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L’Etat constitue l’instrument fondamental qui permet aux institutions de jouer pleinement leurs rôles. Il doit être capable de concevoir des institutions de qualité, de faire respecter leur application. Il peut agir en s’appuyant sur des politiques économiques, budgétaires ou grâce à des mesures et fiscales.

Dans un système démocratique, le rôle des pouvoirs exécutifs est bien défini et les limites sont connues. Des institutions de contrôle fonctionnent d’une manière indépendante pour éviter tout abus de pouvoir.

C’est l’Etat, au sens de pouvoir exécutif, qui est l’institution de mise en œuvre des réformes. Dans le cas des pays émergents, l’intervention de l’Etat est inévitablement étendue. Ceci pour quatre raisons au moins :

✓ l’Etat est une institution majeure dont les décisions sont en mesure de modifier les structures de l’ensemble du système et le comportement des agents ; c’est la seule institution organisée à l’échelle nationale ;

✓ par ailleurs, les coupures historiques de nature économique et sociale qu’ont vécues la plupart des pays émergents ont remis en cause le contrat social établi et affaibli les organisations de la société civile

✓ l’Etat est l’agent essentiel de production et d’offre des biens publics (éducation, formation professionnelle, recherche fondamentale, santé, infrastructure).

Il faudrait ajouter qu’avec la disparition de l’ordre ancien, dans la plupart des pays émergents, l’Etat s’est retrouvé propriétaire d’un domaine marchand important (entreprises) et est donc de fait un acteur majeur, directement impliqué dans la production et la distribution des richesses.

Pour l’organisation du cadre institutionnel 44 de mise en œuvre, il est nécessaire que l’appareil soit organisé dans des institutions aux rôles et aux rapports définis d’une manière précise tant par la loi et la réglementation que par l’exercice effectif des missions. Il est maintenant clairement établi que l’efficacité de l’appareil de l’Etat est fonction de la précision des stratégies et de la qualité et de la cohérence des politiques publiques, de la mise en place de systèmes d’information transparents, de la qualité des mécanismes de régulation et enfin du contrôle de la mise en œuvre et du respect de la législation.

Pour la qualité propre des agences d’exécution du gouvernement, les recommandations se rejoignent pour demander que l’appareil de l’Etat soit efficient, peu bureaucratique et flexible. Les institutions publiques doivent garantir la transparence du marché et défendre les agents économiques contre les attaques anticoncurrentielles, les pratiques déloyales et les tendances de monopoles de l’information.

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44 : LOUNNAS Rezki / Théorie des institutions et applications aux organisations / Cahiers de recherche Page N°04-01 / HEC Montréal / 2004.

Il est maintenant démontré que l’intervention de l’Etat est nécessaire pour assurer une croissance durable. Cependant la théorie économique comme la plupart des analyses empiriques et recommandations des IFI limite cette intervention au plan de la régulation, de la promotion de la croissance et, en général, de la promotion d’un cadre de fonctionnement qui permette un comportement efficient de l’entreprise et l’endogénéité des décisions de la croissance.

La pratique concrète de gestion des réformes et de relance de l’économie permet de tirer une constatation majeure du point de vue théorique : dans les pays en transition sortant d’un système de gestion étatique, l’état-gouvernement peut intervenir, non seulement à titre de promoteur, mais également à titre d’investisseur direct.

Pour Douglas North, une administration publique compétente et un bon fonctionnement sont des sources d’avantages compétitifs pour les nations. Le manque de légitimité des Etats des pays du sud constitue une faiblesse incontestable, qui favorise la mise en place, de pouvoirs arbitraires.

Cependant, la nécessite de l’intervention de l’Etat doit être organisée d’une manière prudente.Elle doit être considérée comme une situation d’exception, une période transitoire, de passage temporaire car les tentations de glissement vers un retour à l’interventionnisme étatique sont grandes. A l’inverse des pays développés, où la place de l’Etat dans la croissance est limitée, le fonctionnement de l’économie règle par le marché, l’intervention des opérateurs privés généralisée et la place des entreprises publiques limitées généralement à quelques activités d’utilités publiques.Dans les pays émergents, la situation est différente.L’Etat est omnipotent dans les mécanismes de fonctionnement de l’économie nationale.

