• Aucun résultat trouvé

B. Le recours administratif et le recours de

4) Le recours associatif

109. Une association, comme toute personne morale, peut évidem-ment recourir si elle est touchée dans ses propres droits constitution-nels314. En ce qui concerne les groupements écologistes, deux hypothè-ses seulement me semblent devoir être envisagées dans cette perspective, à savoir, d'une part, le cas où 1 'un de ces goupements acquiert un bien-fonds dans le but d'en assurer la protection et se retrouve dans la situa-tion d'un voisin évoquée ci-dessus et, d'autre part, le cas où une asso-ciation soulève un griefformel relatif à la procédure cantonale315 .

309 AUER (1983) no 370. Sur la question de la titu1arité, id. nos 349 ss; AUBERT

(1967) p. 600. Voir aussi KALIN (1994) pp. 236 ss.

3IO ATF 120 la 110, 111, X; 113 la 468, 470, Association X; AUER (1983) no 372.

3ll ATF 119 la 362, 364 ss, X AG; 118 la 112, 116, S.; 118 la 232, 234, B.

312 ATF 118 la 488,490, B.; 110 la 140, 141, M.

313 ATF 118 la 46, 53-54, Verein Scientology Kirche Zürich; 110 la 140, 143, M.

314 ATF 113 la 247, 249-250, Solothurner Heimatschutz.

31 5 ATF 113 la 247, 250, Solothurner Heimatschutz.

LES VOIES DE DROIT DES ORGANISATIONS ÉCOLOGISTES

110. Mais un groupement qui n'estpas lui-même touché par l'acte attaqué peut aussi agir par la voie du recours de droit public dans l'inté-rêt de ses membres s'il a la personnalité juridique, si ses statuts le chargent de défendre les intérêts en cause et si un grand nombre de ses membres sont lésés et auraient la qualité pour agir eux-mêmes316. Les conditions du recours corporatif sont donc les mêmes que pour les voies de droit ordinaires. Mais, dans le cadre du recours de droit public, le fait qu'un grand nombre des membres doivent avoir eux-mêmes la qualité pour agir, c'est-à-dire être touchés dans des intérêts personnels et juridiques, représente une barrière plus sérieuse. Lorsque c'est un arrêté qui est attaqué, il est aisé d'invoquer 1 'intérêt virtuel d'un grand nombre de membres. Mais, par définition, les décisions concrètes ne touchent les intérêts juridiques que d'un petit nombre de personnes. Certains en ont conclu que le recours corporatif n'existait, en pratique, que contre les actes normatifs317. On peut toutefois imaginer des cas, rares il est vrai, où une association de quartier pourrait montrer qu'une grande part de ses membres, propriétaires ou locataires domiciliés par hypothèse dans un périmètre restreint, sont touchés dans leurs droits par une décision concernant une construction ou installation située dans ledit périmè-tre318. Mais pour les associations écologistes d'importance cantonale ou nationale, la qualité pour agir au moyen du recours de droit public n'est en effet probablement donnée que contre des arrêtés. Cette faculté ne leur est pas d'une grande utilité: si une norme cantonale ne les satis-fait pas, c'est souvent qu'elle ne va pas assez loin, défaut que le recours de droit public ne saurait guérir319.

3I6 ATF 119 la 197, 201, Schweizerischer Kanuverband; 114 la 452, 456-457, Schweizerische Vereinigung für Straflosigkeit des Schwangerschaftsabbruches;

113 la 426, 429, Quartierverein Rotmonten; 113 la 468, 471, Association X.

317 AUER (1983) no 368; MARTI (1979) p. 76. Voir aussi KALIN (1994) p. 269, qui vise également les Allgemeinvelfügungen.

318 ATF 113 la 426,429, Quartierverein Rotmonten, a contrario.

319 Supra nos 31 et 39.

LA QUALITÉ POUR AGIR

Il. AUX ÉTATS-UNIS

A. Introduction

111. Le problème de la qualité pour agir (standing) est abordé par les juristes américains presque exclusivement sous l'angle de l'accès aux tribunaux. Assez peu d'attention est accordée à la qualité pour agir dans le cadre de la procédure administrative proprement dite. Et encore, dans ce cas, la réflexion entreprise est-elle en partie dérivée de la pro-blématique judiciaire. Nous exposerons donc d'abord les traits essen-tiels de la qualité pour agir devant les tribunaux américains, avant de consacrer quelques lignes à la procédure administrative.

