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Ces dernières deux décennies ont vu un changement dans le focus de la politique de développement économique ainsi que dans les programmes de recherche qui se sont orientés plus vers l’entrepreneurship. Cet intérêt croissant pour le rôle de l’entrepreneur dans l’économie a conduit à un nombre croissant d’articles académiques s’intéressant aux facteurs qui promeuvent l’entrepreneurship. Ces recherches ont eu un impact sur les mesures publiques voulant inciter « l’esprit entrepreneurial » qui in fine devaient augmenter la croissance économique. Malgré la disparition de l’entrepreneur de la théorie économique standard, les travaux empiriques vont se focaliser sur l’entrepreneur et son rôle dans la création d’entreprise et la pénétration sur les marchés industriels (Hamilton et Harper, 1994).

L’analyse évolutionniste, qui considère l’entrepreneur comme figure centrale du processus d’innovation dans les économies modernes s’inspirant directement des analyses de J. Schumpeter (1932,1942), expliquera le lien entre l’innovation et la croissance économique « à travers le rôle de la connaissance » (Bareiro et Ravix, 2008). Comme le remarque David J. Storey (1982), les PME ont toujours existé dans tous les pays partout dans le monde comme l’unité de production typique. Elles constituent la majeure partie de la population d’entreprises et contribuent pour une grande partie à l’emploi des populations.

Etant donné le rôle central de l’entrepreneur dans ces petites structures qui diffère de celui du manager dans les grandes entreprises, le succès ou le déclin de la PME dépend souvent des aspirations et des motivations de ce dernier (Penrose, 1959). Pour pouvoir analyser pourquoi certaines entreprises sont plus performantes et croissent plus vite que d’autres et comment mettre en place une politique de soutien adaptée, il convient de s’intéresser à celui qui en est la figure centrale : l’entrepreneur. Le mot « entrepreneur » a été introduit au 16e siècle et provient

du verbe « entreprendre » français qui en sa forme de substantif « entrepreneur » référait à quelqu’un qui réalise un projet de création d’entreprise.

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Souvent, on cite à tort Josef Schumpeter (1934) comme celui qui a été le premier à identifier l’entrepreneur en tant qu’entité digne d’étude, distincte d’un propriétaire d’entreprise ou d’un manager. Longtemps « […] le rôle de l’entrepreneur n’a pas suscité beaucoup d’intérêt parmi les économistes pendant pratiquement un demi-siècle jusqu’à l’important travail fourni par Kirzner (1973). Le point de vue de Baumol, que l’entrepreneur a été éliminé en raison de la nature du sujet qui est l’étude des marchés, a été accepté par tous sauf par quelques dissidents parmi les chercheurs » (Storey, 1982 ; p. 60).

Bien que l’entrepreneur se situe au cœur de l’activité économique capitaliste, la grande majorité des économistes, à des rares exceptions près, ont préféré se focaliser sur des analyses microéconomiques (Walras, et les Marginalistes) ou macroéconomiques (Quesnay, Smith, Ricardo etc.) (Boutiller, 2015). L’auteure rappelle que bien que l’entrepreneur se situe à l’intersection de ces deux logiques, c’est lui qui a été généralement mobilisé pour expliquer « la boîte noire » de la dynamique des affaires et de l’innovation. En conséquence, la définition apportée à l’entrepreneur n’a pas le même sens selon les différents économistes et leurs approches respectives.

Cantillion et l’optimisation des investissements

La première fois que le terme a été introduit par un économiste ce fut par Cantillon (1755) dans son ouvrage Essai sur la nature du commerce en général. Selon ce dernier (chapitre XIII, p.67)

« Les entrepreneurs sont les marchands, en gros, de laine, de grains, les boulangers, les bouchers, manufacturiers, et tous les marchands de toute espèce qui achètent les denrées et matériaux de la campagne, pour les travailler et revendre à mesure que les habitants ont besoin de les consommer ».

