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Renforcement de la protection des intérêts du preneur d’assurance dans l’opération de courtage d’assurance

CONVENTION DE COURTAGE EN MATIÈRE D’ASSURANCE

Section 2. Adéquation de la notion d’entremise

B. Après 2002 : vers un renforcement législatif

2. Renforcement de la protection des intérêts du preneur d’assurance dans l’opération de courtage d’assurance

La directive va préconiser également un principe de cohérence entre le projet proposé par le courtier et les besoins déterminés du client et/ou les exigences manifestées de celui-ci (715). Elle vient réaffirmer la volonté de préserver les intérêts du preneur d’assurance (716) dans le cadre de l’activité d’intermédiation au regard du droit de la consommation (717

). Cette prise en compte découle ainsi d’une décision de la Commission européenne de refondre la directive de 2002 du fait entre autres de « turbulences financières rencontrées au sein de l’Union européenne [qui] avaient montré l’importance de garantir aux consommateurs une protection efficace dans l’ensemble des secteurs financiers, et notamment en assurance » (718

).

2. Renforcement de la protection des intérêts du preneur d’assurance dans l’opération de courtage d’assurance

202. La refonte du droit de l’intermédiation d’assurance a été opérée dans un esprit de préservation des intérêts du preneur d’assurance principalement par la consolidation des obligations d’information, de conseil et de mise en garde du courtier en assurances et par le développement d’un formalisme au sein de la relation courtier — preneur d’assurance. Aussi,

(713) Dir. 2002/92/CE, art. 12. 1. c) et d) devenu C. ass., anc. art. L. 520-1 II. 1 ° b) et c) ; C. ass., art. L. 521-2 II. 1 ° b) et c).

(714) Dir. 2002/92/CE, art. 2-3 al. 2 : « Ces activités ne sont pas considérées comme une intermédiation en assurance lorsqu’elles sont exercées par une entreprise d’assurance ou un salarié d’une entreprise d’assurance qui agit sous la responsabilité de celle-ci. ».

(715) Dir. (UE) 2016/97, art. 20. 1. al. 2 : « Tout contrat proposé est cohérent avec les exigences et les besoins du client en matière d’assurance » ; Dir (UE) 2016/97, art. 30. 1. al. 1 : « (…) l’intermédiaire ou l’entreprise d’assurance se procure également les informations nécessaires sur les connaissances et l’expérience du client ou du client potentiel dans le domaine d’investissement dont relève le type spécifique de produit ou de service, la situation financière de cette personne, y compris sa capacité à subir des pertes, et ses objectifs d’investissement, y compris sa tolérance au risque, pour être ainsi en mesure de recommander au client ou au client potentiel les produits d’investissement fondés sur l’assurance adéquats et, en particulier, ceux qui sont adaptés à sa tolérance au risque et à sa capacité à subir des pertes. ».

(716) Dir. (UE) 2016/97, considérant (44) : « (…) Tout produit d’assurance proposé au client devrait toujours être cohérent avec les exigences et les besoins de ce dernier et être présenté sous une forme compréhensible, afin de permettre au client de prendre une décision en connaissance de cause. ».

(717) Dir. (UE) 2016/97, considérant (10) : « Les turbulences financières récentes et actuelles ont montré l’importance de garantir aux consommateurs une protection efficace quel que soit le secteur financier concerné. Il convient, dès lors, de renforcer la confiance des consommateurs et d’uniformiser davantage la réglementation de la distribution des produits d’assurance, de façon à garantir aux clients un niveau adéquat de protection dans toute l’Union. (…) ».

(718) GHUELDRE R., DELAMARE-DEBOUTTEVILLE C-E., La directive sur la distribution d’assurance, RGDA 2016 p.346.

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la genèse d’une législation propre au courtage d’assurance permet un renforcement de la protection des intérêts du preneur d’assurance dans l’opération de courtage d’assurance tant sur le fond (a) que sur la forme (b).

a. Protection des intérêts du preneur d’assurance sur le fond

203. Si en premier lieu la directive de 2002 déterminait les obligations propres à la convention de courtage d’assurance (i), la transposition de la directive de 2016 au sein du Code des assurances prévoit en second lieu un enrichissement de ces obligations (ii).

i. Détermination des obligations propres à la convention de courtage d’assurance

204. Création des obligations légales du courtier. La directive de 2002 mettait l’accent sur les obligations incombant aux intermédiaires, et donc aux courtiers dans un souci de transparence et de préservation des intérêts des clients de ceux-ci. Elle dessine ainsi la sphère d’intervention du courtier de manière à la fois temporelle c’est-à-dire en amont, pendant et après la souscription du contrat d’assurance, impartiale et indépendante vis-à-vis des entreprises d’assurances, basée sur la fourniture d’un conseil matérialisé et non du produit d’assurance en lui-même, et ce de manière structurée, et dans le respect de la convention de courtage d’assurance.

