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A. En Suisse

II. Les coûts

19 2. Les frais de justice, qui forment le premier élément des coûts directs d'une procédure ne sont, en général, pas particulièrement élevés pour les organisations écologistes. Devant le Tribunal fédéral, l'émolu-ment judiciaire pour les contestations de droit public et administratif non pécuniaires oscille entre 2500 et 5000 francs (art. 153a al.1 let. b OJF)543. Le Tribunal fédéral se montre très modéré dans ses exigences d'avance de frais (art. 150 al. 1, 2e phrase, OJF) lorsque un recours émane d'une organisation à but idéal544. L'émolument d'arrêté devant les autorités administratives fédérales peut aller jusqu'à 5'000 francs (art. 2 al. 2 OFIPA), mais les organisations écologistes échappent au versement d'une avance de frais (art. 63 al. 4 LP A a contrario )545. Cer-taines instances cantonales, notamment à Zurich, exigent cependant des dépôts relativement élevés, de l'ordre de 1000 francs546 . Lorsqu'une telle exigence s'applique aux recours relatifs à des décisions prises en série et attaquables séparément, elle peut constituer un obstacle insur-montable pour les organisations écologistes, qui ne disposent que d'un budget réduit à affecter aux procédures juridiques.

193. Abstraction faite du problème de l'avance de frais, le budget des organisations écologistes n'est définitivement grevé par les frais de justice que dans la mesure où elles succombent dans la procédure (art. 156 al. 1 OJF, art. 63 al. 1 LP A). Même dans ce cas, il est fréquent, en tout cas au niveau fédéral, que l'instance de recours renonce à exiger des frais de justice ou en fixe un montant réduit compte tenu du but purement idéal poursuivi par l'organisation recourante547. Ces frais ne représentent donc pas, d'une manière générale, une dépense prohibitive548.

543 Cette disposition, entrée en vigueur le 1er janvier 1992, comporte une forte aug-mentation des émoluments, dont le maximum était auparavant de 500 francs.

544 RHINOW (1994) no 1332; K6LZ/HÂNER (1993) no 452.

545 BERNET (1986), no 248, fait état d'une pratique de remise ou de réduction des émoluments pour les parties agissant dans l'intérêt public.

546 D'après les indications d'un responsable d'organisation écologiste.

547 BRUNNER (1990) pp. 28-29.

548 Id.

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194. Les frais d'avocat forment la seconde composante des coûts procéduraux directs. Pour nombre d'affaires, ces frais restent raisonna-bles. La procédure helvétique est relativement simple et les problèmes qui se posent en matière de LPN ne présentent souvent pas de difficul-tés juridiques particulières. Une part non négligeable des recours peu-vent ainsi être traités, au moins partiellement, par le personnel des orga-nisations concernées ou par des avocats travaillant à titre militant.

Certaines procédures requièrent toutefois un travail juridique plus ap-profondi, donc plus coûteux. Leur nombre risque d'ailleurs d'augmen-ter au fur et à mesure que s'accroît le contentieux relatif à la LPE, qui soulève fréquemment des questions assez complexes. Il faudrait, en outre, pour estimer le coût réel des procédures, assimiler aux frais d'avocat le salaire des personnes employées par une organisation, en proportion du temps qu'elles consacrent à effectuer le travail qui reviendrait autre-ment à un mandataire.

195. Les organisations écologistes assument encore d'autres char-ges en relation avec les procédures qu'elles engagent: frais de recher-che, d'administration, voire d'expertise. Dans certains cas, ces dépen-ses, par exemple pour une expertise particulière, sont clairement liées à un recours donné et sont indispensables à la défense efficace du point de vue de 1 'organisation. Dans ce cas, il faut les considérer comme des coûts procéduraux directs. Dans d'autres circonstances, le lien avec une procédure spécifique est plus difficile à déterminer: c'est le cas des frais de secrétariat ou des recherches menées sur une problématique générale.