L’entrepreneur selon Cantillon ne connaît ni les besoins de la population en avance, ni pendant combien de temps son produit sera acheté par le consommateur, car les concurrents tâcheront de lui prendre ces parts de marchés. « Tout cela cause tant d’incertitude parmi tous ces entrepreneurs, qu’on voit, qui font journellement banqueroute » (ibid.). Les entrepreneurs sont vus comme des indépendants à revenu incertain, ils investissent un montant d’argent déterminé dans la production ou l’achat de marchandise sans avoir une idée exacte de combien cet investissement va rapporter. Cependant, ils espèrent que leur bénéfice va être supérieur à leur investissement en se basant sur leur connaissance de la demande pour le produit. Ainsi l’entrepreneur selon Cantillon peut être vu comme une personne qui est prête à prendre des risques et qui doit gérer l’incertitude.

49 L’entrepreneur de J.B. SAY et J.S. MILL

L'entrepreneur, selon J. S. Mill, va se voir assigner un rôle dans la détermination des profits et dans l'explication des divergences entre les firmes. « Ainsi, les différences constatées dans les gains de gestion selon les activités s'expliqueraient par le niveau d'éducation scientifique ou technique exigé de l'entrepreneur » (Mill, 1848 ; p. 409). J.B. Say présente l’entrepreneur dans le cadre de la théorie de la production sous la forme d’un gestionnaire avisé qui combine aux mieux les éléments nécessaires à la réalisation du processus de production (Steiner, 1997). Il ne lui attribue pas un rôle de preneur de risque comme Cantillon mais il le considère comme un manager de la firme. Il décrit les activités de l’entrepreneur et l’associe au changement et à l’innovation. Il distingue l’entrepreneur du capitaliste en prenant en compte les profits de l’un et de l’autre.

Say et Mill ont par la suite popularisé l’utilisation académique du terme. Les deux auteurs ainsi que Cantillon soulignent que l’entrepreneur doit gérer l’incertitude du futur. L’incertitude concerne la probabilité de gains futurs des nouvelles combinaisons de ressources. En d’autres termes, l’entrepreneur n’a pas de certitude sur le fait que les nouveaux produits et services seront acceptés par les clients et doit de ce fait assumer le risque de leur mise sur le marché.

Weber et l’esprit capitaliste

Weber (1905) va dévoiler sa thèse sur la nature et l’origine du capitalisme moderne dans son œuvre l’Éthique protestante et l’Esprit du capitalisme. Le capitalisme moderne ou capitalisme de l’entreprise est fondé sur l’utilisation rationnelle du salariat. Pour Weber, l’expansion du capitalisme moderne n’est pas l’origine du capital mais le développement de l’esprit du capitalisme. A cet égard il souligne qu’il est nécessaire de distinguer l’entrepreneur capitaliste « moderne » de l’entrepreneur « traditionnel ». Ce dernier dirigeait son entreprise dans un esprit traditionnel, tant dans la façon de mener l’entreprise, l’activité exercée qui était purement commerciale, que dans les rapports avec les ouvriers comme dans la recherche de nouveaux clients et de commercialiser les marchandises étaient menées de façon traditionnelle habituelle à l’époque. Et soudain on assiste à l’apparition d’un entrepreneur nouveau qui agit selon l’esprit du capitalisme.

Le cas typique que propose Weber est celui où :

« un jeune homme d’une famille d’entrepreneurs s’était rendu à la campagne ; il y sélectionne avec soin les tisserands qu’il voulait employer ; il aggrave la dépendance et augmente la rigueur du contrôle de leurs produits, les transformant ainsi de paysans

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en ouvriers. D’autre part, il change les méthodes de vente [...]. En même temps il agit selon le principe : réduire les prix, augmenter le chiffre d’affaires. » (1905, 71)

Les conséquences de ce nouvel esprit sont de rompre avec l’ancien mode de vie économique traditionnel et de lancer la dynamique de l’accumulation du capital réinvesti. Les entrepreneurs capitalistes modernes sont alors bien des innovateurs car ils vont briser la routine, leur manière d’entreprendre rompt avec la tradition.

