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Chapitre 5. Genre et participations sociales

5.1 Inégalités de participation entre hommes et femmes et

5.1.1 La participation sociale des aînés et aînées : rappel et

Sous l’angle des scores de participation, les femmes participent moins que les hommes en 1979. En termes de moyenne, l’écart en faveur de ces derniers est de 0.49. Il s’est amoindri en 1994 passant à 0.26 et, 2011, les différences entre sexe ne sont plus significatives (l’écart est alors tombé à 0.15)133.La figure 5.1 illustre la distribution des résultats sur le score regroupés en catégories (pas, peu, moyennement ou fortement participatif) et confirme cette évolution134. En 1979, les hommes étaient plus nombreux à avoir une participation multiple – ils étaient 18% contre 11% parmi les femmes dans la catégorie la plus active. A l’inverse les femmes sont plus nombreuses à avoir une participation faible : 34%

contre 26% côté masculin. En 2011, alors que l’intensité de participation a globalement augmenté, ces tendances se sont atténuées: 30% d’hommes fortement participatifs contre 26% de femmes, ces dernières n’étant plus surreprésentées parmi les peu participatifs (15% contre 18% côté masculin).

l’impact d’une variable indépendante sur une variable dépendante par l’intermédiaire d’autres facteurs y contribuant (ou comment l’introduction de ces facteurs permet de capter la relation initiale établie entre la variable indépendante et la variable dépendante), il nous semble important dans notre démarche de saisir également les mécanismes inverses, les effets suppresseurs, où l’introduction de facteurs additionnels fait émerger ou renforce la relation entre la variable indépendante initiale et la variable dépendante.

133 Il faut toutefois remarquer que l’écart-type reste toujours plus élevé chez les hommes, soulignant une plus grande variabilité des scores parmi ces derniers, voir annexe C pour les chiffres exacts.

134 Si on considère le score sur 12 variables, la différence de moyenne en faveur des hommes passe de 0.42 en 1994 à 0.25 en 2011, l’écart apparaissant alors comme non-significatif. Pour tous les résultats concernant le score sur 12, voir annexe C.

Figure 5.1 : Intensité de participation sociale sur la base du score sur 10 activités selon le sexe en 1979, 1994 et 2011135

N.B. : en % sur la population des 65-94 ans apte et vivant à domicile en Valais et à Genève ; données pondérées ; aucune=0 activité, faible= 1-2 activités, moyenne= 3-5 activité, forte= 6-10

activités.

Les résultats détaillant les inégalités entre hommes et femmes sur les différentes pratiques viennent illustrer l’ambiguïté des évolutions entre d’une part leur disparition en termes de score et, d’autre part, leur maintien, voire leur transformation. La figure 5.2 illustre les tendances dans les trois vagues d’enquête.

135 Pour le détail des chiffres et des tests chi2 sur les différences entre sexes, voir l’annexe C.

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

femmes hommes femmes hommes femmes hommes

1979 1994 2011

forte moyenne faible aucune

Figure 5.2 : Pratiques de participation sociale selon le sexe en 1979, 1994 et 2011 [en %]

197919942011

N.B. : en % sur la population des 65-94 ans apte et vivant à domicile en Valais et à Genève ; données pondérées.

En 1979, les hommes étaient notamment plus investis que les femmes dans les loisirs communautaires (+ 31% concernant le fait de fréquenter des établissements publics type au café, + 8% quant à la participation à des fêtes de village/quartier) et les activités de manifestations politique ou syndicale (+

20%). A l’inverse, les femmes étaient plus nombreuses à participer au cercle religieux (+ 14%). Ces différentes tendances subsistent en 2011 mais elles ont toutes connu un recul plus ou moins important : les indices de dissimilarité concernant la participation masculine sont alors de + 9% sur les cafés, + 8% sur les fêtes de village/quartier, + 12% sur les manifestations politiques/syndicales et de - 6% concernant la participation religieuse.

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90%

Ce mouvement partiel d’homogénéisation des pratiques se retrouve aussi sur la question de rendre service à des amis ou connaissances. La comparaison se limite ici à 15 ans mais montre une disparition de l’écart significatif en faveur des hommes quant à cet engagement de proximité, ce dernier passant de + 10% en 1994 à + 4% en 2011.