112. Le moins que 1 'on puisse dire est que la doctrine américaine n'est pas tendre avec la jurisprudence des tribunaux fédéraux en ma-tière de qualité pour agir. Incohérence, confusion et sophisme sont des appréciations fréquemment portées sur la façon dont la Cour suprême et les tribunaux inférieurs ont abordé cette question320. Il n'est dès lors pas étonnant que de nombreux auteurs aient eu l'ambition de proposer une approche nouvelle et globale du problème321. Cependant, malgré la pertinence des analyses et l'intérêt des propositions contenues dans cer-taines de ces contributions, aucune conception claire ne s'est pour 1 'heure imposée et le débat, tant académique que judiciaire, reste assez ouvert.

113. Cette situation s'explique d'abord par la multiplicité des sour-ces juridiques: alors qu'en Suisse les art. 88 et 103 OJF, ainsi que l'art. 48 LPA sont déterminants, la qualité pour agir devant les tribu-naux américains est régie à la fois par 1 'art. III de la Constitution, qui fixe le cadre du pouvoir judiciaire322, les nombreuses dispositions léga-les qui déterminent léga-les modalités du contrôle des tribunaux sur l'admi-nistration et enfin les règles jurisprudentielles que les juges, pétris de la tradition de la common law, s'estiment autorisés à appliquer en sus du

320 DAVIS/PIERCE (1994), vol. 3, p. 2; SUNSTEIN (1992) p. 186; FLETCHER (1988) p. 221; BEERS (1986) p. 67; NICHOL ( 1985) p. 635; NICHOL(1984) p. 68; CURRIE (1981); HOMBURGER (1975) pp. 62 ss.

32 l DAVIS/PIERCE (1994), vol. 3, pp. 1 ss; SUNSTEIN (1992) et (1988); FLETCHER (1988); WINTER (1988); LOGAN (1984); TUSHNET (1977); DAVIS (1968).

322 L'article II de la Constitution a aussi été invoqué, mais de façon plus marginale, cf. infra no 131.

LES VOIES DE DROIT DES ORGANISA TI ONS ÉCOLOGISTES

droit écrit. L'autre difficulté à laquelle est confrontée la jurisprudence est celle de construire une théorie de la qualité pour agir qui s'adapte aux multiples situations qui peuvent donner lieu à une action civile. Il nes 'agit pas ici uniquement de savoir qui peut recourir contre une déci-sion, mais beaucoup plus généralement de savoir qui est habilité à exi-ger judiciairement le respect d'un devoir juridique, devoir de faire ou de ne pas faire, devoir d'un organe de l'Etat ou d'un particulier323 . Trou-ver une réponse unique à une question aussi vaste exige maintes contor-sions et il se peut bien que 1 'entreprise soit sans espoir324.

B. Historique

114. La plupart des commentateurs remarquent que, jusqu'à la moitié de ce siècle, il n'y avait pas à proprement parler de théorie de la qualité pour agir, le mot de standing n'étant d'ailleurs pas utilisé par la jurisprudence325. En pratique, celui qui entendait intenter une action judiciaire devait montrer qu'il était touché dans un intérêt

juridique-ment protégé par la Constitution, une loi spéciale ou la common law326 • C'était le modèle du droit privé327. Dans la ligne de cette conception, la Cour suprême en était venue à ne reconnaître la qualité pour agir qu'à celui qui alléguait la violation d'un droit personnel (legal right)328 .

115. Ce modèle ne devait pas résister au développement del 'Etat administratif, qui entraînait la nécessité de redéfinir les modalités du contrôle judiciaire des autorités étatiques329.

Dès 1940, la Cour suprême admettait qu'une décision de la Federal Communication Commission accordant une autorisation d'émettre à une

323 Cf. FLETCHER ( 1988) pp. 223-224.

324 Cf. FLETCHER (1988) p. 290: «But to think, or pretend, that a single law of stan-ding can be applied uniformly to ali causes of action is to produce confusion, intellectual dishonesty and chaos».

325 DAVIS/PIERCE (1994), vol. 3, pp. 5 ss; NICHOL (1993) p. 1151; SUN STEIN (1992) p. 169; FLETCHER (1988) p. 244; VINING (1978) p. 55.

326 GELLHORN/LEVIN (1991) p. 369; FLETCHER (1988) p. 224.

327 BATOR et al. (1988) p. 121.

328 Tennesse Electric Power Co. v. TVA, 306 U.S. 118, 137-138 (1939); DAVIS/PIERCE (1994), vol. 3, p. 7; SUNSTEIN (1992) pp. 180-181.

