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Le rôle secondaire joué par les acteurs spécialisés en matière forestière

Section I : Un fort jacobinisme : une réalité en matière forestière

B. Le rôle secondaire joué par les acteurs spécialisés en matière forestière

En Grèce, le principal responsable de la politique forestière est l’Administration forestière et en France c’est l’Office National des Forêts (O.N.F.), la différence essentielle étant que l’O.N.F. fonctionne sous la forme d’un Établissement public industriel et commercial (E.P.I.C.), contrairement à l’Administration forestière qui est une Administration d’État.

Le point commun entre ces deux organismes est qu’ils sont tenus d’appliquer la législation forestière. En s’appuyant sur la loi, l’Administration forestière grecque doit protéger la forêt704 dont la valorisation fait partie des missions des organismes décentralisés705. Si l’Administration forestière grecque repose sur les structures traditionnelles d’une Administration étatique (1), l’O.N.F est une entreprise publique créée dans un esprit de modernisation de l’État (2).

1. L’Administration forestière grecque ou l’alter ego de l’État

En Grèce, l’Administration forestière fut créée en 1830, au moment où naissait le nouvel État grec706. Suite à de nombreux problèmes707, elle fut organisée de manière autonome à partir de 1922 après la libération de la Macédoine et de Thrace708. Sa situation ne cessa de se dégrader, car tous étaient convaincus que la

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Article 5§1 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

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Article 5§2 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

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En effet, elle commença à fonctionner depuis le décret B.D. « Sur l’organisation des services forestiers » en septembre 1836.

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Ces problèmes conduisirent à son abrogation en 1877 et à l’attribution de la protection des forêts à la police. En effet, la création du Service Central des Forêts, assujetti au Ministère de l’Économie, en 1893 refléta la priorité économique de la politique forestière.

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En nous appuyant sur les traités forestiers de l’époque, tels l’ouvrage de GRISPOS P. « Histoire forestière de la Grèce moderne », nous constatons que l’État considérait la gestion de la forêt comme lui étant dommageable, p.225.

forêt était nuisible à l’État. Cette logique fut confirmée par l’arrêt d’Areios Pagos 164/1883 dans lequel la juridiction civile suprême répondit négativement à l’applicabilité du droit pénal en matière forestière, arguant que « la protection de la forêt n’intéress[ait] pas l’État ». En outre, le Ministère compétent déclara : « Je veux de l’argent et non de la forêt »709. Cette priorité eut des conséquences désastreuses en matière forestière. C’est après la guerre civile que s’épanouit l’Administration forestière, l’ensemble des questions relatives à la forêt faisant partie de ses missions. Parmi les lois protectrices des forêts issues de la Constitution de 1975 figurent les décrets 1231/1981 et 402/1988 « Sur l’organisation des services forestiers ». L’efficacité de l’Administration forestière grecque a été soulignée par la Caisse Mondiale sur la Nature qui, dans son rapport, classe la Grèce au quatrième rang des pays de l’Union européenne et au premier parmi les pays méditerranéens en ce qui concerne la protection et la gestion de la forêt.

Cependant, aujourd’hui l’Administration forestière s’est dégradée. La première étape de cette détérioration fut le Décret 126/1986710 qui confia la gestion des forêts publiques non domaniales aux regroupements forestiers, en supprimant les centres spécialisés en la matière. Bien sûr, la possibilité prévue par la loi 1650/1986711 qui consistait à autoriser l’aliénation de la compétence de l’Administration forestière, de « territoires d’intérêt spécial » dont le réseau « Natura 2000» faisait partie était une mesure qui allait à l’encontre d’une gestion forestière homogène. Cependant, le signe le plus évident d’une dégradation de l’Administration forestière fut le terme mis à son intervention en matière d’incendies de forêts qui, après de nombreuses péripéties712, relève aujourd’hui exclusivement du Service des Pompiers713. Dans un

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GRISPOS P. « Histoire forestière de la Grèce moderne »,op.cit., p. 129.

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Décret 126 du 17/4/1986 « Procédure de cession de l’exploitation, de conservation et d’amélioration de forêts qui appartiennent à l’État et aux personnes morales du secteur public et aux associations forestières», J.O.R. A’44.

711

Loi 1650/1986, du 16/10/1986, « Sur la protection de l’environnement », J.O.R.A’ 160.