196. Les art. 159 al. 2 OJF et 64 LPA prévoient l'octroi de dépens à la partie ayant entièrement ou partiellement gain de cause pour les frais indispensables occasionnés par le litige. L'art. 64 LP A précise que ces frais doivent être relativement élevés pour justifier des dépens. Cette disposition indique que l'autorité «peut» allouer des dépens, mais elle a été interprétée comme fondant un véritable droit549Par frais indispen-sables, il faudrait entendre les dépenses définies ci-dessus comme frais procéduraux directs. Les organisations écologistes devraient donc pou-voir les récupérer lorsqu'elles obtiennent, au moins partiellement, gain de cause.

197. En réalité, la possibilité d'obtenir des dépens est sensible-ment plus restreinte. Les autorités administratives ne se limitent pas

549 JAAC 57/16; 54/39; RHINOW (1994) no 1122; Kë>LZ/HANER (1993) no 308;

BERNET (1986) no 14; GRISEL (1984) p. 847.

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aux honoraires d'avocat (art. 8 al. 2let. b etc OFIPA), mais ne prennent pas en compte le travail salarié (art. 8 al. 2 let. a OFIPA). Quant au Tribunal fédéral, il ne reconnaît en principe pas le droit à des dépens à la partie qui n'est pas représentée par un avocat550. Dès lors, l'octroi d'une indemnité pour des débours, que le Tribunal a pourtant admise en son principe551 , n'est accordée qu'à titre exceptionnel, à condition, en outre, que ces débours soient considérables et prouvés552. Une indem-nité pour perte de temps ou de gain revêt également un caractère excep-tionnel553. Cette pratique prétérite incontestablement les organisations écologistes, dans la mesure où elles font largement appel à leur person-nel salarié pour s'occuper de leurs recours.

Au surplus, le montant des dépens accordés reste faible 554, la plu-part du temps très en deçà des frais réels555 . Cette faiblesse de l'indem-nisation de la partie victorieuse résulte, d'une part, d'un plafond régle-mentaire556 et, d'autre part, de la pratique restrictive des instances de recours, dont il est au demeurant difficile d'analyser les critères, les décisions sur les dépens n'étant en principe pas motivées557 .

198. Hormis 1' octroi de dépens, il n'existe pas de moyen pratica-ble permettant à une partie victorieuse de se faire rembourser ses frais de procédure. Le Tribunal fédéral a jugé que, vis-à-vis des autorités fédérales, le sort des frais exposés en raison de la procédure était réglé exclusivement par les dispositions spéciales concernant les dépens, ce

550 ATF 113 lb 353, 357, B.; KbLZ/HÀNER (1993) no 453; BERNET (1986) no 261;

ÜRISEL (1984) p. 849.

551 Art. 2 al. 1 du tarif pour les dépens alloués à la partie adverse dans les causes portées devant le Tribunal fédéral, du 9 novembre 1978, R.S. 173.119.1, ci-après:

tarif du Tribunal fédéral.

552 ATF 113 lb 353,357, B.; KbLZ/HÀNER (1993) no 453.

553 Id.; art. 2 al. 2 du tarif du Tribunal fédéral.

554 Cf. BRUNNER ( 1990) p. 29.

555 Ainsi, par exemple, dans l'affaire de la Croix-de-Coeur, les opposants à l'alti-port alléguaient 95 194,50 francs de frais judiciaires, 38 848 francs de frais d'ex-pertise et de maquette et 125 989 francs de frais divers, DEP 1987 p. 47. Il ne reçurent que 5000 francs de dépens, DEP 1987 p. 44; PETITPIERRE-SAUV AIN (1987) p. 76.

556 L'art. 6 ch. 2 du tarif du Tribunal fédéral fixe le montant maximum des honorai-res d'avocats à 5000 francs pour les recours de droit public et de droit adminis-tratif. Cette disposition s'applique par analogie au recours administratif, le maxi-mum étant réduit pour les recours aux autorités inférieures (art. 8 al. 3 et 4 OFlPA).