329 FLETCHER (1988) p. 225; BA TOR et al. (1988) pp. 121 ss.

LA QUALITÉ POUR AGIR

station de radio pouvait être attaquée par toute personne lésée (aggrieved) ou dont les intérêts étaient défavorablement affectés (adverse/y ajfected) par la décision en question330. Peu après, la Cour reconnaissait qu'un demandeur qui avait démontré une atteinte personnelle pouvait agir en tant que private attorney general, défenseur de l'intérêt public331 . Tou-tefois, au-delà des droits traditionnels, seuls des intérêts économiques étaient pris en considération par les tribunaux pour trancher de 1 'exis-tence d'une lésion332.

116. Mais c'est au début des années 1970, à partir de 1 'arrêtAsso-ciation of Data Processing Organizations, !ne. v. Camp333, que la «ré-volution»334 intervenue dans l'approche judiciaire de la qualité pour agir déboucha sur la jurisprudence, encore déterminante aujourd'hui, qui a pour pierre de touche l'exigence d'une atteinte de fait (injury in fact). Appliqué de façon souple par la prise en compte d'un très large éventail d'intérêts, le nouveau critère de la qualité pour agir a consacré une libéralisation spectaculaire de 1' accès aux tribunaux335 .

117. Par ailleurs, 1 'adoption, dans le cadre des grandes lois de pro-tection de 1 'environnement, de dispositions sur les citizen suits a évi-demment contribué à inscrire dans la législation des définitions très lar-ges de la qualité pour agir.

330 FCC v. Sanders, 309 U.S. 470 (1940).

331 Scripps-Howard v. FCC, 316 U.S. 4 (1942); voir aussi Associated Industries of New-York v. Ickes, 134 F.2d 694 (2d Cir. 1943), vacated as moot, 320 U.S. 707 (1943).

332 LAWRENCE (1989) p. 10290; SIERRA CLUB (1989) p. 53.

333 Ci-après: Data Processing, 397 U.S. 150 (1970); voir aussi Barlow v. Collins, rendu le même jour, 397 U.S. 159.

334 L'expression est du juge Powell dans United States v. Richardson, 418 U.S. 166, 194-195 (1974).

335 LAWRENCE (1989) p. 10289; DAVIS (1970) p. 471. Il convient de préciser que la séquence historique en deux époques (avant et après la libéralisation) présentée ici n'est pas absolument incontestée. Ainsi WINTER (1988), rappelant (pp. 1380 et 1397 ss) l'existence d'anciennes possibilités d'action populaire, insiste sur 1 'évolution restrictive qu'a représenté l'émergence même de la notion de qualité pour agir dans la première moitié de ce.siècle. Pour sa part, FLETCHER (1988), pp. 229 ss, critique sévèrement l'arrêt Data Processing et semble considérer la consécration de l'exigence d'une atteinte de fait comme une nouveauté malheu-reuse, restreignant indûment la qualité pour agir. Très critique également envers cet arrêt, SUN STEIN (1992) pp. 185 ss et (1993b)passim. Voir aussi HaMBURGER (1975) pp. 55 ss.

LES VOIES DE DROIT DES ORGANISA TI ONS ÉCOLOGISTES

C. Les principes constitutionnels

1) L'article III

118. L'article III, section 2, de la Constitution prévoit que le pou-voir judiciaire s'étend à certaines catégories de «cas» et de «controver-ses». De l'emploi de ces termes (cases and controversies clause)336 la jurisprudence a déduit que les tribunaux ne pouvaient trancher que de litiges concrets et n'étaient pas autorisés à donner des avis consulta-tifs337. Elle a aussi, plus récemment, déduit de cette formulation 1 'exis-tence d'un certain nombre de conditions constitutionnelles à la recon-naissance de la qualité pour agir:

«Comme minimum irréductible, l'art. III exige de la partie qui fait appel au tribunal qu'elle montre ( 1) qu'elle a subi ou a été menacée d'une atteinte personnelle en raison de la conduite prétendument il-légale du défendeur( ... ) et (2) que ce préjudice puisse raisonnable-ment être attribué à l'action contestée( ... ) et (3) qu'il puisse selon toute probabilité être réparé par une décision favorable» ( ... )338.

Ces trois conditions méritent quelques développements.

