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La sécurisation des déplacements : voir et être vu

UNE NUIT URBAINE SOUS ÉCLAIRAGE ARTIFICIEL

2.2 LES FONCTIONS DE L’ÉCLAIRAGE URBAIN AUJOURD’HUI 1 Des fonctions dites « consensuelles »

2.2.1.2 La sécurisation des déplacements : voir et être vu

Faciliter la tâche visuelle du conducteur

La première fonction attribuée aujourd’hui à l’éclairage urbain reste une fonction de sécurisation des déplacements, que ce soit par la sécurité de circulation ou la sécurité des biens et des personnes. Il s’agit donc pour l’éclairage d’assurer les conditions de visibilité

158 THEVENIN T., CHARDONNEL S. et COCHEY E., 2007, « Explorer les temporalités urbaines de l’agglomération de

optimales pour la sécurisation des déplacements, notamment des déplacements motorisés et de leur interaction avec les déplacements piétonniers.

La sécurité liée à la circulation automobile et celle des personnes sont certainement les éléments qui portent la plupart des projets d’éclairage, routiers ou urbains. L’éclairage des voies publiques constitue un moyen efficace d’assurer la sécurité et le confort des usagers, permettant, par une amélioration de la visibilité :

- de favoriser la sécurité et les déplacements ;

- de limiter la perte de capacité visuelle liée à l’éblouissement causé par les feux de croisement des véhicules se déplaçant en sens inverse ;

- d’améliorer l’appréciation des distances la nuit.

Pour l’usager, il s’agit donc de percevoir distinctement les points singuliers et les obstacles éventuels, fixes ou mobiles. Cette perception permet à l’usager d’évaluer, avec certitude et en temps utile, leur position, leur direction et leur vitesse de déplacement, améliorant ainsi grandement la tâche de navigation. Le rôle signalétique de la lumière, permettant de souligner un axe, d’indiquer une direction ou d’affirmer une intention est donc primordiale (image 12). La lumière permet de marquer une perspective, de dessiner une trajectoire, guidant ainsi le citadin dans une nuit qui efface quantité de signes et d’informations visuelles, perturbant la perception que l’on peut avoir d’un lieu en journée. Pour la sécurité du piéton, il convient ainsi d’assurer la visibilité des bordures de trottoirs, des véhicules, l’identification des obstacles et des autres piétons circulant dans les mêmes espaces.

Image 12 Éclairage fonctionnaliste pour sécuriser les déplacements.

Photographie longue pause de la rocade de Dijon, montrant un éclairage fonctionnaliste servant à sécuriser les déplacements à grande vitesse sur cette voie. © Samuel Challéat, ThéMA, 2010.

Une plurimodalité rendant la tâche plus complexe

L’AFE, dans ses Recommandations relatives à l’éclairage des voies publiques159, définit la tâche

visuelle du conducteur, et celle du piéton. La tâche visuelle du conducteur d’automobile et de deux roues apparaît complexe. Il doit :

- accomplir un déplacement qui nécessite une information visuelle permanente de l’espace situé devant lui ;

- adapter son comportement lorsqu’il se trouve dans le flot des véhicules, ou dès que d’autres véhicules apparaissent dans son champ de vision ;

- prendre des décisions rapides pour dépasser, croiser les autres véhicules, éviter les obstacles. Une information sur la position et le mouvement des objets qui l’environnent est donc primordiale ;

- percevoir les autres usagers, piétons, deux roues.

La tâche visuelle du piéton est moins complexe, même s’il doit : - accomplir un déplacement en détectant des obstacles éventuels ; - identifier les autres piétons ;

- déceler rapidement la présence des véhicules ;

- apprécier l’éloignement et les mouvements de ces derniers ; - être vu dans de bonnes conditions lorsqu’il traverse une rue.

