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Remplacer le terme de « territoire » par le vocable de « local », notamment dans une perspective de développement local, propre à traduire la participation et l’implication des populations sur un territoire donné, représente une perspective alléchante. Pour autant, il nous semble que ce « local » n’est pas suffisamment pertinent pour cerner des logiques d’acteurs de manière purement sociologique. Nous avons donc choisi d’abandonner l’idée de « local » pour bien garder celle de « territoire ». La définition de ce dernier étant toujours délicate, il parait intéressant de réaliser un petit détour par deux types de territoire : l’urbain et le rural. Ces derniers présentent en effet l’avantage d’avoir été – et d’être toujours d’ailleurs – étudiés par des champs sociologiques clairement identifiés. Présenter les grandes lignes de la sociologie urbaine et de la sociologie rurale permet ainsi de montrer que la sociologie n’a pas totalement oublié le territoire, même si elle ne le saisit pas en tant que tel. Par ailleurs, il faut bien voir que la dichotomie entre villes et campagnes parait de plus en plus obsolète. Dans un monde où les frontières entre ces deux types d’espace sont de plus en plus floues et mouvantes, une sociologie du territoire globale semble de plus en plus adéquate pour répondre aux attentes des individus.

1- La sociologie urbaine

En France, plus de 80 % de la population vit en milieu urbain. Il n’est donc pas étonnant que les études sociologiques se soient abondamment – quasi-exclusivement ? – penchées sur ce territoire ces dernières années. Pourtant, dès 1958, certains chercheurs faisaient le deuil de la sociologie urbaine, estimant que la diversité des situations urbaines induisait de trop grandes difficultés dans la constitution d’un champ disciplinaire clairement identifié. « En ce qui concerne la France, indépendamment des recherches statistiques et plus particulièrement démographiques, l’étude des sociétés urbaines présente une telle hétérogénéité qu’il est difficile de considérer qu’il y ait une sociologie urbaine française. Il existe une étude géographique des villes et une étude sociologique des villes, mais ni l’une ni l’autre ne suffisent à constituer une sociologie des villes »64. De plus, d’autres auteurs soulignent la complexité, tout aussi grande, de cerner le profil de l’habitant des villes, l’Urbain. Ainsi, les tentatives de définition de cette 11111111111111111111111111111111111111111111111111111111111

64. CHEVALIER Louis, « Le problème de la sociologie des villes », GURVITCH Georges (dir.), Traité de sociologie générale, Paris, PUF, 1958, p. 309.

typologie d’individus restent relativement vagues. « Un urbain est celui qui, à la fois, vit dans un habitat d’un certain type, a une profession qui ne concerne pas l’agriculture ou la pêche, et appartient à un groupe d’individus ayant le même type d’activités et des habitudes de vie et de consommation nécessitant la présence et le travail de nombreux autres groupes de producteurs vivant, en particulier, dans le même espace »65. Pour vague qu’elle soit, cette définition a au moins le mérite de mettre en évidence différentes caractéristiques qui seraient propres aux individus ayant une pratique régulière du milieu urbain. Par ailleurs, ce flou, cette diversité de situations urbaines, n’empêchent pas les sociologues de se pencher sur cette thématique et de réaliser différentes recherches sur les espaces urbains. Pour éviter de questionner la notion même d’urbain, certains auteurs étudient la ville de manière purement fonctionnelle, comme un objet spatial. Cette manière de définir la ville est d’ailleurs partagée par des géographes et des sociologues. Pour eux, « la ville est un ensemble compact de personnes, de maisons, d’équipements et d’activités, exerçant une fonction dans l’organisation de la cité et du territoire »66. Il est intéressant de noter, dans cet extrait, l’utilisation du terme « territoire » qui sert ici de support à une approche fonctionnelle de la ville et donc de l’urbain.