140 ii. Enrichissementdes obligations propres à la convention de courtage d’assurance

205. Afin de rendre efficace l’activité de distribution d’assurance, le Code des assurances prévoit dorénavant des exigences d’ordre professionnel et d’ordre organisationnel à la charge du courtier ainsi qu’un enrichissement des informations à fournir et des règles de conduite inhérentes. Il introduit en outre des principes généraux en distinguant dispositions applicables à l’ensemble des contrats d’assurance et exigences supplémentaires relatives aux contrats de capitalisation et certains contrats d’assurance-vie (719).

206. Introduction d’exigences professionnelles et organisationnelles. Les exigences professionnelles incombant au courtier en assurances nouvellement développées dans le Code des assurances se déclinent autour des connaissances et aptitudes du professionnel de l’assurance d’une part et de son obligation d’honorabilité d’autre part. La directive de 2016 accroît les exigences professionnelles inhérentes aux professionnels de l’assurance (720). Il s’agit de « garantir un niveau élevé de professionnalisme et de compétence chez les intermédiaires d’assurance » (721

). À propos de l’honorabilité du courtier, elle rappelle que ces exigences « contribuent à la solidité et à la fiabilité du secteur de l’assurance ainsi qu’à l’objectif de fournir aux preneurs d’assurance une protection adéquate » (722

).

Concernant les exigences organisationnelles, il s’agit davantage de prescriptions relatives à la relation courtier - entreprise d’assurance, soit de mettre en place une obligation pour les entreprises d’assurances d’approuver, de mettre en œuvre et d’actualiser les politiques internes, notamment les politiques de souscription et de gestion des risques (723) et de

(719) Concernant l’assurance-vie, les contrats de capitalisation et les assurances groupe que nous avons choisi de ne pas développer dans notre étude (voir supra n° 11), il convient de préciser que « pour ceux-là, non seulement le distributeur sera tenu par les dispositions applicables à tout contrat d’assurance, mais des obligations particulières viendront renforcer et éclairer d’une autre manière les « informations à fournir » et les « règles de conduites » du seul fait que l’adossement du contrat d’assurance à un produit d’investissement est susceptible de faire naître des con fl its d’intérêts d’une nature particulière que la personne au contact du client, au nom du distributeur, devra prévenir et si possible gérer ». De plus, les obligations d’information et de conseil sont davantage renforcées en ce sens que « le risque est moins dans l’aléa de la vie de l’assuré que dans les aléas du rendement de l’investissement liés aux risques des marchés financiers ». Dès lors « Le distributeur est tenu d’informer (et presque de former) le client en fonction de l’état de ses compétences sur ces sujets sur les propositions de contrats et de stratégies d’investissement combinées. Il s’agira de préciser pour chacun les orientations en termes de support d’investissement et de faire les mises en garde appropriées sur les risques inhérents aux contrats ou à certaines stratégies d’investissement » — LANGE D., Le nouveau droit de la distribution de l’assurance, RGDA 2018 p.6.

(720) C. ass., art. L. 511-2, C. ass., art. L. 511-3. (721) Dir. (UE) 2016/97, considérant (28). (722) Dir. (UE) 2016/97, considérant (30). (723) C. ass., art. L. 511-4.

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renforcer le principe de transparence en termes d’échanges d’informations sur l’honorabilité, les connaissances et les aptitudes professionnelles des intermédiaires d’assurance (724).

Par ailleurs, la transposition de la directive de 2016 permet l’introduction dans le Code des assurances des conditions de contrôle approfondies de l’exercice de l’activité de distribution d’assurance (725

) et de sanction notamment en cas de manquement à ses obligations de la part du courtier (726) par la réorganisation des dispositions liées à la liberté d’établissement et la liberté de prestation et notamment la surveillance des produits et des exigences en matière de gouvernance (727).

