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Le statut de la forêt à Roumanie

En Roumanie, la forêt couvre 6,3 millions d’hectares soit 26,7% de la superficie du pays. La majorité de la superficie forestière se situe en montagne438 où elle est menacée par le dessèchement et la sécheresse, mais aussi par l’intervention humaine qui provoque défrichements, dégradation des sols et pollution. Par ailleurs, la privatisation de 300.000 hectares de terrains à destination sylvestre439 en pleine crise économique a des conséquences négatives comme le défrichement destiné à utiliser du bois pour des raisons économiques440.

En Roumanie, la classification des forêts obéit à un schéma particulier: il s’agit de la différenciation entre domaine public et domaine privé, mais selon deux « concepts » qui ont une signification globale. Il s’agit du « fonds forestier national » et de « la végétation forestière en dehors de ce fonds »441. Cette dernière doit être

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KABOGLU I., « Turquie », préc.

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KABOGLU I., « Turquie », préc.

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67% de la forêt roumaine est située en montagne, 25% dans la zone des collines et des coteaux et 8% en plaine.

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Soit 4% du fonds forestier.

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DUTU M., « Le régime de protection, conservation et développement des forêts en Roumanie », in

Droit, forêts et développement durable, sous la direction de PRIEUR M.- DOUMBE-BILLE S.,

Bruylant, 1996, p.212.

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Le fonds forestier national comprend les forêts, les terrains destinés au reboisement, qui doivent servir aux besoins de culture, de production ou d’administration sylvestre, les étangs, les lits des résineux les terrains non productifs inclus dans les aménagements sylvestres, indifféremment de la nature de la propriété. La végétation forestière des terrains situés en dehors du fonds forestier national est constituée par la végétation forestière des plaines boisées, les rideaux forestiers de protection des terrains agricoles, les plantations forestières et les arbres des zones de protection, des travaux hydrotechniques et de l’aménagement du territoire, ceux situés le long de cours d’eau et de canaux d’irrigation ; les rideaux forestiers de protection et les arbres longeant les voies de communication au- delà de la forêt et la végétation de la zone alpine.

gérée par les propriétaires selon des normes édictées par le Ministère des eaux, des forêts et de la protection de l’environnement. Le fonds forestier national considéré comme « bien d’intérêt public » ressemble au régime forestier français. Il s’agit d’un régime public de protection, de garde et d’exploitation des forêts indépendamment du caractère public ou privé de la propriété forestière. Cela justifie des limitations à l’exercice de la propriété privée. La Constitution roumaine prévoit la protection de l’environnement442, mais aussi des limitations du droit de propriété en faveur de l’environnement443.

Toutefois, il ne faut pas confondre le concept technico-juridique de « Fonds Forestier National » avec les notions de « fonds publics » ou « fonds privés ». En effet, en Roumanie le critère est une politique forestière fondée sur la fonction écologique destinée à appliquer un régime minimal avec un caractère de conservation et de protection de la forêt. En effet, même dans les forêts privées, la régénération, la bonne administration et la protection des forêts, l’exploitation industrielle du bois, l’assurance de l’intégralité du développement du fonds forestier sont d’ « intérêt général », car elles visent à protéger le droit fondamental de l’homme à l’environnement444.

Le fonds forestier national fait partie d’un système sylvestre constitué de « normes techniques, sylvestres, économiques et juridiques concernant l’aménagement, la culture, l’exploitation, la protection et la sauvegarde de ce fonds ». À titre d’exemple, le Code forestier prévoit le droit de préemption en faveur de l’État et une série de mesures pour protéger les forêts contre les déforestations irrationnelles, les maladies et les insectes nuisibles et pour sauvegarder le fonds forestier.

Les structures de la forêt roumaine centralisées autour du Ministère des eaux, des forêts et de la protection de l’environnement sont divisées en trois catégories : les

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Article 134(2) lettre E de la Constitution roumaine.

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Article 41(6) de la Constitution roumaine.

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DUTU M., « Le régime de protection, conservation et développement des forêts en Roumanie », préc., p.213.

structures ayant la compétence de l’administration445, les structures pour l’administration446 et la gestion et les associations des propriétaires. La forêt faisant partie du fonds forestier national est aménagée par les investissements publics, élaborés selon les prévisions des plans d’aménagement du territoire prévus par la loi. Par ailleurs, établis par le Ministère des eaux, des forêts et de la protection de l’environnement, les aménagements sylvicoles prévus pour une période de 10 ans447 sont la base du cadastre forestier et ils entretiennent le fonds forestier448.