712

La chronique de la transmission de la lutte contre les incendies au Service des Pompiers commence en 1985, quand cette lutte fut confiée au Ministère de l’Armée pour un an. En 1986, le Service des Pompiers devint responsable de la lutte contre les incendies pour un an. En 1989, la loi du 26/4/1989 prévoyait un Acteur Unifié de Protection des Forêts, mais depuis 1998 c’est le service de Pompiers qui est chargé de la lutte contre les incendies, en vertu de la loi 2612/1998, J.O.R. A’112 et de la loi 3511/2006 sur la réorganisation du Service des Pompiers, le développement de sa mission et autres, J.O.R. A’258.

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KEKERIS I, « L’Administration forestière : de son établissement jusqu’à aujourd’hui », 19 septembre 2011, texte publié en ligne sur le blog respentza : http://respentza.blogspot.gr/2011/09/blog- post_9524.html

pays méditerranéen, la gravité du risque naturel ne devrait pas permettre la distinction entre protection et gestion de la crise.

Après avoir présenté l’Administration centralisée de la forêt grecque, nous analyserons l’effort de modernisation du secteur forestier que supposa la création de l’Office National des Forêts.

2. La volonté de modernisation du secteur français par l’Office National de forêts

Sans aucun doute, la création de l’O.N.F. traduit la volonté d’autonomiser la gestion forestière face à l’intervention étatique antérieure afin de valoriser économiquement la forêt714(a). Cependant, l’omniprésence étatique en matière forestière (b) a fortement amoindri l’efficacité de cette autonomisation.

a. L’Office National des forêts : une volonté d’autonomisation

Il est évident que la création de l’O. N. F. répond à la volonté d’échapper au jacobinisme forestier et de rendre autonome l’administration responsable des questions forestières. Si en France cette volonté s’est concrétisée (i), en Grèce le cadre juridique existant ne permet pas sa réalisation (ii).

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i. Concrétisation de l’autonomisation en France

L’O.N.F. a été créé par le premier article de la loi 64-1278 du 23 décembre 1964715. La transformation de l’Administration en Office signifie un changement de méthodes et de moyens et fait appel à la psychologie de l’entreprise, même si subsiste l’essentiel du cadre juridique antérieur. Toutefois, contrairement aux autres entreprises publiques nées soit de nationalisations d’entreprises soit du secteur privé716, l’Office National des forêts qui se définit comme un établissement public à caractère industriel et commercial vient du secteur public administratif et représente plus précisément la modernisation « par substitution » d’une administration traditionnelle de l’Administration des Eaux et Forêts717. En tant qu’héritier de cette Administration718, l’O.N.F. est né comme une « mesure de réorganisation radicale719» pour mettre un terme à un contexte de « distinction accusée 720» entre l’activité de gestion des forêts soumises au régime forestier et les missions de service

715

L’idée de créer l’Office National des Forêts remontait à 1959 et fut défendue en 1960 par l’Union des syndicats d’ingénieurs des Eaux et Forêts pendant la discussion entre parlementaires et représentants de ce syndicat, favorables à la création d’un établissement doté d’une autonomie financière et d’un budget annexe. En 1961, cette idée commença à prendre forme dans des études menées par le ministère de l’Agriculture. Après l’approbation quasi unanime de ce projet par les communes, en juillet 1964 un projet de réorganisation des administrations agricoles en trois groupes fut approuvé en réunion interministérielle. Le 18 novembre 1964, le projet dont faisait partie la création de l’O.N.F. sous la forme d’un établissement public industriel et commercial fut approuvé en Conseil des ministres qui décida de le soumettre au Parlement avec un projet de loi de finances rectificatif, p. 15 ; La France a- t- elle une politique forestière ?, étude présentée par l’Union des syndicats d’ingénieurs des Eaux et Forêts 1960, Midal, Montargis, p.50 et suiv.

716

À titre d’exemple, la loi du 8 avril 1946 qui créa l’Électricité de France et la loi du 17 mai 1946 qui créa le Gaz de France.

717

DURAND- PRINBORGNE Cl., « L’Office National des Forêts », R.F.F., janvier 1966, n°1, p.1 et s.

718

Depuis le Code forestier de 1827 jusqu’en 1965, l’Administration des Eaux et Forêts regroupait sous l’autorité du ministre de l’Agriculture une direction générale des Eaux et Forêts et des services extérieurs comprenant des ingénieurs des Eaux et Forêts. La direction générale disparut avec la réorganisation du ministère et le corps des ingénieurs des Eaux et Forêts fusionna avec celui des ingénieurs du génie rural.