207. Principes généraux. Le Code des assurances impose désormais aux distributeurs d’assurance de respecter des prescriptions d’honnêteté, d’impartialité et de professionnalisme en vue de préserver les intérêts du preneur d’assurance (728

). En effet, « les trois adjectifs ont chacun leur charge. Ils composent une formule renforcée de la bonne foi déclinée pour les relations d’affaires entre un professionnel et un consommateur » (729). Il s’agit là de règles de conduite voire déontologiques. Le Code des assurances offre ainsi un fondement légal à des prescriptions voire des normes de conduite que l’on peut retrouver également dans le Code moral des courtiers (730). Il rappelle en outre que la préservation des intérêts du preneur d’assurance est au cœur de la relation d’intermédiation d’assurance donc au cœur de la relation de courtage entre courtier et preneur d’assurance.

En écho au Code de la consommation, le Code des assurances va imposer au courtier de transmettre une information de manière générale, voire dans sa déclinaison publicitaire, de

(724) C. ass., art. L. 511-5.

(725) C. ass., art. L. 515-1 à L. 515-3. (726) C. ass., art. L. 515-4.

(727) C. ass., art. L. 516-1 I ; Il s’agit entre autres de mettre à la charge du distributeur-concepteur du produits d’assurance qui peut tant être l’entreprise d’assurance que le courtier, et notamment le courtier grossiste (Comme le prévoit le Code de conduite régissant les rapports entre les courtiers grossistes souscripteurs en assurance et les courtiers directs dans l’exécution auprès du client des obligations d’information et de conseil, CSCA 2009) une obligation d’information à destination des intermédiaires, notamment le courtier direct, ayant vocation à distribuer le produit d’assurance au preneur d’assurance. En outre, le courtier a une obligation de s’informer lorsqu’il ne conçoit pas lui-même les produits d’assurance. Ainsi, il doit mettre en place des « dispositifs appropriés pour se procurer les informations (mentionnées au dernier alinéa du I) et pour comprendre les caractéristiques et le marché cible défini de chaque produit d’assurance » (C. ass., art. L. 516-1 II).

(728) C. ass., art. L. 521-1 I.

(729) LANGE D., Le nouveau droit de la distribution d’assurance, RGDA 2018, p.6.

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manière claire, exacte et non trompeuse (731). Il s’agit de coller à la protection qu’offre le Code de la consommation en matière de pratiques commerciales trompeuses (732).

L’activité de distribution d’assurance doit se faire au mieux des intérêts du preneur d’assurance. Aussi, le courtier ne doit pas être rémunéré « d’une façon qui contrevienne à [son] obligation d’agir au mieux des intérêts du souscripteur ou de l’adhérent » (733). Il ne doit pas être encouragé à recommander un produit d’assurance particulier au preneur d’assurance alors qu’il pourrait proposer un autre produit d’assurance correspondant mieux aux exigences et aux besoins au preneur d’assurance. Cette nouvelle prescription n’est pas sans rappeler le point n° 2 du Code des courtiers énonçant que « l’importance de la rémunération que le courtier doit retirer normalement de son travail ne doit en aucun cas influencer la qualité de la prestation de service ».

208. Informations à fournir et règles de conduite. Concernant les obligations du courtier d’assurances, le Code des assurances détaille les informations que ce dernier doit fournir ainsi que les règles de conduite inhérentes. Les obligations d’information et de conseil sont désormais plus détaillées (734). Un paragraphe « règles de conduite » est introduit toutefois il s’agit davantage de règles de mise en œuvre des obligations d’information et de conseil plutôt que d’un Code de conduite à proprement parler. De plus, sont introduites dans le Code des assurances des exigences supplémentaires relatives aux contrats de capitalisation et certains contrats d’assurance-vie (735

) notamment en matière de prévention des conflits d’intérêts, d’informations à fournir et de règles de conduite (de mise en œuvre des obligations).

209. Obligations protectrices des intérêts du preneur d’assurance. De manière générale émergent de nouvelles expressions venant matérialiser la protection des intérêts du preneur d’assurance, au cœur de cette nouvelle législation. Il est question des « exigences et des besoins » (736) du preneur d’assurance. Il s’agit pour le courtier de satisfaire aux demandes de son client et de prendre en compte ses besoins réels, c’est-à-dire ses intérêts à assurances dans

(731) C. ass., art. L. 521-1 II.

(732) C. conso., art., L. 121-1 à L. 121-5. (733) C. ass., art. L. 521-1 III.

(734) Voir infra n° 409 et svts, 456 et svts. (735) C. ass., art. L. 522-1.

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le but de proposer en conséquence un projet d’assurance présentant une cohérence en regard du profil du preneur d’assurance.

