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Chapitre 4. Participations sociales : entre évolutions et

4.2 Inégalités et variabilités des logiques de participation

4.3.4 Recul et hausse de l’impact de l’éducation, entre

Les évolutions liées à l’impact du niveau d’instruction ne montrent pas une tendance claire permettant de trancher en termes de démocratisation ou d’accroissement des inégalités. Si celui-ci reste un aspect important de la participation sociale, comme nous l’avons vu auparavant, les résultats mettent à jour des indices allant dans ces deux directions contradictoires selon les activités, parfois conjointement, parfois uniformément. Seule la participation familiale est marquée par une démocratisation – tant d’ailleurs du point de vue du niveau d’instruction que des sources de revenu. A l’inverse, de nouvelles

116 L’impact des groupes d’âge reste stable, voire tend plutôt à se renforcer, les termes d’interaction ne confirmant cependant pas significativement cette tendance (voir annexes D pour chiffres).

117 Pour revenir sur les résultats les plus anciens, la tendance à un moindre impact de l’âge chronologique et surtout des âges avancés entre 1994 et 2011 suivrait une évolution inverse entre 1979 et 1994 (hausse de l’effet d’âge). Ceci se vérifie significativement sur l’analyse des cours (voir figure 4.33). On peut interpréter cette hausse comme une différenciation croissante entre cohortes avec l’arrivée de générations porteuses de nouvelles pratiques et plus généralement une diffusion des pratiques contrainte par l’âge. On doit cependant aussi mentionner le fait que les effectifs de participants étaient plus faibles en 1979, notamment sur cette activité, et qui plus est cet échantillon n’avait pas été stratifié par âge – réduisant l’effectif disponible des plus vieux. Les résultats concernés sont ainsi à prendre avec prudence.

118 La plupart des résultats relevés dans cette section (à l’image de nos analyses plus générales d’ailleurs) sont en effet stables à travers nos trois modèles et s’il apparaît que les tests effectués sur les termes d’interactions perdent parfois leur significativité (c’est le cas sur la variable score 10 dans le 3ème modèle, de même le test de Wald sur les pratiques religieuses y devient également non-significatif), les tendances identifiées entre les trois enquêtes persistent bien lorsqu’on compare les résultats obtenus sur les trois enquêtes.

inégalités émergent en matière de participation politique ou syndicale. Entre ces deux tendances, c’est davantage une persistance, voire un déplacement des logiques, qui transparaît.

L’ambiguïté du rapport entre démocratisation et renforcement des inégalités se retrouve tout d’abord dans l’analyse des scores de participation (cf. figure 4.34).

D’un côté, les résultats des régressions et des tests d’interaction soulignent bien une certaine baisse de la pénalité pesant sur ceux qui n’ont eu qu’une formation élémentaire. Cette évolution concerne alors uniquement la période entre 1979 et 1994. D’autre part, des tendances inverses à une certaine démocratisation sont également à souligner. Bien que les tests s’avèrent non-significatifs, il faut en effet observer un renforcement de l’effet positif d’avoir une éducation tertiaire entre 1979 et 2011, soit un élitisme croissant. Ici, plus qu’une baisse des inégalités liées au statut éducatif, c’est davantage la logique d’ascenseur décrite par Levy et al. (1997) concernant la stratification sociale de la société suisse qui transparaît de nos différents résultats.

Figure 4.34 : Evolution de l’effet du niveau d’instruction sur les scores de participation

Score 10 Score 12

NB : régressions de poisson ; modèle 2 ; AME en 1979-1994-2011 et tests d’interaction ;

* : p<0.1, ** : p<0.05, *** : p<0.01.

