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Suivi de l’application

Les recommandations du Rapport mondial sur le handicap relatives à la recherche

F. Suivi de l’application

Bien qu’il ne soit pas toujours assimilé à une mesure d’application, le suivi joue également un rôle clé. Il permet de connaître les mesures d’application qui ont donné de bons résultats et celles qui n’ont pas abouti.

Il aide à affiner les lois, politiques et autres mesures d’application, et à utiliser au mieux les budgets disponibles. Il contribue aussi à dévoiler les atteintes aux droits de l’homme, de manière à permettre l’indemnisation des victimes et, en principe, à éviter la répétition de ces manquements.

Les rapports des États parties au Comité des droits des personnes handicapées occupent une place essentielle dans ce processus. La société civile et les institutions de défense des droits de l’homme peuvent elles aussi informer le Comité, au moyen de ce qu’il est convenu d’appeler des rapports alternatifs. Les rapports des États et les rapports alternatifs sont analysés en détail dans le module 7.

En plus du suivi international, il peut y avoir un suivi national. Il ressort du Manuel de formation sur le monitoring des droits de l’homme11 du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme que le suivi des droits de l’homme est une expression de sens large, comprenant la collecte active, la véri-fication, l’analyse et l’usage d’informations afin d’évaluer et de traiter des questions rela-tives aux droits de l’homme. Ce suivi s’exerce dans la durée. L’expression englobe aussi la collecte, la vérification et l’usage d’informa-tions pour résoudre les problèmes des droits de l’homme qui se posent à propos des lois, politiques, programmes et budgets ainsi que d’autres interventions.

Plusieurs aspects de cette définition méritent d’être soulignés:

11 Série sur la formation professionnelle n° 7/Rev.1 (Publica-tion des Na(Publica-tions Unies, à paraître).

acteurs de l’administration à respecter pleinement ce droit à l’avenir;

− Le suivi peut se faire à différents stades.

Il commence généralement avec la col-lecte de l’information primaire, celle qui émane directement de la source.

Mais il peut aussi faire appel à des sources secondaires. C’est ainsi que le Comité des droits des personnes han-dicapées exerce son suivi sur la base des rapports périodiques des États parties et des rapports alternatifs pré-sentés par la société civile et les institu-tions nationales de défense des droits de l’homme.

Le suivi porte principalement sur:

Les lois, les politiques, les budgets et les programmes. La Convention exige l’examen et, en règle générale, la réforme d’une série de lois, de politiques et de stratégies: il pourra s’agir, par exemple, de faire en sorte que les lois anti-discrimination pro-tègent contre la discrimination fondée sur le handicap et que d’autres lois, comme celles qui ont trait à la santé, à l’éducation ou à la construction, ne contiennent aucune discrimination de cette nature. Comme, de plus, la Convention requiert une affectation adéquate des ressources, les budgets peuvent eux aussi faire l’objet d’un suivi. De surcroît, il y a tout lieu de craindre que des programmes et stra-tégies comme les strastra-tégies nationales de développement ou les stratégies en cas de crise humanitaire portent atteinte aux droits de personnes han-dicapées si ces droits ne sont pas sys-tématiquement pris en compte. Tous ces processus peuvent être surveillés;

Les incidents et les événements. Ils peuvent être source de violations

individuelles des droits de l’homme et il importe que celles-ci fassent l’objet d’une surveillance. Les données à ce sujet peuvent provenir des victimes elles-mêmes. Elles peuvent aussi émaner des informations diffusées par les médias ainsi que d’autres sources, dont les procédures judi-ciaires. C’est là un domaine qui est traditionnellement au cœur du suivi des droits de l’homme;

Les situations et les lieux. Il y a parfois des situations – en matière de pres-tation de services, par exemple – ou des lieux – certaines institutions, par exemple – qui peuvent poser des problèmes du point de vue des droits de l’homme. Le degré d’accessibilité des écoles pourrait être surveillé, en vue de l’identification des principaux obstacles à l’éducation inclusive. Des enquêtes sur les entreprises pourraient faire ressortir les questions à résoudre pour rendre l’emploi inclusif et assurer l’aménagement raisonnable du lieu de travail. Même en l’absence d’alléga-tions de violad’alléga-tions individuelles (évé-nements), le suivi pourrait révéler des violations ou contribuer à les prévenir.