2) L'atteinte defait

119. Cette atteinte doit être distincte et palpable339 ou, end' autres termes, particulière et concrète340. Des doléances de caractère général

336 Sur cette clause en général, cf. RADCLIFFE ( 1978).

337 Muskrat v. United States, 219 U.S. 346 (1911).

338 «(A)t an irreductible minimum, Art. III requires the party who invokes the court 's authority ta show th at he personally has suffered sorne actual or threatened injury as a result of the putative/y illegal conduct of the defendant, ( ... ) and th at the injury 'fair/y can be traced ta the challenged action' ( ... ) and 'is likely ta be redressed by a favorable decision' ( .. .)», Valley Forge Christian Co/lege v. Americans United for Separation ofChurch and State (ci-après: Valley Forge), 454 U.S. 464,472 (1982) (références omises). Cette triple exigence a été reprise régulièrement, quoique dans une formulation un peu plus détaillée dans les cas les plus récents, cf. U.S. v. Hays, 115 S.Ct 2431, 2435 (1995); Northeastern Florida Contractors v. Jacksonville, 113 S.Ct. 2297, 2301-2302 (1993); Lujan v. Defenders ofWildlife, 112 S.Ct. 2130,2136 (1992).

LA QUALITÉ POUR AGIR

ne suffisent pas341, ni une atteinte abstraite342. Il ne suffit pas non plus qu'un intérêt «connaissable» (cognizable interest) ait été atteint, il faut, en outre, que le demandeur soit parmi les personnes atteintes343, ce qui revient à dire qu'il doit être touché dans un intérêt personnel.

120. Cependant, le fait qu'un préjudice soit subi par un très grand nombre de gens ne permet pas de leur dénier la qualité pour agir. Dans l'arrêt United States v. SCRAP, la Cour suprême, saisie d'une action intentée par deux groupes écologistes, est allée jusqu'à affirmer:

339

340

« ... toutes les personnes qui profitent des richesses panoramiques du pays, et en définitive toutes celles qui respirent son air, peuvent se prévaloir d'une atteinte similaire à celle alléguée ici par les groupe-ments écologistes. Mais nous avons déjà indiqué clairement que la qualité pour agir ne saurait être déniée simplement parce que beau-coup de gens subissent le même préjudice ... Dénier la qualité pour agir à des personnes qui sont atteintes de fait simplement parce que beaucoup d'autres sont atteintes signifierait que les actions gouver-nementales les plus préjudiciables et les plus répandues ne pourraient être mises en cause par personne. Nous ne pouvons accepter cette conclusion.»344

Valley Forge, 454 U.S. 464, 475 (1982); Gladstone, Rea/tors v. Village of Bel/wood, 441 U.S. 91, 100 (1979); Warth v. Seldin, 422 U.S. 490,501 (1975).

U.S. v. Hays, 115 S.Ct. 2431, 2435 (1995); Northeastern Florida Contractors v. Jacksonville, 113 S.Ct. 2297, 2302 (1993); Lujan v. Defenders of Wildlife, 112 S.ct. 2130,2136 (1992).

341 U.S. v. Hays, 115 S.Ct. 2431,2435 (1995); Valley Forge, 454 U.S. 464,482-483 (1982); Warth v. Seldin, 422 U.S. 490,499 (1975).

342 Schlesinger v. Reservists Committee ta Stop the War (ci-après: Schlesinger), 418 U.S. 208, 217 (1973); Los Angeles v. Lyons, 461 U.S. 95, 101-102 (1983).

343 Sierra Club v. Morton, 405 U.S. 727, 734 (1972).

344 « ... al! persans who utilize the scenic resources of the country, and indeed al!

who breathe its air, could claim harm sim il ar ta th at alleged by the environmental groups here. But we have already made it clear th at standing is not ta be denied simply because many people suffer the sa me injury ... Ta deny standing to persans who are infact injured simply because many others are also injured, would mean that the most injurious and widespread Government actions could be questioned by nobody. We cannat accept that conclusion.» United States v. SCRAP, 412 US 669, 687-688 (1973). DAVIS/PIERCE (1994), vol. 3, p. 21, considèrent comme toujours valide, même si la jurisprudence plus récente de la Cour suprême et notamment l'arrêt Lu jan v. NWF, 497 U.S. 871, 889 (1990) semble renier l'arrêt SCRAP, l'idée qu'une atteinte environnementale commune à l'ensemble de la population suffit pour conférer la qualité pour agir; une telle atteinte n'est pas abstraite, mais bel et bien tangible. L'opinion concurrente des juges Kennedy et

