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Autres arguments contre la protection législative contre le lookisme

100. Le débat sur la question de la nécessité de mettre en place une loi anti-lookiste se résume en ces termes: Désirons-nous réellement que les juges déterminent des standards objectifs de beauté ou d’apparence physique professionnelle? Est-ce le véritable rôle qui leur est attribuable ? De même, est-ce vraiment bénéfique pour les victimes de mettre en avant leur excès ou leur manque d’attractivité ou leur look inadéquat en justice702

?

101. Un grand nombre d’auteurs américains s’opposent catégoriquement à ce type de législation703. Selon certains, « de bonnes intentions ne forment pas nécessairement de bonnes lois704 ». De plus, on soutient que le rôle des lois contre la discrimination est d’éradiquer certaines formes de discrimination et non pas de transformer les organisations et les employés en

702

CINO V., « Labor: beauty bias and the limits of the law » http://www.insidecounsel.com/Exclusives/2010/9/Pages/Beauty-Bias-and-the-Limits-of-the-

Law.aspx?k=discrimination+physical+appearance, 27 septembre 2010. 703

TIETJE L., CRESAP S., « Is Lookism unjust?: The ethics of aesthetics and public policy implications », Journal of Libertarian Studies, vol. 19, 2005, p. 31, 48. BARRO R., « So you want to hire the beautiful. Well, why not? », Business Week, 16 mars 1998, p. 18. JAMES R., « If you are attractive and you know it, please apply: Appearance based discrimination and employer discretion », Valparaiso University Law Review, vol. 42, 2008, p. 629-677. 704

MAGUIRE K., « Good intentions don't necessarily make for good legislation ». http://www.metrowestdailynews.com/news/x23455798#ixzz1m52aox3D, Gate House News Service, 17 mai 2007.

141 ‘super humains’705

ni même d’abolir toute forme de subjectivité dans les choix. Certains penseraient même que résoudre le conflit en faveur du droit produirait des résultats absurdes706.

Il convient de lire la théorie du Professeur Robert Post. Selon lui, une loi fédérale anti-lookisme n’est pas la bonne solution. Il affirme que: « Anti-lookism ordinances abstract so severely from everyday social life that it is difficult to imagine how they could possibly reconstruct any actual social practice »707.

De plus, une loi de la sorte porterait atteinte au droit de l’employeur à l’indépendance et il serait extrêmement difficile de bien la rédiger. L’interprétation des cours serait très confuse. L’interprétation du terme ‘apparence physique’ serait très difficile et une telle loi ne protégerait pas les personnes qui le méritent.

De plus, quand bien même ces problèmes seraient résolus, il resterait un malaise général vis-à- vis d’une telle loi. L’apparence physique joue un rôle tellement important dans notre manière de nous percevoir qu’il serait pratiquement impossible de s’en détacher « [i]n what sense does a person without an appearance remain a person ?708 ». En effet, Post se pose la question de savoir si l’on réalise véritablement ce que signifierait de rencontrer une personne et de la traiter comme si son visage, son corps, sa voix et ses gestes étaient non pertinents, comme s’il s’agissait d’une personne sans apparence physique. Demeurerait-elle une personne709

? Il serait en effet irraisonnable de s’attendre des employeurs qu’ils agissent vis-à-vis des personnes belles de manière différente dans le milieu de travail et en dehors de ce milieu710.

Enfin, comme le fonctionnement de la société dépend des stéréotypes, la société est réticente à se désister de la valeur qu’elle donne aux apparences physiques711

.

705

CINO V., « Labor: Beauty Bias and the Limits of the Law » http://www.insidecounsel.com/Exclusives/2010/9/Pages/Beauty-Bias-and-the-Limits-of-the-

Law.aspx?k=discrimination+physical+appearance, 27 septembre 2010. 706

Voir les commentaires de la conclusion de Wilson v. Sw. Airlines Co., 517 F. Supp. 292 (Texas 1981). 707

« Les lois anti-lookisme en droit du travail diffèrent tellement des interactions de la vie quotidienne qu’il serait très difficile d’imaginer comment elles pourraient reconstruire des pratiques sociales préexistantes ». POST R., « Prejudicial appearances: the logic of American antidiscrimination law », California Law Review, vol.88, 2000. 708

POST R., « Prejudicial Appearances: The logic of American anti-discrimination law », California Law Review, vol. 88, 2000, p. 12.

