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Le processus national de ratification

personnes handicapées et des organisations

A. Le processus national de ratification

La loi et la pratique constitutionnelles régissent les divers aspects du processus de ratification qui se déroule généralement (mais pas toujours) à l’échelon national avant la ratification ou l’adhésion au niveau international. À noter que la Convention ne prescrit aux États aucun processus national spécifique de ratification.

Dans l’ensemble, il existe deux modali-tés de ratification nationale, qui sont fonction du rôle joué par le pouvoir législatif. Dans les pays de droit civil, la ratification prend la forme d’une approbation de l’instrument par le législateur. Après le vote, la loi portant ratification est transmise au pouvoir exécutif en vue de sa promulgation, de sa publication

et de son dépôt auprès du dépositaire de l’instrument. Ainsi, l’Argentine, le Chili, la Croatie, l’Équateur, l’Espagne, la Hongrie, le Mali, le Niger et le Panama ont ratifié la Convention au moyen d’une loi adoptée par le parlement. Le Mexique l’a ratifiée par l’ap-probation d’une des chambres du parlement.

Dans la plupart des pays qui ont une tradi-tion de common law, ainsi que dans d’autres régimes, la ratification d’un instrument peut se faire par une décision du pouvoir exécutif. Si le parlement intervient, c’est à titre consultatif, ce qui signifie qu’un vote n’est pas nécessaire.

C’est ainsi que le Bangladesh, la Nouvelle-Zélande et la Thaïlande ont ratifié la Conven-tion par décision du pouvoir exécutif.

Quelles que soient les différences entre ces deux modalités et les spécificités des régimes nationaux, ces processus internes offrent d’im-portantes occasions de sensibiliser l’opinion et de faire mieux comprendre l’instrument à l’étude. De fait, les étapes qui précèdent et qui suivent la ratification influent sur la phase suivante – celle de l’application – par exemple en permettant de détecter les vides juridiques et autres et de mobiliser un soutien.

Certains États font faire une analyse nationale des avantages et des défis liés à la ratification. En pareil cas, ses auteurs évaluent les convergences entre la législa-tion et les politiques nalégisla-tionales, d’une part, et la convention, d’autre part; ils mettent en évidence, notamment, les raisons qui militent en faveur de la ratification et de l’application, et les obligations et les dépenses qui en décou-leraient. Au cours de la phase préparatoire interne, l’analyse nationale accompagne la proposition de ratification. Tout examen préa-lable à la ratification devrait faire partie d’un processus d’étude des lois existantes et de la législation envisagée, appelé à se poursuivre

pendant l’application. Idéalement, les résul-tats de l’analyse commanditée par les auto-rités, et conçue sous l’angle de l’intérêt natio-nal, devraient à terme être rendus publics.

De même, les États devraient faire précé-der la ratification de consultations d’une ampleur suffisante. C’est au demeurant ce que prescrit la Convention elle-même, dont le paragraphe 3 de l’article 4 se lit comme suit:

Dans l’élaboration et la mise en œuvre des lois et des politiques adoptées aux fins de l’application de la présente Conven-tion, ainsi que dans l’adoption de toute décision sur des questions relatives aux personnes handicapées, les États Parties consultent étroitement et font activement participer ces personnes, y compris les enfants handicapés, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent.

Même si l’État n’est pas lié par cette disposition parce qu’il n’est pas encore devenu partie à la Convention, l’organisa-tion de consultal’organisa-tions publiques sur la ratifica-tion est une bonne pratique qui peut influer sur l’application ultérieure de l’instrument.

La consultation peut faire de la ratification davantage qu’un geste politique en direction de la communauté internationale et amélio-rer réellement la situation sur le terrain.

Si des consultations ont lieu, elles devraient tenir compte de tout l’éventail des parties prenantes à la ratification. Les repré-sentants de l’administration devraient être consultés. Cependant, nombre de services administratifs ont un rôle à jouer dans la réalisation des droits des personnes handi-capées, et les consultations peuvent se dérouler à différents niveaux – administra-tions centrales, provinciales et municipales, par exemple. De même, les consultations peuvent cibler non seulement les ministères

des affaires sociales et de la santé, dont relèvent généralement les questions liées au handicap, mais aussi des ministères tels que ceux de l’éducation, de la justice, de l’inté-rieur ou des finances, qui auront à participer à la mise en œuvre de la Convention.

