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Chapitre 1 : Analyse et développement institutionnel du système de secours d’urgence pré-

2. L’arène d’action

2.2. Les situations

Les situations d’action rassemblent la prise d’appel d’urgence, la régulation de la situation d’urgence (le diagnostic à distance), le déclenchement des moyens et leurs arrivées sur les lieux, la prise en charge sur le terrain, puis le transfert. Dans les différentes situations d’action analysées, les acteurs sont amenés à se coordonner en vue :

- de réaliser une hypothèse diagnostique lors de la réception de la détresse à un des numéros d’urgence,

- de dimensionner et caractériser l’équipe la plus adaptée pour prendre en charge la détresse,

- de réaliser une prise en charge avec une équipe possiblement multi-institutionnelle aboutissant à un bilan de la situation,

- d’adapter ce dimensionnement à la réalité de la situation décrite par l’équipe envoyée, - de prescrire une prise en charge adaptée à la situation (traitement et lieu

d’hospitalisation).

Nous pouvons repérer toutes ces étapes dans les situations analysées. Un environnement institutionnel du secours d’urgence pré-hospitalier est repérable : faire le bilan des circonstances de survenue de l’accident, de la détresse, mettre en sécurité et évaluer la gravité

pour déterminer la meilleure prise en charge. Tous les acteurs se rassemblent sur ces points et s’accordent dans un ensemble cohérent (Gherardi, 2006) et justifié.

Des catégories d’objectifs sont identifiables. Selon les institutions deux logiques vis-à-vis de ces objectifs peuvent être distinguées. Tout d’abord une logique d’égalité est discernable : tous les appels aux secours doivent être pris en compte de la même manière à tout point du territoire pour les sapeurs-pompiers. Ensuite, pour d’autres institutions, c’est offrir les soins les plus adaptés à la situation dans une logique de moyens limités qui prédominent dans les discours: les places en hôpital sont limitées, il faut les attribuer à ceux qui en ont le plus besoin.

Les objectifs identifiés par tous les participants concernent le résultat : une prise en charge de qualité, évaluable par la satisfaction patient et par la traçabilité des actions comparables aux standards professionnels.

Les objectifs des participants du management stratégique concernent l’amélioration de la qualité de la prestation des différents acteurs. Concernant les objectifs du management opérationnel, il concerne la « perméabilité des systèmes pouvant intervenir pour fiabiliser les données » (entretien membre du conseil départemental) recueillies et traitées pour la prise en charge d’une personne en détresse. La mise en œuvre d’un secours « qualitativement satisfaisant » (selon le médecin du SAMU) n’est possible que par une régulation conforme aux bonnes pratiques. Cette régulation adaptée permet d’apporter le meilleur secours possible, avec un transport rapide, mobilisant le moyen le mieux adapté, pour le confort de la victime, avec possiblement une médicalisation, dans le centre le plus adapté. Ces éléments nécessitent une hiérarchisation des priorités dans la prise en charge pour assurer une forme de continuité. Sur le terrain, les objectifs opérationnels concernent l’identification de la nature de la détresse par l’analyse de la situation, l’observation et la discussion avec l’ensemble des professionnels compétents. Cela correspond à la réalisation d’un bilan exhaustif pour permettre un diagnostic médical à distance aussi précis que possible. Viennent ensuite, les éléments de prise en charge concrète : stabiliser l’état de santé, prendre en charge la douleur et la globalité de la personne (prise en compte des détresses psychologiques associées à une urgence), évacuer rapidement la personne vers un établissement adapté en respectant le confort des personnes prises en charge en restant à l’écoute des variations liées aux évènements extérieurs. Cette dernière dimension fait naitre une catégorie d’objectifs que nous pouvons nommer objectifs de circonstances : intervenir en sécurité et ne pas perturber les événements en cours.

Ces objectifs sont partagés par l’ensemble des acteurs et sont présentés comme guidant la coordination des actions.

Les situations de secours pré-hospitalières sont cependant difficiles à délimiter. En effet, il est possible de considérer que le secours d’urgence commence à partir de l’appel d’urgence, à partir du déclenchement des secours ou encore à partir de l’arrivée des secours sur place. Cependant, les acteurs qui posent le début de la situation de secours d’urgence pré hospitalier au moment de l’intervention sur le terrain évoquent l’importance de la régulation de l’appel et de la prise d’appel. Cette nuance dans la délimitation de la situation est en faveur de la prise en compte de l’appel dans la délimitation de la situation de secours d’urgence pré-hospitalier.

Concernant la fin de l’action de secours, nous avons pu identifier une différence majeure entre les groupes d’acteurs rencontrés (groupe hospitalier, groupe SDIS, groupes préfecture – ARS, groupes ambulanciers privés/association de protection civile). Pour les acteurs hors hôpital, l’action de secours s’arrête lors de la prise en charge par une équipe médicale hospitalière, peu importe sa localisation : dans le sas des urgences ou lors de l’intervention d’une équipe mobile d’urgence hospitalière. Cette différence est retrouvée essentiellement au niveau des encadrants. Elle permet d’identifier les différentes phases des actions de secours d’urgence où des transferts de responsabilités s’opèrent : quand un médecin SMUR arrive sur les lieux, c’est lui qui est responsable du bilan et de la négociation de la prise en charge avec le médecin SAMU. Pour les secouristes, et les paramédicaux, c’est l’arrivée dans une structure d’accueil qui marque la fin de la situation.

Les choix se font selon les objectifs spécifiques de chaque individu avec son institution d’appartenance tout en ayant l’objectif commun d’apporter la meilleure réponse à la personne prise en charge.

Les participants de la situation ont tous un degré de contrôle de la situation par l’information qui transite entre eux. C’est ce point qui les préoccupe et qui est relevé dans les « manœuvres ». Nous avons pu identifier dans les situations connexes « exercice de sauvetage maritime de grande ampleur» que l’information concernant le nombre de victimes est toujours difficile à établir de manière certaine.

Les résultats de l’action sont analysés dans les ambulances après le transfert de la personne par toutes les équipes. Lors de la rédaction du compte-rendu d’information télétransmis à l’Etat-Major, les participants débattent de la situation et des actions effectuées. Une analyse entre institution est possible pour certaines actions par la réalisation de retour d’expérience entre le SAMU et le SDIS. Ces réunions permettent d’aborder les situations qui ont posé un problème et de déterminer son origine. Les problèmes concernent les délais d’envoi sur le terrain à cause d’une régulation trop longue ou inadaptée, ou des dimensionnements d’équipe estimés non

pertinents. Des difficultés de communication entre les institutions peuvent alors être mises en lumière et retravaillées.