709 POST R., « Prejudicial appearances: The logic of American anti-discrimination law », California Law Review, vol. 88, 2000, p. 12.

710 TOLEDANO E., « The glass mirror: Appearance-based discrimination in the workplace », From the SelectedWorks of Enbar Toledano, http://works.bepress.com/enbar_toledano/2, 2012.

711

POST R., « Prejudicial appearances: The logic of American anti-discrimination law », California Law Review, vol. 88, 2000, p. 12.

142 Les lois contre la discrimination seraient un mécanisme de transformation sociale et selon Post, ces lois seraient non pas une codification à aspiration d’équité, mais plutôt une « pratique sociale » qui régularise d’autres pratiques sociales influencées par les différences culturelles définies. Cette conception s’oppose à celle qui interprète les lois contre la discrimination en tant qu’une manière de contrer des décisions irrationnelles afin de garantir la prise de décisions basées sur le mérite712. Cette approche sociologique aurait pour objectif de changer non pas seulement la manière dont les personnes se traitent entre elles, mais également la manière dont elles se perçoivent713.

Les théories basées sur la transformation sociale expliquent que le lookisme est juridiquement permis en raison de la conviction sociale selon laquelle le lookisme a une valeur supérieure aux coûts et critiques qui existent à son encontre. Une prohibition juridique contre le lookisme imposerait donc un changement majeur et radical dans la manière de penser et de se comporter les uns avec les autres. D’autant qu’ajouter l’apparence physique à la liste des attributs que les employeurs devraient ignorer, exclurait tout élément subjectif et entraînerait des conséquences morales négatives en ce que cela ôterait tout degré d’humanité dans les interactions humaines. En effet, selon Post, les employeurs seraient amenés à considérer les candidats comme des instruments et non comme des êtres humains714. Post poursuit en disant que de telles lois pourraient aboutir à des extrêmes, tels que la protection des voix trop aigües ou des comportements grognons.

Aussi, certains mentionnent la parodie d’une protection excessive qui entrainerait des résultats absurdes et durs à croire : «By the time you’ve finished preventing discrimination against the ugly, the short, the skinny, the bald, the knobbly-kneed, the flat-chested and the stupid, you’re living in a totalitarian state »715.

Ces lois seraient un genre de reductio ad absurdum de la logique basique des lois américaines contre la discrimination qui s’applique aux critères de race ou de genre.

712POST R., « Prejudicial appearances: The logic of American antidiscrimination law », California Law review, vol. 88, 2000., p. 12.

713POST R., « Prejudicial appearances: The logic of American antidiscrimination law », California Law review, vol. 88, 2000 p. 12.

714 POST R., « Prejudicial appearances, the logic of American antidiscrimination law », California Law review, vol. 88, 2000, p.15.

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143 102. En outre, les dissidents à toute loi anti-lookisme redoutent qu’elle impose des coûts cachés sur des affaires et réduise le support pour d’autres législations qui prohiberaient les discriminations effectivement insidieuses716. En effet, ils partagent par exemple leur souci de voir que l’insertion du poids aurait un effet dissuasif pour l’établissement de nouvelles entreprises717. Ils considèrent que la protection contre la grossophobie entraînerait des procès, un engorgement des tribunaux, des coûts nettement supérieurs aux employeurs, et supposément, une mauvaise publicité718. Or, pour l’heure, il existe relativement très peu de procès en la matière. D’autres estiment que la protection contre la grossophobie en matière de travail changerait la direction des ressources visant à remédier aux discriminations fondées sur la race ou le genre719.