Cependant, cette approche fonctionnelle est loin d’être partagée par tous, et certains sociologues urbains préfèrent se pencher davantage sur les interactions spatialisées permises par ce type de territoire. Dans cette perspective, ce sont les rapports sociaux entre les individus qui sont étudiés de manière privilégiée. L’espace urbain n’est finalement presque plus qu’un

« prétexte » à l’observation de jeux d’acteurs. En effet, la ville est « pratiquée par chacun à travers un éventail de compétences qui visent à s’accommoder à la vie sociale urbaine, qui est aussi et surtout une vie publique. Ici, c’est donc moins sur des territoires que sur des personnes rencontrées dans des activités et des lieux du quotidien que reposent les conduites d’appropriation et de familiarité. Plus que d’inscription spatiale ou de processus de territorialisation, il s’agit de décrire et d’analyser des moments ordinaires, des sociabilités sans engagement particulier qui, en dépit de leur dispersion et de leur enchaînement à l’échelle de l’individu, parviennent à faire de la ville un lieu d’urbanité, c’est-à-dire un espace où s’opère la mise à distance polie d’autrui »67. La ville est donc créatrice de sociabilités en permettant les interactions entre les individus. Plus encore, c’est un espace parfait pour observer ces interactions sociales. « Carrefour », « entité » ou encore « médiatrice »68, la ville devient même, parfois, un acteur à part entière de ces interactions sociales. Créée par elles, mais les enrichissant dans un mouvement dialectique, la ville est un lieu privilégié pour l’étude d’une société.

Cependant, entre approche fonctionnelle et approche interactionnelle, les études portant sur la ville adoptent différentes perspectives qu’il n’est pas toujours évident de concilier. En fait, la sociologie urbaine est composée de ces deux types de sociologie. Pour reprendre les formulations de Jean-Marc Stébé et d’Hervé Marchal69, il existe tout d’abord une sociologie dans la ville, qui montre la complexité de la vie urbaine, l’enchevêtrement des trajectoires individuelles… En parallèle, il existe également une sociologie de la ville, qui étudie les autres dimensions – notamment politiques, économiques, sociales – impactant le monde des villes.

Ainsi, « d’une façon générale, la ville est un point d’articulation privilégié entre un espace densifié, différencié et limité dans son étendue, et une population agrégée, hétéroclite, spécialisée ; elle est un lieu de confrontation entre de multiples acteurs de la vie sociale et une matérialité donnée, instituée, formalisée. […] L’espace reçoit l’empreinte de la société tout

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65. BEAUJEU-GARNIER Jacqueline, Géographie urbaine, Paris, A.Colin, 1995, p. 15.

66. BRUNET Roger, op. cit., p. 185. Yves Grafmeyer ne dit pas autre chose lorsqu’il estime que « la ville se présente toujours à l’observation immédiate comme un regroupement de populations et d’activités durablement stabilisées sur un territoire restreint », GRAFMEYER Yves, Sociologie urbaine, Paris, Nathan, 1994, p. 8.

67. STEBE Jean-Marc, MARCHAL Hervé, La sociologie urbaine, Paris, PUF, 2007, p. 110.

68. Pour reprendre les qualificatifs qu’utilise Jacqueline Beaujeu-Garnier dans son analyse de l’espace urbain.

BEAUJEU-GARNIER Jacqueline, op. cit., p. 37.

69. STEBE Jean-Marc, MARCHAL Hervé, op. cit. Souligné par nous.

autant que l’inverse »70. Cette vision de la ville permet d’envisager les prémices d’une sociologie du territoire qui étudierait de manière systémique l’interaction entre une société et un espace.

Etudier les jeux d’acteurs en milieu urbain, ainsi que l’influence réciproque de ces acteurs sur l’espace, permet en effet de mettre en évidence l’interaction existant entre un milieu et les individus qui le pratiquent.

Par ailleurs, certains sociologues vont encore plus loin, en estimant que la sociologie urbaine « se centre sur la dimension proprement urbaine des divers aspects de la vie sociale »71. La sociologie urbaine se pencherait donc sur toutes les problématiques posées par la sociologie de manière globale, considérées dans un cadre spatial particulier que serait le monde urbain. En poussant cette analyse à l’extrême, on pourrait presque estimer que la sociologie urbaine ne concerne pas uniquement l’espace de la ville, mais tout espace affecté par des comportements de type urbains. L’extension de l’urbanité à des milieux a priori non urbains nous incite à étudier maintenant les dynamiques à l’œuvre dans un autre type d’espace : le monde rural.

