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Les critères de distinction quantitatifs : Taille, chiffre d’affaires,

1.3.2. Le monde de la PME, entre une extrême complexité et des caractéristiques communes qui forment sa spécificité

1.3.2.1. Les critères de distinction quantitatifs : Taille, chiffre d’affaires,

Comme cela a été déjà indiqué, le critère retenu pour sa commodité d’emploi est le nombre de salariés employés ou le chiffre d’affaires. La distinction quantitative a l’avantage d’être simple à appliquer et sans équivoque, mais elle est insuffisante quant à l’analyse du fonctionnement des PME tant pour l’organisation de la production interne. Notamment, si on est emmené à mettre en place des mesures de soutien ciblées adaptées à la situation des PME. L’hétérogénéité de cette catégorie d’entreprises, définie par un chiffre d’affaires maximal et un nombre de salariés maximal n’informe en rien sur son organisation, leurs besoins et difficultés de développement ni comment elle organise ces activités de production.

En premier lieu il convient de différencier les PME indépendantes (ou autonomes) des PME dépendantes (ou liées). Les PME indépendantes ne sont pas liées à une autre entreprise qui détient plus que 50 % de son capital et elles détiennent de ce fait, l’autonomie de décision. Cette distinction s’avère d’autant plus importante que ces entreprises ont plus de difficultés de croissance que les PME dépendantes (Harhoff et al., 1998). Ceci en raison du fait qu’elles ne peuvent bénéficier d’un soutien en termes de financements ou de transfert de connaissances d’une maison mère ou du réseau des filiales puisqu’elles n’ont pas de lien de ce type (Kremp et Sevestre, 2000). De plus, les PME indépendantes ont plus de difficultés d’obtenir des crédits du fait qu’elles présentent un plus grand risque pour les établissements de crédit du fait d’un manque de garanties. En raison de leurs ressources limitées, elles ont des possibilités réduites de financement de leurs investissements et d’accès aux informations etc.

L’analyse à travers les critères quantitatifs et juridiques se trouve insatisfaisante quant aux explications données qui justifient les découpages opérés. Pourquoi devrait-on considérer une PME en tant que telle jusqu’à 250 salariés et au-delà de ce seuil elle passerait dans le champ d’une grande entreprise ? Selon le critère quantitatif en Europe et en France, les entreprises

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dépassant ce seuil ne sont plus considérées comme PME et ne peuvent de ce fait ne plus bénéficier des aides spécifiques qui leur sont destinées. De plus, les entreprises de 500 salariés et plus peuvent présenter plus de similitudes avec les entreprises considérés PME selon les critères statistiques et avoir les mêmes comportements d’un point de vu de l’organisation de leurs activités ou de l’organisation interne.

Alors que d’autres entreprises de petite taille peuvent avoir un mode différent de gestion de leurs activités ressemblant plutôt à celui d’une GE, notamment quand elles ont des activités d’exportations (Torrès, 2004). Dans ce contexte, de disposer d’un contour précis des PME qui ne se focalise pas uniquement sur le fait d’une distinction à partir d’un critère de taille exprimé en nombre de salariés ou d’un seuil de chiffre d’affaires ne permettent que sommairement de caractériser ce type d’entreprises.

On assiste à une multiplication importante des textes sur les PME et une augmentation d’attrait dans l’analyse de leur importance économique à partir des travaux de David Birch (1979) qui revendiqua que la majorité des créations d’emplois aux Etats-Unis seraient du fait des PME et non des grandes entreprises. Il va être à l’origine du terme « gazelles » qui sont des entreprises qui montrent une croissance rapide et qui seront celles qui vont être à l’origine de la plus grande part des créations d’emploi parmi les PME. La nécessité d’apporter une typologie à ce type d’organisation pour mieux cerner le phénomène s’est fait sentir et on assistera à des essais de catégorisation utilisant des variables qualitatives ou quantitatives et qualitatives.

