• Aucun résultat trouvé

La convention de courtage d’assurance : la grande absente du droit des affaires

CONVENTION DE COURTAGE EN MATIÈRE D’ASSURANCE

Section 2. Adéquation de la notion d’entremise

A. Avant 2002 : une convention innommée

2. La convention de courtage d’assurance : la grande absente du droit des affaires

Ainsi, la source de l’obligation contractuelle de la convention de courtage d’assurance n’est autre que la manifestation de la volonté libre entre le courtier d’assurance d’une part et le preneur d’assurance d’autre part, chacun exprimant la volonté de s’obliger envers son co-contractant conférant ainsi force obligatoire de l’accord conclu par les parties. La volonté de s’obliger du courtier est mue par un principe de sauvegarde des intérêts du preneur d’assurance.

2. La convention de courtage d’assurance : la grande absente du droit des affaires

186. Absente du Code de commerce. Si le Code de commerce traite du courtage notamment en ce qu’il répute acte de commerce les opérations de courtage, il n’envisage que certains types de courtage tels que le courtage de marchandises, de transport par terre et par eau, les courtiers interprètes et conducteurs de navires (645), ou encore les opérations de courtage aux enchères (646) sans évoquer le courtage d’assurance terrestre à tout le moins. Toutefois, il convient de noter que les courtiers interprètes et conducteurs de navires relèvent du courtage d’assurance maritime et que de par leur création en 1681 par l’édit de Colbert, ils ont été les premiers courtiers en matière d’assurance à avoir une existence juridique (647

).

187. Apparition sommaire dans le Code des assurances. Bien que le droit des assurances ait pris forme de manière législative lors de l’édiction de la loi du 13 juillet 1930

(641) C. civ., art. 1193 ; « La notion juridique de mutuus dissensus peut être définie comme la convention par laquelle toutes les parties consentent à la révocation de la convention qu’elles ont conclue antérieurement » — SIRI A., Le mutuus dissensus, Notion, domaine, régime, Th., Aix-Marseille III, 2011.

(642) LATINA M., Contrat généralités, op. cit., n° 122. (643) Ibid., n° 130.

(644) C. civ., art. 1211.

(645) C. com., art. L. 131-1 et svts. (646) C. com., art. L. 321-3. (647) Code de commerce de 1807.

128

en majorité reprise lors de la rédaction du Code des assurances en 1976 (648), et malgré l’émission d’une première directive de 1977 (649

) relative à l’exercice effectif de la liberté d’établissement et de la libre prestation des services pour les activités d’agent et de courtier d’assurance, le Code des assurances était peu disert en matière d’intermédiation d’assurance qui était définie succinctement (650).

188. Code des assurances de 1976 : Premières définition et conditions nationales de l’intermédiation d’assurance. Le Code des assurances de 1976 retenait la notion de présentation d’assurance pour décrire l’opération d’intermédiation en assurance. Au titre de l’ancien article R. 511-1, était ainsi considéré comme présentation d’une opération pratiquée par les entreprises mentionnées à l’article L. 310-1 le fait, pour toute personne physique ou morale, de solliciter ou de recueillir la souscription d’un contrat d’assurance ou de capitalisation ou l’adhésion à un tel contrat ou d’exposer oralement ou par écrit à un souscripteur ou adhérent éventuel, en vue de cette souscription ou adhésion, les conditions de garantie d’un tel contrat. Ce libellé permettait de dégager les spécificités de l’intermédiation d’assurance à savoir la matérialisation du lien entre le client du courtier et l’entreprise d’assurance à travers l’intervention du courtier ayant pour objectif la souscription ou adhésion à un contrat d’assurance, soit la création d’un lien juridique entre le preneur d’assurance et l’assureur. Il présentait également comme procédure inhérente à l’intermédiation en assurance, le fait d’exposer oralement ou par écrit les conditions de garantie du contrat d’assurance proposé (651

).