103. Aussi, certains redoutent que des lois locales soient trop vagues ou qu’elles aient des termes trop larges, ce qui entraînerait des résultats inconsistants, voire même une appréhension de la part des employeurs720. En effet, dans certains domaines, l’apparence physique est centrale, et l’interdire entraînerait des dommages directs aux employeurs721

. De plus, les dissidents à une protection juridique contre le lookisme considèrent qu’une belle apparence physique est préférée par les clients et collègues, par suite, elle augmenterait la performance de l’entreprise et donc elle devrait être considérée comme une qualification légitime pour le métier voire même comme un BFOQ722, notion que nous détaillerons au chapitre suivant. L’employeur devrait avoir la liberté de choisir les personnes compatibles avec l’environnement de son entreprise723

. Il conviendra d’insister sur ce point au chapitre 5, chapitre dans lequel nous imaginerons une loi

716

BYME P., « As a matter of fat », voir http://www.sfweekly.com/2001-01-17/news/as-a-matter-of-fat/, 17 janvier 2001. FROD R., The race card: How bluffing about bias makes race relations worse, New York: Farrar, Straus and Girous, 2008, p. 176.

717

Voir Mass. weighs extending discrimination law, MSNBC, 17 mai 2007, http://www.msnbc.msn.com/id/18725638/.

718

CARMICHAEL M., « Do we really need a law to protect fat workers? », Boston Globe, 5 août 2007, p.26. 719

MAGUIRE K., « Legislation would expand law to protect short, fat people », Associated Press, www.boston.com/news/local/massachusetts/articles/2007/05/17/legislation_would_

expand_law_to_protect_short_fat_people/, 17 mai 2007. 720

JAMES R., « If you are attractive and you know it, please apply: appearance based discrimination and employer discretion », Valparaiso University Law Review, vol. 42, 2008, p. 629-677.

721

BARRO J., « So you want to hire the beautiful. Well, why not? », Business Week, 16 mars 2008, p.18. 722

BARRO J., « So you want to hire the beautiful. Well, why not? », Business Week, 16 mars 2008, p.18.

723 VO L., « A more attractive look at physical appearance-based discrimination: Filling the gap in appearance-based anti-discrimination law », Southern Illinois University Law Journal, vol. 26, 2002, p. 339.

144 idéale et équilibrée en matière de lookisme, recouvrant uniquement les traits qu’elle serait censée recouvrir.

De plus, certains estiment qu’une loi spécifique sur le lookisme, précisant les critères prohibés, tels que la taille, le poids et les traits faciaux pourrait créer un engorgement indésirable des tribunaux. Or les États du Michigan724, Santa Cruz et San Francisco725, ont prouvé que cela n’a pas été le cas ; d’autant plus que certains pourraient supposer qu’une telle loi augmenterait les coûts de procédure d’action en justice. Toutefois Santa Cruz par exemple, n’a pas eu à subir des coûts additionnels en matière de protection contre la discrimination en rapport avec le poids726.

104. Un autre argument est le suivant. Selon certains, les lois contre la discrimination, notamment celle du Civil Rights Act, sont fondées sur la notion de blâme et de faute. Elles responsabilisent les personnes qui ont des comportements injustes. Or, la discrimination fondée sur l’apparence ou l’orientation sexuelle par exemple, ne serait pas suffisamment grave pour être sanctionnée727.

En effet, selon certains, le lookisme n’est tout simplement pas injuste, et pas assez ‘immoral’ ou grave pour être défié par la loi. C’est un phénomène naturel et humain et il n’est pas du rôle de l’État de garantir la moralité728

. En effet, certains argumentent que le fait que nous complimentons incessamment la belle apparence physique et non pas la blancheur de peau ou la santé physique prouve que le lookisme n’est pas immoral729.

D’ailleurs, selon Monsieur Feldman, la discrimination devient moralement inacceptable quand il s’agit de traiter une personne de manière moins favorable que les autres en se fondant sur une

724

SOLOVAY S., Tipping the scales of justice: Fighting weight-based discrimination, Amherst, New York, Prometheus Books, 2000, p. 25-26.

725

KUBILIS C., « Weighting for protection in Massachusetts: the myth of equal opportunity in employment », Suffolk University Law Review, vol. 211, 2008.

726

KUBILIS C., « Weighting for Protection in Massachusetts: the myth of equal opportunity in employment », Suffolk University Law Review, vol. 211, 2008.

727 THERAN E., « Free to be arbitrary and ... capricious: Weight-based discrimination and the logic of American anti-discrimination law », Cornell Journal of Law and Public Policy, vol. 1, 2001.

728

TIETJE L., CRESAP S., « Is lookism unjust ?: The ethics of aesthetics and public policy implications », Journal of Libertarian Studies, vol. 19, 2005, p. 31, 48.

