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Systèmes de gestion de la santé et de la sécurité au travail

2.2 APPROCHES DE PRISE EN CHARGE DE LA SST

2.2.3 Systèmes de gestion de la santé et de la sécurité au travail

Les systèmes de gestion de la santé et de la sécurité au travail (SGSST) sont une approche de PCSST (Frick et Kempa, 2011; Gallagher, Underhill et Rimmer, 2001; Gamache et Pérusse, 2006; Gey et Courdeau, 2009; Marsden et al., 2004; Munar, 2010; Robson, Clarke, Cullen, Bielecky, Severin, Bigelow, Irvin, Culyer et Mahood, 2007). C'est un « ensemble d'éléments liés ou interdépendants destinés à établir une politique et des objectifs de sécurité et de santé au travail, et à réaliser ces objectifs » (BIT, 2002, p. 25). Les SGSST ont émergé à la fin des années 1990 dans le contexte de l'amélioration continue inspirée par la Roue de Deming (planifier - faire - vérifier - agir) (Deming, 1982). C’est un phénomène « accentué par le mimétisme des entreprises pour une mode managériale naissante » (Askenazy, 2006, p. 81). Il est caractérisé par un formalisme dû aux nombreuses normes et procédures de SST.

L’émergence des SGSST a été favorisée par des États qui ont adopté différentes positions (Frick et Kempa, 2011). Certains, avec la directive européenne du 12 juin 1989 sur la SST, ont rendu obligatoire leur mise en place, assortie de contraintes

législatives (modèle obligatoire). D’autres ont laissé le choix aux entreprises d’y adhérer (modèle facultatif); c'est le cas des principes directeurs concernant les SGSST de l'OIT (ILO-OSH 2001) ou des Voluntary Protection Programs aux États-Unis (Redinger et Levine, 1998). Leur adoption par les entreprises montre leur maturité en prévention (Drais, Favaro et Aubertin, 2008). L’État offre des incitatifs pour encourager les entreprises à adopter les référentiels (Frick et Kempa, 2011). Cela explique le rôle des interventions externes et des incitatifs dans le déclenchement de la PCSST.

Les SGSST conduisent « à une meilleure prise en charge de la SST et à des diminutions d'accidents, de maladies et de coûts d'indemnisation » (Gamache et Pérusse, 2006, p. 17). Par exemple, Drais et al. (2008) constatent que « sur les dix entreprises observées, sept pensent avoir amélioré leur prise en charge de la SST du fait de leur structuration en matière de gestion de la prévention » (p. 9). Les entreprises qui appliquent les SGSST sont plus productives, performantes, compétitives et maximisent leurs revenus et leurs profits (Dobigny, Bianchi, Rio, Bohy, 2010; Marsden et al., 2004; Messier, 2009; Plante et Cloutier, 2007). Les SGSST améliorent l’image de marque des entreprises, le climat de sécurité, la perception par les employés de la SST, la participation aux activités de SST, l’augmentation de la productivité (Frick et Kempa 2011; Gamache et Pérusse, 2006; Marsden et al., 2004; Munar, 2010; Ndjoulou et Pérusse, 2012). Par exemple, Munar (2010) rapporte que sur les 35 entreprises observées en Pologne, 70 % ont diminué significativement leur taux d'accidents, 50 % ont réduit le nombre des employés exerçant dans des conditions dangereuses, 70 % ont bénéficié d'une baisse des primes d'assurance. En Suède, les employés de quatre établissements sur cinq sont satisfaits de leur environnement de travail.

Ces résultats sont dus à l'engagement des dirigeants, à la participation des employés et au renforcement du dialogue social. L’engagement des dirigeants à divers niveaux de la hiérarchie (Munar 2010) se traduit par l’intégration de la SST dans les systèmes de gestion (Frick et Kempa 2011; Marsden et al., 2004) et dans la stratégie de l’entreprise

(Frick et Kempa 2011; Gamache et Pérusse, 2006; Gey et Courdeau, 2009; Mathieu, 2007; Mouton, 2006; Munar, 2010; Ndjoulou et Pérusse, 2012; OIT 2011b; Pérusse et

al., 2012). Par exemple, à la suite de l’implantation des SGSST, Rolls Royce a

enregistré 11 millions £ de profits grâce à une bonne gestion des absences; ce montant n’est que la partie visible de l'iceberg (Marsden et al., 2004). La participation des employés passe par la prise de décision et la détection des risques propres à leurs activités (Mathieu, 2007). Les SGSST fonctionnent avec « un véritable dialogue social, qui peut prendre forme au sein d’un comité paritaire de SST » (OIT, 2011b, p.10). Ce dialogue facilite la communication sur les enjeux de SST entre les dirigeants et les employés (Mathieu, 2007; Pérusse et al., 2012). « Le dialogue social s’institutionnalise aussi au sein des établissements pérennes » (Amossé, 2006, p. 2). Les SGSST ont donc un effet positif sur la prise en charge et certains de ses éléments comme le dialogue social, la participation des employés, l’engagement des dirigeants constituent un véhicule pour pérenniser la PCSST (Frick et Kempa 2011; Gamache et Pérusse, 2006; Gey et Courdeau, 2009; Mathieu, 2007; Mouton, 2006; Munar, 2010; Ndjoulou et Pérusse, 2012; OIT 2011b; Pérusse et al., 2012).

Cependant, la mise en place des SGSST est bonne en théorie, mais comporte en pratique des lacunes (Frick et Kempa, 2011). Les SGSST exigent de la méthode, du temps et surtout de l’engagement (Mouton, 2006). La PCSST par les SGSST n'est pas toujours évidente, certaines entreprises s’en servent comme paravent pour des intérêts économiques (économies sur l'indemnisation) ou publics (bonne image ou accès au marché) (Downs, 2003; Frick et Kempa, 2011; Gallagher et al., 2001; Gey et Courdeau, 2009). Les petites entreprises rencontrent des difficultés dans l’implantation des SGSST à cause de leur taille : inaccessibilité aux ressources, instabilité de la main- d'œuvre, inexpérience en industrie, difficulté d'adaptation à l'autorégulation de la SST, état d'esprit peu enclin à une approche systémique de SST; leurs relations avec les intervenants externes sont souvent distantes (Gallagher et al., 2001 ; Lescure, Nadeau et Morency, 2015). Comme sous-traitants, les petites entreprises se voient imposer des

principes des SGSST sans une explication préalable, ni consultation de leurs employés. Les SGSST répondent plutôt aux besoins des GE, préoccupées par les coûts et les relations avec les États. Ils favorisent parfois une approche formaliste sans effet parfois sur l'engagement des dirigeants et la participation des employés. Malgré ces défis, les entreprises qui appliquent les SGSST s’en sortent mieux. Elles pérennisent la PCSST. Elles se sont appuyées sur l’engagement de leurs dirigeants, la participation de leurs employés et le dialogue social. Ce sont des conditions de succès à la pérennisation de la PCSST qui vont aider à l’élaboration du cadre conceptuel.