d’emprisonnement et d’amende. Or, le sursis probatoire peut être accompagné d’une obligation
de « se soumettre à des mesures d'examen médical, de traitement ou de soins, même sous le
régime de l'hospitalisation. Ces mesures peuvent consister en l'injonction thérapeutique prévue
par les articles L. 3413-1 à L. 3413-4 du Code de la santé publique, lorsqu'il apparaît que le
condamné fait usage de stupéfiants ou fait une consommation habituelle et excessive de
boissons alcooliques […]»
1145. Dans ce cas particulier le sursis probatoire et donc la peine
alternative, prend en compte l’alcoolisme ou la toxicomanie de l’agent, ce qui est intéressant.
Ce régime de l’hospitalisation renvoie donc aux cures de désintoxication prévues par le Code
de la santé publique.
288. Les cures de désintoxication
1146et l’importance du consentement. Les cures de
désintoxication
1147peuvent être une solution à la réduction de ce type de violences
involontaires, mais elles ne sont pas toujours imposées au délinquant et vont, le plus souvent,
nécessiter le consentement de la personne dépendante
1148. Il en va de la responsabilité d’un
auteur de violences involontaires qui devra soigner son addiction pour éviter de reproduire ce
type de violences évitables. Il est inutile de développer davantage à propos des cures de
désintoxication dans la mesure où elles ne sont pas prévues au titre de peine complémentaire
ou alternative, mais qu’elles peuvent toutefois être imposées parmi les obligations du sursis
probatoire, comme le précise l’article 132-45, 3° du Code pénal. Toutefois, il convient de
préciser que des améliorations sont nécessaires, en ce qui concerne l’hospitalisation sans
consentement d’abord et en ce qui concerne l’hospitalisation consentie ensuite
1149.
1143 À propos des peines alternatives : « il existe des peines qui, sans être prévues par le texte accompagnant l’incrimination, peuvent être prononcées “à la place” de l’emprisonnement ou de l’amende et se cumuler entre elles ou être prononcées en remplacement les unes des autres […] », in X. PIN, Droit pénal général, op. cit.,
p. 380.
1144 P. CONTE et P. MAISTRE DU CHAMBON, Droit pénal général, op. cit., n°452 et s. cité in X. PIN, Droit pénal général, op. cit., p. 377.
1145 Selon l’article 132-45, 3° du Code pénal, auquel renvoie l’article 739, alinéa 2 du Code de procédure pénale, à propos des obligations particulières pouvant être imposées lors du sursis probatoire.
1146 Ces questions ont déjà été développées de manière indépendante quand il était question de lutter contre la
toxicomanie et contre l’alcoolisme, cf. supra nos 173 (toxicomane) et 288 (alcoolique).
1147 Art. L. 3311-1 et s. CSP, en ce qui concerne l’alcoolisme et art. L. 3411-1 et s. CSP, en ce qui concerne la toxicomanie.
1148 Cela est notamment prévu à l’article L. 3414-1 du Code de la santé publique pour la toxicomanie.
1149 V. J.-B. PERRIER, « L’avènement historique de la judiciarisation », in J.-B. PERRIER (dir.), Soins et privation de liberté, LGDJ, 2015, 189 pages, p. 151 et s.
LES SPÉCIFICITÉS DE LA RÉPRESSION DES VIOLENCES INVOLONTAIRES AGGRAVÉES PAR LA PRISE DE SUBSTANCE NÉCESSITANT DES PEINES ADÉQUATES
196
289. Il semble que l’importance des soins des toxicomane et alcoolique soit négligée au
moment de sanctionner les auteurs de violences involontaires aggravées. Mais si les
toxicomanes ou alcooliques commettent des violences involontaires c’est parce qu’ils ont eu
accès aux substances psychoactives. Il va donc falloir sanctionner, en plus des auteurs de
violences involontaires aggravées par la prise d’alcool ou de stupéfiants ceux qui ont permis
cette prise de substance, en tant que complices.
