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Section 2 : Les tempéraments au principe de non-discrimination ou les motifs légitimes ou faits justificatifs

A) La théorie de role-modeling

123. Qu’en est-il du cas où la personne qui exerce un métier doit être un exemple (de santé, de minceur, de glamour, d’élégance ou de propreté) aux clients ou consommateurs ou usagers ? L’apparence physique ne projette-t-elle pas des messages sur le genre de personne qu’un employé est ? Et serait par voie de conséquence celle prise en considération par l’employeur et les clients ? La notion de role modeling est aussi étroitement liée à celle des préférences et satisfaction des clients861 qu’à l’image de l’entreprise. Cette notion relève d’une logique de embedded personhood, c’est-à-dire quelqu’un qui ne peut être entièrement compris sans tenir sérieusement compte de ses traits physiques862. Parfois, incontestablement, notre apparence reflète qui nous sommes et la façon dont nous désirons être vus ou « interprétés » par notre clientèle et autrui. Les lois contre la discrimination de manière générale, notamment en matière de lookisme, sont en conflit avec la logique de embedded personhood.

Dans le cadre de certains métiers, tel que le mannequinat, l’apparence corporelle prend un usage symbolique et représente soit une marque de respect redevable aux interlocuteurs, soit relève du sérieux de la fonction et des responsabilités qui y sont rattachées. L’apparence physique devient ainsi un moyen pour convaincre, attirer, gagner la confiance, l’adhésion et le respect d’un public visé. Quelle que soit la raison psychologique ou physiologique, les employeurs considèrent que les individus qui n’ont pas l’air de prendre soin d’eux n’aspireront pas confiance chez les clients potentiels863, ce qui justifie le pouvoir des employeurs de ‘contrôler’ l’apparence physique des salariés et de poser des standards minimums d’apparence.

Par exemple, en matière de produits de luxe, il nous parait logique que les personnes représentant ces marques, directement ou indirectement, aient une apparence physique soignée, hygiénique et bien entretenue (ongles bien soignés, cheveux propres et bien coiffées,…). Aussi, comment imaginer une vendeuse de produits dermatologiques à la peau acnéique par exemple ?

861Cour d’Appel de Douai, chamber sociale, 29 septembre 2004 n° 00-523.

862 KIRKLAND A., Fat Rights: dilemma of difference and personhood, New York: University Press, 2008. 863

FOWLER-HERMES J., « Appearance-based discrimination claims under EEO laws », Florida Bar Journal, vol. 75, édition 4, avril 2001.

174 B) Les coûts engendrés par les salariés obèses

124. Les personnes obèses courent des risques élevés au niveau de la santé, de l’absentéisme et de la productivité basse864, de plus hauts risques de litiges judiciaires, de plus hauts coûts pour les employeurs et de la mauvaise publicité865.

L’obésité aux États-Unis coûte aux compagnies plus que 45 milliards de dollars (soins médicaux et absentéisme) selon un rapport de 2008866.

L’un des arguments les plus fréquemment utilisés en matière de grossophobie est le fait qu’embaucher des personnes « à risque » -en l’occurrence obèses- reviendrait à supporter des coûts supplémentaires de soins médicaux867 et en primes d’assurance-maladie. Les employeurs peuvent argumenter que les personnes en surpoids manquent de qualités essentielles comme par exemple l’agilité et qu’elles sont plus enclin à développer des éventuels problèmes cardiaques. En outre, les personnes en surpoids seraient davantage sujettes à des problèmes de santé, ce qui contribue à l’absentéisme et à la productivité réduite868

. En effet, les tribunaux américains ont permis à certains employeurs de rejeter des candidats en surpoids, alors même que l’employé ne souffrait d’aucun problème de santé869

.

D’autre part, il est intéressant de noter que les niveaux de poids couverts par l’assurance aux États-Unis pour tout traitement ou médicament baissent d’année en année. N’est-ce pas artificiel et arbitraire de baisser les index de poids de manière injustifiable ? N’est-ce pas injuste envers

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BARRINGTON L., ROSEN B., « Weights & measures: What employers should know about obesity », The Conference Board, http://www.conference-board.org/publications/publicationdetail.cfm?publicationid=1477, 2008.

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ROELING M., « Weight discrimination in the American workplace: Ethical issues and analysis », Journal of Business Ethics, vol. 40, 2002, p.183. Voir aussi CARMICHAEL M., « We really need a law to protect fat workers ? », Boston Globe, 5 août 2007, p. 26. Voir MAGUIRE K., « Legislation would expand law to protect short, fat people, », Associated press, 17 mai 2007, http://www.boston.com/news/local/massachsussets/articles/2007/05/17/legislation_would_expand

_law_to_protect_short_fat_people. 866

SWANTON M., « Weighty issues: Courts say workers comp covers weight reduction surgery, obesity epidemic raises both workers comp and ADA litigation risks for employers », 12 janvier 2009. http://www.insidecounsel.com/Issues/2009/December-2009/Pages/Weighty-Issues.aspx?page=3.

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BARRINGTON L., ROSEN B., « Weights & measures: what employers should know about obesity », The Conference Board, http://www.conference-board.org/publications/publicationdetail.cfm?publicationid=1477, 2008. Voir aussi WANN M., Fat! So?, Berkley:CA, Ten Speed Press, 1998, p. 154. Dans les années 1980, la compagnie U- Haul de location de voitures charge les personnes obèses de primes d’assurances plus élevées, contrairement aux fumeurs par exemple. Voir STEAMS P., Fat history: Bodies and beauty in the modern west, New York: Gothman Books, 2004, p.115.

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BARRINGTON L., ROSEN B., « Weights & measures: What employers should know about », The Conference Board, http://www.conference-board.org/publications/publicationdetail.cfm?publicationid=1477, 2008.

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175 les classes socio-économiques inférieures, dont le mode de vie est moins sain et engendre le surpoids870 ? En outre, si cet argument était valable, par un raisonnement d’analogie, ne devrait- on pas administrer le même traitement aux individus fumeurs, alcooliques et anorexiques ?

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