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VII.  Le modèle d’analyse

1.   Réponse synthèse aux questions de recherche

Rappelons tout d’abord que notre question de recherche se déclinait en cinq sous- questions. Nous posions d’abord la question de savoir quels seraient les effets de la constitutionnalisation du droit de négociation collective sur :

a) la validité des mesures législatives qui restreignent le droit de grève

b) la validité des dispositions des régimes de représentation collective qui excluent certaines catégories d’employés de leur application

c) la validité des mesures législatives qui restreignent la capacité de négocier certaines matières relatives aux conditions de travail

d) l’interprétation des dispositions des régimes de représentation collective en droit privé au Québec

De plus, nous posions la question de savoir si le recours aux normes du droit international du travail aurait un impact sur les effets de la constitutionnalisation du droit de négociation collective à la fois en droit public et en droit privé.

En droit public, quinze (15) décisions ont été répertoriées dans des cas de contestations constitutionnelles. Parmi ces affaires, sept (7) ont donné lieu à une déclaration d’invalidité de certaines dispositions.

En regard du droit de grève, nos résultats tendent à confirmer l’invalidité des mesures qui restreignent le droit de grève, quoique nous ayons répertorié une seule décision et que le jugement rendu par la cour en première instance ait été porté en appel (chapitre IX, section 2). Cette affaire portait sur l’obligation de fournir des services essentiels en cas de grève, services qui pouvaient être déterminés unilatéralement par l’employeur.

Quant aux exclusions de certaines catégories d’employés des régimes de représentation collectives généralement applicables, nous avons étudié cinq (5) décisions de tribunaux. Trois (3) jugements, dont deux (2) qui ont acquis l’autorité de la

chose jugée, concluent à l’invalidité de l’exclusion. Les deux décisions finales ont été rendues en première instance avant l’arrêt Fraser et n’ont pas été contestées en appel. Il s’agit de l’exclusion des employés occasionnels au Nouveau-Brunswick et de l’exclusion des responsables de services de garde et des ressources intermédiaires en santé au Québec. La troisième décision porte sur l’exclusion des travailleurs agricoles saisonniers et est en instance de révision judiciaire.

Enfin, les décisions qui concluent à la validité des exclusions, soit celle concernant les cadres de la Société des casinos du Québec et celle portant sur les membres de la GRC, sont toutes deux en appel.

À la lumière de l’analyse de cinq autres jugements abordant des questions connexes, nos résultats nous ont permis de dresser le constat suivant : la constitutionnalisation du droit de négociation collective aura un effet sur la validité des exclusions des régimes de négociation lorsque a) l’exclusion a pour effet l’absence totale de tout processus de négociation ou de consultation de bonne foi des salariés et b) l’absence de processus emporte dans les faits l’incapacité des employés de s’associer dans le but de poursuivre des objectifs liés au travail.

L’analyse de nos résultats nous porte à conclure que l’arrêt Fraser a eu un effet déterminant pour limiter l’impact de la constitutionnalisation du droit de négociation collective sur la validité des exclusions des régimes de relations de travail. En effet, par cette décision, la Cour suprême semble avoir permis d’exclure de l’examen constitutionnel les mesures législatives qui encadrent la façon dont les salariés s’associent aux fins de la négociation collective (tel que la définition des unités de négociation ou les modalités de l’accréditation), et celles qui encadrent le processus de négociation comme tel (par exemple, le niveau de négociation ou la définition même de ce qui constitue de la négociation, par opposition à une simple consultation).

En regard du contenu de la négociation et de la capacité pour l’État d’imposer des conditions de travail non négociées, cinq (5) jugements ont été étudiés, dont trois (3) sont en instance d’appel. Les situations où les dispositions législatives ont été invalidées sont celles où les associations requérantes n’ont été consultées d’aucune manière avant l’adoption de la loi imposant des conditions de travail différentes de celles qu’elles avaient négociées, à savoir le cas des enseignants en Colombie-Britannique, le cas des employés de Radio-Canada et le cas des membres de la GRC. Dans ces affaires, les gouvernements sont intervenus pour imposer des conditions de travail alors que les syndicats n’avaient pas eu la chance de participer à un processus de négociation de

bonne foi – ni même de consultation – avant l’adoption de la législation. Il s’agissait donc de circonstances très similaires à celles de l’arrêt Health Services.

Quant à l’effet de l’utilisation du droit international en droit public, nos résultats ne sont pas concluants dans l’ensemble. Nous n’avons pas pu observer d’effet significatif dans un sens ou dans l’autre.

En droit privé, la constitutionnalisation du droit de négociation collective n’a pas eu d’effet sur l’interprétation des régimes législatifs de relations de travail, notamment en raison de l’arrêt Plourde c. Wal-Mart dans lequel la Cour suprême a rejeté l’argument voulant que la jurisprudence antérieure sur la fermeture d’entreprise devait être réévaluée à la lumière de la hiérarchie des normes établie depuis l’arrêt Health

Services. Le recours au droit international est par ailleurs inexistant selon nos résultats

en droit privé.

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