Au plan social, la législation forestière roumaine prévoit pour les populations autochtones des droits sur les forêts, droits qui sont souvent en conflit avec la protection de l’environnement. À titre d’exemple, la loi n° 82/1993 sur la constitution de la Réserve de la Biosphère « le Delta du Danube » établit le droit des populations autochtones à conserver leurs coutumes locales et leurs activités traditionnelles. Dans ce but, la loi prévoit la possibilité de compensations accordées par l’État et un droit de préemption en faveur de l’État à la concession des superficies de terrains pour la mise en valeur des ressources terrestres et aquatiques.

Une recherche consacrée au statut juridique de la forêt peut donner l’impression de ne pas concerner le Droit, impression erronée lorsque nous nous interrogeons sur l’ampleur de questions relatives à la forêt449. Celle-ci est un territoire qui présente un intérêt économique grâce à la fourniture de bois, matière principale de l’industrie et les produits forestiers ont une fonction nourricière. De plus, la forêt a un intérêt pour lutter contre le risque naturel, lutte qui depuis toujours symbolise la lutte

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Il s‘agit de la Régie nationale des forêts « ROMSILVA »-RA, qui a pour objet l’entretien unitaire sur les principes écologiques, sur la base des aménagements sylvicoles, du fonds forestier en totalité pour augmenter la participation écologique des forêts à l’amélioration de l’environnement, en couvrant les exigences de l’économie nationale.

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On pourrait diviser leurs compétences en deux catégories : la coordination des attributions administratives des forêts et la protection de l’environnement qui implique l’exploitation économique et le contrôle des servitudes pour la protection de la nature et le maintien d’un « état forestier » qui concilie les intérêts d’exploitation et protection.

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À l’exception des forêts de peupliers qui sont accordées pour une période de 5 ans.

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DUTU M., « Le régime de protection, conservation et développement des forêts en Roumanie », préc., p.214.

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de l’Homme face à la Nature450. La contribution de la forêt à la régulation des sols et à la lutte contre le changement climatique sont des exemples emblématiques du caractère protecteur de la forêt contre le risque naturel. Enfin, la forêt joue également un rôle déterminant pour la qualité de vie des occidentaux. Plus précisément, la forêt est un lieu de détente qui permet à l’Homme de se redéfinir par le contact avec la Nature451. Pour toutes ces raisons nous constatons que cela vaut la peine d’approfondir les questions juridiques relatives à la forêt.

Mais, comme la politique forestière est une politique territorialisée, nous pouvons nous interroger sur l’intérêt de comparer la France et la Grèce.

Même si, à première vue, la comparaison entre les droits forestiers français et grec semble peu pertinente, un examen plus attentif montre que cela en vaut la peine. Tout d’abord, la France et la Grèce font partie du bassin méditerranéen. Cela signifie qu’une partie de la forêt française est soumise aux mêmes risques naturels que la forêt grecque et la lutte contre ces risques naturels joue un rôle essentiel dans la valorisation de la forêt. Celle-ci constitue le grand défi de la politique forestière, car il s’agit de respecter sa fonction écologique qui inclut son rôle paysager.

La France et la Grèce étant des pays membres de l’Union Européenne, leur application d’une politique forestière constitue un exemple de mise en œuvre du droit européen. Cela est renforcé par le fait que cette politique ne dispose pas d’une base juridique autonome. Le fait de comparer la mise en œuvre par ces deux pays d’une politique forestière peut répondre à des questions comme l’intérêt de créer une base autonome pour la politique forestière, malgré son caractère territorialisé.

Enfin, même si nous concentrons notre attention sur les différences qui existent entre la France et la Grèce, comme par exemple la continuité que connaît le droit forestier en France par rapport aux profonds changements qui ont marqué la politique grecque après la Révolution, de ces différences nous pouvons en tirer des

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KONTOS P., Forêts et civilisation en Grèce, Athènes , 1906, p.15.

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conclusions sur l’importance que la tradition a sur l’effectivité juridique en matière forestière.

§V. Une présentation générale de l’organisation de l’État en Grèce

Étant donné que ce travail est une étude de droit comparé entre la France et la Grèce redigée en français, nous estimons nécessaire de présenter certains éléments à caractère général sur la géographie (A) et sur l’organisation de l’État grec (B).