LES VOIES DE DROIT DES ORGANISATIONS ÉCOLOGISTES

Cet arrêt est, à vrai dire, considéré comme le plus libéral jamais rendu par la Cour suprême en matière de qualité pour agir345. Mais même lorsque les tribunaux s'efforcent de distinguer les demandeurs du reste de la population, ils se contentent d'une relation de fait assez lâche avec l'objet du litige: ainsi les visiteurs effectifs d'un site naturel menacé de destruction peuvent se prévaloir d'un préjudice personnel, quand bien même la vallée est ouverte à tous346. En revanche, 1' aversion, commune à 1 'ensemble de la population, pour la cruauté envers les animaux, ne permet pas d'alléguer un préjudice distinct fondant la qualité pour agir347.

La qualité de contribuable ne donne pas non plus de droit d'action en 1 'absence de lien logique (logical nexus) entre le statut de contribuable et l'acte étatique attaqué348 . Enfin, un particulier ne saurait invoquer simplement une atteinte à son droit, partagé avec chaque citoyen, à ce que 1 'administration agisse conformément à la loi349.

121. L'intérêt touché n'a pas besoin d'être économique, il peut être esthétique ou récréatif. L'intérêt à la jouissance, à 1 'usage et à la conservation de ressources naturelles est «connaissable»: sa lésion cons-titue une atteinte de fait susceptible de fonder la qualité pour agir350.

Sou ter, dans l'arrêt Lujan v. Defend ers ofWildlife, 112 S.Ct. 2130, 2147 (1992), qui rappelle que peu importe combien de personnes sont atteintes, va dans le même sens.

345 Sierra Club v. Robertson, 28 F.3d 753, 759 (8th Cir. 1994); LAWRENCE (1989) p. 10291, note 21.

346 Sierra Club v. Morton, 405 U.S. 727, 734-735 (1972). Certains tribunaux sem-blent avoir récemment augmenté l'exigence de précision quant à l'usage effectif des ressources naturelles en cause, notamment en ce qui concerne les terrains en mains publiques; Wilderness Society v. Gril es, 824 F.2d 4 (D.C. Cir. 1987); NRDC v. Burford, 19 ELR 20740 (D.D.C. 1988); NWF v. Burford, 699 F.Supp. 327 (D.D.C. 1988); ce dernier arrêt a été confirmé par la Cour suprême après avoir été cassé par une cour d'appel, Lujan v. NWF 497 U.S. 871 (1990); LAWRENCE ( 1989) p. 10292.

347 Animal Lover 's Volunteer Association v. Weinberger, 765 F.2d 937 (9th Cir. 1985).

348 Valley Forge, 454 U.S. 464 (1982); United States v. Richardson, 418 U.S. 166 (1974); Schlesinger, 418 U.S. 208 (1973); Flast v. Cohen, 392 U.S. 83 (1968);

Frothingham v. Mel/on, 262 U.S. 447 (1943).

349 Lujan v. Defenders ofWildlife, 112 S. Ct. 2130, 2143-2144 (1992);Allen v. Wright, 468 U.S. 737, 754 (1984); Valley Forge, 454 U.S. 464, 482-483 (1982).

350 Le premier arrêt reconnaissant de tels intérêts fut rendu par la cour d'appel pour le deuxième circuit: Scenic Hudson Preservation Conference v. Federal Power Commission, 354 F.2d 608 (1965). La Cour suprême suivit quelques années plus tard: Sierra Club v. Morton, 405 U.S. 727 (1972); United States v. SCRAP, 412

LA QUALITÉ POUR AGIR

Par contre un intérêt purement idéologique ne sera pas pris en considé-ration351.

122. Il n'est enfin pas nécessaire que le plaignant soit atteint dans un intérêt important. La Cour suprême a admis, reprenant une formule du professeur Davis, qu'une bagatelle identifiable (identifiable trifle) suffisait352. Cela étant, il n'est pas contestable que la question de savoir ce qui constitue un intérêt «connaissable» n'implique pas seulement une détermination objective, mais également un jugement normatif353 .