L’information doit être transmise « sous une forme compréhensible/claire, exacte et non trompeuse » (737). Ce dernier qualificatif n’est pas sans rappeler la législation des pratiques commerciales trompeuses prévue par le Code de la consommation, semblant placer de fait le preneur d’assurance sous le statut de consommateur d’assurance (738

).

Cette information doit permettre au preneur d’assurance de « prendre une décision en connaissance de cause » (739). En premier lieu, cette formule rappelle que le preneur d’assurance reste le décideur final du choix de souscrire ou non le contrat d’assurance proposé par le courtier. En second lieu, il s’agit de rappeler que le preneur d’assurance doit pouvoir prendre la décision de souscrire le contrat d’assurance proposé seulement après avoir bénéficié des informations, des conseils voire des mises en garde délivrées par le courtier.

En outre, sont évoquées d’une part la « complexité du contrat d’assurance ou de capitalisation » (740) à laquelle les obligations de l’intermédiaire doivent être adaptées, impliquant que le preneur d’assurance ne peut comprendre seul tous les aspects de ce contrat et d’autre part « sa tolérance aux risques et sa capacité à subir des pertes » (741), c’est-à-dire sa capacité financière à contracter.

b. Protection des intérêts du preneur d’assurance sur la forme

210. Emergence d’un formalisme ad probationem. La directive de 2002 évoquait la preuve des obligations du courtier par l’intermédiaire d’un support notamment « sur papier ou sur tout autre support durable disponible et accessible au client » (742).

Il s’agissait d’une part de tendre vers un suivi matériel des échanges d’informations entre le courtier et son client (743) et d’autre part, de rendre ces échanges clairs et compréhensibles

(737) C. ass., art. L. 521-4; C. ass., art. L. 522-5. (738) Voir infra n° 261 et svts.

(739) C. ass., art. L. 521-4 ; C. ass., art. L. 522-5. (740) C. ass., art. L. 521-4 ; C. ass., art. L. 522-5.

(741) C. ass., art. L. 522-5 ; cela concernant uniquement les contrats d’assurance-vie et de capitalisation. (742) Dir. 2002/92/CE, art. 13, 1, a).

(743) Dir. 2002/92/CE, art. 13, 2 : « Par dérogation au paragraphe 1, point a), les informations visées à l’article 12 peuvent être fournies oralement lorsque le client le demande ou lorsqu’une couverture immédiate est nécessaire. Dans ces cas, les informations sont fournies au client conformément au paragraphe 1 immédiatement après la conclusion du contrat d’assurance ».

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pour le client (744) l’objectif étant de renforcer le cadre de la convention de courtage d’assurance.

La directive de 2016 vient définir la notion de support durable (745). Il s’agit de renforcer la traçabilité des échanges d’informations et nouvellement de la fourniture de conseils entre le courtier et son client (746) en détaillant le contenu du document d’information, soit un document annexe et connexe à la convention de courtage d’assurance qui matérialise son existence et lui confère son objet (747). En outre, si le principe du support écrit demeure (748), il est dérogé à cette règle dans l’hypothèse de l’utilisation d’un support durable ou d’internet (749), ce qui est une nouveauté. Le principe est que le support est un support écrit ou durable et que la transmission orale d’information reste l’exception (750

) pour des raisons évidentes de preuves.

211. Intérêt d’un formalisme ad probationem. Si « la validité d’un contrat n’obéit à aucune condition de forme » (751) par principe, il demeure toutefois l’exception imposant trois types de formalisme, soient « le premier, exigé à peine de nullité du contrat (ad validitatem), le deuxième, seulement requis à des fins probatoires (ad probationem) et le troisième, aux fins de publicité » (752). Si le courtage d’assurance n’est pas concerné par l’exigence d’un écrit solennel ou aux fins de publicité, il semble l’être en revanche en matière de preuve,

(744) Dir. 2002/92/CE, art. 13, Modalités d’information : « b) avec clarté et exactitude, d’une manière compréhensible pour le client ».

(745) Dir. (UE) 2016/97, art. 20, 18), Fourniture de conseils et pratiques de vente en l’absence de conseil : « 18) « support durable », tout instrument qui : a) permet au client de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement, de telle sorte qu’elles puissent être consultées ultérieurement pendant une période adaptée à l’objectif de ces informations ; et b) permet la reproduction exacte des informations stockées ».

(746) Dir. (UE) 2016/97, art. 20, 5. : Fourniture de conseils et pratiques de vente en l’absence de conseil : « 5. Pour ce qui concerne la distribution des produits d’assurance non-vie énumérés à l’annexe I de la directive 2009/138/CE, les informations visées au paragraphe 4 du présent article sont fournies au moyen d’un document d’information normalisé sur le produit d’assurance, sur support papier ou sur un autre support durable ».

