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Une adaptation imposée par le principe constitutionnel de subsidiarité

Section II : Une exigence de territorialisation en matière forestière

A. Une adaptation imposée par le principe constitutionnel de subsidiarité

En France, la première réforme vers la décentralisation eut lieu en 1982 et se poursuivit en 2003par une révision constitutionnelle879 qui changea la manière d’être de l’État880. L’intégration du terme « décentralisé » dans la constitution inaugure l’époque d’une nouvelle conception de l’organisation territoriale881. La notion de décentralisation correspond à la « libre administration des collectivités locales ». Elle est prévue par l’article 72 de la Constitution française882 et par l’article 102 de la Constitution grecque. L’intégration du principe de subsidiarité dans la Constitution

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Article 72 alinéa 2 de la Constitution française issu de la loi constitutionnelle n°2003-276 du 28 mars 2003: « Les collectivités territoriales ont vocation à prendre des décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon », DOUENCE J.-C., « Le statut constitutionnel des collectivités territoriales », Encyclopédie, Dalloz Collectivités territoriales n°6.

880

VIGUIER J., « La décentralisation territoriale est-elle encore au XXIe siècle une “manière d’être”de l’État? », in Regards critiques surs quelques (r)évolutions récentes du droit sous la direction de Krynen J. et M. Hecquard-Théron, t. 2 Réformes - Révolutions, 2005, Presses universitaires de l’Université des Sciences sociales de Toulouse, p.620.

881

VIGUIER J., « La décentralisation territoriales est-elle encore au XXIe siècle une “manière d’être”de l’État? », préc. p.627.

882

La Charte européenne de l’autonomie locale : une nouvelle chance pour la décentralisation à la française ?, document en ligne : http://www.senat.fr/territoires/ P.11.

démontre une volonté du gouvernement de modifier la perspective unitaire de l’État883 par la prise de décisions au plus près du terrain884. D’ailleurs, en France la constitutionnalisation de la décentralisation se produisit en même temps que l’adoption de la Charte européenne de l’autonomie locale885 qui imposa notamment le principe de l’autonomie locale886, principe également applicable en Grèce.

En Grèce, depuis la réforme constitutionnelle de 2001 l’article 102 prévoit une présomption de la compétence en faveur des organismes de décentralisation pour les affaires locales. Le principe de subsidiarité en tant qu’expression de la démocratie de proximité figure également dans le Code des collectivités territoriales grecques887. Le principe de subsidiarité888 est également un principe de droit européen qui tend à faire de l’autonomie locale un droit fondamental889. Le fait que le Traité de Lisbonne l’appelle «principe d’adéquation»890 ne dénature pas l’apport du principe de

883

VIGUIER J., « La décentralisation territoriales est-elle encore au XXIe siècle une “manière d’être”de l’État? », préc. p.637.

884

Contribution à un bilan de la décentralisation, HERVÉ E., Rapport d'information fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales n° 679 (2010-2011) - 28 juin 2011, http://www.senat.fr/notice- rapport/2010/r10-679-notice.html , p.70.

885

Cette Charte, en vigueur depuis le 5 septembre 1988, fut adoptée en France, suite à la loi n°2006- 823 du 10 juillet 2006 autorisant l’approbation du traité ; La Charte européenne de l’autonomie locale : une nouvelle chance pour la décentralisation à la française?, document en ligne : http://www.senat.fr/ territoires/ p.7.

886

Article 2 de la Charte européenne de l’autonomie locale : http://conventions.coe.int/treaty/fr/treaties/ html/122.htm

887

Article 75 de la loi 3469/2006 du 8/6/2006 « Sur la validation du Code municipal et communal », J.O.R. A’114.

888

VIGUIER J., « La décentralisation territoriale est-elle encore au XXIe siècle une “manière d’être”de l’État? », préc., p.636 et Contribution à un bilan de la décentralisation ; HERVÉ E., Rapport d'information fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales n° 679 (2010-11), op. cit., p.69.

889

Contribution à un bilan de la décentralisation, HERVÉ E., Rapport d'information fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales n° 679 (2010-2011), op. cit., p.69.