2- La sociologie rurale

Statistiquement, le monde rural correspond tout d’abord à une définition à la fois bien précise, mais paradoxalement très floue, car englobant l’ensemble du « non-urbain ». Ainsi,

« l'espace à dominante rurale, ou espace rural, regroupe l'ensemble des petites unités urbaines et communes rurales n’appartenant pas à l’espace à dominante urbaine (pôles urbains, couronnes périurbaines et communes multipolarisées). Cet espace est très vaste, il représente 70 % de la superficie totale et les deux tiers des communes de la France métropolitaine »72. Cette définition implique un certain nombre de caractéristiques propres à la population rurale. Il est désormais impossible de confondre cette dernière avec la population agricole, qui a longtemps été la principale catégorie socio-professionnelle vivant en dehors des villes. « La population rurale en France correspond aux personnes résidant en dehors des unités urbaines, c’est-à-dire des communes ou des ensembles de communes qui comptent sur leur territoire une zone bâtie d’au moins 2 000 habitants où aucune habitation n’est séparée de la plus proche de plus de 200 mètres. Nous ne pouvons donc pas assimiler population rurale et population agricole »73. D’ailleurs, l’espace rural se définit comme un mode particulier d’utilisation de l’espace et de la vie sociale. Il est notamment caractérisé par une densité relativement faible des habitants et des constructions, un usage économique à dominance agro-sylvo-pastorale, une identité et une représentation spécifiques, fortement connotées par la culture paysanne…

De ce fait, tout comme la sociologie urbaine, la sociologie rurale est une sociologie réellement pluraliste, faisant appel à tous les champs de la discipline pour étudier les faits sociaux. « Si on ne la limite pas à une sociologie agricole spécialisée, la sociologie rurale se définit donc par son champ d’étude, les sociétés rurales, et exige le concours de toutes les sciences sociales pour aboutir à une intégration des divers aspects de la vie rurale. Dans cette perspective, le sociologue rural s’attribue une double tâche, d’une part étudier lui-même les aspects de la société qui relèvent de sa ou de ses spécialités, et d’autre part, réinterpréter et intégrer de son point de vue les matériaux que lui fournissent les chercheurs des autres disciplines »74. Bien que cette dernière analyse soit un peu datée, elle nous semble toujours 11111111111111111111111111111111111111111111111111111111111

70. STEBE Jean-Marc, MARCHAL Hervé, op. cit., p. 10. Ces auteurs font d’ailleurs de cette caractéristique la spécialité de la « tradition ethnologique » : « Contrairement à la sociologie urbaine d’inspiration marxiste qui a tendance à traiter les rapports sociaux comme s’ils se déroulaient sur un "coussin d’air" – dans un vide territorial – la tradition ethnologique, et ce depuis ses débuts, n’a jamais séparé l’étude des rapports entre les hommes et l’étude des rapports des hommes à leur milieu », p. 33.

71. GRAFMEYER Yves, op. cit., 1994, p. 8.

72. Définition donnée par l’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques).

73. STEBE Jean-Marc, MARCHAL Hervé, op. cit., p. 43.

74. MENDRAS Henri, « Sociologie du milieu rural », GURVITCH Georges (dir.), Traité de sociologie générale, Paris, PUF, 1958, p. 316.

d’actualité dans sa manière de considérer les objectifs de la sociologie rurale. Celle-ci s’est ainsi totalement affranchie de son passé relié au monde agricole pour mieux cerner ce qu’est réellement le monde rural aujourd’hui. « Cette sociologie rurale, qui était avant tout une sociologie des agriculteurs, a pu faire face à la disparition progressive partout dans le monde industrialisés de ces sociétés paysannes ("la fin des paysans") en redéfinissant strictement la ruralité, davantage en fonction de la société globale et de ses transformations que par rapport au fait urbain »75. Mais cette indépendance dans l’étude du monde rural par rapport au monde urbain reste cependant à relativiser.

