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En élaborant ce mémoire, nous avons récolté des informations utiles à la mise en œuvre d’une approche intercompréhensive dans les classes et nous les avons rassemblées afin de fournir quelques outils aux enseignants. Les ressources ci-dessous ont été compilées de manière aléatoire et ne constituent en aucun cas un document prescriptif. Elles ont pour but de donner quelques idées et quelques pistes concrètes aux enseignants du primaire.

Activités de sensibilisation

Pour De Pietro (2008 : 219), il est nécessaire de sensibiliser les élèves aux notions de proximité linguistique et de familles de langues « si l’on souhaite qu’ils disposent des connaissances qui leur permettront d’activer leurs compétences avec un maximum d’efficacité dans le cadre de stratégies intercompréhensives ».

Pour ce faire, les enseignants pourront recourir à certaines activités proposées par EOLE (Perregaux et al., 2003) telles que :

- Moi je comprends les langues voisines I ; - Moi je comprends les langues voisines II ; - Un air de famille.

Idées d’activités

Au-delà de l’adaptation des MER, il est également possible de proposer des activités décrochées permettant de travailler la compréhension écrite par une approche intercompréhensive. Nous décrivons brièvement ci-dessous une sélection d’idées :

- comparer des chansons et leurs traductions dans plusieurs langues (texte à trou, paragraphes à remettre dans le bon ordre…) ;

- comparer des poèmes, des BD, des affiches publicitaires dans plusieurs langues ;

- reconstituer un dialogue en anglais et en allemand à partir de sa traduction française (avec des phrases données dans le désordre) ;

- travailler par thèmes inter-langues (événements particuliers, vie quotidienne, conte de fée, etc.) ;

- trier par genre des textes en plusieurs langues ;

173 - essayer de dégager des règles de dérivation (Sänger, worker, chanteur…) par

des exercices de classement notamment ;

- faire souligner les mots nouveaux dans un texte et les faire classer « en mots transparents (= ressemblant à ceux d’une autre langue que je connais), mots dérivés ou composés (= dont je reconnais une racine), mots inférables (=

dont je peux deviner le sens grâce au contexte) et mots à chercher dans le dictionnaire », puis demander aux élèves d’émettre des hypothèses quant à leur sens (Herrenberger, 1999 : 74) ;

- faire inférer des catégories grammaticales en inventant du vocabulaire farfelu à l’aide d’affixes et de désinences : par ex. retoupage, etc. ;

- travailler la grammaire en trouvant des phrases d’une structure syntaxique donnée dans des textes multilingues ;

- faire découvrir du vocabulaire nouveau en l’intégrant dans des phrases transparentes afin que les élèves puissent facilement inférer le sens de ces nouveaux lexèmes64 ;

- établir des listes d’inférences-pièges ou de faux amis entre les langues ( par ex.

when - quand /wenn – si ou where - où, wer - qui) au niveau du lexique et des structures au fur et à mesure que les élèves les découvrent ;

- lister certaines corrélations orthographiques : par ex. x-chs : fox - Fuchs, wax – Wachs en comparant des listes de mots ou des textes ;

- comparer des corpus multilingues pour inférer diverses règles de transfert - donner des listes de vocabulaire dans plusieurs langues et demander aux

élèves de retrouver les mots qui signifient la même chose ;

- repérer et lister avec les élèves le lexique commun65 et/ou les structures communes au français et à l’anglais66 et à l’allemand et à l’anglais (cf.

tableau 14 pour des exemples) ; - etc.

64 Par exemple, « la découverte des prépositions de lieu in, on, under (« dans », « sur », « sous ») peut se réaliser par la compréhension d’énoncés au sein desquels des mots congénères facilement reconnaissables ont été utilisés : The elephant is in the cage, the kangaroo is on the piano, the crocodile is under the sofa, etc. » (Beaucamp & Forlot, 2008 : 83-84).

65 Ioannidou (2012 : 415) propose de commencer avec un travail sur « les homographes complets comme table, adore, adorable, image, patient, impatient, surprise, fascination, nature, opinion […] » pour ensuite passer « aux quasi homographes comme (adult, adulte, etc.), puis au vocabulaire transparent mais non homographique (arrival, magnificent, departure, interesting, absolutely, etc.) ».

66 D’après Cuet (2009 : 122), « plus de 3000 mots sont communs (intelligence, train, humour…) » à l’anglais et au français.

174 Tableau 14. Lexique et structures communes

Lexique

Le type de texte choisi peut avoir un impact sur la réussite ou l’échec des élèves et contrairement à ce que l’on pourrait penser, généralement, « l’enjeu ne se pose pas

67 Exemples tirés de Herrenberger (1999 : 25).

175 dans une opposition syntaxe simple vs syntaxe complexe, mais dans la sélection de modèles textuels qui favorisent des principes rédactionnels similaires » (Caddéo &

Jamet, 2013 : 81). On peut donc être tenté de simplifier les textes, mais cela n’est pas réellement utile et il est préférable d’exposer les élèves à des textes les plus bruts possibles (Caddéo & Jamet : 80-81).