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Plus précisément, il accorde de nouveaux pouvoirs aux Parlements nationaux et les Assemblées parlementaires peuvent adresser à la Commission européenne, au Parlement européen et au Conseil de l’Union des « avis motivés » sur le non-respect du principe de subsidiarité par un projet d’acte législatif européen. Le délai pour agir est de huit semaines. Toute assemblée parlementaire peut présenter un recours devant la Cour de justice de l’UE contre un acte législatif européen, dans un délai de deux mois à compter de sa publication, pour violation du principe de subsidiarité. Contribution à un bilan de la décentralisation, Rapport d'information de M. Edmond HERVÉ, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales n°679 (2010-11) - 28 juin 2011, http://www.senat.fr/notice-rapport/2010/r10- 679-notice.html , p.75.

subsidiarité891 qui justifie le caractère subsidiaire de l’intervention de l’Union européenne en matière environnementale892.

Mis à part le principe de subsidiarité, la décentralisation dispose d’autres fondements constitutionnels dans les deux pays. Tout d’abord, le principe d’intégration issu de la Charte de l’environnement français et de l’article 24 de la Constitution grecque constitue un principe unifiant la politique étatique à un volet décentralisé incontestable. Plus précisément, il met le territoire au centre des politiques étatiques, en reconnaissant son caractère de patrimoine commun sans distinction entre territoires « pertinents et territoires non pertinents »893. En outre, le principe de prévention qui passe d’abord par l’identification du risque ne peut pas méconnaître les exigences du territoire894.

La question de l’application du principe de subsidiarité fait partie de la problématique suivante : savoir si la gestion de la forêt peut être considérée comme une affaire locale. La réponse est négative, car en faisant partie de la politique de l’environnement pour des raisons constitutionnelles en Grèce comme en France, elle relève du pouvoir central étatique. La question qui mérite d’être posée est la suivante: dans quelle mesure le principe constitutionnel de subsidiarité s’intègre-t-il à une politique centralisée avec des aspects territoriaux ? Avant de rechercher la réponse dans nos deux pays, il convient de préciser que le principe de subsidiarité en droit forestier a un impact sur le contenu de la décision. Donc, la décision de destruction d’une forêt pour construire une autoroute diffère selon qu’elle est prise au niveau local ou au niveau central. Cela s’explique parce que l’impact de la destruction de la forêt au niveau local est différent de celui qui a lieu au niveau national.

891

Le principe de subsidiarité est défini comme « principe selon lequel les décisions (…) doivent être prises au niveau politique le plus près possible de ceux qui sont concernés par ces décisions », DRAGO R., Le principe de subsidiarité comme principe de droit constitutionnel, RIDC 1994, p.584.

892

CAUDAL S., « Les principes juridiques qui participent à la définition du territoire pertinent », in La

Décentralisation de l’Environnement, Territoires et Gouvernance, textes rassemblés par FOUCHER K.

et ROMI R., Presses universitaires d’Aix-Marseille, Faculté de Droit et de Sciences politiques, 2006 , P.23

893

CAUDAL S., « Les principes juridiques qui participent à la définition du territoire pertinent », préc., p. 21.

894

CAUDAL S., « Les principes juridiques qui participent à la définition du territoire pertinent », préc., p. 21.

En comparant l’impact du principe de subsidiarité en droit forestier français et en droit grec, remarquons qu’en France ce principe s’est traduit progressivement par une série de moyens qui visent à la prise en compte du local, tandis qu’en Grèce il se réalise plus concrètement par un bloc de compétence.

En France, une vraie démarche de décentralisation en matière forestière s’inscrit dans les « Orientations Régionales forestières 895 » établies en application de la loi forestière de 1985 896 qui prévoit une adaptation régionale de la politique nationale. Ce sont des documents qui permettent la mise en œuvre de la politique forestière, car leur contenu détermine dans une large mesure l’aménagement de la forêt897. Même si elle est arrêtée par le ministre, la démarche décentralisatrice consiste en une procédure de dialogue qui intervient grâce aux commissions régionales de la forêt et des produits forestiers898. De plus, l’élaboration d’un « Plan Pluriannuel Régional de Développement Forestier899 » (P.P.R.D.F.) dans chaque région900 vise à améliorer la production et la valorisation économique du bois, tout en respectant les conditions d'une gestion durable des forêts. Même si le plan est élaboré par le représentant de l’État, il inclut une participation des collectivités territoriales concernées901.

