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Chapitre 3: L’étude de terrain

2. Déroulement et processus de la recherche qualitative

2.7. Les difficultés du terrain

2.7.1. Les établissements

2.7.1.1. Les démarches administratives

Pour se rendre dans les établissements publics, les doctorants inscrits à la faculté libanaise bénéficient d’un document signé par le directeur de thèse et le doyen de la faculté qui leur permet, sans aucune autorisation préalable du directeur du lycée, de soumettre leurs questionnaires aux élèves, cela en collaboration, bien entendu, avec des enseignants. Ces derniers sont des figures déterminantes pour la réussite de toute enquête par le temps de leurs cours qu’ils accordent à la recherche et par leur rôle crucial à motiver les élèves à répondre aux questionnaires. Sans ce fameux document il a fallu, par nous-même, nous rendre auprès des chefs d’établissements et les convaincre de l’intérêt de notre recherche. Il faut savoir que le niveau en langue diffère d’un établissement public à un autre en fonction de l’emplacement géographique dudit établissement, de la scolarisation antécédente des élèves et aussi du « charisme » du directeur (rice) du lycée. C’est par le niveau de langue et le taux de réussite au bac que le lycée acquiert sa renommée. Le niveau de langue dans les classes est bien entendu hétérogène, mais pour éviter que les textes ne soient pratiquement pas du tout accessibles à une grande majorité des élèves, nous avons ciblé des lycées publics où les apprenants ont un niveau B1. Nous avons pu soumettre nos questionnaires à des élèves d’un lycée à Beyrouth (le lycée Ghobeiry pour filles) et le lycée d’Abassieh au sud du Liban. Concernant les écoles privées, le doctorant inscrit ou non à la faculté libanaise est sur le même pied d’égalité puisque, même s’il est en possession d’un document officiel, il doit obtenir, selon l’école, soit l’accord du coordinateur de français de l’établissement soit celui du directeur. Dans le cas des réseaux d’écoles appartenant à des associations, il faut solliciter le (la) coordinateur (rice) principal(e), c’est-à-dire, celui (celle) qui supervise les co- coordinateurs de toutes les écoles de cette chaîne, comme c’est le cas des écoles El Mustapha.

165 Lors de notre passage dans les écoles privées, nous avons eu différents accueils que nous présentons à la manière de Pennac quand celui-ci utilise la formule « il y a » pour présenter les différents profils de mères dans son livre Chagrin d’école (2007 : 50-52).

2.7.1.2. À la manière de Pennac : « il y a.. »

Il y a des écoles qui vous accueillent chaleureusement, qui lisent attentivement votre travail qui vous demandent de venir tel jour à telle heure pour rencontrer les enseignants ou les co- coordinateurs de toutes les écoles afin de leur expliquer les démarches à suivre ; il y a des écoles qui prennent le temps de discuter avec vous, qui vous proposent même de se charger des photocopies, qui vous rassurent, qui vous demandent de venir tel jour pour récupérer les questionnaires, mais qui à la fin s’excusent de n’avoir pu mener à terme tout le travail ; il y a des écoles qui font de leur mieux pour vous trouver du temps mais qui sont obligées de se rétracter à cause d’évènements divers ; il y a des écoles qui aimeraient bien vous aider, mais qui ne savent pas comment faire, comment procéder, tantôt elles ont le regard fixé sur les documents tantôt c’est sur vous que se pose le regard, elles sont embarrassées et essayent de trouver une issue pour se « débarrasser » de vous sans brusquerie, avec douceur en prenant un air navré ; il y a des écoles qui ne prennent même pas la peine de jeter un coup d’œil sur les documents et qui vous disent clairement qu’elles ne demanderont pas aux élèves de travailler le français à la maison aux dépens des mathématiques ou autres matières scientifiques, ces écoles, sans aucun ménagement, vous invitent à prendre la porte.

2.7.2. Les élèves

Nous avons préféré distribuer les textes entre la mi-avril et la mi-mai, car à cette période les élèves ne passent aucun examen important et peuvent ainsi consacrer du temps à la lecture des documents. En outre, à cette période, les élèves se sont bien familiarisés à nouveau avec la langue française. « Les élèves ne font rien gratuitement, ils veulent des points », cette déclaration de plusieurs enseignantes montre bien que rien ne peut être fait sans leur aide : les élèves, ayant déjà travaillé les types descriptifs, informatifs et narratifs au premier semestre ont clairement compris qu’il s’agissait de textes « venant de l’extérieur » et c’est par l’attribution de bonus par les enseignant(es) que nous avons pu compter sur leur coopération.

166 Nous avons distribué les questionnaires à la même période aux élèves des établissements publics, ignorant que ces derniers finissent l’année scolaire bien avant les écoles privées afin de libérer les établissements pour les examens officiels. C’est avec réticence que les élèves du lycée public El Ghobeyri ont bien voulu coopérer puisqu’ils avaient déjà fini leur programme, mais ceux du lycée Abassieh ont refusé catégoriquement d’avoir un travail supplémentaire pendant leur période de révision et c’est auprès du directeur de l’établissement qu’ils se sont plaints. C’est donc lui qui a promis des points supplémentaires à leur examen final de français sachant bien que les élèves ont avancé le prétexte de révision pour ne pas avoir de devoirs supplémentaires à faire chez eux.

2.7.3. La situation interne du pays

Après avoir obtenu l’accord de la directrice du lycée Grec-Orthodoxe de Tripoli pour nous y rendre, nous avons convenu avec la coordinatrice de français de distribuer le corpus aux élèves après leurs examens de janvier. Pour cause d’affrontements dans la ville, l’école a dû fermer plusieurs jours ; de peur de prendre trop de retard dans son programme, l’enseignante ne pouvait pas nous accorder plus de temps. La directrice tenait toutefois à nous aider, et pour ce faire, elle nous attribué la séance hebdomadaire d’une heure trente consacrée aux contrôles continus ; la surveillante générale a donc regroupé les deux sections de français dans la grande salle prévue pour les examens. Malheureusement, en peu de temps et avec 60 élèves qui n’avaient pas du tout lu les textes alors qu’ils les avaient eus bien avant notre passage, nous n’avons pas pu faire grand-chose.

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