557 ATF Ill la 1, 1-2, X.

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qui excluait une action en dommages-intérêts contre la Confédération558 .

Par ailleurs, une action en dommages-intérêts fondée sur 1 'art. 41 CO et dirigée contre une personne privée qui succombe exigerait la démons-tration d'un abus de droit constitutif d'acte illicite de la part de cette dernière, ce qui ne pourrait être le cas que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles559.

199. Si les organisations écologistes n'ontpas à espérer grand chose du système des dépens, elles n'ont pas non plus à le craindre lorsqu'elles sont déboutées, du moins sur le plan fédéral. D'abord, parce que, d'une façon générale, les autorités et les organismes chargés de tâches de droit public, ne peuvent prétendre à des dépens (art. 159 al. 2 OJF, art. 8 al. 5 OFIPA)560. Ensuite, parce que, dans les cas où une personne pri-vée se trouve parmi les parties victorieuses, les instances de recours font preuve d'une très grande retenue dans l'imposition de dépens aux organisations à but idéal561 . Il faut encore ajouter que, dans la mesure où elle intervient dans une procédure d'expropriation, une association de protection de 1' environnement ne prend pas de risque financier, les frais de procédure étant en principe à la charge de 1 'expropriant (art. 115 et 116 LEx)562 .

200. La pratique des cantons peut cependant être différente de celle des autorités fédérales. Ainsi, il y a quelques années, la SPE et divers autres recourants se sont vu imposer par le gouvernement argovien plus de 70 000 francs de dépens563 . Si une telle pratique devait se répandre,

558 ATF 112 lb 353, 355-356, Association pour la sauvegarde de la région de la Croix-de-Coeur; DEP 1987 pp. 48-49; pour une critique de cette jurisprudence, voir PETITPIERRE-SAUV AIN ( 1987).

559 Cf. infra no 201.

560 Le Tribunal fédéral fait exception à cette règle en faveur des communes ou orga-nismes qui, dépourvus d'un service juridique, ne sont pas en mesure de se défen-dre eux-mêmes, GRISEL (1984) p. 849.

561 Voir les chiffres donnés par BRUNNER ( 1990) p. 28 concernant les dépens impo-sés à la LSPN.

562 ATF 119 lb 458, 462, VCS, où le Tribunal fédéral n'a toutefois pas accordé de dépens à 1 'organisation recourante, celle-ci ayant totalement succombé, et a laissé entendre qu'il pourrait mettre des frais à sa charge si elle soulevait des questions identiques dans un nouveau recours relatif au même projet routier.

563 Le litige portait sur la construction d'une installation d'incinération de déchets spéciaux à Dottikon, cf. Umweltschutz, novembre 1989, p. 11; BRUNNER (1990) p. 29. Les parties étant finalement parvenues à un accord, y compris sur laques-tion des dépens, cette affaire n'a pas donné lieu à une jurisprudence définitive.

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elle produirait un effet dissuasif certain sur les organisations de protec-tion de 1 'environnement, qui ne peuvent se permettre de risquer plu-sieurs dizaines de milliers de francs dans un recours. Cette dissuasion concernerait spécialement les projets importants, qui sont les plus sus-ceptibles de provoquer des procédures complexes et coûteuses, mais qui sont aussi, en général, ceux dont l'impact sur l'environnement est le plus marqué. Au demeurant, puisque les organisations habilitées à re-courir doivent désormais intervenir dès les premières étapes de la pro-cédure cantonale564, l'imposition de dépens prohibitifs au niveau can-tonal risquerait de les empêcher d'exercer leurs droits de recours fédéraux. Dans cette mesure, une telle pratique serait contraire au droit fédéral.

