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1.4 Les approches probabilistes

1.4.2 Probl` eme de base

Les grandeurs influentes associ´ees au probl`eme physique sont consid´er´ees maintenant comme des variables al´eatoires. Le risque est ´evalu´e sous la forme d’une probabilit´e et non plus sous la forme d’un jugement binaire, `a savoir le dimensionnement est acceptable ou non. C’est

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evidemment une approche plus riche mais qui peut conduire `a de nombreuses difficult´es car il faut, dans un premier temps, identifier les sources d’incertitudes, et, dans un deuxi`eme temps, leur attribuer une distribution statistique, ce qui est parfois peu ais´e. N´eanmoins, au travers de ces questions, la r´eflexion et l’analyse du probl`eme n’en deviennent que plus compl`etes.

1.4.2.1 Probabilit´e de d´efaillance

L’objectif est de d´eterminer la probabilit´e Pf qu’un ´ev´enement ind´esirable se produise sur

une p´eriode sp´ecifi´ee a priori [Leporati, 1977], g´en´eralement un ´etat limite (typiquement, l’Etat Limite de Service et l’Etat Limite Ultime).

Du point de vue probabiliste, l’atteinte de cet ´etat limite, d´efini conventionnellement de ruine (par exemple l’amor¸cage de la corrosion), est conditionn´ee par le caract`ere al´eatoire d’une variable de « r´esistance » R (l’enrobage du b´eton) et d’une variable de « sollicitation » S (la profondeur de p´en´etration des chlorures). Le probl`eme consiste ainsi `a estimer que les facteurs r´esistants soient sup´erieurs aux sollicitations.

Il est `a noter que ces th´eories ont ´et´e d´evelopp´ees dans le cadre de la fiabi- lit´e des structures et que le vocabulaire associ´e `a ce contexte est donc issu de la m´ecanique [Lemaire, 1992] [Ditlevsen et Madsen, 1996].

Dans le formalisme math´ematique, les variables al´eatoires (Xi, i = 1 . . . n) sont repr´esent´ees

par le vecteur ~X. En fonction des r´ealisations de ces variables, l’´etat d’une structure peut appar- tenir `a deux domaines : un domaine de ruine et son compl´ementaire appel´e domaine de sˆuret´e. La fronti`ere entre ces deux domaines est appel´ee surface d’´etat limite ou de d´efaillance.

Pour chaque type de d´efaillance, une fonction d’´etat limite G( ~X) est d´efinie dans l’espace des variables al´eatoires. La fonction G est une fonction d´eterministe (d´ecrite par une ´equation ou un sch´ema num´erique) pour laquelle les variables sont al´eatoires. L’´equation de d´efaillance s’´ecrit alors :

G( ~X) = R − S (1.55)

Ainsi, le domaine de s´ecurit´e est repr´esent´e par l’ensemble des valeurs prises par les variables al´eatoires pour lesquelles G( ~X) > 0 et le domaine de d´efaillance par G( ~X) ≤ 0, comme repr´esent´e sur la figure1.20. L’´equation G( ~X) = 0 est la surface d’´etat limite. La probabilit´e de d´efaillance Pf est donc, pour n variables al´eatoires :

Pf = P h G( ~X) ≤ 0i= Z G( ~X)≤0 fX~(x)dx1. . . dxn (1.56)

De la mˆeme fa¸con, la fiabilit´e est alors d´efinie par :

Pr= 1 − Pf = P h G( ~X) > 0 i = Z G( ~X)>0 fX~(x)dx1. . . dxn (1.57)

Du point de vue probabiliste, la justification du dimensionnement se fait par une probabilit´e cible Pf cible, c’est-`a-dire un risque de d´efaillance acceptable. La probabilit´e de d´efaillance Pf et

la quantification de la s´ecurit´e s’´ecrivent alors :

Pf = P [R ≤ S] ≤ Pf cible (1.58)

La valeur cible de Pf peut-ˆetre choisie suivant plusieurs crit`eres dont notamment :

– la dur´ee de vie exig´ee de l’ouvrage,

– son importance ´economique et strat´egique, – les conditions environnementales.

