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8.2 Spécifications fonctionnelles

8.2.3 Tableau de spécifications

90 100 110

Taux d’identification du marqueur

Taux de présence de l’attribut

COMPOSTEURS Attaque Franche Court Mat Rugueux Bruité

Fig. 8.10: Évolution du taux de présence des attributs au sein du corpus de sons de composteurs, en fonction du taux d’identification du marqueur. Les attributs dont les courbes atteignent rapidement le plafond de 100 % (court, bruité) sont les invariants de la classe. Ceux dont les courbes l’atteignent tardivement (mat, rugueux, bruité) sont des tendances. Les autres attributs sont des leviers. Dans le cas des composteurs, aucun

des mots présentés sur cette figure ne rentre dans la catégorie des leviers.

sonneries de téléphone ou de cour de récréation. La limite entre continuité, discontinuité et rugosité devient délicate dans de tels cas, et les critères de décision des auditeurs ne sont pas maîtrisés. Une solution est de choisir un seuil de binarisation égal à 51 % (majo-rity vote), afin de gagner en précision (au détriment de la quantité d’informations). Dans ce cas, il pourrait être intéressant de mener l’expérience d’indexation en sélectionnant dès le début des participants experts dans le domaine du son.

8.2.3 Tableau de spécifications

Ces analyses nous ont permis de dégager un tableau (voir tableau8.3) recensant les attri-buts caractéristiques de chaque marqueur issus de notre analyse de l’existant. Nous avons indiqué les invariants et les tendances de chaque marqueur sonore ainsi que les leviers que nous avons mis en évidence. Ce tableau constitue les spécifications fonctionnelles de chacun des marqueurs sonores pour la phase de création. Ce tableau de synthèse a été communiqué à l’agence LAPS au début de la phase de création sonore3. D’autres termes sont susceptibles d’être des leviers : il suffit par exemple qu’un seul des exemplaires d’un

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La version du tableau fournie à LAPS était légèrement différente de celle que nous présentons ici. En effet, nous avons affiné notre méthodologie de détermination des invariants et leviers après le début de la phase de création. La version du tableau que nous avons communiquée à LAPS se trouve en annexe

0% 25% 50% 75% 100% 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110

Taux d’identification du marqueur

Taux de présence de l’attribut

ALARMES Aigu Constant Continu Discontinu Long Artificiel Rugueux Tonal

Fig. 8.11: Évolution du taux de présence des attributs au sein du corpus de sons d’alarmes, en fonction du taux d’identification du marqueur. Les attributs dont les courbes atteignent rapidement le plafond de 100 % sont les invariants de la classe, ceux dont les courbes l’atteignent tardivement (long, constant) sont des tendances. Les autres attributs sont des leviers. Dans le cas des alarmes, aucun des mots présentés sur

cette figure ne rentre dans la catégorie des invariants.

corpus possède un attribut pour considérer l’attribut en question comme un levier de design. De plus, notre inventaire se limite à 40 sons pour chaque marqueur ; il peut exis-ter pour un marqueur des leviers que nous n’observons pas dans cette sélection. Nous ne présentons dans ce tableau que les leviers que nous avons isolés à la suite de l’analyse fonctionnelle.

Marqueurs Alarme Composteur Flap-Flap Impact Ouverture Validation

Invariants

-Court Discontinu Court

Bruité Court Bruité Bruité Franc

Traits

Long Mat Long Sourd Continu Aigu

Constant Rugueux Constant Grave Rugueux Brillant

Franc Rugueux Bruité Progressif Tonal

Mat Grave Lisse

Sourd Leviers Aigu -Proche Mat

-Continu Fluctuant Résonant Artificiel

Discontinu Artificiel Rugueux Tonal

Tab. 8.3: Tableau récapitulatif des spécifications fonctionnelles pour chacun des six marqueurs sonores

8.2.4 Discussion

Nous avons choisi d’établir les spécifications fonctionnelles pour le design des six mar-queurs à partir d’une analyse de l’existant. Ce choix peut paraître contraignant : pourquoi se limiter à ce qui existe déjà alors que l’on cherche à créer un nouveau son ? Une autre approche consisterait à réinventer totalement le son, en se plaçant en rupture de ce qui existe aujourd’hui. Nous rappelons cependant que nos travaux de recherche portent sur la question de l’identité sonore. Nous avons choisi de conserver les fonctions telles qu’elles existent aujourd’hui pour que le travail de design sonore se concentre sur l’identité. L’in-ventaire de 240 sons que nous avons réalisé nous a servi de base pour l’étude perceptive de chacun des marqueurs sonores. L’analyse fonctionnelle que nous avons proposée permet, à partir des données d’indexation de cette base, de dégager les invariants, tendances et leviers de chaque objet. Nous obtenons ainsi des portraits de chaque marqueur (tableau