201. Lorsque, par un recours muni de l'effet suspensif, une orga-nisation écologiste a retardé un projet pour finalement se voir déboutée sur le fond, on pourrait imaginer que le promoteur de ce projet lui ré-clame des dommages-intérêts pour les coûts supplémentaires dus au re-tard565. En 1' état de la jurisprudence, la réussite d'une telle démarche est hautement improbable. Dans un arrêt isolé, le Tribunal fédéral avait admis 1 'application de la responsabilité causale prévue à 1 'art. 84 PCF dans le cadre de la procédure de recours de droit public566. Cette juris-prudence extrêmement discutable567 ne semble pas avoir eu de suite568.

564 Supra no 1 0 l.

565 Sur cette problématique, favorable à une telle solution, GADOLA ( 1994) pp. 109 ss;

opposé, TANQUEREL (1988) pp. 148 ss.

566 ATF 91 II 143, Société d'agriculture du Val-de-Ruz.

567 Cf. TANQUEREL (1988) pp. 148-149. GADOLA (1994) pp. 109, note 74, et p. 113, admet l'application des art. 82 et 84 PCF aux procédures administratives devant le Tribunal fédéral, en raison du renvoi de l'article 40 OJF. Or, cette dernière disposition ne renvoie à la PCF que lorsque 1 'OJF <me contient pas de disposition de procédure», ce qui implique, sinon l'existence d'une lacune véritable, au moins celle d'une situation analogue à un état de fait visé par une disposition de la PCF.

Or, comme le remarquent KôLz/HÂNER (1993) no 431, la position d'un recou-rant dans une procédure administrative, surtout s'il poursuit un intérêt public, comme c'est le cas des organisations écologistes, n'est nullement comparable à celle d'une partie à un procès civil. L'art. 40 OJF ne saurait donc constituer une base légale suffisante pour fonder une responsabilité causale dans le contentieux de droit public.

568 Le Tribunal fédéral a rappelé cette jurisprudence dans un arrêt plus récent, mais a néanmoins appliqué les principes de la responsabilité aquilienne au cas qui lui était soumis, ATF 112 II 32, 34, B.

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Si une responsabilité causale pour les dommages résultant de 1 'effet suspensif et 1 'imposition corrélative de sûretés étaient introduits569 , soit par une disposition cantonale ou fédérale expresse570, soit par applica-tion analogique de l'art. 84 PCF, les associaapplica-tions de protecapplica-tion de l'en-vironnement seraient privées de la possibilité de demander 1 'effet sus-pensif, voire de recourir lorsque 1' effet suspensif est automatique, pour tous les projets d'une certaine importance. Elles ne seraient, en effet, manifestement pas en mesure de supporter les montants en jeu. L'effet préventif d'un tel système viderait de sa substance les art. 12 LPN et 55 LPE571 . Une règle cantonale en ce sens devrait donc être considérée comme contraire au droit fédéral572Si l'on s'en tient aux règles de la responsabilité aquilienne, il faut noter que l'utilisation d'une voie de droit et la demande de mesures provisionnelles (y compris 1 'effet sus-pensif) ne sont pas illicites du seul fait qu'elles sont jugées finalement infondées. Seuls le dol ou la négligence grave pourraient entraîner une responsabilité civile573. Dans ces conditions, et compte tenu de la pru-dence dont les organisations suisses de protection de 1 'environnement font preuve dans 1 'usage de leurs voies de droit, on voit mal une action en responsabilité à leur encontre aboutir574.

569 comme abusif au point d'entraîner la responsabilité aquilienne de son auteur, il convient alors de refuser purement et simplement l'effet suspensif. Un projet de loi genevois prévoyant le dépôt de sûretés, à titre exceptionnel, en cas d'effet BO/CN 1993 2094, 2098. Il est intéressant de relever que cette proposition pro-venait de députés favorables à la suppression pure et simple du droit de recours des organisations écologistes, BO/CN 1993 2081.