719

PRIEUR M., Droit de l’environnement, op. cit, p. 323.

720

DURAND- PRINBORGNE Cl., « L’Office National des Forêts », p.14. L’administration forestière correspondait à une contradiction. En effet, même s’il s’agissait d’une administration de l’État qui constituait un service public au sens organique, elle assumait une mission de gestion d’un patrimoine des collectivités publiques constituant un domaine privé ; LAUBADERE, Traité élémentaire de droit

public sur l’ensemble des forêts721. L’argument de l’affectation est très discutable si nous prenons en compte la particularité des règles du droit forestier et la façon doctrinale de comprendre la notion de service public, à savoir reconnaître certains services publics sur les lieux de promenades, comme le service public culturel et touristique722.

Il est intéressant d’examiner les missions de l’O.N.F.723 par rapport à celles de l’Administration forestière grecque, en particulier par rapport à l’impact que peut avoir la transformation d’une Administration en une entreprise publique.

Tant l’Administration forestière grecque que l’Office National des Forêts ont pour mission la protection de la forêt724 qui, en France, s’effectue par la mise en œuvre du régime forestier725. La nécessité de protéger la forêt explique le centralisme de la politique forestière : ainsi, comme nous l’avons demontré, l’Administration forestière décidait de la « qualification forestière » d’un terrain en appliquant les critères propres à la définition de la forêt jusqu’à l’élaboration de la Charte forestière du territoire726. En outre, elle proposait des reboisements727 et donnait son avis sur la décision d’expropriation pour cause d’utilité publique du représentant de l’État dans le département728 ainsi que sur la rédaction de chartes thématiques forestières729. En tant qu’acteur environnemental, l’objectif de l’Administration forestière était de

721

La France a- t- elle une politique forestière ? , op.cit., p. 5.

722

C.E. 11 mai 1959, Dauphin, A.J.D.A. 1960. II, n°132, p.160, R.D.P.1960.1223 concl. Henry ; C.E. 13 juillet 1961, Compagnie fermière du Casino de Constantine et dame Lauriau, A.J.D.A. 1961, n°198 p.491 ; A.J.D.A. 1961, n°198 p. 491, R.D.P. 1962.524, note Waline. En outre, la création des centres régionaux de la propriété foncière en 1963 renforça l’unification de la politique forestière grâce à la création d’un office de gestion des forêts publiques ; DURAND- PRINBORGNE Cl., « L’Office National des Forêts », p.15.

723

Articles L.221-1 – L.221-7 du Code forestier.

724

Article 5 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

725

Article L.122-2 du Code forestier ; Soulignons que la gestion par l’O.N.F. a lieu même si elle est attribuée à un ministère par le biais d’une convention de gestion. C'est ainsi que l'O.N.F. peut gérer les terrains boisés relevant du ministère de la Défense (Instr. n° 21116/DEF/DAG/DE/DOM/URB/30, 16 mai 1991, relative à la gestion forestière de terrains militaires par l'O.N.F.: BOC 1991, p. 1983); HEIM C., « Domaine privé-Forêts des collectivités publiques », JCL. Propriétés publiques, Fasc. 47, n° 61.

726

Article 14 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

727

Article 200 du Décret 86/1969, du 18/1/1969 « Sur le Code forestier», J.O.R.A’7.

728

Article 3 de la loi 2882/2001 du 17/6/2001 « Sur le Code des exécutions forcées des immeubles », J.O.R.A’ 17.

729

réaliser des travaux de reboisement730, des travaux relatifs à la conservation des torrents731 et à la captation d’espèces de la faune sauvage732.

En France, parmi les missions de l’O.N.F., figurent la « gestion et l’équipement » des forêts relevant du régime733, à l’exception de certaines attributions exercées par les services déconcentrés de l’État. Ces missions soulignent le rôle parfois contradictoire de l’O.N.F. qui oscille entre opérateur économique et gestionnaire d’espaces naturels734. D’ailleurs, l’O.N.F.735, en vertu de sa vocation environnementale en tant que prestataire de services dans des espaces naturels, publics ou privés736, peut contribuer dans des zones de revitalisation rurale au maintien de services au public ne relevant pas directement de ses compétences737. Le Code forestier lui permet de devenir un opérateur de développement durable en matière forestière par le biais de ses missions d’intérêt général738.