§2.L
E RÔLE IMPORTANT DES COMPLICES DANS LA PRISE DE SUBSTANCE PSYCHOACTIVE290. La complicité d’une infraction non intentionnelle semble, a priori, difficile à
admettre
1150, dans la mesure où le fait principal punissable de l’auteur n’est pas souhaité. Elle
est pourtant admise à partir du moment où un fait principal est punissable
1151, peu importe qu’il
soit volontaire ou non
1152. En ce qui concerne les violences involontaires aggravées par la prise
de substance psychoactive, tout comme pour tout crime ou délit, est complice la personne qui
« [...] par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation
1153»
1154. Or, cette
aide ou assistance peut être retenue pour celui qui vend la substance psychoactive en cause.
Ainsi, des personnes physiques peuvent être complices de cette prise de substance (A), mais il
ne faut pas non plus négliger le rôle des personnes morales qui facilitent cette prise de substance
et qui peuvent logiquement être sanctionnées (B).
1150 S. FOURNIER, « Complicité », Rép. dr. pén., septembre 2019, n°44.
1151 « La complicité n’est caractérisée que si un fait principal punissable est établi en tous ses éléments constitutifs (Cass. crim., 4 mars 1998, Bull. crim., n°83.). Tel est le sens de l’article 121-7 du Code pénal qui évoque le complice “du crime ou du délit” ou “de l’infraction”. Autrement dit, la punition de la complicité dépend de l’existence d’un fait principal qualifiable […] », in X. PIN, Droit pénal général, op. cit., p. 314.
1152 Cass. crim., 17 nov. 1887, Bull. crim., n°392 ou encore Cass. crim., 14 déc. 1934, DP 1935, 1, 96 ; arrêts notamment cités in S. FOURNIER, « Complicité », prec. cit.
1153 Ici le terme consommation renvoie à la consommation de l’infraction et pas à la consommation de la substance psychoactive.
PARTIE I–TITRE II–CHAPITRE 2
197
A. LA COMPLICITÉ DE LA PERSONNE PHYSIQUE JOUANT UN RÔLE DANS LA
PRISE DE SUBSTANCE
291. Les acteurs de la prise de substance. Deux situations sont à distinguer, en
fonction de la vente licite ou de la vente illicite d’un produit. En effet, le complice peut être la
personne qui vend de l’alcool à une personne déjà en état d’ivresse
1155, mais cela pourrait
également être la personne qui, à la marge, vend de l’alcool sans en avoir l’autorisation
1156. De
plus, cela pourrait concerner la connaissance qui fournit l’alcool lors d’un événement festif, qui
ne vend pas cette substance mais qui va pouvoir engager sa complicité pour diverses raisons.
Cela pourrait enfin concerner le dealer
1157de drogues qui vend un produit illicite et, qui en plus
d’encourir les sanctions pour cette infraction
1158, peut encourir la sanction pour complicité du
délit-obstacle, voire des violences involontaires aggravées. Il va donc falloir évoquer ces
différentes situations.
292. Une complicité largement établie lorsque la substance facilite la
consommation du délit-obstacle. La jurisprudence a reconnu la complicité du délit de conduite
sous l’emprise d’un état alcoolique
1159, de la personne qui prête son véhicule en connaissant
l’état d’ébriété de l’emprunteur
1160. De la même manière, se rendent complices de ce même
délit les collègues de travail d’un conducteur ivre qui le soutiennent pour qu’il rejoigne son
véhicule, alors que ce dernier avait manifesté sa volonté de rentrer chez lui en conduisant malgré
son état. En effet, dans ce cas, les prévenus ont accompli un acte positif volontaire d’assistance
qui a permis de faciliter tant la préparation que la consommation du délit de conduite en état
d’ivresse
1161. En outre, si une personne prête son véhicule à un conducteur qu’elle savait être à
la fois sous l’emprise d’alcool et celle du cannabis
1162, elle se rend complice des délits-obstacles
qui suivent
1163. De la même manière, la jurisprudence a facilement retenu la complicité par
fourniture de moyens dans des situations similaires.
1155 Cf. infra nos 294, 315 et s.
1156 Mais dans ce cas elle risque d’encourir des peines pour cette vente illicite selon les articles L. 3351-1 et suivants du Code de la santé publique.