Était évoquée en outre l’honorabilité du courtier comme condition nécessaire à la réalisation de ces opérations (652). Par ailleurs, le courtier était envisagé uniquement à travers son obligation de souscrire une assurance responsabilité professionnelle et une garantie financière

(648) Concernant les assurances terrestres : « Le processus de codification a été long et laborieux. Pourtant son principe avait été décidé dès 1955 (Loi N° 55-1442 du 08 nov. 1955) » - BIGOT J., Traité de Droit des assurances, Le contrat d’assurance, T. III, LGDJ, 2014, n° 301 ; A l’inverse, les assurances maritimes étaient traitées dans le Code de commerce – Ibid., n° 297.

(649) Dir. 77/92/CEE.

(650) C. ass., anc. art. L. 511-1.

(651) Il s’agissait là de la matérialisation de l’obligation d’information par la réalisation d’un acte matériel ; BIGOT J., Traité de Droit des assurances, L’intermédiation d’assurance, op. cit., n° 26 p.18 : « cette notion de présentation d’opérations d’assurance n’était pas limitée à des actes juridiques, mais englobait des actes matériels, notamment l’exposé des caractéristiques du contrat dans le but de faire contracter le preneur éventuel ».

129

(653), c’est-à-dire par un angle plutôt négatif et curatif de la profession en cas de défaillance de celle-ci.

189. Directive de 1977 et recommandation de 1992 : Premières définition et conditions européennes de l’intermédiation d’assurance. L’adoption de la directive CE 77/92 du 13 décembre 1976 venait matérialiser la prise en considération juridique de la relation courtier — preneur d’assurance par un organe législatif. Cette directive venait définir les catégories d’intermédiaires habilités (654) dont celle du courtier d’assurance, comme « l’activité professionnelle des personnes qui mettent en rapport des preneurs et des entreprises d’assurance ou de réassurance, sans être tenues dans le choix de celle-ci en vue de la couverture de risques à assurer ou à réassurer, préparent la conclusion des contrats d’assurance, et aident éventuellement à leur gestion et à leur exécution, notamment en cas de sinistre » (655). Cette définition avait pour objectif de décrire l’opération de courtage en assurance faisant ainsi état de trois acteurs, à savoir le courtier, intermédiaire d’assurance dont l’intervention a pour objectif la création potentielle d’un lien juridique entre son client, preneur d’assurance et l’assureur, entreprise d’assurance à travers la souscription par le premier du contrat d’assurance. Cette première description permettait d’illustrer la notion d’intermédiation à défaut d’avoir une véritable définition. Elle mettait en exergue « l’entremise entre le preneur et l’assureur en vue de les faire contracter » et « les prestations d’assistance accompagnant généralement l’intermédiation (l’aide à la conclusion, à la gestion et à l’exécution des contrats) » (656

). Toutefois, dans le cadre de la transposition de cette directive (657), seules les dispositions relatives aux conditions de capacité professionnelle et au contrôle de ces conditions ont été retranscrites.

En complément de ce texte était émise une recommandation en 1992 (658) qui venait traiter le point de l’indépendance des intermédiaires en rappelant qu’il incombe à ces derniers d’informer les preneurs d’assurance de liens juridiques ou économiques avec une entreprise

(653) C. ass., de anc. art. L. 530-1 à anc. art. L. 530-3.

(654) Au nombre de 4 : courtiers d’assurance/agents généraux/mandataires d’assurance/producteurs salariés. (655) Dir. 77/92/CEE du 13/12/1976, art. 2.

(656) BIGOT J., Traité de Droit des assurances, L’intermédiation d’assurance, op. cit., n° 25 p.17.

(657) Décr. n° 79-483 du 20 juin 1979 relatif aux conditions de capacité professionnelle de ressortissants d’un État membre de la Communauté économique européenne autre que la France ; Décr. n° 9-484 du 20 juin 1979 relatif à la liberté d’établissement et à la libre prestation de services pour les agents généraux, courtiers et autres intermédiaires d’assurance.

130

d’assurance d’une part ne permettant pas au client de choisir l’entreprise d’assurance de son choix (659) et d’autre part privant le preneur d’assurance d’un large choix d’offres.

Par conséquent, il faudra attendre 2002 avant de voir émerger un réel apport législatif avec les directives de 2002 et 2016 sur l’intermédiation d’assurance (660

) qui seront transposées en 2005 et 2018 (661) dans le cadre d’une harmonisation communautaire.