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Les suites données en 2018 aux saisines adressées au contrôle général

Conformément à la mission de prévention dévolue au Contrôleur général des lieux de privation de liberté, le traitement des saisines permet d’identifier l’existence d’éven-tuelles atteintes aux droits fondamentaux des personnes privées de liberté, et de prévenir leur renouvellement. Dans cet objectif, les contrôleurs en charge des saisines effectuent des vérifications sur pièces et sollicitent par courrier les observations des autorités responsables du lieu concerné, dans le respect du principe du contradictoire. Ils effec-tuent également le cas échéant des vérifications sur place. Les rapports rédigés à l’issue de ces vérifications font également l’objet d’échanges contradictoires avec les autorités responsables.

Au-delà des vérifications et des recommandations qui peuvent en découler, les saisines reçues par le CGLPL sont également une source précieuse d’informations pouvant conduire à programmer une visite ou une contre-visite, ou à assurer le suivi de recommandations ayant été adressées à la suite d’une visite à l’autorité responsable du lieu de privation de liberté.

Certains courriers permettent ainsi de mesurer l’évolution de la situation au sein d’établissements ayant fait l’objet d’une visite et de renouveler des recommandations qui n’auraient pas été suivies d’effet.

Ainsi, en 2018, le CGLPL a reçu un signalement concernant des fouilles à nu qui auraient été réalisées dans une maison d’arrêt sur plusieurs personnes détenues hors des locaux prévus à cet effet, dans une bibliothèque munie de portes vitrées et d’un dispositif de vidéosurveillance. Il avait été constaté par les contrôleurs lors de la visite de l’établissement en 2013 que les dispositions de l’article 57 de la loi pénitentiaire concernant la prohibition des fouilles systématiques étaient délibérément ignorées au sein de cet établissement s’agissant des fouilles sur les personnes arrivantes, à la sortie des parloirs, et lors du placement au quartier disciplinaire ou du quartier d’isolement.

Dans l’enquête épistolaire ouverte par le CGLPL à la suite du signalement, il a donc été demandé à la direction de la maison d’arrêt un état des lieux complet de la mise en œuvre des fouilles intégrales au sein de l’établissement : notes de service, décisions individuelles sur un laps de temps précis, et détermination des lieux dans lesquels des fouilles sont pratiquées au sein de l’établissement.

Le CGLPL a adressé à la direction d’une autre maison d’arrêt une demande de suivi s’agissant de multiples recommandations formulées lors de la visite de l’établis-sement, en septembre 2015. En effet, de nombreux courrier reçus faisaient état de la persistance de certains dysfonctionnements constatés : absence de remise aux personnes détenues et de diffusion en détention du règlement intérieur de l’établissement, absence de distribution de petit-déjeuner, absence de dispositif d’interphonie dans les cellules, absence d’affichage du prix des cantines, persistance de livraison de produits proches de la date de péremption ou périmés, absence de possibilité de commander des produits en cantine exceptionnelle, absence de distribution de produits d’entretien, absence de dispositif d’isolation des cabines téléphoniques afin de préserver la confidentialité des conversations, absence d’accès à la bibliothèque et interdiction de détenir un ordinateur en cellule, absence de dispositif adéquat pour laver le linge des personnes indigentes et n’ayant pas de visites.

Ces deux enquêtes, datant du premier semestre 2018, sont restées sans réponse au jour de la rédaction du présent rapport.

À l’instar des recommandations figurant dans les rapports de visite, les recommandations émises à la suite des échanges initiés sur le fondement des saisines s’attachent au respect du juste équilibre entre le respect des droits fondamentaux des personnes et les impératifs d’ordre public et de sécurité qui s’imposent naturellement au sein des lieux de privation de liberté. Il s’agit essentiellement pour la Contrôleure générale, comme dans le cadre des missions de contrôle, d’engager un dialogue destiné à faire évoluer les pratiques au sein des établissements et la réflexion sur les modalités de prise en charge des personnes privées de liberté, dans le strict respect de leurs droits fondamentaux.