Dans le même sens, K6Lz/HÂNER (1993) no 431.

GADOLA (1994), p. Ill, considère que, dans un tel cas, 1 'application du droit fédé-ral serait rendue plus difficile, mais non impossible. Cette façon de voir, qui fait abstraction de la réalité économique, ne peut être suivie. Un droit de recours sou-mis à des conditions financières prohibitives devient inopérant, donc inexistant.

ATF 112 II 32, 35, B., publié plus complètement in SJ 1986 464; voir également Droit de la construction 1986/3 pp. 66-67 avec commentaire de TERCIER.

On ne saurait toutefois exclure que la menace d'une action en dommages-intérêts puisse avoir un effet dissuasif sur une petite organisation ou un voisin invoquant la violation de règles d'intérêt public, cf. DALLÉVES (1992) p. 45.

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B. Aux Etats-Unis

202. Les actions judiciaires américaines ne sont pas nécessaire-ment très coûteuses à introduire575. Leur poursuite entraîne par contre toujours des frais considérables en raison de la complexité tant de la procédure que du droit de fond, de l'ampleur des mesures d'instruction et de la longueur d'un processus qui génère sans cesse de nouvelles étapes. Un recours massif aux compétences d'avocats est indispensa-ble. Il est, en outre, souvent nécessaire de faire appel à des experts.

Le recours aux services d'avocats et d'experts est également très fréquent dans les procédures administratives. Ces dernières sont, il faut le rappeler, fortement influencées par le modèle judiciaire, du moins lorsqu'unhearing formel est exigé ou lorsqu'une procédure d'appel est prévue. En conséquence, 1 'intervention dans les procédures administra-tives entraîne aussi des frais élevés.

Dans ces conditions, la possibilité d'obtenir des dépens revêt une importance considérable.

203. En vertu du principe fondamental dit de la «règle américaine»

(American rule), les parties à un procès doivent supporter leurs propres frais de procédure, notamment les honoraires de leur avocat, quelle que soit l'issue du litige576Ce principe dissuade évidemment fortement l'in-troduction d'actions visant à protéger des intérêts diffus, comme ceux liés à la protection de 1 'environnement, le gain du demandeur en cas de jugement favorable étant, dans ce cas, inférieur au coût de la procé-dure577. Considérant qu'il était dans l'intérêt public que des particuliers participent à la mise en oeuvre de normes protégeant le bien commun en portant les violations de celles-ci devant la justice, certains tribu-naux avaient admis que les parties qui agissaient en tant que «procu-reurs privés» (private attorneys general) avaient droit à des dépens même

575 BACOW/WHEELER (1984) p. 27. Certains groupes locaux peuvent néanmoins avoir de la difficulté à supporter le coût initial d'une procédure, cf. MILLER (1983) p. 10411, note 56; voir aussi FADIL (1985) pp. 60-61, qui nuance cette constata-tion.

576 Cette règle est rappelée et son histoire exposée en détail in Aleskya Pipeline Co.

v. Wilderness Society, 421 U.S. 240, 247 ss (1975). La jurisprudence a forgé quelques exceptions à la règle, notamment la mauvaise foi de la partie qui suc-combe, id. 257-259. La validité de la règle a été encore confirmée récemment dans l'arrêt Key Tronic Corp. v. U.S., 114 S.Ct. 1960, 1965 (1994).

577 PERCIVALIMILLER (1984) pp. 237-238; FEIN (1984) p. 223.

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en 1' absence de base légale expresse578 . La Cour suprême a mis fin à cette tendance en 1975, dans 1 'arrêtAleskya Pipeline Co. v. Wilderness Society579 , en affirmant clairement que 1 'American rule ne pouvait être écartée que sur la base d'une disposition légale explicite.