Cependant, ces constats d’une baisse des inégalités entre hommes et femmes ne sont pas les seules tendances observables. En effet, de nouveaux espaces de différenciation émergent entre 1979 et 2011. D’une part, un écart croissant en faveur des hommes marque l’augmentation générale de l’engagement bénévole puisqu’en 2011 l’indice de dissimilarité est de + 11%. D’autre part, les femmes connaissent quant à elles une hausse plus marquée de leur pratique de sociabilité amicale privée (+ 14% en 2011) et les loisirs culturels de types spectacles (+ 6 %). Un léger écart apparaît également en faveur de ces dernières concernant la sociabilité familiale (+ 5%)136.

On peut encore dire quelques mots quant aux résultats portant sur la participation associative et l’engagement familial dont nous n’avons pas parlé.

Concernant la première, les résultats n’indiquent pas une tendance claire en termes de différences entre les sexes – la progression serait d’abord plus forte chez les hommes, puis chez les femmes. On peut retenir que les écarts entre hommes et femmes restent faibles (et non significatifs) en 1979 et en 2011137. Si l’on décompose les deux dimensions de cet indicateur, il faut toutefois relever que le fait d’occuper des responsabilités au sein d’une association reste un domaine masculin, contrairement au fait d’assister aux réunions qui ne se différencient guère selon le genre. Des écarts entre hommes et femmes sont aussi observables quant au type d’association dont sont membres les aînés et reflètent alors les tendances relevées sur les différentes pratiques de participation138. Dans la même idée concernant l’engagement de proximité auprès de parents, il faut rappeler que la conclusion quelque peu surprenante à propos d’une non-différenciation est nuancée par une distribution des types de services particuliers inégale selon le sexe, renvoyant en partie à la répartition traditionnelle des rôles selon ce principe139.

Pour compléter cette présentation générale des inégalités de genre en matière de participation, comme dans le chapitre 4, nous nous intéressons spécifiquement aux individus peu participatifs (qui n’affichent qu’une ou deux

136 Le test du chi2 montre que cette différence n’est pas significative (voir annexe C).

137 On peut toutefois constater que les hommes ont toujours plus tendance à être membres d’une association : les femmes sont donc, comme membres, globalement plus actives (voir annexe C pour le détail des chiffres).

138 Parmi les différents types d’association, si la dominance masculine dans les groupes sportifs disparaît, elle se maintient au niveau politique/professionnel. L’appartenance aux associations de solidarité est et reste par contre, quant à elle, neutre. Sans surprise, les associations religieuses sont plus fréquentées par les femmes bien que les différences tendent à se réduire. Les tendances à l’intérieur de la participation associative accompagnent donc dans l’ensemble celles entre les types de participation (voir annexes C pour le détail des chiffres).

139 Les femmes sont plus impliquées dans des aides domestiques type ménage et repas ou dans la confection d’habits, les hommes sur des services comme faire des réparations ou aider dans le travail. Les aides relationnelles sont par contre davantage neutres.

pratiques de participation). Pour rappel, nous trouvons ici des activités « de base », qui ont la caractéristique d’être largement partagées au sein de la population âgée mais aussi d’avoir une importance particulière pour les retraités peu actifs en leur évitant le retrait social. Les résultats, illustrés par les figures 5.3140, relèvent des écarts entre les sexes par rapport à l’importance de différentes pratiques. En 1979, les hommes peu participatifs ont, sans surprise, plus tendance à se rendre au café que les femmes (+ 33%) alors que les femmes fréquentent plus les offices religieux (+ 27%). Si ces tendances se maintiennent dans une certaine mesure jusqu’à nos jours, elles évoluent aussi en parallèle à des transformations plus générales. En particulier, les pratiques de sociabilité privée envers ses amis prennent davantage d’importance pour les femmes peu participatives, et un écart croissant avec les hommes apparaît (+ 18% contre + 5% en 1979). A l’inverse les écarts en termes de participation religieuse baissent avec le recul général de cette activité (plus que + 5% en 2011). Enfin, la fréquentation des cafés connaît également un certain recul des différences genrées parmi les peu participatifs – à l’image de l’évolution générale – mais les écarts restent importants (+ 21%).

140 Nous présentons ici les résultats portant sur le score sur 10 variables. Les résultats sur le score sur 12 correspondent globalement, pour les détails voir annexe C.