A cet effet, Jean Paul Betbèze et Christian St.Etienne (2006) dans leur rapport réclamant une stratégie PME pour la France vont utiliser une distinction des entreprises qui est empruntée au monde animal. Elle combine une catégorisation quantitative avec une distinction qualitative restreinte selon leur mode de croissance, leur comportement à l’export et leur rôle sur le marché. On peut ainsi départager ces firmes en trois catégories auxquelles nous nous permettons d’ajouter une quatrième, celle des gorilles :

▪ Les souris : Ce sont des très petites entreprises (0 à 20 employés) qui jouent un rôle économique important dans la fourniture de produit et services de proximité. En général elles ne croissent pas de manière significative due à leur activité.

▪ Les gazelles : Ce sont des firmes qui comptent entre 20 et 250 employés, elles se caractérisent par une croissance rapide tant au niveau du chiffre d’affaires et/ou du nombre d’employés.

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▪ Les gorilles : Ce sont les entreprises de 250 à 500 employés qui croissent moins vite que les gazelles mais ont des moyens financiers plus importants et sont plus solides pour se lancer sur des marchés internationaux.

▪ Les éléphants : Ce sont les grandes entreprises (plus de 500 employés) qui sous l’effet des externalisations et des rationalisations suppriment des emplois sur le long terme. Dans la compétitivité mondiale elles sont un rôle de donneur d’ordre et sont souvent des entreprises pivots dans les réseaux qui produisent l’essentiel des innovations.

Cette catégorisation a le mérite d’utiliser des critères quantitatifs en y ajoutant certaines caractéristiques qualitatives malgré un certain manque de finesse dans la caractérisation. Néanmoins, elle renseigne sur leur mode de croissance et quelques informations supplémentaires sur leur comportement à l’export et l’innovation. Les informations obtenues ne permettent toutefois pas de dresser un portrait des PME qui permettrait de pénétrer plus loin dans leur mode organisationnel et leur comportement en général.

En dehors des distinctions de taille et du chiffre d’affaires ou de dépendance, il existerait également des différences sectorielles (Storey, 1994). Selon que les PME évoluent dans un secteur spécifique comme par exemple celui de l’industrie pharmaceutique, elles peuvent avoir des niveaux de capitalisation, de vente et des possibilités de croissance plus importantes qu’une PME qui fait partie du secteur alimentaire ou de la réparation de voiture par exemple. De même, elles ne rencontrent pas les mêmes problèmes de développement non plus. Tandis qu’il y a de nombreux travaux qui attestent empiriquement de l’existence des PME, il n’existe pas de théorie générale de la PME dû à l’hétérogénéité de ce type de firme.

Alors qu’à la fin des années 1970 les auteurs qui admettaient enfin la PME en tant qu’entreprise à part (Gervais, 1978 ; Hertz, 1982 ; Marchesnay, 1982) permettant par la suite d’établir un modèle général qui tienne compte des spécificités de cette catégorie d’entreprises (Julien, 1997). La spécificité des PME et les traits structurels caractéristiques qui en découlent sont présentés soit comme des avantages et des forces inhérents à ce type d’entreprises, soit comme des handicaps de développement qui méritent un soutien des autorités publiques afin d’améliorer leurs possibilités de croissance.

Selon Marchesnay (1991), l’identité de la PME repose avant tout sur la personnalité de son dirigeant-propriétaire qui centralise les pouvoirs financiers, économiques et sociaux est définie la stratégie générale de l’entreprise. Les effets de cette centralisation se répercutent en cascade sur le fonctionnement de l’organisation (Besse, 1983). En raison du faible pouvoir économique, les relations structurelles qu’elles entretiennent avec leur environnement sont majoritairement

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placées sous le signe de la dépendance. Notamment, en ce qui concerne la dépendance commerciale à l’égard des grandes entreprises qui se manifeste à travers des relations de sous- traitance. Elles subissent également une dépendance financière à l’égard du banquier mais aussi de la part du fournisseur sur lesquelles les PME s’appuient souvent au-delà des usages traditionnels pour pouvoir financer leur croissance pour répondre à la demande à court terme.

