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Chapitre 1 : Du texte au genre

3. Le genre littéraire en classe de langue

3.2. La trilogie FLE FLS FLM

3.2.1. Le choix des dénominations

Si la langue française peut se prévaloir d’avoir trois statuts différents dont chacun relève d’une méthode d’enseignement, le choix de leur dénomination n’est pas forcément d’ordre didactique, comme le précisent Cuq et Davin-Chnane : « Qu’on l’appelle en effet langue seconde, langue étrangère, langue étrangère privilégiée, langue + quelque qualificatif qu’on voudra, ou même qu’on ne lui donne pas de nom du tout, le choix de la dénomination répond souvent davantage à des considérations sociolinguistiques, de politique linguistique voire idéologique qu’à des considérations proprement didactiques. » (2007 : 11) Ils avancent également que l’important en didactique « est de disposer d’un concept qui, tout en tenant compte des paramétrages politiques, socio- et psycholinguistiques, soit capable de rendre compte, aussi bien pour les individus que pour les sociétés concernés, d’un ensemble de situations particulières d’apprentissage et d’enseignement et de fournir un cadrage aux choix méthodologiques puis pédagogiques qui seront opérés en aval et en contextualisation » (ibid.). Par ailleurs, le concept FLS a été créé pour répondre au mieux aux besoins des apprenants dont la langue n’est pas première ; ce troisième concept s’est rattaché à la dichotomie FLM/FLE tout en s’en distinguant car « avec des objectifs spécifiques, et dans un système

82 institutionnel qui n’est pas celui du FLE mais celui du FLM, le français langue seconde, plutôt que de demeurer un objet de partage, glisse finalement vers une certaine autonomie» (ibid.). Cuq définit la français langue seconde comme suit (2007 : 15) :

Le français langue seconde est un concept ressortissant aux concepts de langue et de français. Sur chacune des aires où il trouve son application, c’est une langue de nature étrangère. Il se distingue des autres langues étrangères éventuellement présentes sur ces aires par ses valeurs statutaires, soit juridiquement, soit socialement, soit les deux, et pas le degré d’appropriation que la communauté qui l’utilise s’est octroyée ou revendique. Cette communauté est bi- ou plurilingue. La plupart de ses membres le sont aussi, et le français joue dans leur développement psychologique, cognitif, et informatif, conjointement avec une ou plusieurs autres langues, un rôle privilégié.

Il reformule sa définition en ces termes : « Le FLS est une langue non maternelle apprise dans les pays où il a un statut particulier et une influence sur le développement de l’individu étant donné son usage dans la société et son rôle de langue d’enseignement. » (2007 : 15-16) En outre, Cuq considère que la fonction de langue d’enseignement est capitale pour le FLS puisque « c’est elle qui contient en elle les meilleurs germes d’évolution méthodologique » (2007 : 16). Cependant, le FLS en tant que concept qui, à la fois, assure l’enseignement du français et en français est « au cœur de la problématique méthodologique » (Cuq, 2007 : 16). En effet, Cuq précise qu’« entre les méthodes FLM qui mettent la barre très haut et les méthodes FLE qui montrent rapidement leurs limites, le FLS n'arrive pas encore à créer sa propre méthodologie » (ibid.), et ce, même si « depuis quelques années il est question de production de manuels, de méthodes, d’adaptation de productions françaises à l’environnement des apprenants, à leur besoins et à leurs capacités, en tenant compte des attentes institutionnelles » (Cuq, 2007 : 25). L’acquisition du français est indispensable pour l’apprenant dans un contexte de FLS puisqu’elle est « la langue de communication intra et extra-scolaire, celle de scolarisation pour suivre un cursus scolaire et celle de socialisation pour vivre les évènements d’une communauté culturelle » (Cuq, Davin-Chnane, 2007 : 27) ; l’équation FLE +FLSco +FLSSo = FLSLP développée par Davin-Chnane met bien en perspective cette importance (ibid.). Elle définit le FLS comme étant un « concept interdidactique » parce qu’il est un « point d’interaction » entre les différentes didactiques du français (Cuq et Davin-Chnane, 2008 : 11). Par ailleurs, Cuq et Davin-Chnane (2008 : 11) soutiennent la présence d’une transposition méthodologique et pédagogique en classe de FLS, en d’autres termes, l’existence d’« une adaptation au public concerné et aux objectifs scolaires d’éléments méthodologiques initialement conçus pour le FLE ou pour le FLM ». Galisson

83 évoque pour sa part « l’adoption et l’adaptation éventuelle de réponses, testées sur le terrain, par des disciplines de même statut (les didactiques) à des problèmes circonvoisins » (cité par Cuq et Chnane-Davin, 2008 : 11). Cette transposition est bénéfique pour l’apprenant dans la mesure où il peut s’approprier à la fois la « dimension sociale de l’échange », la « maîtrise du discours » et la « maîtrise de la langue ». Elle lui permet aussi d’aborder la littérature en classe dont les objectifs sont divers.

3.2.2. La littérature en FLE/FLS

Pour Canvat, l’objectif premier de la lecture littéraire en FLE/FLS est de former des lecteurs autonomes capables donc « d’aller choisir eux-mêmes leurs livres, de feuilleter à leur rythme les livres retenus, de faire éventuellement appel à un adulte pour une aide ponctuelle, de consulter en libre accès, d’effectuer une recherche documentaire, une lecture sélective, d’identifier des collections, de reconnaître des genres et des types de textes…. » (2007 : 33).

Gruca apporte aussi une clarification en assurant que l’objectif de l’exploitation des textes littéraires en classe de langue « n’est pas de former des spécialistes en ou de littérature, mais des lecteurs éclairés de textes produits dans la langue qu’ils sont en train de s’approprier et qui, étrangement, font écho à ceux qu’ils ont fréquenté et fréquentent toujours dans leur langue maternelle » (2007 : 209). Elle affirme que cet aspect est souvent négligé alors qu’il est nourri des « expériences », de l’ « éducation », des « connaissances » et des « lectures » des élèves. Elle propose également un deuxième objectif qui consiste en la construction de l’enseignement littéraire en classe « dans la continuité, la progression et la répétition afin de donner progressivement à l’apprenant les outils d’analyse qui le conduiront vers l’autonomie » (ibid.). Le texte littéraire sera alors inséré régulièrement « comme support d’activité » qui permettra « non seulement de renforcer les compétences lectorales et linguistiques de l’apprenant, mais aussi de prendre en charge son apprentissage culturel dans une perspective interculturelle où la littérature a un rôle à jouer » (ibid.) : « Lire une œuvre littéraire, c’est vouloir rencontrer l’autre, partager ses sentiments et ses expériences qui se déroulent dans un univers différent. » (ibid.)

Afin de mieux appréhender le texte littéraire en classe de langue et pour faciliter son exploitation, Gruca met en place un parcours à étapes.

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