Dans le débat relatif à la ratification, les personnes handicapées devraient avoir voix au chapitre à la fois directement et par l’intermé-diaire de leurs organisations. Les consultations devraient prendre en considération la diversité des handicaps. Les personnes handicapées ne forment pas un groupe monolithique: leurs handicaps sont variés (psychosociaux, intellec-tuels, physiques, sensoriels) et elles sont elles-mêmes diverses (hommes, femmes, enfants, personnes autochtones, personnes âgées, etc.).

Les consultations devraient tenir compte de cette variété dans toute la mesure du possible.

L’opportunité de soutenir, y compris finan-cièrement, la participation des organisations de personnes handicapées aux consulta-tions devrait être mûrement pesée. Parmi les États qui s’engagent dans le processus de ratification, certains – pays en développe-ment ou pays qui traversent une crise, par exemple – peuvent avoir du mal à élargir les consultations faute de moyens financiers suffisants. Force est alors de tirer le meilleur parti possible de ressources limitées. Mais la consultation doit avoir lieu, non seulement pour assurer la participation et l’intégration des personnes handicapées, mais aussi parce que celles-ci peuvent avoir des propositions à faire quant à l’utilisation la plus efficace de ressources modiques en vue de l’application progressive de la Convention.

D’autres acteurs de la société civile, comme les organisations non gouverne-mentales qui se préoccupent des droits de l’homme ou du développement, devraient également être consultés. S’il existe une

institution nationale de défense des droits de l’homme, elle devrait pouvoir s’exprimer; elle peut également contribuer aux travaux de recherche sur les droits des personnes handi-capées et à l’analyse des lois et politiques.

Le processus de ratification devrait être inclusif et représentatif de la société dans son ensemble, groupes minoritaires et opposition politique compris; il ne devrait pas porter la marque d’un programme politique. Cela tient notamment à ce principe du droit inter-national qui veut que les autorités succes-sives d’un pays soient également liées par tout instrument international déjà ratifié. Le danger est que le pouvoir en place soit tenté d’exclure certains acteurs, comme l’oppo-sition politique, pour pouvoir prendre ses décisions plus librement. À terme, cepen-dant, cela pourrait nuire à l’application de la Convention, qui ne se poursuivrait pas en cas de changement de gouvernement.

Le processus de ratification de l’Australie offre un bon exemple des différentes étapes à parcourir. L’Australie a signé la Convention en mars 2007 et l’a ratifiée en juillet 2008. L’exer-cice national a comporté un examen appro-fondi de toute la législation du Commonwealth, des États et des Territoires destiné à détermi-ner si le pays pouvait se conformer à tous les articles de la Convention. Le Ministère de la famille, du logement, des services de proxi-mité et des affaires autochtones et le Minis-tère de la justice, en consultation avec les organisations nationales de personnes handi-capées ainsi qu’avec les conseils consulta-tifs et les services juridiques spécialisés dans le domaine du handicap, ont présenté au Gouvernement un rapport sur l’impact de la ratification. Les auteurs du rapport y ont dressé la liste des avantages et des inconvénients de la ratification de la Convention et de son Proto-cole facultatif, analysé la compatibilité des lois

australiennes avec les obligations découlant de la Convention, décrit l’impact économique, environnemental, social et culturel de la ratifi-cation, défini un moyen adéquat de transcrire directement la Convention dans le droit natio-nal et procédé à un examen comptable des lois, politiques et programmes.

La préparation de la ratification n’est pas seulement un processus conduit par les autorités nationales. La société civile peut également plaider en faveur de la ratifica-tion. À vrai dire, son intervention peut être un déclencheur particulièrement efficace de l’action gouvernementale. À cette fin, la société civile et d’autres acteurs peuvent:

• Se documenter:

✓ Apprendre comment la Convention peut être transposée dans le droit national;

✓ S’informer sur les effets et les coûts de la ratification;

✓ Déterminer les manières dont la ratifica-tion peut répondre aux besoins des per-sonnes handicapées.