En Grèce, même si la loi parle notamment de « protection » en ce qui concerne les compétences de l’Administration forestière, en réalité les missions de celle-ci concernent également la gestion, conçue pour être compatible avec les missions de développement durable : construction de routes forestières739, travaux d’amélioration concernant les refuges de la faune sauvage, maintenance et

730

Article 209§2 du Décret 86/1969, du 18/1/1969 «Sur le Code forestier», J.O.R.A’7.

731

Article 224§1 alinéa 3 du Décret 86/1969, du 18/1/1969 « Sur le Code forestier», J.O.R.A’7.

732

Article 254§6 alinéa 3 du Décret 86/1969, du 18/1/1969 « Sur le Code forestier», J.O.R.A’7.

733

Article L.122-2 du Code forestier ; HEIM C., « Domaine privé-Forêts des collectivités publiques », JCL. Propriétés publiques, Fasc. 47, n° 61.

734

En outre, grâce à sa qualité d’E.P.I.C., l’O.N.F. se charge de travaux pour la fixation des dunes, s’ils sont réalisés sur les dunes littorales du domaine de l’État indemnisé par convention L.221-4 du Code forestier. Ainsi, d’après l’article L.222-7, l’O.N.F. peut procéder à la vente des bois façonnés.

735

Dans le cadre des missions confiées aux maisons des services au public prévues à l’article 27 de la loi 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

736

Cette action de l’O.N.F. entraîna inévitablement des réactions et des contentieux dans le milieu libéral, C.E. 29 sept. 2003, Fédération nationale des géomètres experts et a., n° 221283.

737

Article L.221-5 du Code forestier.

738

Article L.221-6 du Code forestier. Plus précisément, il peut réaliser tant en France qu’à l’étranger « études, enquêtes et travaux » destinés à la valorisation de la biomasse forestière, à la protection et au développement durable des ressources naturelles, notamment forestières, à la prévention des risques naturels, à la protection, réhabilitation, surveillance et mise en valeur de paysages, au développement rural dans la mesure où cela concerne la gestion forestière ou contribue « au maintien de services publics dans les zones rurales fragiles ».

739

renouvellement des routes forestières, études pour la construction de bâtiments forestiers740 et études de travaux forestiers741.

La principale différence entre l’O.N.F. et l’Administration forestière est l’esprit d’indépendance dans lequel celui-là a été créé, autonomie que reflète sa capacité contractuelle742. Les contrats de l’O.N.F. peuvent être classés selon le caractère de leur objet. Ainsi, une distinction mérite d’être faite entre les contrats de « quasi mission de service public »743 et les contrats de droit commun concernant la gestion des forêts de particuliers. Toutefois, malgré cette volonté d’indépendance le changement qu’a supposé la création de cet office est loin de limiter profondément l’intervention étatique en matière forestière.

ii. Une autonomisation incompatible avec le cadre juridique existant en Grèce

Dans ce contexte, il est intéressant d’examiner si un organisme équivalent à l’O.N.F. pourrait remplacer l’Administration forestière grecque.

Cela pourrait se faire moyennant la création d’une entreprise publique744. Le principal avantage d’une telle solution serait l’autofinancement de la forêt, car celui-ci est très important depuis la création en 2010 de la Caisse Verte745, dont le but est d’acquérir des fonds environnementaux. Parmi ceux-ci figurent les sommes payées par les propriétaires de constructions illicites qui, parfois, se situent en forêt.

740

Article 237§2 du Décret 86/1969, du 18/1/1969 «Sur le Code forestier», J.O.R.A’7.

741

Article 222§1 du Décret 86/1969, du 18/1/1969 «Sur le Code forestier», J.O.R.A’7.

742

GIZARD M., Droit et fiscalité forestiers, P.U.F., 1996, p.226.

743

Il s’agit de contrats concernant les travaux d’entretien et d’exploitation de certaine forêts de l’État, les études et travaux dont la réalisation est confiée à l’O.N.F. par toutes personnes publiques dans le cadre du régime forestier ; GIZARD, Droit et fiscalité forestiers, préc., p.227.

744

En Grèce, les entreprises publiques sont soumises à la loi 3429/2005 du 27/12/2005 « Entreprises publiques et Organismes (D.E.K.O.)», J.O.R. A’314/27.12.2005) ; SPILIOTOPOULOS E., Manuel de

droit administratif, op. cit. , p. 374.