Le bon fonctionnement de ce dialogue est tributaire de la façon dont les autorités saisies participent à ces échanges. Depuis sa création le CGLPL saisit régulièrement par courrier les directeurs d’établissements pénitentiaires, la DAP ainsi que les ministres concernés, pour solliciter leurs observations sur les atteintes aux droits alléguées dans les saisines qu’il reçoit. Or, depuis plusieurs mois, le CGLPL déplore une multipli-cation des enquêtes sans réponses et un allongement considérable des délais de réponses s’agissant notamment des établissements pénitentiaires.

En ce qui concerne l’administration pénitentiaire, la mise en place en juillet 2017 par cette direction d’un système centralisé de réponse aux enquêtes du CGLPL a entraîné en 2018 un arrêt quasi-total de la réception de réponses aux vérifications initialement

adressées aux directeurs d’établissements pénitentiaires, les rares réponses reçues l’étant dans des délais les rendant souvent obsolètes.

Depuis juillet 2017, les réponses aux enquêtes adressées aux directeurs d’établissements pénitentiaires sont rédigées par un service de cette direction.

Le CGLPL continue de son côté de s’adresser directement aux directeurs d’établisse-ments, qui sont, s’agissant des établissements pénitentiaires, les interlocuteurs les mieux à même de lui répondre, lors des missions comme dans le traitement des saisines et, aux termes de la loi du 30 octobre 2007, « les personnes responsables du lieu de privation de liberté ».

La situation consécutive à la mise en place du système centralisé de réponses aux enquêtes par la direction de l’administration pénitentiaire entrave l’exercice de la mission du CGLPL. Au demeurant, contrairement à l’objectif affiché par la direction de l’admi-nistration pénitentiaire, la qualité des réponses ne s’en est pas trouvée améliorée. Les éléments de réponse transmis sont souvent trop anciens en raison du délai de réponse, et il arrive fréquemment que les réponses soient incomplètes et les documents demandés manquants.

Après plus d’un an de fonctionnement de ce nouveau système, le CGLPL constate que les délais de réponse ont considérablement augmenté, et qu’un nombre très important d’enquêtes reste sans réponse. Jusqu’en juillet 2017, une proportion d’environ 13 % des enquêtes restait sans réponse. 67 % des enquêtes envoyées entre août 2017 et fin décembre 2018 restaient sans réponse au 1er janvier 2018.

En 2018, la part des enquêtes adressées à des directeurs d’établissements pénitentiaires était de près de 60 %. 82 % de ces enquêtes n’avaient pas obtenu de réponse au 1er janvier 2019.

Lorsque le CGLPL a néanmoins obtenu des réponses de la DAP, celles-ci sont parvenues (en 2017 et 2018) en moyenne avec un délai de 7 mois, contre 3 mois lorsque ces réponses proviennent directement des chefs d’établissements pénitentiaires.

Le CGLPL reçoit très régulièrement des courriers de chefs d’établissements indiquant, à la suite d’un rappel, avoir transmis des éléments de réponse à la DAP plusieurs mois auparavant.

Par ailleurs, les délais de réponse aux enquêtes concernant des problématiques d’am-pleur nationale, pour lesquels le CGLPL sollicite directement la direction de l’admi-nistration pénitentiaire ou les ministères de la justice, de l’intérieur et de la santé sont également de plus en plus longs.

À titre d’exemple, malgré de multiples rappels, le CGLPL n’a pas reçu de réponse à une enquête concernant les conséquences de l’hospitalisation des personnes détenues en UHSA, en USHI ou à l’EPSNF envoyée le 21 décembre 2016, ou encore à une enquête en date du 20 mars 2017 concernant la mise en place d’une redevance forfaitaire pour le passage du code de la route en détention.

Cette absence de réponse est préjudiciable à la bonne avancée des travaux du CGLPL.

Le CGLPL déplore que les directions des ministères avec lequel elle a des échanges réguliers et notamment la direction de l’administration pénitentiaire n’aient pas mis en œuvre les moyens suffisants pour répondre à ses demandes dans des délais raisonnables.

Par ailleurs, en 2018, le CGLPL a encore été trop souvent saisi par des personnes faisant état de conséquences négatives sur leur détention à la suite de courriers envoyés au CGLPL. Avant d’évoquer les saisines de l’année 2018, il apparaît nécessaire d’évo-quer ce sujet.

1. Les atteintes au principe de confidentialité

des correspondances et les suspicions de représailles

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