Ces deux tendances se retrouvent sur les différentes activités, parfois de manière conjointe, parfois non. Premièrement, la logique d’ascenseur décrite ci-dessus marque aussi la sociabilité amicale privée (cf. figure 4.35). Le mouvement vers un accroissement de l’impact d’avoir une haute éducation reste non-significatif – il n’en demeure pas moins que cet axe de différenciation est

Figure 4.35 : Evolution de l’effet du niveau d’instruction sur les visites rendues aux amis

NB : régressions logistiques ; modèle 2 ; AME en 1979-1994-2011 et tests d’interaction ;

* : p<0.1, ** : p<0.05, *** : p<0.01.

Deux formes de participation montrent une tendance beaucoup plus claire vers une démocratisation : elles font toutes deux référence au cercle familial. Comme le montre la figure 4.36, les pratiques d’engagement et de sociabilité dans le cercle familial voient en effet disparaître leurs différenciations liées à l’éducation.

Si on assiste bien à un processus de diffusion au sein des classes sociales des investissements familiaux, il faut toutefois remarquer ici que les inégalités existant jadis indiquaient de moindres chances de participation pour les moins éduqués, mais également les plus éduqués. La participation familiale perd dans ce cadre son importance particulière pour ceux ayant une formation intermédiaire, renvoyant principalement au cursus de l’apprentissage professionnel. Ces résultats interrogent la disparition d’une culture familiale particulière propre à ces groupes, hypothèse qu’il s’agirait cependant d’approfondir et de confirmer à travers des travaux plus poussés.

-0.20 -0.15 -0.10 -0.05 0.00 0.05 0.10 0.15 0.20

1979 1994 2011

AME instruction (réf. intermédiaire)

basse haute

***

**

(*)

79-2011 79-94 94-2011 Wald

basse * ***

haute

tests interaction avec enquête

***

Figure 4.36 : Evolution de l’effet du niveau d’instruction sur l’accès aux activités sociales dans le cercle familial

Visite famille Service famille

NB : régressions logistiques ; modèle 2 ; AME en 1979-1994-2011 et tests d’interaction ;

* : p<0.1, ** : p<0.05, *** : p<0.01.

A l’opposé de cette homogénéisation de la participation familiale, assister à des manifestations politiques et syndicales montre l’émergence significative de logiques inégalitaires. La figure 4.37 indique cependant que si globalement une hausse des inégalités sociales se dégage, la tendance n’est pas très claire.

Entre 1994 et 2011, avoir une éducation basse serait devenu plus excluant alors que l’avantage des fortement éduqués aurait disparu.

Figure 4.37 : Evolution de l’effet du niveau d’instruction sur l’assistance à des manifestations politique/syndicales

NB : régressions logistiques ; modèle 2 ; AME en 1979-1994-2011 et tests d’interaction ;

* : p<0.1, ** : p<0.05, *** : p<0.01.

Figure 4.38 : Evolution de l’effet du niveau d’instruction sur l’accès aux activités d’engagement formel, de loisirs culturels et de participation religieuse

Associationnisme Bénévolat

Spectacle Cours

Eglise

NB : régressions logistiques ; modèle 2 ; AME en 1979-1994-2011 et tests d’interaction ;

* : p<0.1, ** : p<0.05, *** : p<0.01.

Au-delà d’une persistance des inégalités, un certain nombre de pratiques montrent également une tendance allant dans le sens d’un accroissement de la différenciation. Ces évolutions n’apparaissent pas comme statistiquement significatives mais la comparaison des AME entre enquêtes donne des résultats qui méritent d’être relevés (voir figure 4.38). Trois mécanismes se distinguent.

Par rapport aux activités dans l’espace public, l’engagement formel évolue dans le sens d’un plus fort impact positif d’avoir une haute éducation, les inégalités se déplaçant vers le haut. Les loisirs culturels connaîtraient quant à eux une hausse plus généralisée des inégalités avec un gradient qui s’étend des deux côtés. Enfin, la participation religieuse tend quant à elle à devenir favorisée par un bas niveau d’instruction. Cette dernière activité devient alors d’autant plus importante pour nombre de groupes considérés comme plus vulnérables : les femmes, les plus âgés et maintenant les moins éduqués.