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Le risque de crédit

Dans le document Le refus du banquier (Page 71-74)

MICROECONOMIQUES DE LA LIBERTE DE REFUS

Paragraphe 1 : Les risques bancaires, fondement de la liberté du banquier du banquier

A. Le risque de crédit

66. Les opérations de crédit représentent une importante partie de l’activité bancaire, elles constituent même sa fonction traditionnelle. Ces opérations se traduisent par un prêt des fonds reçus en dépôt ou par un prêt des fonds actuels ou futurs de la banque235. Il est donc logique que le risque de crédit et sa maîtrise soient au cœur du métier de la banque.

a. Définition du risque de crédit

67. Notions. Le risque de crédit est défini, littéralement, comme un risque de pertes dues à

la défaillance potentielle d’un emprunteur dans le remboursement des dettes contractées auprès de l’établissement de crédit. Juridiquement, le risque de crédit fait appel au risque d’insolvabilité du

233 S. Guinchard, T. Debard, Lexique des termes juridiques, Dalloz, 19eéd., 2012 ; G. Cornu, op. cit., « risque »

234 Littré, « risque »

71 débiteur qui se traduira, souvent, par l’ouverture d’une procédure de surendettement, dans le cas d’un consommateur, ou d’une procédure collective, dans le cas d’une entreprise236. Économiquement, il s’agit du risque de déviation défavorable de la valeur d’une position financière, consécutive à une modification de la qualité de crédit de l’une des contreparties. C’est pourquoi le risque de crédit est souvent associé au risque de défaut d’une contrepartie emprunteur, appelé aussi risque de contrepartie et qui correspond à l’incapacité du débiteur à faire face à ses obligations, même si il ne s’y limite pas237.

68. Appréhension du risque. La mesure de ce risque est primordiale tant il est difficile

d’anticiper l’évolution de la situation de l’emprunteur238. Or, c’est précisément cette mesure qui permettra au banquier de prendre une décision et de refuser de contracter, le cas échéant. Ce risque se calcule, classiquement, en fonction de trois paramètres que sont l’évaluation de la perte en cas de défaut, le taux de recouvrement en cas de défaut et, logiquement, la probabilité de défaut239.

Cette notion de défaut, selon les accords du comité de Bâle240, correspond à la réalisation, de façon alternative ou cumulative, de deux événements. Il s’agit, d’une part, de l’improbabilité, décelée par la banque, du remboursement de la totalité du crédit par le débiteur, sauf recours à des mesures appropriées telles que la réalisation d’une garantie. Il s’agit, d’autre part, de l’arriéré du débiteur sur un crédit important dépassant 90 jours, ce qui inclut les découverts en tant que créances échues, dès lors que le client en a dépassé la limite autorisée ou qu’il lui a été demandé de se conformer à une limite inférieure à l’encours actuel241. L’appréciation du défaut peut alors conduire à l’inscription comptable d’une créance par la banque au poste des provisions, à la cession d’une créance corrélative à une perte économique importante, ou encore à la demande d’ouverture d’une procédure collective par la banque ou par le débiteur lui-même242. Le risque de crédit sera constaté si les créances sont d’ores et déjà contentieuses, ou n’être que potentiel si les créances sont encore douteuses. En tout état de cause, une créance contentieuse ou douteuse devra faire l’objet d’une provision, qu’il s’agisse d’une provision générale ou d’une provision spécifique, qui affectera nécessairement le compte de résultat de

236 S. Piédelièvre et E. Putman, Droit bancaire, Economica 2011, n°621 et s.

237 P. Raimbourg, M. Boizard, Ingénierie financière, fiscale et juridique, 2eéd, Dalloz, 2009, n° 24.11

238 S. Piédelièvre et E. Putman, Droit bancaire, op. cit., n°618

239 P. Raimbourg, M. Boizard, op. cit., n° 24.13 s.

240 Art. 178, Règlement UE n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement

241 T. Roncalli, La gestion des risques financiers, 2eéd., Economica, 2009, p. 162

72 l’établissement de crédit243.

b. Les éléments du risque de crédit

69. Pour être parfaitement caractérisé, le risque de crédit, terme générique, fait appel à différentes sous-catégories de risques, propres à la matière financière.

70. Le risque de dilution. Cette définition du risque de crédit sous-tend également le

risque de dilution, c’est-à-dire le risque d’une réduction du montant d’une créance par l’octroi d’un crédit, sous la forme de liquidités ou sous toute autre forme, d’une remise ou d’une annulation de créance244. Ce type de risque est donc relatif aux créances nées des prêts bancaires ou encore des facilités de crédit.

71. La dégradation de la qualité du crédit. Mais le risque de crédit peut, encore, prendre

la forme d’une dégradation de la qualité du crédit, ce qui entraîne une hausse de la prime de risque sur cet emprunteur et, en conséquence, une diminution de la valeur de marché de cette dette245. Cette notion du risque de crédit est plus difficile à cerner, et correspond, en outre, davantage aux obligations risquées. Néanmoins, le risque de défaut implique nécessairement une dégradation de la qualité du crédit, ce qui explique que ce risque soit pris en compte dans le processus de décision du banquier.

72. Le risque de liquidité. Si le risque de crédit et le risque de liquidité sont bien deux

risques distincts, ils sont souvent liés. En effet, le banquier, en mettant des fonds à disposition de ses clients, prend également un risque de liquidité puisque, de fait, il renonce à la liquidité des fonds prêtés, ce qui justifie, par ailleurs, le taux d’intérêt, d’une part, et la liberté de refuser l’opération, d’autre part. Aussi, le risque de liquidité, c’est-à-dire le risque « de ne pas pouvoir faire face à ses engagements […] dans un délai déterminé et à un coût raisonnable » en raison d’une insuffisance de fonds246, se voit amplifié par une défaillance du débiteur, synonyme de prolongement de l’immobilisation des fonds. La réalisation de ce risque peut alors amener le banquier à se refinancer sur le marché interbancaire voire à renoncer temporairement à d’autres emplois des fonds qui auraient pu être plus attractifs et plus rentables que l’opération défaillante247.

243 T. Roncalli, op. cit.., p. 163

244 Article 4-1 d), arrêté du 20 février 2007 relatif aux exigences de fonds propres applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement ; article 4, 53), Règlement précité ; T. Bonneau, op. cit., n°327 I

245 T. Roncalli, op. cit., p. 161 s.

246Article 4 h), Règlement CRBF n°97-02 du 21 février 1997 relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (tel que modifié par l’arrêté du 5 mai 2009 relatif à l’identification, la mesure, la gestion et le contrôle du risque de liquidité) ; T. Bonneau, Régulation bancaire et financière européenne et internationale, Bruylant, 2012, n°159

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73. Le risque de taux. Enfin, le risque de crédit peut être dû à un risque de taux,

c’est-à-dire « le risque encouru en cas de variation des taux d’intérêt du fait de l’ensemble des opérations de bilan et de hors-bilan »248. Le banquier s’expose donc à un risque de taux lorsqu’il prête à taux fixe tout en faisant appel à des ressources qu’il emprunte à taux variable249.

Avant même la conclusion d’un contrat, le banquier doit donc s’intéresser à la situation actuelle de l’emprunteur potentiel mais également envisager son évolution prévisible à court ou moyen terme250, ce qui pourra justifier un refus de sa part s’il estime que la situation du candidat à l’emprunt présente un risque trop important. Toutefois, il devra aussi surveiller l’évolution de la situation en temps réel au cours de la relation contractuelle251.

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