La loi d’orientation sur la forêt de 2001 contribua beaucoup à la démocratisation du processus décisionnel forestier effectué en 2001. Cette loi signifia

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Articles L.122-1 – L. 122-2 du Code forestier.

896

Loi nº85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la production de la forêt, Journal Officiel du 5 décembre 1985.

897

Article L.122-2 du Code forestier.

898

Article L.122-1 du Code forestier. Toutefois, l'expérience montre que ces O.R.F., même si elles sont l'occasion de vrais débats, risquent de ne pas essaimer ni de se concrétiser dans les politiques locales de développement ou d'aménagement du territoire portées par les Conseils régionaux, faute de passerelles et de messagers ; MONIN J.-C., Décentralisation et politique forestière : propositions et mesures pour les communes forestières, Rapport , février 2003, p.39. http://portail.fncofor.fr/content/medias/ media517_izQkVNyTyRdCjVv.pdf

899

Article L.122-12 du Code forestier. Ce plan identifie à l'échelle régionale les massifs forestiers justifiant, en raison de leur insuffisante exploitation, des actions prioritaires pour la mobilisation du bois.

900

Le PPRDF introduit par la loi du 27 juillet 2010 dite de modernisation de l’agriculture et de la pêche qui comporte plusieurs dispositions destinées à développer le secteur forestier dans son article 64 http:// draaf.picardie.agriculture.gouv.fr/Le-Plan-Pluriannuel-Regional-de,498

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Article L.122-13 du Code forestier. Il est préparé par un comité comprenant des représentants des propriétaires forestiers et des professionnels de la production forestière, notamment le centre régional de la propriété forestière, des représentants des communes forestières, de l'O.N.F. et des représentants régionaux des chambres d'agriculture.

une prise en compte du territoire en adaptant au niveau local des seuils d’application de l’autorisation de défrichement902. En outre, la stratégie locale de développement forestier sous la dénomination « charte forestière du territoire » ou « plan de développement de massif »903 constitue une démarche de décentralisation tant au niveau des acteurs904 qu’au niveau du processus décisionnel905. La technique de contractualisation qui est utilisée pendant l’élaboration de cette Charte permet la prise en compte des problématiques spécifiques à la forêt sur un territoire donné entre les acteurs professionnels et institutionnels locaux906.

En Grèce, la réforme de l’Action décentralisée de l’État en 2010 a clarifié les compétences de la région. Depuis, la loi qualifie d’affaire régionale une problématique avec des incidences nationales qui est la lutte contre les incendies907. Par ailleurs, cette réforme législative confie à l’Administration décentralisée du pays une série de compétences relatives à la gestion forestière. Celles-ci concernent d’abord l’autorisation pour l’installation de mines dans la forêt et la réalisation de programmes forestiers, ainsi que la coordination et le contrôle des programmes de développement forestier au niveau régional et interrégional. La planification du reboisement relève également de l’action décentralisée de l’État. En effet, en matière d’incendie, l’Administration est chargée de créer des stations de protection forestière et de coordonner le centre pour la réglementation du feu. Par ailleurs, concernant la gestion de la forêt, relèvent de l’action décentralisée de l’État la réalisation d’études

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Le seuil de surface à partir duquel tout défrichement doit être soumis à autorisation est désormais fixé par le préfet du département, entre 0,5 et 4 hectares, BARTHOD C., BARRILLON A.ARCANGELI F., HERMELINE F. « La loi d'orientation sur la forêt du 9 juillet 2001 », Rev. For. Fr. LIII - 5-2001 p.502

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Article L.123-3 du Code forestier.

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Article L.123-2 du Code forestier : l'élaboration et la mise en œuvre de la stratégie locale de développement forestier sont conduites par un comité associant les propriétaires forestiers, leurs mandataires ou leurs organisations représentatives, les professionnels de l'exploitation forestière ou leurs organisations représentatives, des représentants des établissements publics, des associations d'usagers de la forêt ou de protection de l'environnement ainsi que des collectivités territoriales concernées. Ce comité est présidé par un représentant élu d'une des collectivités territoriales. La stratégie retenue définit les objectifs, les indicateurs relatifs aux actions à mettre en œuvre et des indicateurs de résultats. Un compte rendu annuel de sa mise en œuvre est établi et adressé à la commission régionale de la forêt et des produits forestiers où il fait l'objet d'un débat.