« Le défi est donc de proposer des échantillons de langue authentiques (c’est-à-dire non trafiqués, non simplifiés, non artificiels) tout en mesurant leur accessibilité et leur interopérabilité. La difficulté supplémentaire en intercompréhension est de sélectionner des textes dans plusieurs langues. » (Caddéo & Jamet, 2013 : 81)

Il s’agira donc d’exposer les élèves à des textes complexes dès le départ, tout en veillant à ce que le degré de transparence et la thématique abordée permettent aux apprenants d’accéder à un minimum de compréhension afin de ne pas les décourager.

Elaboration des consignes

Voici des exemples de consignes68 permettant d’aborder des textes par une approche intercompréhensive :

A. « Essayer de respecter les principes suivants : 1. Je prends connaissance du titre et du thème.

2. Je fais une première lecture silencieuse de la totalité du texte, puis je reprends le texte phrase par phrase.

3. J’essaie de comprendre la première phrase et je remplace les mots inconnus de la langue étrangère par le mot machin, ou bien machiner, machiné, machineur (si je reconnais la nature du mot) mais en allant jusqu’au bout de la phrase. L’inconnue en effet peut être résolue une fois tout le reste de la phrase comprise.

4. Je reprends la phrase en intégrant tout ce qui a été résolu après-coup.

5. Je passe à la phrase suivante même si tout n’est pas résolu.

68 Consignes reprises d’EuRom5 dans Caddéo et Jamet (2013 : 43-44) et quelque peu adaptées pour correspondre à notre contexte. Il est évident que de telles consignes sont beaucoup trop denses pour des élèves du primaire et elles ne devraient pas leur être transmises ainsi à l’écrit. Elles constituent un exemple utile pour les enseignants qui auront la responsabilité de les morceler et de les rendre accessibles à leur classe.

176 6. J’essaie de synthétiser mes informations : de quoi et de qui on parle, quand ça

s’est passé, où ? dans quelles circonstances ?

7. A la fin du texte, je refais une lecture de l’ensemble. Beaucoup d’éléments restés en suspens peuvent s’éclairer à ce moment-là.

B. Entourez dans le texte les mots qui restent obscurs après les lectures

Enfin, reportez-vous au texte en français, vous verrez si des aspects que vous n’aviez pas compris s’éclairent.

C. Une fois que vous avez travaillé sur les textes, réfléchissez à votre expérience :

1. A quel nombre de mots obscurs aboutissez-vous ? Ce nombre est-il supérieur ou inférieur au nombre de mots compris ?

2. Est-ce que vous avez reconnu l’organisation typique de [tel genre de textes] ? 3. Est-ce que le fait d’avoir lu des textes similaires en langues différentes

vous a aidés à comprendre le sens de certains mots ?

4. Seriez-vous capables de compléter les cases du tableau ci-dessous avec des mots que vous retrouvez dans les textes ?

Allemand Anglais Français

X mot

Y mot Z mot

5. Que pourriez-vous dire de … [poser une question en lien avec l’observation d’un phénomène linguistique]? » (EuRom5 in Caddéo & Jamet, 2013 : 43-44)

Formulation d’aides

Voici des exemples d’aides ou de conseils permettant de soutenir la compréhension en langue étrangère :

177 - « aller jusqu’au bout de la phrase ou du paragraphe ; ce qui revient à laisser des inconnues ou des morceaux non résolus qui pourront s’éclairer de manière rétroactive ; […]

- construire le sens par « strates » : par exemple, « déshabiller » une phrase construite avec des incises, des parenthèses, des appositions pour s’en tenir à l’information centrale, avant de s’intéresser au reste ;

- faire des aller-retour pour permettre de garder en mémoire la cohérence générale du texte, sa progression et son thème ou pour clarifier, corriger, améliorer sa première proposition ;

- oraliser sa compréhension afin d’en évaluer la pertinence ;

- recourir à l’écoute : soit pour un mot que la prononciation pourrait éclairer ; soit pour une phrase ou le texte afin de construire une compréhension globale ;

- rechercher des indices extra-linguistiques : les images, si elles ont été bien choisies, sont par exemple de bons indices ;

- solliciter l’inférence, qui intervient à toutes les étapes de la lecture et qui est la mise en œuvre de ses connaissances linguistiques dans toute leur diversité ou de son expérience pour la reconstruction du sens ». (Caddéo & Jamet, 2013 : 68)

Champs lexicaux pertinents69

Voici quelques exemples de champs lexicaux proches du français permettant une approche intercompréhensive avec de jeunes apprenants :

- animaux : gazelle, puma, elephant, kangaroo, crocodile, tiger, rat, etc. ; - musique : music, instruments, saxophone, tambourine, guitar, trumpet, etc. ; - nourriture : melon, banana, pork, mutton, beef, olive, apricot, carrot, biscuit, etc. ; - vêtements : shorts, pyjamas, boots, cardigan, etc. ;

- disciplines scolaires : mathematics, history, geography, music, etc. ; - sports : basketball, football, badminton, etc.;

- etc.

69 Les champs lexicaux suivants sont extraits de Beaucamp et Forlot (2008 : 82), à l’exception des exemples liés au champ lexical du sport.