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TOLEDANO E., « The glass mirror: Appearance-based discrimination in the workplace », dans SelectedWorks of Enbar Toledano, 2012.

145 considération qui est moralement « impertinente »730. Les critères « moralement impertinents » sont ceux qui sortent du contrôle de l’individu, tels que le sexe, l’âge, la race, le handicap. Nous voyons bien que ces critères sont hors du contrôle de l’individu.

105. Aussi, est-il possible de soutenir que les victimes garderaient le silence ou ne se prononceraient que rarement par peur des représailles. En effet, selon le rapport de SOS racisme, les victimes de discrimination sont réticentes à faire valoir leurs droits devant des tribunaux et préfèrent rester anonymes : « Souvent les victimes anonymes de discriminations raciales à l’embauche redoutent de participer à la procédure judiciaire ou de se constituer partie civile par peur de la justice et des complications. Elles ne souhaitent pas non plus s’investir dans une action qui va être longue et à l’issue incertaine »731. Cela s’applique aussi pour les témoins732

. Dans la plupart des cas, le silence ou le déni de ces personnes est justifié soit par leur ignorance des moyens auxquels ils peuvent avoir recours, soit en raison de la fragilité des situations sociales, par crainte de l’avenir, en l’absence de perspectives et donc par peur de perdre un emploi733.

Non seulement le problème de standard de ‘beauté’ ou ‘laideur’ se pose, mais aussi, imaginons un procès où l’employeur conteste l’appartenance du demandeur à la catégorie de ‘physiquement sous la moyenne’ et que la victime concède qu’elle y appartient effectivement734. Scénario réaliste ? Elle se sentirait probablement embarrassée d’en discuter devant un juge. C’est de l’autocensure préalable735

.

730 FELDMAN D., Civil liberties and human rights in England and Wales, 2ème edition, Oxford University Press, 2002, p. 135.

731

Voir BOUZIDI M., « Les chemins de la non-discrimination en entreprise : entre poids des apparences et promotion de la diversité : un nouveau défi pour la fonction Ressources Humaines », Mémoire de Master 2 Professionnel, Ressources Humaines, Promotion 2006, p.28.

732

Selon le rapport de SOS Racisme, « Un salarié de la société BASF a fait parvenir à l’association la copie d’un e- mail reçu en interne qui comportait des critères d’embauche discriminatoires. La personne a souhaité faire connaitre ce délit mais elle a préféré taire son identité ». BOUZIDI M., « Les chemins de la non-discrimination en entreprise : entre poids des apparences et promotion de la diversité : un nouveau défi pour la fonction Ressources Humaines », Mémoire. Master 2 Professionnel, Ressources Humaines, Promotion 2006, p.28.

733

BOUZIDI M., « Les chemins de la non-discrimination en entreprise : entre poids des apparences et promotion de la diversité : un nouveau défi pour la fonction Ressources Humaines », Mémoire. Master 2 Professionnel, Ressources Humaines, Promotion, 2006, p.29.

734MCDONALD J., FISHER Jr., PHILIPS LLP., «”Lookism”, the new form of illegal discrimination », Bloomberg

law reports, vol. 4, n° 46, 2010.

735

Entretien avec Monsieur Yves Dautrioux, représentant du conseil d’État auprès du Défenseur des droits, Paris, le 21 mai 2013.

146 106. De plus, la différence entre l’attractivité et les autres critères protégés est que ces derniers sont immuables, inaltérables. L’apparence physique est, quant à elle, mutable dans une large mesure, et par suite, la discrimination à raison de l’apparence physique ne devrait pas être protégée736.

107. L’on pourrait se demander si une telle loi n’affecterait pas négativement l’attitude des employeurs. Le manque d’attractivité deviendra-t-il un critère pour une discrimination positive ? Les employeurs engagés dans la diversité au sein de l’entreprise seraient-ils fiers de recruter des personnes au physique ‘en deçà de la moyenne’ ? Certains vont même jusqu’à se demander si les personnes très attrayantes ne seraient pas tentées d’’enlaidir’ leur apparence physique afin de ne pas se faire rejeter ! Les employés qui se sentiraient en danger, prendraient-ils du poids volontairement afin d’être protégés par la loi737

? L’on va même jusqu’à croire qu’une loi anti- lookisme en matière de travail pousserait les personnes à blâmer leur échec au travail au motif de leur belle apparence physique ! Sans nul doute, cela va à l’extrême et est certainement absurde.