123. Dans l'arrêtLujan v. Defenders ofWildlifede 1992, la Cour suprême a resserré le critère de 1' atteinte de fait, en exigeant plus stric-tement, d'une part, que cette atteinte soit actuelle ou imminente et non simplement conjecturale ou hypothétique354 et, d'autre part, qu'elle soit personnelle et affecte le demandeur de façon individuelle. Elle a ainsi refusé de considérer qu'était personnellement atteint par une politique pouvant affecter 1' existence d'espèces animales lointaines quiconque utilisait une portion quelconque de 1' écosystème global touché par la politique en question, avait un intérêt dans 1' étude ou 1' observation d'espèces d'animaux menacées ou invoquait un intérêt professionnel

U.S. 669 (1973); Duke Power Co. v. Caro/ina Environmental Study Group, !ne., 438 U.S. 59 (1978); Japan Whaling Association v. American Cetacean Society, 478 U.S. 221 (1986);Lujan v. Defenders ofWildlife, 112 S.Ct. 2130,2137 (1992).

35! Sierra Club v. Morton, 405 U.S. 727, 739-740 (1972), pour une critique viru-lente de cette décision, voir SAX (1973). Il faut relever que même s'il a refusé de reconnaître les recourants purement idéologiques, cet arrêt est considéré par les organisations écologistes comme une victoire, puisqu'il a consacré la prise en compte, à condition qu'ils soient touchés concrètement, des intérêts liés à la pro-tection de l'environnement, cf. SIERRA CLUB (1989) p. 53.

352 United States v. SCRAP, 412 U.S. 669, 689, note 14 (1973).

353 En ce sens NICHOL (1993) pp. 1155 ss et (1986) pp. 1929 ss; SUNSTEIN (1993b) pp. 38 ss.

354 Lujan v. Defenders ofWildlife, 112 S.Ct. 2130,2136 et 2138 (1992). Se fondant sur cette jurisprudence, la cour d'appel du huitième circuit a récemment dénié la qualité pour agir au Sierra Club pour attaquer un plan de gestion d'une forêt nationale, considérant qu'aucune atteinte imminente aux intérêts des membres de l'organisation ne découlait de ce plan; la cour a cependant admis qu'il s'agis-sait d'un point sujet à discussion et a pris la peine de rejeter également sur le fond la demande du Sierra Club, Sierra Club v. Robertson, 28 F.3d 753, 758 ss.

(8th Cir. 1994). La cour d'appel du neuvième circuit s'en est, au contraire, tenue à sa jurisprudence admettant la qualité pour agir des organisations écologistes dans de tels cas, Resources Limited, !ne. v Robertson, 8 F.3d 1394, 1397-1398 et la jurisprudence citée (9th Cir. 1993).

LES VOIES DE DROIT DES ORGANISA TI ONS ÉCOLOGISTES

concernant ces animaux355 . Cette approche plus restrictive de 1 'atteinte de fait a été vivement critiquée356, mais il ne semble pas qu'elle limite, en pratique, la capacité des organisations écologistes à intenter action.

Tout au plus les oblige-t-elle à enrichir leur dossier de témoignages pré-cis de membres personnellement affectés par 1 'objet du litige357 .

3) La causalité

124. L'atteinte subie par celui qui veut intenter une action judi-ciaire doit pouvoir raisonnablement (fair/y) être attribuée à la conduite étatique dont 1 'illégalité est alléguée358 . Cela ne signifie pas qu'une re-lation de causalité directe et prouvée de façon absolue soit exigée. Une substantielle probabilité que 1 'action prétendument illégale soit la cause de 1 'atteinte suffit359 . En outre, le préjudice subi par le demandeur peut avoir été causé par la réaction d'un tiers à l'action étatique en cause360 .

Si la Cour suprême a appliqué le critère de la causalité de façon très constrastée, elle paraît avoir été plus sévère en matière de ségrégation raciale361 ou sociale362 qu'en matière d'environnement363 . Elle a ainsi admis qu'un groupe écologiste pouvait attaquer une augmentation des tarifs de transport de marchandises par chemin de fer, ce groupe préten-dant que 1 'augmentation en question allait décourager 1 'usage de matiè-res recyclables, désormais plus chèmatiè-res à transporter, ce qui entraînerait

Si la Cour suprême a appliqué le critère de la causalité de façon très constrastée, elle paraît avoir été plus sévère en matière de ségrégation raciale361 ou sociale362 qu'en matière d'environnement363 . Elle a ainsi admis qu'un groupe écologiste pouvait attaquer une augmentation des tarifs de transport de marchandises par chemin de fer, ce groupe préten-dant que 1 'augmentation en question allait décourager 1 'usage de matiè-res recyclables, désormais plus chèmatiè-res à transporter, ce qui entraînerait