Le concept peut se décliner en cinq critères, qui sont :

▪ La centralisation de la gestion

▪ La stratégie implicite majoritairement de court terme ▪ La faible décomposition des tâches

▪ Des systèmes d’informations internes et externes simples et informels ▪ Un contact direct avec la clientèle

Ces travaux qui vont essayer de démontrer que la PME est spécifique comparativement à la GE vont former le courant de la spécificité. « Malgré l’hétérogénéité du monde des PME, chaque auteur insiste sur les caractéristiques communes. Car ce sont ces invariants qui constituent la base de la spécificité des PME » (Torres, 1998, p.9). Le problème de ce courant était d’établir un « idéal-type », le modèle classique ou traditionnel de la PME qui a pour principal inconvénient qu’il essaie de construire une théorie unitaire de la PME en excluant les PME qui ne se conforment pas au modèle. Ceci en raison de leurs activités innovatrices ou d’exportations qui nécessitent une adaptation organisationnelle et stratégique qui sort du cadre du modèle classique de la PME instauré par le courant de la spécificité.

Les travaux en sciences de gestion qui ont essayé de tracer un portrait général de la PME classique ont fait apparaître quelques traits communs qui peuvent être appliqué à une grande partie des PME traditionnelles ou classiques servant à relever certaines similitudes dans leur modèle de gestion sans qu’elles puissent servir de modèle généralisé car, comme nous l’avons indiqué plus en aval, certaines PME ne se trouvent que partiellement sous cette typologie. Le tableau 3 résume quelques faits stylisés qui semblent récurrents chez les PME.

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Tableau 3: Quelques faits stylisés des PME

Domaine Caractéristiques des PME

Direction et propriété

C’est le dirigeant de la PME-TPE qui est à l’origine de la création de l’entreprise qui, pour la plupart du temps, lui appartient.

En qualité de propriétaire de l’entreprise, il a le plein pouvoir décisionnaire et va définir la stratégie et l’organisation des activités.

Les PME sont souvent détenues en famille et font objet de transmissions dans la famille.

Taille

Ce sont des entreprises de petite taille. La définition européenne de la PME retient un seuil maximal de moins de 250 salariés

Stratégie

Le dirigeant des petites entreprises raisonne souvent à court terme en privilégiant des solutions qui s’avèrent rapidement performantes au détriment de solutions stratégiques qui démontrent leur efficacité dans le temps (Torres, 2003 ; Gueguen, 2009).

La concentration du système de décision provoque bien souvent un manque de perspective à moyen et long terme dû à l’absorption du temps du dirigeant par les tâches quotidiennes et répétitives (Besse, 1983). Existence d’un problème général de la formation des dirigeants aux tâches de gestion,

Les Ressources Humaines

Plus les PME sont de taille réduite, plus les salariés sont obligés d’être polyvalents (Torres, 2003 ; Julien, 2008) ce qui conduit à l’idée de l’encastrement des fonctions des unes sur les autres

Réseaux et localisation

La participation à des réseaux efficaces pour répondre aux besoins croissants d’information et de se procurer les informations tacites qui réclament de la proximité et donc un milieu propice au développement de la croissance sont des moyens pour assurer la compétitivité des PME. Pierre Bourdieu (1980) suggère déjà dans ses travaux que la création et le développement des PME dans de nombreuses régions étaient dynamisés par la présence d’un milieu stimulant et facilitant. Les travaux d’Annlee Saxenian (1994) vont conforter ces thèses.

Outils d’organisation

Les PME ont des outils et des concepts propres bien différents de ceux utilisés par les GE dans les domaines du marketing, de la finance et en gestion des ressources humaines (Julien, 2008) en raison de la non appropriation des outils des GE à leur situation particulière.

Notamment, elles se distinguent par une flexibilité due à leur organisation plate

Financement Les PME rencontrent majoritairement des difficultés

de financement

Clients Les PME ont une grande proximité avec leurs clients.

En résumant, les PME présentent certaines caractéristiques spécifiques qui les distinguent des GE et qui vont être déterminantes dans leur démarche stratégique qui constituent leurs facteurs

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clés de succès (FCS) mais peuvent également être à l’origine de leurs difficultés de développement des affaires. En premier lieu, le dirigeant a une place prédominante dans la conduite de la stratégie de l’entreprise. Selon son profil et ses croyances, il va soit prendre des risques ou avoir des réticences face à la prise de risque. En deuxième lieu, il y a l’organisation en elle-même qui se caractérise par des ressources limitées, mais aussi par une grande flexibilité organisationnelle qui est un atout car cela apporte une grande réactivité. En troisième lieu, c’est le secteur d’activité, l’environnement de l’entreprise qui détermineront les choix stratégiques des PME.

