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Les théories de l’apprentissage sous-jacentes à la pédagogie dialogique et les types de

Chapitre III : Les trois types de discussion 33 

3.1.  Les théories de l’apprentissage sous-jacentes à la pédagogie dialogique et les types de

élèves

Avant de pouvoir aborder de manière plus détaillée les types de discussions qui sont le cœur de notre cadre conceptuel, il est important de comprendre certains aspects des théories d’apprentissages sous-jacentes. Nous nous intéresserons ici essentiellement à la recherche socioculturelle avec la théorie de Vygotsky et la théorie de la zone de développement intermentale (ZDI) de Mercer.

L’importance de Vygotsky pour la discussion et son concept

d’internalisation

Wells et Ball (2008) se réfèrent à Vygotsky afin de mettre en évidence l’importance du dialogue pour l’individu pour prendre en charge son propre apprentissage afin de participer de manière productive aux activités de la communauté et de la société au sens plus large. Ils citent Vygostky qui explique : « how, by receiving assistance in thinking together with others, one transforms one’s ability to engage autonomously in thinking, planning and reflecting on action in the dialogue of « inner speech ». » (p. 170). Comme Vygotsky, ces auteurs mettent l’accent sur l’investigation collaborative de groupe. La classe est vue comme étant une communauté dans laquelle chaque individu apporte un sens supplémentaire afin d’atteindre une compréhension commune d’un phénomène.

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Mercer et Dawes (2008) utilisent la théorie de Vygotsky pour expliquer comment l’utilisation du langage peut devenir un outil que les enfants utilisent pour « penser ensemble » ou plus exactement pour « interpenser » (Mercer, 2000). Vygotsky a été un des premiers psychologistes à prendre en compte le rôle de la discussion dans l’organisation que l’on comprend du monde qui nous entoure.

He insisted that our ability to talk and think is in the first instance social and only later becomes individual. By participating in activities and talk, children come to make as their own the purposes, practical categories and ways of going about things that are essential to their social environment, to their families and to the other groups they belong to. (Barnes, 2008, p. 7)

Ainsi, selon une perspective Vygotskienne, c’est par le fait d’être en interaction et de discuter avec les autres que l’enfant va construire ses propres représentations.

Mercer et Dawes (2008) font référence au concept d’internalisation de Vygotsky, qui fait valoir que le développement cognitif résulte d’un processus de socialisation linguistique. Ce concept semble démontrer que le processus de réflexion se fait seul en tant qu’individu. Quand Vygotsky décrit la langue comme un moyen de médiation, comme un outil, il semble dire par là qu’elle facilite le développement cognitif des individus dans le sens d’une pensée purement logique. Ceci s’explique par le fait que le modèle de raisonnement de Vygotsky était essentiellement un modèle monologique. Vygotsky voyait donc de manière monologique, en d’autres mots, de manière individuelle (avec soi-même) le raisonnement. « By this was meant that the idea behind it was of a self contained logical system, a system in which each element is perfectly defined by the other elements so that there is no ambiguity or conflicting interpretations » (Wegerif et Mercer, 1997, p. 51).

Suite à ces déductions, Wegerif et Mercer (1997) soulèvent alors une ambivalence dans la théorie socioculturelle contemporaine :

On the one hand, it is argued that cognition is embedded in language use, and this is used to justify close attention to social, collaborative processes of learning. On the other hand, language use is still treated as little more than a “mediating means” for supporting individual cognitive development towards abstract rationality. (p. 51)

Cette ambivalence a poussé les chercheurs à dépasser la recherche socioculturelle au- delà des limites de l’horizon de la théorie de Vygotsky « Education could then be studied critically as a process for enabling children to use language more effectively as a means

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for carrying out joint, social intellectual activity » (Wegerif et Mercer, 1997, p. 51). Pour cela, certains auteurs, notamment Bakhtine (Volosinov), insistaient sur le fait qu’il faut dépasser le modèle monologique de Vygotsky. Bakhtine (Volosinov) a créé la théorie dialogique qui est aujourd’hui largement utilisée en éducation.

En plus de requestionner le modèle de raisonnement monologique de Vygostky, nous développons dans la prochaine section un second aspect de la théorie de Vygotsky : la zone de développement proximale, qui est elle aussi remise en question et transformée en un nouveau concept appelé « la zone de développement intermentale » par Mercer (2000).

La zone de développement intermentale (ZDI) de Mercer (2000)

Mercer (2000) fait référence à un autre concept de la théorie de Vygotsky notamment la zone proximale de développement (« ZPD », mêmes initiales en anglais) qui définit la différence entre l’originale et l’éventuelle réalisation. Vygotsky défendait l’idée que « instruction is only useful when it moves ahead of development ». Mercer (2000) reformule cela ainsi : « good teaching should draw children just beyond their existing capabilities to stretch their intellect and so help them to develop. » (p. 140).

Ce concept de ZDP exprime, selon le point de vue de Vygotsky, que le développement individuel est quelque chose de « sensible » au dialogue, mais surtout un processus selon lequel les processus d’apprentissages de l’individu sont facilités et accélérés par l’activité sociale (intermentale). En d’autres mots, c’est au travers de l’activité sociale que l’individu va faciliter son processus d’apprentissage individuel (intramentale).

Mercer (2000) compare son concept d’« interpenser », dont nous avons parlé plus haut, au processus intermental (activité sociale) de Vygotsky. C’est donc ainsi que Mercer (2000) développe sa théorie de l’« Intermental Development Zone » (IDZ).

In this intermental zone, which is reconstituted constantly as the dialogue continues, the teacher and learner negotiate their way through the activity in which they are involved. If the quality of the zone is successfully maintained, the teacher can enable a learner to become able to operate just beyond then established capabilities, and to consolidate this experience as new ability and understanding. If the dialogue fails to keep minds mutually attuned, the IDZ collapses and the scaffolded learning grinds to a halt. Like Vygosky’s original idea of the ZPD, the concept of an “intermental development zone” still focuses attention on how a learner progresses under guidance in an activity, but in a way which is more clearly related to the variable contributions of both teacher and learner. (p. 141)

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La Zone de développement intermentale (ZDI) est souvent décrite comme l’espace partagé créé par l’activité conjointe entre un enseignant et un élève et les discussions quand un enseignant apprend à un élève.

L’importance du dialogue dans les apprentissages expliquée par Vygostky et la ZDI de Mercer sont deux concepts qui permettent de mieux comprendre l’importance de la discussion dialogique pour les apprentissages des élèves. Dans la prochaine section, nous vous présentons les concepts clés de l’enseignement dialogique.