(747) Dir. (UE) 2016/97, art. 20, 8.

(748) Dir. (UE) 2016/97, art. 23, 1 : « Toute information fournie aux clients en vertu des articles 18, 19, 20 et 29 est communiquée aux clients : a) sur support papier ».

(749) Dir. (UE) 2016/97, art. 23, 2 : « Par dérogation au paragraphe 1, point a), du présent article, les informations visées aux articles 18, 19, 20 et 29 peuvent être fournies au client en recourant à l’un des supports suivants : a) sur un support durable autre que le papier, si les conditions énoncées au paragraphe 4 du présent article sont remplies ; ou b) au moyen d’un site internet, si les conditions énoncées au paragraphe 5 du présent article sont remplies ».

(750) Dir. 2002/92/CE, art. 13, 2.

(751) DISSAUX N., Contrat : formation, Répertoire de droit civil, avril 2017, n° 203. (752) Ibid., n° 211.

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dire par un écrit ad probationem (753). De plus, si la convention de courtage ne fait pas automatiquement l’objet d’un écrit, il existe de nombreux commencements de preuve (754

) tels que les échanges de mails entre le courtier et le preneur d’assurance, le questionnaire, la notice d’information. La production d’un écrit semble être nécessaire, car elle permet de protéger d’une part le preneur d’assurance en s’assurant qu’il dispose bien de tous les éléments lui permettant de donner un consentement libre et éclairé (755) et d’autre part, de constituer un élément de preuve de la diligence du courtier dans l’exécution de ses obligations. En effet, « l’incorporation dans des formes matérielles ou sensibles est la condition indispensable pour garantir aux informations et conseils distillés avant la conclusion des contrats d’assurance leur pleine efficacité pour éclairer la prise de décision du souscripteur et pour permettre par leur enregistrement chez le distributeur la surveillance par l’autorité compétente du respect de ses obligations par l’appareil de distribution » (756).

La Cour de cassation pose le principe général que « celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit apporter la preuve de l’exécution de cette obligation » (757

). Le professionnel doit apporter la preuve contrairement à l’énoncé de l’article 1353 alinéa 1du Code civil (758

).

Dans un contexte de judiciarisation des rapports, le formalisme apparaît comme plus que nécessaire. Son essor se traduit également dans d’autres domaines de services tels que le conseil en gestion de patrimoine et le conseil en investissements financiers, dans lesquels le conseiller est tenu de remettre une lettre de mission à son client que ce dernier va contresigner (759). Les directives européennes de 2002 et 2016 viennent en ce sens renforcer les obligations en imposant une matérialisation ad probationem de ces obligations.

212. Prémices du formalisme instauré par la directive européenne de 2016. L’essor du formalisme découlant de la directive européenne de 2016 n’est pas sans rappeler une

(753) Formalisme ad probationem : une simple règle de preuve, Cass. Com. 25 mai 1993, n° 91-14.774, Bull. 1993, IV, n° 205 p.146.

(754) C. civ., art. 1362.

(755) COUTURIER G., « Les finalités et les sanctions du formalisme », Defr. 2000, n° 37209, p.880 : « il s’agit toujours d’attirer l’attention de ce contractant sur l’importance ou sur certains aspects du contrat conclu et de fixer ces points sans équivoque ».

(756) LANGE D., Le nouveau droit de la distribution d’assurance, RGDA 2018 p.6. (757) Cass. Civ. 1ère, 25 févr. 1997, n° 94-19.685, Bull. 1997, I, n° 75, p.49.

(758) Cass. Civ. 1ère, 2 oct. 2013, n° 12-20.452, NP, à propos de la preuve de l’obligation de conseil qui incombe au notaire.

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recommandation de l’ACPR (760) rendue en 2013 (761) complétée par une annexe de 2016 relative à la mise en place d’un formalisme spécifique dans le lien de droit qui unit le courtier, intermédiaire en assurances et le preneur d’assurance. Il est question de s’assurer de la trace des informations recueillies en vérifiant d’une part que le document de recueil des informations a bien été remis au client ou tenu à sa disposition, par exemple en cas de vente à distance et veillant d’autre part à la conservation des informations recueillies et à leur accessibilité pendant toute la relation avec le client et au-delà, conformément aux règles attachées à la prescription (762). Il s’agit de formaliser le rapport unissant le courtier au