En effet, il existe globalement deux courants d’opinion à propos du monde rural76 : une vision pessimiste et une vision optimiste. Dans la vision pessimiste, le monde rural est en déclin, aucun redressement n’est possible, et les ruraux ont plutôt besoin d’assistance pour survivre correctement dans leur espace de vie. Dans la vision optimiste, les atouts du monde rural se suffisent à eux-mêmes, il faut juste aider à mettre en valeur les potentialités. Mais quelle que soit la vision adoptée, « l’avenir du monde rural, parce qu’il dépend du renforcement de ses effectifs, s’inscrit davantage dans la représentation qu’en ont les citadins. On a vu que l’espace de liberté, qui s’y était créé par l’effacement des contraintes anciennes, donnait aux stratégies résidentielles des possibilités de choix renouvelées. Or, l’image du monde rural est ambivalente. Elle est positive dans la vision idyllique d’une nature généreuse et d’une vie sociale conviviale, et négative dans la peur de l’isolement et des pièges de l’interconnaissance. D’un autre côté, cette image est chez chacun alimentée par la référence à tel village ou telle petite région, connus souvent à partir de la résidence secondaire, laquelle est presque toujours jugée inhabitable à titre permanent. Et cette image est d’autant plus ancrée dans la conscience collective qu’elle correspond au discours médiatique qui l’amplifie à gros traits. Entre une représentation symbolique, fortement teintée d’affectivité et l’analyse objective, même schématique, de la réalité, l’incompatibilité est totale »77. Cette citation fleuve, mais particulièrement explicite, le montre bien, le rural fonctionne aujourd’hui beaucoup sur les représentations qu’il inspire à différents types de populations. Plus que le monde rural lui-même, c’est donc sa représentation idéalisée qui est fortement encensée, notamment par des urbains fatigués de la ville mais qui ne pratiquent cet espace qu’épisodiquement. Chacun a donc sa propre image du rural, renforcée par une série de stéréotypes véhiculés par les médias, ce qui montre bien que « la catégorie du rural est moins un concept qu’un construit social, une catégorie de lecture du social »78. Cette idéalisation du rural, par rapport à un urbain dont la représentation est plus fonctionnelle, nous parait essentielle à souligner ici, tant elle intervient dans la constitution d’une identité territoriale d’une population donnée. Nous y reviendrons au cours de notre analyse. Notons simplement que les représentations positives du rural se forment dans une sorte d’opposition au monde urbain, ce qui questionne fortement l’indépendance réciproque de ces deux espaces.

D’ailleurs, le terme de « rural » est souvent défini de manière résiduelle par rapport à l’urbain. C’est ce que montre la définition de l’espace rural proposée ci-dessus par l’INSEE.

C’est également ce qu’analyse Yannick Sencébé, à travers sa thèse portant sur les questions de mobilité et surtout de temporalité, dans un territoire à dominante rurale. « Toutes ces temporalités de la vie ordinaire évoquent, au fond, une même et seule frontière : celle qui sépare la campagne et la ville. Temps de la lenteur pour l’une et temps de l’empressement pour l’autre ; temps de la mémoire et des racines pour la première, temps de l’action et du mouvement pour la seconde. Campagne immobile, ville sans répit. Jamais cette frontière n’a été autant encensée, protégée, revendiquée. L’heure n’est plus, en effet, à la revendication des campagnes profondes, 11111111111111111111111111111111111111111111111111111111111

75. BOUDON Raymond, BERNARD Philippe, CHERKAOUI Mohammed, LECUYER Bernard-Pierre, Dictionnaire de sociologie, Paris, Larousse, 1999, 279 p.

76. KAYSER Bernard, La renaissance rurale. Sociologie des campagnes du monde occidental, Paris, Armand Colin, 1990, 316 p.

77. KAYSER Bernard, BRUN André, CAVAILHES Jean, LACOMBE Philippe (dir.), Pour une ruralité choisie.

Paris, Edition de l’Aube, 1994, p. 82.