Figure 5.3 : Pratiques de participation sociale parmi les peu participatifs selon le sexe et l’enquête

197919942011

NB : en % sur la population des individus peu participatifs, c’est-à-dire ayant un score de 1 ou 2 pratiques ; données pondérées.

Globalement, si une baisse des inégalités de genre au cours des 32 dernières années est confirmée, les différentiels en faveur des hommes concernant les loisirs de sociabilité communautaire et d’engagement public persistent malgré tout. Dans ce cadre, il faut aussi relever que fréquenter des établissements publics constitue toujours une pratique particulièrement importante pour les hommes peu participatifs. A l’inverse, les plus fortes chances des femmes d’avoir une participation religieuse sont également confirmées et persistantes.

Ces différences sont toutefois également en recul, notamment entre 1979 et 1994. Ce type de participation perd également son statut de participation de base privilégiée des femmes peu participatives. En outre, en parallèle aux tendances soulignant une certaine homogénéisation des pratiques féminines et masculines – tendance qui se retrouve sur les variables scores – il ne faut pas

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80%

ben.

asso.

manif. pol./synd.

cours spectacle fêtes vill./quar.

cafe église visite ami visite fam.

hommes femmes

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ben.

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manif. pol./synd.

cours spectacle fêtes vill./quar.

cafe église visite ami visite fam.

hommes femmes

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80%

ben.

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manif. pol./synd.

cours spectacle fêtes vill./quar.

cafe église visite ami visite fam.

hommes femmes

négliger l’apparition de nouvelles lignes de démarcation : en faveur des hommes concernant les activités de bénévolat et en faveur des femmes en matière de sociabilité amicale. La sociabilité amicale tend également à devenir une pratique particulièrement importante pour les femmes peu participatives. Au final, une certaine dominance masculine en termes d’engagement public est par là confirmée alors que la tendance croissante à une participation sociale plus informelle des femmes apparaît en parallèle (sociabilité privée notamment mais également loisirs culturels). En termes de genre, la distinction privé/ public qui renvoie au partage traditionnel des tâches entre hommes et femmes - que nous adaptons ici au contexte de la retraite à travers une définition multiple - est ainsi toujours présente, même si ses contours ont évolué.

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Nous retrouvons à travers cette analyse descriptive des taux de participation des aînés et aînées les tendances explicitées par les résultats des différentes analyses de régression menées dans chapitre 4. Les figures 5.4 et 5.5 reprennent ces résultats concernant l’effet d’être un homme par rapport à une femme, résultats exprimés ici en effets marginaux moyens. Plus particulièrement, sont reproduits ici les résultats obtenus dans nos trois modèles, c’est-à-dire un premier intégrant le sexe et les deux autres variables démographiques-exogènes que sont la région d’habitation et l’appartenance à une classe d’âge, un deuxième y ajoutant le niveau d’instruction comme mesure d’inégalités sociales et enfin un troisième intégrant un ensemble de variables faisant référence à des ressources disponibles au moment de l’enquête. Des différences apparaissent entre les trois modèles, indices d’effet médiateur de l’impact du genre par les autres variables du modèle.

Figure 5.4 : Effet de la variable sexe sur les scores des participation dans les trois modèles de régression en 1979, 1994 et 2011

1979 1994 2011

Figure 5.5 : Effet de la variable sexe sur les différentes pratiques dans les trois modèles de régression en 1979, 1994 et 2011

197919942011

Dans le chapitre précédent, nous avions déjà esquissé certains mécanismes derrière les inégalités entre hommes et femmes en 2011. Plus particulièrement nous avions mentionné que la prise en compte des inégalités éducatives tendait à confirmer l’effet positif d’être une femme sur la pratique de loisirs culturels alors que l’effet positif d’être un homme sur l’engagement public avait tendance à diminuer quand ce facteur est pris en compte. La prochaine section vise à reprendre plus en profondeur ces questions. Il s’agira de quantifier et tester les possibles effets médiateurs attribuables à chaque variable introduite dans les modèles et, par là, la part de l’effet de genre qui peut être expliqué plus directement par d’autres facteurs. Cela impliquera de décomposer le modèle 3 qui englobe plusieurs variables.

5.1.2 Genre, inégalités et différences dans le système de ressources et