Au cours de ses déplacements, l’usager a donc pour exigence la prise en compte des éléments nécessaires à son déplacement. La perception sûre et rapide est rendue possible grâce aux contrastes de luminance et à l’absence de gêne liée à l’éblouissement. Ce contraste est généralement obtenu entre l’objet et le fond. Pour un conducteur, le fond est constitué par la totalité du champ visuel, mais il comprend des objets spécifiques qui sont, par ordre d’importance décroissante :

- la chaussée et ses limites ; - les accotements ou les trottoirs ; - les façades et enseignes éventuelles ;

- le ciel, les points lumineux constitués par les luminaires et les lampes

En milieu urbain, le bâti, la densité et la diversité des usagers constituent des paramètres fondamentaux. La sécurité des usagers dépend donc de la prise de conscience de l’environnement dans lequel ils évoluent. Sur un fond clair le piéton sera vu en silhouette ; sur un arrière-plan sombre, il ne sera vu que par contraste positif, s’il est plus éclairé que l’arrière-plan.

Des conflits visuels entre éclairage public et éclairage privatif

En milieu périurbain, on rencontre plus de difficultés en termes d’exigences visuelles. L’environnement proche est constitué par un tissu urbain complexe, fait d’un ensemble de zones d’activités diverses, caractérisées par de nombreuses émissions de lumière pas toujours

contrôlées : éclairage des bâtiments et parkings en zones industrielles et commerciales, éclairage privé en zones résidentielles, etc. (images 13 et 14).

Image 13 Diversité de sources lumineuses en zone d’activités commerciales.

Photographie (panoramique par assemblage) d’une voie publique longeant une zone d’activités commerciales (Quétigny, 21). On peut voir sur cette image une grande diversité de sources lumineuses, ainsi que le relatif « effacement » de l’éclairage public par l’éclairage commercial privé. © Samuel Challéat, ThéMA, 2010.

Image 14 Parking la nuit en zone commerciale.

Photographie (panoramique par assemblage) d’un parking en zone commerciale (Quétigny, 21), depuis la chaussée. © Samuel Challéat, ThéMA, 2010.

La composition du trafic est multiple, tant du point de vue de sa nature que du type d’usagers : les véhicules légers côtoient une proportion importante de poids lourds, les usagers locaux croisent des usagers de passage ou en transit, itinérant de ville en ville, et ayant des comportements très différents. La présence importante d’échangeurs, de ronds- points, de zones de conflits (cisaillement entrées/sorties, ponts, courbures marquées, ruptures de perspectives, etc.) rend extrêmement délicate la tâche de navigation dans ces zones, où la visibilité de la trajectoire passe bien souvent après sa lisibilité, cette dernière étant déjà complexe, dans un enchevêtrement de panneaux directionnels ou d’information, d’affichages publicitaires et d’enseignes diverses attirant l’attention de l’usager, conducteur ou piéton (images 15 et 16).

Image 15 Échangeur routier périurbain.

Photographie (panoramique par assemblage) d’un échangeur routier périurbain (Mirande, 21). © Samuel Challéat, ThéMA, 2010.

Image 16 Une rue en zone périurbaine.

Photographie (panoramique par assemblage) d’une rue en zone périurbaine (Mirande, 21) où se côtoient éclairage public, éclairages publicitaires multicolores, éclairages de parkings privatif. © Samuel Challéat, ThéMA, 2010.

En rase campagne et en l'absence d’éclairage public, c’est la chaussée qui constitue le champ visuel de l’usager. Le risque d’éblouissement provient alors principalement de la vision des feux de véhicules venant en face, l’arrière plan non éclairé n’en atténuant pas les effets. L’entrée (et inversement la sortie) brusque d’une zone bâtie éclairée (village par exemple) créée également un éblouissement par un contraste très marqué et une transition rapide d’une zone non éclairée à une zone éclairée, et inversement.

La sécurité des biens et des personnes reste bien souvent le premier argument avancé par les décideurs des collectivités locales en faveur de l’éclairage public. Le discours français sur ce rôle de l’éclairage est ainsi très consensuel, et l’on peut lire dans L’urbanisme lumière de Dupont et Giraud160 que « le constat est indéniable : si les communes éclairent bien, elles améliorent la sécurité nocturne. » La fonction de lutte contre la délinquance attribuée à la lumière est analysée en profondeur ci-après, faisant ressortir l’évolution actuelle qui consisterait plus à rendre à l’aise le passant qu’à permettre au policier de contrôler visuellement l’espace, s’inscrivant dans la logique de prévention situationnelle.

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