Les éléments mis en évidence auparavant, permettent de dresser un portrait de la PME (cf. tableau 3,4) qui présente les caractéristiques communes générales concernant la taille, le mode de direction, les difficultés de financement, le type de management, etc. En ayant conscience que certaines PME ne peuvent présenter qu’une partie des caractéristiques énoncées et se différencier en quelques points de ce portrait tout en faisant partie du contingent des PME.

Etant donné que la plupart des caractéristiques énoncées ci-dessus ont été validées par la plupart des travaux concernant la PME comme objet d’étude nous allons nous en servir comme cadre d’analyse de départ afin de le confronter à un cadre d’analyse élargi en y introduisant le facteur de l’organisation de ces activités. Autrement dit, pour suivre les préconisations de William Gartner (1989) qui explique qu’au lieu de se focaliser à trouver une définition de l’entrepreneur qu’il est impossible à établir, il serait plus utile de « se focaliser sur ce que l’entrepreneur fait au lieu de ce qu’il est », nous poursuivons notre analyse qui se focalisera sur les activités des PME à défaut de pouvoir établir une théorie de la PME globalement applicable à toutes les entreprises rentrant sous cette catégorie quantitative d’entreprises.

A cet effet, au lieu d’essayer d’établir une définition de la PME générale, nous allons orienter notre étude vers les activités des PME et les caractéristiques qualitatives qu’elles partagent. Ceci dans l’optique de souligner premièrement que ce sont des entreprises qui ont des caractéristiques propres, différentes des grandes entreprises et deuxièmement selon qu’elles sont fortement innovatrices et/ou internationales elles peuvent également faire partie de sous- catégories d’entreprises avec des caractéristiques particulières. Le départ de notre analyse se fait à partir du modèle simple qui relève les caractéristiques des PME classiques (voir tableau 4).

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Tableau 4: Les caractéristiques communes des PME

CATEGORIE CARACTERISTIQUE SPECIFIQUES

Taille Firmes de petite et moyenne taille

Direction Dirigée de façon personnalisée par l’entrepreneur et le cas échéant par sa famille Capital Le capital est détenu par le dirigeant ou/et sa famille

Marché Une part de marché relativement restreinte sauf pour les marchés de niche

Juridique Indépendante

Force de négociation Manque de force de négociation avec les clients et fournisseurs

Stratégie Souvent court terme, adaptative intuitive et peu formalisée. Selon le secteur d’activité proactive ou réactive.

Management Contacts directs entre la direction et les employés, management souple et flexible, adaptatif

Personnel Polyvalent

Système d’information interne

Direct, informel dû à la forte proximité des acteurs Système d’information

externe

Simple, basé sur des contacts directs

Contrôle du marché Par des réseaux souvent informels, la coopération interentreprise pour produire des économies d’échelles

Localisation Intégration relativement étroite dans la collectivité locale dont sont issus les dirigeants

Relations donneur d’ordre Dépendance plus ou moins grande vis-à-vis des donneurs d’ordre selon le secteur d’activité

Financement Difficultés d’obtention de crédit

Peu de recours au financement par ouverture du capital Clients Proximité avec des clients

Ce qui est commun à toutes les firmes de moyenne et petite taille est le rôle prépondérant du dirigeant dans la gestion de l’entreprise. Selon son statut, sa formation, sa trajectoire sociale et professionnelle et sa personnalité (aversion ou non au risque) l’avenir de l’entreprise n’est pas le même. La PME est conditionnée par son environnement, la stratégie se définie selon son contexte et ses ressources limitées, son mode d’organisation flexible constitue une force qui lui apporte une forte réactivité face à un environnement changeant. Elle est ainsi mieux armée pour répondre à une demande changeante, spécifique. Elle a des atouts incontestables mais aussi des faiblesses prononcées notamment au niveau du financement ou du réseau de l’information, de la formation des dirigeants qui peuvent faire objet d’un soutien public appuyé.