905

Article L.123-3 du Code forestier.

906

BARTHOD C., BARRILLON A.ARCANGELI F., HERMELINE F. « La loi d'orientation sur la forêt du 9 juillet 2001 », préc. , p.502.

907

Article 186 de la loi 3852/2010, du 7/6/2010 « Sur la nouvelle architecture de l’Administration, Programme Kallikratis », J.O.R. A’87.

sur la valorisation des forêts domaniales, la gestion des produits forestiers, la surveillance des études de gestion, l’édiction des directives sur la chasse et le développement des pâturages forestiers908.

Si ces compétences font partie de la réforme décentralisatrice de 2010, depuis toujours dans le droit grec des mesures de vraie décentralisation étaient identifiables. Plus précisément, étant donné les liens de proximité qui existent entre les habitants et les espaces verts, en Grèce les bois et les parcs situés dans les villes sont gérés de façon décentralisée et plus précisément par les maires909. En outre, en Grèce c’est le Secrétaire général de l’État et l’Administration forestière qui prennent l’initiative pour classer un territoire comme « dangereux » face au risque d’incendie, décision finalement prise par le Ministère de l’Agriculture910. D’ailleurs, pendant l’incendie, le maire à égalité avec l’Administration forestière, la police, l’armée et les Services de Secours, est compétent pour gérer la crise911. Même si la responsabilisation du maire reflète une volonté de proximité, le partage de la responsabilité en affaiblit l’efficacité. En revanche, le maire est seul responsable de la coopération des services municipaux avec les acteurs responsables pour la réglementation du feu912. Après l’incendie, le Secrétaire général de la Région prend l’initiative d’élaborer des chartes des forêts endommagées et de mettre en œuvre l’obligation constitutionnelle de reboisement913. Cette mission constitue une vraie décentralisation, parce qu’elle est la première étape de la réalisation d’une obligation constitutionnelle.

Si l’exigence de la décentralisation a comme origine une volonté de proximité, celle-ci est encore plus forte en cas de propriété publique non domaniale.

908

Article 280 de la loi 3852/2010, du 7/6/2010 « Sur la nouvelle architecture de l’Administration, Programme Kallikratis », J.O.R. A’87.

909

Article 5 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

910

Article 25 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

911

Article 28 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

912

Article 31 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

913

Article 34§4 de la loi 998/1979 du 29/12/1979 « Sur la protection des forêts et les étendues forestières du pays » (J.O.R., A’289, 29/12/1979).

Β. Une adaptation à la propriété non domaniale relativisée par le centralisme forestier

L’exigence constitutionnelle de décentralisation est renforcée par le droit de propriété. La propriété forestière publique non domaniale est une notion plus large qui dans le cadre de cette étude va être appréciée par rapport à la propriété forestière communale, présente tant en France qu’en Grèce.

Dans nos deux pays, la propriété communale est d’origine révolutionnaire. En Grèce, elle remonte à la Révolution de 1821. En France également, l’affirmation de la propriété communale remonte à la Révolution, période pendant laquelle beaucoup de forêts communales étaient issues des « communaux » de l’Ancien Régime. Pendant la Révolution, les communes acquirent une véritable existence juridique et bénéficièrent du transfert de propriété des bois et forêts communaux914.

Le fondement historique ayant été constaté, reste à identifier le fondement juridique qu’est la Constitution915. Puisque les droits fondamentaux s’appliquent aux personnes publiques916, la valeur constitutionnelle du droit de Propriété concerne également la Propriété communale. Le Conseil d'État français a confirmé la possibilité d'invoquer les stipulations de l'article 6, § 1 et de l'article 1er du premier Protocole additionnel pour garantir un droit patrimonial même en cas de litige relatif à la répartition de ressources publiques entre deux personnes publiques quels qu'en soient les effets patrimoniaux917. Le respect de l’aspect économique de la propriété

914

MONIN J.-C., Décentralisation et politique forestière : propositions et mesures pour les communes forestières, Rapport, précité, p.18.

915

BOURRACHOT F., « La liberté des personnes publiques de disposer de leurs biens » , R.F.D.A. 2003 p. 1110.

