu’artisan ou entrepreneur de travaux agricoles ou forestiers. Souvent les hommes qui

travaillent en tant qu’indépendants n’hésitent pas à cesser ou refuser un chantier quand ils le

considèrent incompatible avec le travail agricole à faire. Les objectifs de production et la taille

de l’exploitation sont modestes. Ces éleveurs ne sont pas intéressés par une approche très

technique de l’élevage ovin, même si l’élevage ovin est une activité professionnelle

rémunératrice pour eux. Ils disent qu’ils consacrent plus de temps à l’élevage qu’à l’autre

travail, même si l’élevage rapporte moins. Ils essaient de simplifier la conduite du troupeau en

réduisant le nombre de lots d’animaux et le nombre d’intervention sur le troupeau : les béliers

sont avec les brebis toute l’année, ils ne vendent que des agneaux finis, hors des filières

qualité. Certains d’entre eux réduisent le nombre de distribution des repas au troupeau et le

nombre de type de ration distribuée. Le troupeau est placé en estive l’été, et l’éleveur met en

œuvre du pâturage continu le reste de l’année. Les performances sont moyennes mais très

variables (PN= 1.1).

6.6. « Le troupeau conduit dans l’incertitude »

Cette stratégie vise à réaliser le rêve d’être éleveur quelque soit la production obtenue. Ces

éleveurs éprouvent de nombreuses difficultés : installations successives, avec des productions

différentes, problèmes sanitaires, de foncier, de trésorerie, de bâtiments peu fonctionnels,

parfois insuffisants. Ils sont souvent en train de monter leur troupeau. A l’avenir, ils espèrent

obtenir un revenu agricole, et certains d’entre eux espèrent devenir éleveurs à temps plein. La

conduite du troupeau mise en œuvre l’année de l’enquête était différente de la conduite du

troupeau qu’ils souhaitent mettre en œuvre : à cause de difficultés climatiques, sanitaires, et

du manque de temps à consacrer à l’élevage, ils n’ont pas réussi à faire ce qu’ils voulaient.

Les données recueillies en enquête concernant le nombre de brebis et d’agneaux n’ont pas été

suffisamment précises pour évaluer les performances du troupeau.

Dans le paragraphe suivant, à partir des résultats obtenus concernant les attributs construits,

les axes de différenciation des stratégies d’élevage et les types de stratégies d’élevage, je

reviens sur les hypothèses initiales de cette étude.

7. Avec les attributs, les axes de différenciation et les types de stratégies,