Le chemin à parcourir dans la lutte contre le lookisme demeure encore long et de nombreux obstacles persistent. Reste à définir lesquels…

736

Sur les modes d’altération du physique: maquillage, … voir TOLEDANO E., « The glass mirror: Appearance- based discrimination in the workplace », From the SelectedWorks of Enbar Toledano, 2012.

737

MCDONALD J., FISHER Jr., PHILIPS LLP., «”Lookism”, the new form of illegal discrimination », Bloomberg law reports, vol. 4, n°46, 2010.

147 CHAPITRE 3 : LES AUTRES OBSTACLES À UNE PROTECTION JURIDIQUE ABSOLUE CONTRE LE LOOKISME

108. La mise en application d’une loi apportant une protection juridique complète contre le lookisme, c’est-à-dire prévoyant et apportant des solutions à tous les cas de lookisme, se révèle être une démarche extrêmement complexe car elle implique de relever des défis juridiques et sociaux majeurs. Les obstacles à la légifération d’une telle protection comprennent notamment d’une part les difficultés en matière de preuve, la part possible d’arbitraire dans la détermination du lookisme, l’impossibilité de définir un standard objectif de ‘beauté’ ou de look idéal, le risque de surcharge de l’appareil judiciaire lié à un trop grand nombre d’actions en justice ainsi que celui d’une utilisation abusive du droit d’ester en justice, la problématique de redondance avec les sanctions des lois existantes et la difficulté de heurter des croyances enracinées dans la société. Par ailleurs, les violents conflits d’intérêt opposant les employés et employeurs, ces derniers disposant d’une protection juridique, semblent difficiles à trancher.

Appliquer un principe d’égalité absolue signifie proscrire toute distinction quelqu’en soit la justification. Or, le principe de non-discrimination revêt un objectif plus précis : il prohibe toute différence de traitement basée sur un critère illégitime. Et même dans ce dernier cas, il admet des dérogations si elles sont proportionnées ou répondent à une justification légitime. En principe, une discrimination fondée directement sur un critère prohibé ne peut pas être justifiée. Or, selon certains, les différences de traitement ne sont pas a priori prohibées car choisir revient à discriminer, et toute différence de traitement n’est pas nécessairement constitutive d’une discrimination738. Elle l’est si et seulement si la différence de traitement devient arbitraire.

Il existe sans nul doute, dans les droits français et américains de la discrimination, une contradiction entre le principe de liberté qui assure à chacun le libre choix de son comportement et le principe de non-discrimination qui, a contrario, impose ou prohibe certains comportements. Comment peut-on interpréter le principe de non-discrimination de manière à créer un équilibre, sans toutefois contredire le droit ?

738

BAVENCOFFE C., « L’article L. 122-45 du Code du travail », Université de Lille II, Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales, mémoire de Diplôme d’études approfondies, Droit Privé sous la direction de Mr. Bossu, année universitaire, 1999-2000.

148 Dans le cadre d’un entretien d’embauche, bien qu’il soit déconseillé au recruteur de poser au candidat des questions relatives à son âge, son sexe, ses origines, son orientation sexuelle, sa religion ou son handicap, a-t-il pour autant le droit de se fonder sur des critères physiques lors de l’entretien pour déterminer son choix ? Le cas échéant, sur quel(s) fondement(s) pourrait-il s’appuyer ?

Section 1 : Le droit de l’employeur à l’autonomie de la volonté et la liberté de choix

109. La question du lookisme dans l’emploi crée une tension fondamentale entre les droits de l’homme du salarié et les droits de l’employeur. En effet, nous avons d’un côté les droits des employés ou candidats à l’emploi à l’égalité de traitement739, l’égale opportunité, l’égalité

professionnelle, l’égal accès au travail et la dignité ; et de l’autre la liberté de l’employeur d’entreprendre, à valeur constitutionnelle740

et a fortiori la liberté contractuelle (à titre d’exemple, le libre choix des collaborateurs741), la liberté d’organiser et de gérer742

ou diriger

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