1157 Cet anglicisme désigne le vendeur de drogues.
1158 L’article 222-39, alinéa 1 du Code pénal prévoit cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende en cas
de cession ou d’offre illicite de stupéfiants à une personne pour sa consommation personnelle.
1159 Art. L. 234-1 C. route.
1160 T. corr. Limoges, 10 août 1999, BICC 2000, n°116 ; Jurispr. auto 2000, 175.
1161 CA Angers, 3 oct. 2006, JCP 2007, IV, 2020 ; Jurispr. auto 2007, 235.
1162 Art. L. 234-1 et L. 235-1, C. route.
LES SPÉCIFICITÉS DE LA RÉPRESSION DES VIOLENCES INVOLONTAIRES AGGRAVÉES PAR LA PRISE DE SUBSTANCE NÉCESSITANT DES PEINES ADÉQUATES
198
293. Une complicité largement retenue par fourniture de moyens. La jurisprudence
admet que le propriétaire d’un véhicule qui confie le volant à un conducteur ivre se rend
complice du délit de conduite en état d’ivresse
1164ou sous l’emprise d’un état alcoolique
1165.
Une situation analogue a permis de retenir la complicité d’un restaurateur routier ayant servi de
l’alcool à un individu déjà ivre, tout en sachant qu’il allait reprendre la route
1166. Cette
jurisprudence permet de constater l’importance du rôle de celui qui délivre de l’alcool. Ce
dernier est en possession d’une licence qui l’autorise à en vendre et des sanctions peuvent
légitimement apparaître lorsque malgré tout, ce dernier néglige certaines interdictions comme
la vente d’alcool à une personne en état d’ivresse
1167. Toutefois, les juridictions, depuis 2000
préfèrent retenir la qualité d’auteur de certaines personnes qui fournissent le moyen de
commettre l’infraction plutôt que de complice
1168. Cela a notamment été le cas d’un propriétaire
d’un véhicule qui le prête à une personne qui se trouve être sous l’emprise d’alcool
1169. En effet,
le propriétaire du véhicule a remis volontairement les clés à la victime, en sachant que cette
dernière était ivre et n’avait pas le permis de conduire
1170. Il s’agissait donc d’une faute
caractérisée du propriétaire du véhicule qui exposait autrui à risque d’accident d’une
particulière gravité, que le propriétaire du véhicule ne pouvait ignorer et qui a contribué à créer
la situation qui a permis la réalisation du dommage
1171. Pour la Cour de cassation, cela explique
que le propriétaire du véhicule soit l’auteur d’un homicide involontaire dans cette situation
particulière. De la sorte, celui qui prête son véhicule à une personne sous l’emprise d’alcool,
qui décède par la suite était, selon la jurisprudence, assimilable à l’auteur de l’infraction
d’homicide volontaire ce qui est fort contestable puisque c’est l’auteur qui commet la faute de
conduire en état d’ivresse. Cela ne va pas dans le sens de cette infraction particulière et de la
politique pénale répressive qui souhaite aggraver la peine du conducteur dans cet état
d’intoxication évitable. L’implication d’un degré supérieur de ces personnes qui fournissent le
moyen de commettre l’infraction, depuis les années 2000, est donc contestable.
1164 CA Alger, 20 oct. 1965, Gaz. Pal. 1966, 1, 133.
1165 T. corr. Limoges, 10 août 1999, BICC 2000, n°116 ; Jurispr. auto 2000, 175.
1166 T. pol. Bar-sur-Seine, 28 mars 1980, Gaz. Pal., 1982, 2, Somm. 384.
1167 Le débitant de boissons qui donne à boire à une personne manifestement ivre encourt une peine d’amende de
4e classe selon l’article R. 3353-2 du Code de la santé publique.
1168 S. FOURNIER, « Complicité », prec. cit.
1169 Cass. crim., 14 déc. 2010, n°10-81.189, Bull. crim., n°200, notamment cité in S. FOURNIER, « Complicité »,
prec. cit.
1170Ibidem.