Schumpeter et l’entrepreneur innovateur

Avec la domination de la pensée néoclassique, l’entrepreneur va disparaître de la littérature, qui ne laisse aucune place à l’initiative ou à l’innovation à l’exception chez des auteurs tels que Schumpeter, Knight ou Hayek. « Le premier économiste à mettre l’accent sur le rôle de l’entrepreneurship dans le développement économique fut Joseph A. Schumpeter. L’entrepreneur selon Schumpeter (1934) est un individu qui a une fonction d’innovateur ou de créateur :

« Nous appelons ‘entreprise’, la réalisation de nouvelles combinaisons [économiques] ; les individus qui ont la fonction de réaliser ces nouvelles combinaisons, nous les appelons ‘entrepreneurs’ […] »

Il souligne que la création de l’innovation dans tous les domaines économiques et managériaux est la caractéristique essentielle de l’effort entrepreneurial qui a une fonction essentielle dans le développement économique. L’entrepreneur au sens de Schumpeter (1934) est l’acteur primordial du changement économique qui réalise toutes ces innovations. Il affirme par la suite que la fonction entrepreneuriale n’est pas seulement fournie par les propriétaires d’entreprise mais peut aussi exister parmi les employés d’une entreprise. L’entrepreneur schumpetérien est celui qui va favoriser l’émergence et le développement de nouvelles possibilités qui sont inconnues dans l’environnement économique ce qui le situe au cœur du processus d’innovation. On peut alors déduire de ces réflexions que la personne qui crée une entreprise qui ne mène pas à des innovations n’est pas à considérer comme un entrepreneur. Ainsi ils coexisteraient différents types de dirigeants : l’entrepreneur ou l’inventeur de nouvelles combinaisons technologiques, managerielles, organisationnelles etc. et le propriétaire-dirigeant d’une entreprise qui exploite son entreprise pour la faire prospérer.

Si on prolonge la théorie de Schumpeter qui affirme que l’entrepreneur est un inventeur de nouvelles combinaisons dans de différents domaines, on peut transposer cette logique sur les différentes catégories de PME. Ce qui permet une distinction entre PME entrepreneuriales qui sont innovatrices « radicales » (invention de rupture) au niveau managérial, organisationnel ou

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créatrice de nouveaux produits ou de services, et les autres PME traditionnelles qui ont pour projet le développement et la pérennité de l’entreprise sans pour autant vouloir se lancer dans des innovations radialement nouvelles mais plutôt incrémentales (amélioration d’un bien ou service sans invention d’un nouveau produit).

Marshall, l’entrepreneur manager

« Toutefois cette approche de la fonction de l’entrepreneur qui s’inspire directement des analyses de Schumpeter (1934, 1942) vient le plus souvent masquer une autre, celle de Marshall, qui, en s’appuyant sur une conception différente de la connaissance, permet au contraire d’établir que le principe de connexion entre innovation et développement économique passe par l’entrepreneur dans l’organisation de l’industrie (Bareiro et Ravix, 2006, p.1) ». La vision de Marshall sur les concentrations d’industries dans des localisations particulières a inspiré largement toute une littérature sur les spécificités d’un phénomène industriel localisé dans certaines régions italiennes : l’émergence de petites firmes manufacturières qui étaient plus performantes que les grandes entreprises tant en création d’emploi qu’à l’exportation. L’entrepreneur selon Marshall (Marshall, 1920, livre IV, chapitre XII, 18 et 19) est le

« producteur qui produit, non pour satisfaire une demande spéciale mais pour fournir la demande générale du marché, doit, dans son rôle premier qui est être marchand et organisateur de la production, avoir une connaissance approfondie des affaires de son commerce. Il doit prévoir les grands changements dans la production et la consommation, il doit pouvoir prévoir les opportunités de fournir de nouveaux produits qui correspondent à un réel besoin ou à une amélioration du processus de production d’un ancien produit. Il doit être capable de juger avec prudence et prendre des risques avec audace […] Dans son rôle d’employeur, il doit être un dirigeant naturel de personnes ».

Marshall prête ainsi à l’entrepreneur deux fonctions, celle d’un entrepreneur et celle d’un manager. D’un côté il doit avoir certaines qualités qui sont une connaissance parfaite des affaires, il doit être visionnaire et pouvoir anticiper la future demande pour lui fournir de nouveaux produits qui répondent au besoin de la demande et améliorer les produits existants, il doit savoir prendre des décisions murement réfléchies et ne pas hésiter de prendre des risques dans les affaires. Deuxièmement, il doit être un manager qui doit gérer ses ressources humaines ce qui lui octroie une fonction de contrôle et maintien de l’ordre et de l’unité de l’entreprise. « Dans le monde industriel moderne décrit par Marshall, une catégorie spécialisée ‘d’homme d’affaires’ joue différents rôles dans le management d’entreprise, allant de la prise de risque,

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par l’ingénierie et la supervision, agissant comme des managers hautement qualifiés et des intermédiaires entre travailleurs et consommateurs (Ravix J.L., 2014, p. 75 - 76).