204. Un autre obstacle à 1 'octroi de dépens est le principe de 1' «immunité souveraine» (sovereign immunity ), qui s'oppose à ce que 1 'Etat soit condamné à des dépens quelles que soient les circonstan-ces580. L'Etat peut cependant renoncer à cette protection. C'est ce que 1 'Etat fédéral a fait à travers 1 'Equal Access to Justice Act (EAJA)581 , qui prévoit notamment que les Etats-Unis sont soumis à 1' obligation de payer des dépens dans la même mesure que le sont d'autres parties en vertu de lacommon law ou de lois spéciales582. Le principe desovereign immunity, renforcé par le onzième amendement de la Constitution, cons-titue en revanche toujours un obstacle à 1 'obtention de dépens dans les actions contre des Etats, ceux-ci n'ayant que rarement renoncé à leur immunité à ce propos583 .

205. Les organisations écologistes peuvent, en fait, s'appuyer sur de nombreuses dispositions légales spéciales pour prétendre à 1' octroi de dépens.

C'est ainsi que toutes les dispositions instituant des citizen suits comportent une clause sur les dépens584. En revanche, seules

quelques-578 Voir les exemples cités in Aleskya Pipeline Co. v. Wilderness Society, 421 U.S.

240,270, note 46 (1975). Voir aussi Kë>TZ (1984) p. 99, note 10.

579 421 U.S. 240, 247 ss (1974), cette décision cassait Wilderness Society v. Morton, 495 F.2d 1026 (D.C. Cir. 1974). Cette jurisprudence est toujours valable, Key Tronic Corp. v. U.S., 114 S.Ct. 1969, 1965 (1994).

580 BENNETT ( 1989) pp. 1-2. Le principe de sovereign immunity est appliqué ici aux dépens, mais sa portée est plus large, puisqu'il postule que l'Etat, souverain, ne peut être assigné en justice qu'avec son consentement, cf. BA TOR et al. (1988) pp. 1097 ss.

581 Cette loi a modifié diverses dispositions légales existantes en vue de permettre l'octroi de dépens aux parties opposées à l'Etat fédéral dans des procédures ad-ministratives et judiciaires, voir 5 U.S.C. § 504 et 28 U.S.C. § 2412. Voir aussi ROBBINS (1995) p. 25; ROBINSON (1995a) p. 47; BENNETT (1989) pp. 1-1 ss;

ROSENBAUM (1985) pp. 10348 ss.

582 EAJA, 28 U.S.C. § 2412(b) in fine.

583 MILLER (1983) p. 10416.

584 ROBINSON (1995a) p. 47; BENNETT (1989) pp. 7-1 ss; ROSENBAUM (1985) pp. 10348, note 2, et ss; MILLER (1983) p. 10409. On peut mentionner notam-ment CAA, 42 U.S.C. § 7604(d); CWA, 33 U.S.C. § 1365(d); RCRA, 42 U.S.C.

§ 6972(e); TSCA, 15 U.S.C. § 2619(c)(2); MPRSA, 33 U.S.C. § 1415(g)(4); NCA,

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unes des dispositions prévoyant un recours judiciaire contre des règle-ments ou décisions de l'administration (judicial review) sont munies d'une telle clause585 . La question s'est posée de savoir si, dans une pro-cédure dejudicial review, des dépens pouvaient être accordés par appli-cation analogique de la clause relative aux citizen suits. Une telle solu-tion ne semble guère compatible avec l'exigence de base légale claire posée par l' arrêtAleskya Pipeline et une seule cour d'appel a réellement persévéré dans cette voie586.

206. Les dispositions sur les dépens sont presque toutes calquées sur le modèle de celle du CAA, qui prévoit que le tribunal peut octroyer une indemnité pour les frais de procédure, incluant de raisonnables

206. Les dispositions sur les dépens sont presque toutes calquées sur le modèle de celle du CAA, qui prévoit que le tribunal peut octroyer une indemnité pour les frais de procédure, incluant de raisonnables