• Former:

✓ Notamment les décideurs par des réu-nions, des courriels, des lettres, des appels téléphoniques et des visites, en soulignant que le handicap est une ques-tion de droits de l’homme;

✓ Notamment la collectivité locale en encourageant la tenue de débats natio-naux et de causeries dans les écoles et dans la collectivité;

• Mobiliser des partenaires et des alliés tels que d’autres groupes de personnes handicapées, des organisations de défense des droits de l’homme et des mouvements sociaux, et à ce titre:

✓ Mettre en exergue l’importance de la question;

✓ Lancer une campagne commune en faveur de la ratification;

✓ Suggérer des actions concrètes aux-quelles ces partenaires puissent s’asso-cier;

✓ Constituer un réseau, et notamment mettre en place des canaux de communi-cation et d’échanges d’information (par la création d’un site web, par exemple).

• Faire pression:

✓ Écrire au Gouvernement en lui deman-dant instamment de signer et de ratifier la Convention;

✓ Parler de la Convention avec des parle-mentaires;

✓ Rencontrer les interlocuteurs habituels dans les ministères, les organismes locaux et nationaux, etc.

• Assurer le suivi:

✓ Adresser des lettres de remerciement aux fonctionnaires et autres partenaires;

✓ Évaluer le succès des stratégies et des messages.

Le Service de la lutte antimines des Nations Unies et le Haut-Commisariat aux droits de l’homme (HCDH) ont élaboré un dossier de sensibilisation pour aider les centres de lutte antimines à plaider en faveur de la ratification de la Convention. Dans l’encadré ci-dessous figure le modèle d’une lettre qui peut être envoyée à des parties prenantes pour promouvoir la ratification.

[NOM ET ADRESSE DE L’EXPÉDITEUR]

[NOM ET ADRESSE DU FONCTIONNAIRE DESTINATAIRE]

[DATE]

[Monsieur] [Madame],

La Convention relative aux droits des personnes handicapées est entrée en vigueur le 3 mai 2008. Le 30 mars 2007, jour où elle a été ouverte à la signature, elle comptait 82 signataires: c’est le chiffre le plus élevé jamais enregistré à la date d’ouverture à la signature d’une convention des Nations Unies. Le texte complet de cet instrument est disponible à l’adresse suivante: www.un.org/disabilities. La Convention:

Fixe des normes internationales concernant les droits et les libertés des personnes handicapées;

Clarifie l’application aux personnes handicapées de ces principes des droits de l’homme que sont l’intégration, la non-discrimination, l’accessibilité et la participation;

Offre aux pouvoirs publics un modèle sûr dont ils peuvent s’inspirer pour l’élaboration des lois et politiques nationales;

Institue des mécanismes efficaces de suivi de la réalisation des droits des personnes handicapées;

Prescrit des mécanismes nationaux de mise en œuvre et de suivi de la Convention.

La Convention marque un changement de modèle dans la manière de penser le handicap et de percevoir les personnes handicapées. Ces personnes cessent d’être les «objets» du dévouement de personnes charitables, de traitements médicaux et de la protection sociale pour devenir les «sujets» de droits, capables de prendre des décisions et de jouer un rôle actif dans la société.

La Convention est le premier instrument majeur des droits de l’homme de ce siècle; elle est une conquête historique pour les 650 millions de personnes handicapées qui vivent dans le monde. Elle offre certainement [au] [à la] [NOM DU PAYS] une importante occasion de s’acquitter de ses obligations vis-à-vis de ses citoyens. Nous serons heureux de travailler avec vous sur ces questions, et sommes prêts à vous apporter le soutien dont vous pourriez avoir besoin.

Je vous prie d’agréer, [Monsieur] [Madame], l’assurance de ma considération distinguée.

[NOM DU SIGNATAIRE ET DE L’ORGANISATION]

B. Le processus international