Ainsi l’entrepreneur de Marshall peut être à la fois un entrepreneur schumpétérien, mettant en place des innovations radicales qui demandent une prise de risque importante puisque l’adoption de l’innovation par la demande n’est pas garantie mais aussi être un entrepreneur « classique » améliorant l’existant avec des innovation incrémentales.

Penrose et l’entrepreneur coordinateur ambitieux

Selon l’analyse d’Edith Penrose (1959) la firme et l’entrepreneur sont intimement liés : « La firme , telle que nous l’avons défini, est à la fois une organisation administrative et un ensemble de ressources productives; son objectif global est d’organiser l’utilisation de ces propres ressources ensemble avec d’autres ressources acquises à l’extérieur de la firme pour la production et la vente de biens et services pour en tirer profit, les ressources physiques produisent des services essentiellement pour l’exécution de l’organisation prévu par son personnel , dont les activités sont liées entre elles par le cadre administratif dans lequel elles ont exercées. La structure administrative de la firme est créée par les personnes qui la dirigent ; […] Les activités productives de cette firme sont régies par ce que nous appelons ces ‘opportunités productives’, qui comprennent toutes les possibilités productives que ses ’entrepreneurs’ voient et dont ils peuvent en tirer profit (Penrose, 1959, p. 31) ».

Elle démontre de ce fait que la firme présente une double dimension : elle est une institution qui a des activités productives diverses et en même temps elle possède « une dimension comportementale qui relève de l’entrepreneur » (Bareiro et Ravix, 2006). L’entrepreneur est celui qui visualise les opportunités productives futures pour les convertir en opportunités profitables mais c’est également lui qui va créer la structure organisationnelle, le design de l’entreprise. L’entrepreneur selon E. Penrose est un individu ou un groupe d’individus qui fournissent des services entrepreneuriaux31. Schumpeter met en avant le rôle majeur des innovations sous l’action de l’entrepreneur (la création de nouvelles opportunités sous la ‘destruction – créative’ en recherchant de nouveaux débouchés, nouveaux produits, de nouvelles méthodes de production, de nouveaux matériaux de production).

31 Elle entend par ce terme l’introduction ou l’acceptation de nouvelles idées, en particulier en ce concerne des nouveaux produits, de nouvelles technologies, l’embauche de nouveaux personnels manageriels, mais aussi de changements fondamentaux dans l’organisation administrative de la firme, de la manière de trouver du capital, de nouvelles stratégies d’expansion ainsi que le choix des méthodes d’expansion.

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Edith Penrose va ajouter à cette liste une dimension organisationnelle c’est–à-dire l’innovation dans la gestion de l’entreprise. Notamment, dans l’embauche de nouveau personnel, de nouvelles façons de trouver du capital, de changement structurel de l’organisation de l’entreprise.

« […] j’ai supposé que les entrepreneurs qui dirigent des firmes performantes sont ambitieux et entreprenant, et qu’ils vont essayer de faire autant de profit qu’il soit possible - ils ne vont pas choisir les cours d’action les moins profitables en tenant compte de l’incertitude et un choix donné d’actions » (ibid., p.184).

L’entrepreneur a un rôle central à jouer et selon son tempérament ambitieux ou entreprenant, la firme va être plus ou moins performante. Le manque d’ambition serait de la même manière dommageable à la croissance de l’entreprise que l’incompétence entrepreneuriale de percevoir des opportunités de marché. Elle remarque également que « l’horizon d’une firme est souvent extrêmement limité, ceci étant encore plus vrai s’il s’agit de PME.

L’entrepreneur qui est peu entreprenant va se contenter d’être performant dans son domaine d’activité sans considérer les possibilités qui sont à sa portée s’il avait regardé un peu plus loin » (ibid., p.36). Souvent, le manque de croissance a été attribué à une demande insuffisante au lieu de l’imputer à un manquement de compétences entrepreneuriales. De ce fait, l’entrepreneur selon E. Penrose il doit être ambitieux, repérer et profiter des opportunités du marchés, être innovateur dans le sens de Schumpeter mais également au niveau de l’organisation de la firme et dans la façon de trouver du capital.