Aussi, si l’intervention de l’Etat est nécessaire pour la mise en œuvre des réformes et le lancement d’initiatives de relance de l’économie, il est tout aussi nécessaire que le système politique soit un cadre de jeu démocratique transparent et que l’environnement institutionnel et légal affirme et concrétise la liberté d’entreprendre et l’efficience du marché – ce dernier exprimant des règles du jeu acceptées par tous les acteurs et dont la mise en œuvre est garantie par des institutions équitables.

Le succès qu’a eu les théories sur les défaillances du marché et asymétrie d’information défendues en l’occurrence par Joseph Stiglitz a contribué de maniéré décisive dans la reconfiguration de rôle de l’Etat qui doit jouer un rôle régulateur et être capable de fournir des biens publics (sécurité des investissements, stabilité macro-économique et stabilité des règles), de mettre en place les incitations nécessaires et de soutenir des institutions à même d’améliorer le fonctionnement des marchés

Les débats sont denses et les accords entre économistes plutôt difficile à obtenir. Pour les uns, la mondialisation a déclassé les analyses keynésiennes et les thérapies qui en découlent. Pour d’autres au contraire, l’Etat possède encore suffisamment d’instruments d’intervention pour pouvoir contraindre « les firmes globales » à respecter ses choix de politique économique et le capitalisme financier, devenu fou, à se discipliner.

L’action de l’Etat dans le champ économique doit être aujourd’hui en mesure d’apporter des solutions qui permettent d’aller vers des paliers supérieurs de croissance. De ce fait, L’Etat doit pouvoir se consacrer aux grandes tâches qui touchent à l’économie de connaissance à la construction de la compétitivité, aux réformes qui attendent la politique de protection sociale. D’autres économistes institutionnalistes ont proposé de définir « un ensemble de droits de la propriété et de droits contractuels, de les appliquer, de les respecter et de les faire respecter »45.On voit bien ici le rôle de l’Etat dans la détermination du rythme de la croissance économique. Par ses investissements dans l’éducation, la formation, la recherche, le développement, la diffusion des connaissances ainsi que les infrastructures, par sa capacité à mettre en place les bonnes institutions. L’Etat favorise la croissance économique à long terme et l’inscrit donc dans la durée.

Dans une économie qui accumule beaucoup de retard dans divers domaines, et dont les institutions n’arrivent toujours pas à « rationaliser », les comportements des opérateurs économiques. L’Etat doit encore être interventionniste, non seulement dans la régulation mais aussi dans l’investissement dans le marché de travail ainsi que dans la gestion coordonnée des ressources.

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45 : HASSAN HOUSSEIN Souraya et PALLOIX Christian / De l’économie de développement à l’économie du changement institutionnel / Page N° 77 / CRIISEA-UPJV / 2003.

Si on veut une régulation de qualité : au lieu d’avoir un Etat omniprésent et inefficace, l’économie de marché nécessite un Etat plus réduit mais plus expert. La qualité de ses directives, de ses actions, de sa vision et de sa régulation compense de loin son rétrécissement.

Mais l’économie de marché n’a d’existence réelle que si l’Etat est fortement présent dans l’économie et la sphère sociale. Ainsi, J.RIVOIRE écrit « les pouvoirs publics ont un rôle essentiel à jouer dans l’économie de marché (….) parce que sans eux, l’économie dégénèrerait en anarchie, ou, plus précisément, en anarcho-libéralisme. Les interventions des pouvoirs publics répondent à plusieurs objectifs différents : assurer les solidarités, répartir les charges commune, fixer et faire respecter les règles du jeu, freiner les mouvements perturbateurs, seconder les efforts. » 46