916

Pour la reconnaissance du principe de libre administration comme liberté fondamentale, C.E., Sect., 18 janv. 2001, Commune de Venelles, R.F.D.A. 2001, p. 378; A.J.D.A. 2001, p. 153, chron. M. Guyomar et P. Collin.

917

C.E., Sect., 29 janv. 2003, Commune de Champagne-sur-Seine, req. n°248894 et Commune d'Annecy, R.F.D.A. 2003, p. 972, obs. A. Potteau ; A.J.D.A. 2003, p. 613, concl. L. Vallée. Toutefois, auparavant cette possibilité n’était pas retenue : C.E.D.H., 23 nov. 1999, Section de commune d'Antilly c/ France, req. n°45129/98 qualifiant la section de commune d'organisation gouvernementale échappant à la compétence ratione materiae de la Cour et rejetant sa requête invoquant l'article 6 de la Convention et l'article 1er du Protocole comme irrecevable en application de l'article 34. En sens contraire C.E., 12 déc. 1997, Section de commune d'Antilly, req. n°168202, Lebon, tables, p. 700 sur l'article 6 et l'article 1er du premier Protocole additionnel.

forestière communale justifie qu’en cas de classement de la forêt communale en réserve naturelle, celle-ci fasse l’objet d’une compensation financière correspondant aux pertes de revenus liées à l’arrêt de l’exploitation forestière918.

La particularité du terme « forêt communale » résume un élément appartenant au patrimoine privé de la commune, qui est une composante du patrimoine forestier national919. Cette dualité patrimoniale explique d’une part le renforcement de la propriété forestière non domaniale (1) et d’autre part l’intégration des limites au droit de propriété des personnes publiques (2).

1. Le renforcement de la propriété communale

Pour la commune, la forêt fait partie de ses richesses économiques et sociales920. La position géographique de la forêt communale renforce le défi que constitue l’exercice de l’arbitrage par la collectivité propriétaire921. En effet, les établissements publics peuvent acquérir des forêts, ce qui leur permet de satisfaire à l'exercice de leurs compétences moyennant des procédés d'acquisition de droit commun, mais aussi par la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique922. Contrairement à la Grèce où la forêt communale ne dispose pas de ses propres acteurs, en France le premier acteur de la forêt communale est la Fédération Nationale des Communes Forestières. Cet organisme auquel près de 5.000 communes ont

918

La Semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n°9, 25 Février 2013, act. 182 Nature de la compensation financière des pertes de revenus liées à l'arrêt de l'exploitation forestière, arrêt C.A.A. Nancy, 17 déc. 2012, n° 11NC01934.

919

http://www.onf.fr/communes_forestieres/sommaire/reperes/foret_communale/@@index.html et p. 8 de l’édition de l’O.N.F. : l’élu forestier.

920

LACROIX P., « La forêt communale », revue Administration, n°187, 2000, p. 53.

921

En effet, 20% des forêts des collectivités sont situées à proximité de grandes agglomérations et un tiers des forêts se trouvent dans des zones touristiques méditerranéennes ou montagneuses en France. Bilan patrimonial des forêts communales de métropole, éd. 2012 ; O.N.F., FNCOFOR, disponible en ligne sur : http://www.onf.fr/communes_forestieres/sommaire/reperes/foret_communale/20080924- 125438-462849/++oid++198f/@@display_advise.html

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adhéré fut créé en 1933 et regroupe les associations départementales et leurs unions régionales, les communes dont le département n’est pas organisé en association, des organismes intéressés par l’action forestière communale et des adhérents à titre individuel923. Son objectif est de valoriser le patrimoine forestier communal grâce à une gestion durable afin de faire de la forêt des collectivités un élément fort du développement local924. Ainsi, cette Fédération représente les communes forestières auprès des instances politiques et administratives françaises et participe à toutes les structures et commissions nationales traitant de la forêt. Son action forestière se traduit par des initiatives comme la création en 1990 de la « Fédération Européenne des Communes Forestières » ( F.E.C.O.F.) et en 1996 de l’Observatoire Européen de la Forêt de Montagne925. Dans les départements dépourvus d’associations, les communes adhèrent directement et individuellement à la Fédération926.

En outre, le regroupement des forêts communales favorise son renforcement et son autonomie et est un outil du processus démocratique local927. Le Code forestier prévoit quatre possibilités pour réaliser ce regroupement, ce qui permet à la commune