N’importe quel acteur peut suivre la situa-tion des droits des personnes handicapées.

Toutefois, certains d’entre eux ont des respon-sabilités particulières:

États. Comme cela a déjà été signalé, l’État est tenu de rendre compte au Comité des mesures qu’il a prises pour appliquer la Convention;

Institutions nationales de défense des droits de l’homme. En vertu de l’ar-ticle  33, les institutions nationales de défense des droits de l’homme ont un rôle à jouer dans la promotion, la protection et le suivi de l’application des dispositions

de la Convention. Cette fonction est étu-diée plus avant dans le module 6. Qu’il suffise ici de souligner que ces institutions doivent se conformer aux Principes de Paris, ce qui signifie qu’elles doivent être habilitées à présenter au pouvoir exécu-tif, au parlement et à d’autres autorités des rapports traitant notamment: de la conformité de la législation aux normes des droits de l’homme; de tout cas de vio-lation des droits de l’homme; de la situa-tion des droits de l’homme; de leurs vues sur les réactions des pouvoirs publics à la situation des droits de l’homme. Les mécanismes nationaux de prévention mis en place conformément au Protocole facultatif à la Convention contre la tor-ture et autres peines ou châtiments cruels, inhumains ou dégradants devraient envi-sager de faire une place aux droits des personnes handicapées dans leurs activi-tés de suivi;

Société civile/organisations de per-sonnes handicapées. Le paragraphe 3 de l’article 33 dispose que la société civile et, en particulier, les personnes handicapées et les organisations qui les représentent  sont associées et parti-cipent pleinement au suivi de la Conven-tion. Elles doivent donc prendre part à la surveillance organisée, par exemple, par le mécanisme indépendant ou par les autorités nationales. De plus, la société civile, et en particulier les per-sonnes handicapées et les organisations qui les représentent, devraient suivre et défendre de leur propre initiative les droits des personnes handicapées;

Autres acteurs de la société civile. L’ar-ticle  33, paragraphe  3, mentionne la société civile en général. Les organisa-tions de la société civile qui ne repré-sentent pas les personnes handicapées ont elles aussi un rôle à jouer dans le suivi de la Convention. Ainsi, les ONG

de défense des droits de l’homme devraient s’intéresser aux droits des per-sonnes handicapées dans leur travail de suivi de la situation générale des droits de l’homme. Si elles ne le faisaient pas, les personnes handicapées pourraient se trouver exclues des mesures prises ensuite pour résoudre les difficultés et réparer les torts causés;

Organisations intergouvernementales.

Certaines organisations intergouver-nementales ont une fonction de suivi.

C’est le cas en particulier des bureaux extérieurs du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et des unités des missions de paix qui sont spécialisées dans les droits de l’homme.

Plusieurs unités sur le terrain, comme celles du Timor-Leste et de la Sierra Leone, participent activement au suivi de l’application de la Convention. De plus, des organisations régionales telles que le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisa-tion pour la coopéral’Organisa-tion et la sécurité en Europe (OSCE) contrôlent les élections, et il importe de veiller à ce que leurs activités tiennent compte elles aussi des droits des personnes handicapées.

Comme l’indique l’article  31 relatif aux statistiques et à la collecte de données, les États, en recueillant des informations adéquates, des données chiffrées et des résultats de la recherche, peuvent formuler et appliquer des politiques qui donnent effet à la Convention. La mise en œuvre de cette dernière peut être accélérée par des poli-tiques fondées sur des données factuelles, sur les résultats du suivi et sur les faits signa-lés à l’échelon national, ainsi que sur les rapports présentés au Comité des droits des personnes handicapées et sur les observa-tions finales de celui-ci.

Introduction

Pratiquer une discrimination, c’est traiter une personne ou une chose différemment.

L’expression n’est pas nécessairement néga-tive: discriminer, cela peut consister à faire preuve de jugement. Néanmoins, le terme de discrimination peut également désigner le comportement de celui qui traite certaines personnes de manière inéquitable en raison de leurs caractéristiques. C’est cette seconde acception qui intéresse le droit des droits de l’homme.