8.3) plus précis que ce que l’on pouvait visualiser sur la carte de l’espace sensoriel (figure

pour la classe composteur ) sont situés relativement loin du barycentre de la classe cor-respondante dans l’espace sensoriel. Ces attributs ne sont pas exclusivement liés à une classe, mais des exemplaires de sons d’autres classes peuvent les exprimer. L’exemple de l’attribut court est intéressant : il est invariant de la classe des composteurs et de celle des impacts, et c’est une tendance des validations. L’analyse des correspondances tient compte de toutes les relations entre sons et mots pour générer un espace de visualisation optimal. L’analyse fonctionnelle que nous proposons permet de rentrer dans le détail des relations entre attributs et classes de sons. Un autre résultat étonnant est l’absence d’in-variants pour la catégorie des alarmes. Cette classe est celle dont les exemplaires identifiés (expérience E3) sont les plus nombreux. Pourtant, il n’y a pas d’attributs communs à tous les exemplaires de cette classe. Ce phénomène n’est pas sans rappeler les propos de Wittgenstein (Wittgenstein 1953) lorsqu’il démontre qu’il n’y a pas de traits communs à tous les exemplaires de ce que l’on nomme « jeux », mais que les membres de cette fa-mille sont apparentés et partagent certains traits et pas d’autres, formant ainsi un réseau d’associations complexe4. Nous avons des alarmes courtes, d’autres longues, la plupart sont aiguës mais certaines ne le sont pas ; certaines sont artificielles et discontinues, alors que d’autres sont continues et naturelles. Nos recherches ne sont pas focalisées sur les alarmes (qui dans le domaine du son constituent un sujet de recherche à part entière) mais le lexique sonore et l’analyse que nous avons faite peuvent constituer des outils pour explorer les différentes propriétés de cette classe de sons. Nous n’avons pas isolé d’invariants pour ce marqueur, mais il serait pertinent d’étudier des sous-catégories de la famille d’alarmes (par exemple, en fonction du degré d’urgence perçu). L’analyse fonc-tionnelle que nous avons proposée peut s’appliquer à n’importe quel ensemble de sons, et permettrait donc d’extraire les invariants relatifs à ces sous-catégories, s’ils existent. Notre approche reste fortement dépendante de la constitution de l’inventaire de sons, et surtout de sa caractérisation par les attributs du lexique (et donc du lexique lui-même). Notre méthodologie d’analyse fonctionnelle est exploratoire et les idées d’invariants, de tendances et de leviers mériteraient de plus amples investigations. Dans notre cas pra-tique, cette méthodologie a néanmoins permis d’extraire pour chaque objet une liste de termes du lexique caractérisant la fonction ou la nature de l’objet. Le design sonore des marqueurs de notre étude s’appuiera sur ces caractéristiques.

4« Considérons par exemple les processus que nous nommons les « jeux ». J’entends les jeux de dames et d’échecs, de cartes, de balle, les compétitions sportives. Qu’est-ce qui leur est commun à tous ? — Ne dites pas : Il faut que quelque chose leur soit commun, autrement ils ne se nommeraient pas « jeux » — mais voyez d’abord si quelque chose leur est commun. [...] Voyez, par exemple, les jeux sur damiers avec leurs multiples affinités. Puis passez aux jeux de cartes : ici vous trouverez beaucoup de correspondances avec la classe précédente, beaucoup de traits communs disparaissent, tandis que d’autres apparaissent. Si dès lors nous passons aux jeux de balle, il reste encore quelque chose de commun, mais beaucoup se perd. — Tous ces jeux sont-ils « divertissants » ? Comparez les échecs et la marelle [...]. Songez maintenant aux jeux de rondes : ici, il y a l’élément du divertissement, mais combien d’autres caractéristiques ont disparu ! Et ainsi nous pouvons parcourir beaucoup d’autres groupes de jeux ; voir surgir et disparaître des analogies. » (Wittgenstein 1953)