78. CETTOLO Hélène, op. cit., p. 33.

mais à la valorisation d’un patrimoine longtemps négligé, à la préservation d’un environnement menacé. La campagne devient le conservatoire de tout ce que la ville a oublié ou maltraité »79. Rural et urbain sont donc loin d’être déconnectés l’un de l’autre : le rural devient un espace préservé, pensé comme un refuge par rapport à un urbain de plus en plus dégradé. Pour cette raison, l’urbain envahit le rural, ponctuellement ou définitivement, à travers des mouvements de population encore ténus, mais néanmoins présents. On en arrive en fait à une grande diversité de situations, résumées par « une seule constatation majeure : la ville envahit la campagne et elle perd son rôle traditionnel. Cette invasion est spatiale et sociologique. Spatialement, autour du noyau central plus ou moins engorgé d’activités et dépeuplé de résidences, se dessine une énorme frange périphérique, plus ou moins structurée et équipée, qui se dilue parfois fort loin dans la campagne. Sociologiquement, ces suburbains, ces banlieusards sont à moitiés citadins et à moitié ruraux : ils accumulent les avantages et les inconvénients des deux situations. Cette auréole plus ou moins régulière est sans cesse conquérante par sa frange extérieure. Il s’ensuit une situation fluctuante et une âpre concurrence pour l’occupation du sol : d’une situation traditionnelle de complémentarité, on en arrive à un processus de conflits pour l’utilisation de ce sol précieux »80. Ainsi, les acteurs « originels » du monde rural sont loin d’avoir encore tous intégrés les évolutions récentes d’un espace qu’on aurait pu croire immuable. « Jadis maîtres ou serfs sur un territoire qu’ils occupaient seuls ou presque, aujourd’hui minoritaires ou presque dans des communes où ne s’exercent pas que des activités agricoles, les paysans, frustrés de la richesse qu’ils créaient, se sentent marginaux sur un espace qui, bouleversé comme "outil de production" devient un refuge pour des citadins fatigués de leur état »81. Cette « invasion » du monde rural par le monde urbain n’est pas sans générer un certain nombre de conflits entre

« autochtones » et nouveaux arrivants.

D’ailleurs, cette « invasion » est d’autant plus aisée qu’il n’existe plus aujourd’hui de coupure systématique entre ville et campagne. Les hommes s’ancrent dans un réseau complexe de lieux et de territoires disséminés82, sans qu’il soit toujours évident de discerner ce qui relève du monde urbain et ce qui relève du monde rural. L’exemple du « périurbain », nouvelle catégorie spatiale proposée par l’INSEE, à mi-chemin entre l’urbain et le rural, est en ce sens révélateur de la complexité à définir respectivement ces deux espaces. Cette tendance aboutit alors à une multiplicité de situations et à une forte recomposition des espaces, chacun d’entre eux étant investis d’une certaine « dose » de rural et d’urbain. « Près des villes, et singulièrement des plus grandes, les hommes s’accumulent et les populations rurales et urbaines se mélangent. Du coup, la part de la population agricole est minimisée. La distinction entre ville et campagne devient quasi impossible. La confrontation entre ruraux d’origine et néo-ruraux peut être porteuse de difficultés, les aspirations des uns et des autres n’étant pas les mêmes, et des conflits pouvant éclater à propos de l’usage du sol. Loin des villes, certains territoires gardent leur population rurale à un niveau numérique satisfaisant. Dans ces campagnes-là, les activités se maintiennent généralement bien. Par contre, dans les territoires dévitalisés par l’exode rural, la crise s’installe, parce que le renouvellement de la population ne se fait pas »83. La confusion urbain/rural induit donc des territoires différents, aux acteurs diversifiés, soumis à des problématiques différentes. Il n’est donc pas illogique de se demander si une sociologie rurale est encore pertinente aujourd’hui.

En effet, en France, « on peut estimer que le rural n’existe plus à l’heure actuelle en tant que modalité spécifique d’organisation et de fonctionnement d’une société. Bien sûr, le rural et la ruralité sont toujours présents, mais comme des catégories de discours – politique, 11111111111111111111111111111111111111111111111111111111111

79. SENCEBE Yannick, Les lieux et les temps de l’appartenance. Mobilités et territoires. Une analyse sociologique du pays Diois, Thèse de sociologie sous la direction de Bernard Ganne, Lyon, 2001, p. 8.

80. BEAUJEU-GARNIER Jacqueline, op. cit., p. 289.

81. ROMERO Christine (dir.), Campagnes et société. Fonctions et usages des campagnes françaises, Orléans,

81. ROMERO Christine (dir.), Campagnes et société. Fonctions et usages des campagnes françaises, Orléans,