La Déclaration universelle des droits de l’homme reconnaît que Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclara-tion, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de reli-gion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situa-tion. Cet énoncé concis a été repris dans les législations et constitutions nationales, dans des accords régionaux et dans des instru-ments des Nations Unies. Mais que signi-fie-t-il dans la pratique? La discrimination peut prendre de nombreuses formes: elle peut être très ouverte, inscrite dans la loi ou occulte. Elle est souvent le produit de préju-gés, de disparités économiques et sociales, et d’idées préconçues d’ordre culturel ou religieux. Pour combattre la discrimination, il faut combattre ces visions négatives.

La discrimination fondée sur le handi-cap frappe aujourd’hui une grande partie de la population mondiale. C’est une des principales difficultés rencontrées par les personnes handicapées et par leurs proches.

Elle se manifeste sous différentes formes et peut avoir des effets désastreux sur leur exis-tence et, par extension, sur le reste de la société. Dans son observation générale n° 5 (1994), le Comité des droits économiques, sociaux et culturels indique ce qui suit:

[…] les personnes souffrant d’un han-dicap font depuis toujours l’objet d’une discrimination qui se manifeste sous diverses formes − qu’il s’agisse des ten-tatives de discrimination odieuse telles que le déni aux enfants souffrant de handicap de la possibilité de suivre un enseignement, ou des formes plus sub-tiles de discrimination que constituent la ségrégation et l’isolement imposés maté-riellement ou socialement. […] Ce sont aussi bien la négligence, l’ignorance, les préjugés et les idées fausses que l’ex-clusion, la différenciation ou la ségréga-tion pures et simples, qui bien souvent empêchent les personnes souffrant d’un handicap de jouir de leurs droits éco-nomiques, sociaux ou culturels sur la base de l’égalité avec le reste des êtres humains. C’est dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, du logement, des transports, de la vie culturelle et en ce qui concerne l’accessibilité des lieux

et services publics que les effets de cette discrimination se font particulièrement sentir. (C’est nous qui soulignons)

Si l’observation générale porte spécifi-quement sur les droits économiques, sociaux et culturels, elle pourrait s’appliquer aussi bien aux droits civils et politiques. Nombreux sont par exemple les pays où les personnes handicapées ne sont toujours pas autorisées à voter et n’ont pas la capacité juridique de se marier ou de conclure un contrat d’achat ou de vente d’un bien immobilier.

Il est difficile d’analyser la discrimination sans s’intéresser aussi au concept d’égalité.

Dans le droit des droits de l’homme, la non-discrimination et l’égalité sont réellement les deux faces d’une même pièce. En luttant contre la discrimination, nous espérons lutter contre les facteurs qui, dans la société, génèrent l’inégalité. Et en combattant les facteurs qui sont source d’inégalité, nous espérons prévenir la discrimination.

Il peut néanmoins y avoir, dans l’étude des relations entre non-discrimination et égalité, une certaine confusion sur le sens du mot «égalité». Celui-ci est souvent compris comme désignant des réalités qui sont iden-tiques ou équivalentes. Dans le cas des droits de l’homme, il ne signifie aucunement que toutes les personnes sont identiques. Il veut dire qu’elles ont toutes les mêmes droits. Pour que deux personnes aient les mêmes droits, il faut parfois qu’elle soit traitées différemment en raison de leurs différences intrinsèques (par exemple, lorsqu’elles sont de sexes différents, qu’elles n’ont pas le même patri-moine linguistique, qu’elles n’appartiennent pas toutes deux à une minorité ou qu’elles ont des incapacités différentes).

Traiter différemment deux personnes dans de telles conditions peut créer la confu-sion et susciter des allégations de discrimina-tion. Or il ne s’agit pas de discriminadiscrimina-tion. Il s’agit de la simple reconnaissance du fait que les personnes sont différentes mais qu’elles ont les mêmes droits; pour faire de l’égalité une réalité, il faut parfois procéder différem-ment selon les personnes dont il s’agit.