Kirzner

Kirzner (1976) va définir l’entrepreneur comme un individu qui a une posture de vigilance par rapport aux opportunités de profits qui résultent d’un déséquilibre des prix. Cette « vigilance entrepreneuriale » est une capacité propre à l’entrepreneur qui lui permet d’acquérir l’information de façon spontanée. L’entrepreneur identifie ses profits parce qu’ils existent et qu’il en a conscience de ce fait. L’entrepreneur de Kirzner ne crée rien, contrairement à l’entrepreneur schumpétérien présenté comme un individu hors du commun qui par son action fait évoluer l’économie ponctuellement, au contraire c’est un individu ordinaire qui possède par rapport à d’autres, la faculté de mieux déceler les opportunités de profit du marché.

L’entrepreneur vue par la théorie économique

William Baumol (1968) est persuadé que la théorie économique ne réussit pas à apporter une analyse précise du comportement de l’entrepreneur. La raison est à chercher dans le fait que

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l’entrepreneur est incompatible avec des conditions du modèle d’équilibre néoclassique. Pour l’auteur l’entrepreneur est innovateur et une source potentielle de déséquilibre. La créativité de l’entrepreneur et son esprit entrepreneurial vont déterminer la combinaison des facteurs de production rentable et productive. La croissance économique est donc le résultat d’un environnement institutionnel encourageant l’esprit entrepreneurial combiné à la créativité humaine. En conséquence pour soutenir cet entrepreneur créatif, la création d’un environnement institutionnel adapté et favorable à la création produira de la richesse sociale.

Edith Penrose (1959) signale la même problématique autour du phénomène entrepreneur en relevant que l’analyse économique n’a pas les outils pour analyser les déterminants non- économiques de l’esprit entrepreneurial et du comportement de l’entrepreneur (l’influence des habitudes et traditions sur la perception du monde de l’entrepreneur, l’influence de facteurs environnementaux sur sa prise de décision, pourquoi ils n’auront aucun scrupule à être agressifs à la recherche de profit etc.). Par conséquent, il serait inutile d’essayer de réduire tout comportement à des fonctions d’utilité mathématiques et admettre que « la recherche sur les déterminants non économiques des entrepreneurs doit être étudiée par d’autres domaines de recherche comme la sociologie ou la psychologie ».

Mark Casson (1991) est l’un des premiers auteurs à avoir proposé une théorie de l’entrepreneur. Il regrette que les sciences économiques aient abandonné ce champ d’investigation aux sociologues, psychologues ou aux sciences politiques. Dans son ouvrage L’entrepreneur il propose une théorie de l’entrepreneur considéré comme un coordinateur de ressources rares. Son travail de coordination va lui procurer son gain. C’est un spécialiste qui a des capacités de négociation, d’organisation, de gestion, de vente et d’innovation (Boutillier, 2015). L’apport de Casson consiste également dans son interrogation sur les raisons qui conduisent les individus à devenir entrepreneur : on devient entrepreneur car on est au chômage, parce qu’on refuse l’autorité d’un supérieur, parce que cela procure un revenu supplémentaire à une activité salariale, parce que c’est un passe-temps ou parce qu’on est à la recherche d’une autonomie nécessaire pour exploiter ses talents. Filion (1997) indique que si on voulait faire une synthèse des principaux courants de la pensée économique concernant l’entrepreneurship, la proposition de Baumol (1993) qui distingue deux catégories d’entrepreneurs : l’entrepreneur-organisateur d’entreprises et l’entrepreneur-innovateur serait pertinent. Le premier représente l’entrepreneur classique au sens de Say (1803), Knight (1921) et Kirzner (1973), alors que le second symbolise celui qui est décrit par Schumpeter (1934). En résumant, l’analyse économique de l’entrepreneur voit l’entrepreneur comme un détecteur d’opportunités, un preneur de risque, ou

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un innovateur qui a un rôle dans le développement de l’économie. En revanche, elle n’intègre aucunement le comportement et les éléments qui influencent son comportement dans l’analyse. D’autres disciplines se sont par contre essayées à ce travail.

L’école psychologique

Parmi les auteurs qui ont essayé d’identifier des traits psychologiques qui permettent de