745

Article 1 de la loi 3889/2010 du 14/10/2010 « Sur le Financement des interventions environnementales, Caisse Verte, Validation des Chartes forestières et autres », J.O.R. A’ 182 ; CHAINTARLIS M., « La question compliquée de la ratification des Chartes forestières de la loi 3889/2010 », Per.Dik.., 2011, p.596.

Normalement, ces fonds sont destinés à réaliser des objectifs environnementaux, mais depuis une réforme législative récente décidée en pleine crise économique746, ces derniers ne reçoivent plus que 5% de ces fonds, ce qui signifie un net recul.

Néanmoins, le cadre juridique actuel ne permet pas une telle évolution du droit forestier. En effet, la condition nécessaire est la compatibilité de la gestion de la res communis, dont la forêt fait partie747, par une entreprise publique. Notre réflexion s’appuie sur la solution qu’adopta le Conseil d’État grec à propos de la possibilité qu’une entreprise publique gère le littoral748. La forêt et le littoral présentent des similitudes tant sur le plan juridique, puisqu’ils font partie du domaine public naturel en Grèce, que sur le plan de la gestion, parce qu’ils présentent un intérêt touristique et peuvent donc avoir un impact économique positif. À l’occasion de cet arrêt une réflexion a été menée sur la possibilité de gestion de la res communis par une entreprise privée.

Le Conseil d’État souligna que les res communes sont destinées à l’usage du public, et par conséquent ne font pas partie du « patrimoine privé » du public. Notons que ces termes « patrimoine privé » renvoient à la domanialité privée de l’État. En outre, un argument issu du droit constitutionnel fut utilisé. En effet, le droit au développement de la personnalité749 et le droit de l’Homme à l’environnement750 permettent la cession des droits d’exploitation des res communes, ce qui est une prérogative de la puissance publique qu’un E.P.I.C. ne peut exercer. Ainsi, étant donné que ladite cession répond à l’intérêt général et, sans exclure une volonté de profit, son rôle ne peut être que secondaire. C’est pourquoi les actes en question sont administratifs et donc susceptibles de recours devant le Conseil d’ État.

Même s’il n’est pas encore possible que le Conseil d’État grec opte pour la gestion de la forêt par une entreprise publique, il convient d’examiner la position

746

Article 39 de la loi 4024/2011 du 27 octobre 2011, « Sur les réglementations des retraites, l’uniformisation des salaires, et autres dispositions d’application de programme – cadre de stratégie budgétaire 2012−2015 », J.O.R. Α 226). Il est à noter que l’intitulé de la loi ne dit rien de son contenu relatif aux questions forestières.

747

Article 967 Code civil grec et arrêt d’Areios Pagos 207/2010.

748

C.E. grec Ass. 895/2008 confirmé par l’arrêt du C.E. grec 818/2013.

749

Article 5 de la Constitution grecque.

750

Article 24 de la Constitution grecque. (C’est le même article qui prévoit expressément la protection de la forêt).

exprimée par les juges du Conseil d’État dont une minorité s’est déclarée en faveur de la nature privée du litige, distinction rappelant la question de la domanialité privée du droit français. Le fondement conceptuel de cet aspect est la nature privée du contrat. En effet, selon l’article 94§1 et §3 de la Constitution hellénique les litiges issus de contrats publics sont soumis à la juridiction administrative, s’ils sont administratifs, mais si leur nature est privée, ils relèvent du juge judiciaire. En outre, d’après la Cour Suprême Spéciale, les critères indispensables pour une convention administrative sont les suivants : l’obligation qu’une partie de la Convention soit une personne publique ou l’État, la mise en œuvre d’un service public et la position dominante de l’État751. Cette jurisprudence souligne l’attachement du juge administratif grec au critère organique. D’après cette position, il faut distinguer la gestion des res communes qui ne constitue pas une prérogative de la puissance publique de leur protection, qui peut en constituer une.

Ainsi, nous pouvons conclure que si l’Administration forestière devait changer de forme, elle pourrait prendre celle d’un E.P.A. ou d’un Établissement à double visage.

La gestion de la forêt publique en Grèce par une entreprise publique n’est possible que si la forêt est intégrée à la catégorie de biens privatifs. Cela entraînerait la domanialité privée de la forêt grecque. Une telle perspective, comme nous l’avons