Dans le domaine de la construction, cette valeur est souvent relativement faible (10−1`a 10−4) car, pour un Etat Limite Ultime, les crit`eres sociaux et ´economiques de la d´efaillance ne sont peu ou pas acceptables (par exemple pour l’effondrement d’un pont, les ´eventuelles victimes et les coˆuts d’interruption du trafic).

1.4.2.2 M´ethodes de justifications de la s´ecurit´e

Les m´ethodes existantes de justification de la fiabilit´e sont g´en´eralement regroup´ees en quatre niveaux [Madsen et al., 1986] :

– Niveau 0 : Approche d´eterministe. Il correspond aux approches purement d´eterministes, c’est-`a-dire que les sollicitations et les r´esistances ont des valeurs strictement fix´ees. La s´ecurit´e et les incertitudes sont couvertes par un facteur de s´ecurit´e global.

– Niveau 1 : Approche semi-probabiliste. La s´ecurit´e est introduite par l’interm´ediaire de coefficients partiels de s´ecurit´e et de valeurs repr´esentatives judicieusement choisies. Les valeurs repr´esentatives (ou caract´eristiques) tiennent compte de la dispersion statistique observ´ee par un fractile de la loi de distribution. Les coefficients de s´ecurit´e sont d´etermin´es en fonction du choix des valeurs repr´esentatives et des mod`eles structuraux employ´es, `a partir de m´ethodes plus compl`etes d´ecrites dans les niveaux suivants.

– Niveau 2 : Analyse probabiliste simplifi´ee. Le niveau correspond aux analyses probabilistes pour lesquelles la fiabilit´e est quantifi´ee par un indice de fiabilit´e. Des hypoth`eses simpli- ficatrices permettent de calculer une probabilit´e de d´efaillance approch´ee (lin´earisation de la surface d’´etat limite).

– Niveau 3 : M´ethodes probabilistes. Il est fond´e sur des m´ethodes purement probabilistes pour lesquelles les variables al´eatoires sont caract´eris´ees par leur loi conjointe. La proba- bilit´e de d´efaillance est alors d´etermin´ee de fa¸con math´ematiquement exacte en calculant une int´egrale multiple sur le domaine de d´efaillance. Dans bien des cas, les distributions conjointes ne sont pas connues ou l’int´egrale n’est pas calculable sauf dans le cas de fonc- tions d’´etat limite lin´eaires. On a alors recours `a des m´ethodes d’int´egration num´eriques de type Monte-Carlo.

Il est `a noter que les m´ethodes de niveau 1 sont utilis´ees dans les codes de calcul r´eglementaires comme les Eurocodes (b´eton, acier. . .), et que les coefficients partiels de s´ecurit´e peuvent ˆetre ´evalu´es `a partir des m´ethodes de niveau 2 [AFNOR, 2003]. Ainsi, afin de d´evelopper une m´ethodologie `a caract`ere r´eglementaire, les approches de niveau 2 vont ˆetre d´etaill´ees dans la partie suivante.

Les m´ethodes de niveau 3 permettent, quant `a elles, une d´etermination pr´ecise de la probabi- lit´e de d´efaillance [Rubinstein, 1981]. Les simulations de Monte-Carlo font appel `a de nombreux

tirages des variables al´eatoires, et pour chaque tirage, la valeur de la fonction performance indique si l’on se trouve dans le domaine de d´efaillance (figure1.21).

Fig. 1.21 – Illustration de la m´ethode de Monte-Carlo

La probabilit´e de d´efaillance s’exprime alors simplement comme le rapport entre le nombre de tirages pour lesquels la d´efaillance est atteinte (nf) et le nombre total de tirages (n) :

Pf =

nf

n (1.59)

Cette m´ethode est efficace et ne pose pas de contrainte particuli`ere sur la fonction `a ´evaluer ou les variables al´eatoires (type de loi). Cependant, elle converge lentement : pour des probabilit´es de d´efaillance de 10−4, on a besoin d’environ un million de tirages pour une erreur tol´er´ee de 10% sur le r´esultat (pour Pf=10−k, environ 10k+2 tirages). Les temps de calcul peuvent devenir

extrˆemement longs.

Cette m´ethode reste toutefois utilis´ee, notamment comme m´ethode de r´ef´erence pour l’´evaluation pr´ecise de Pf. On a alors recours `a des algorithmes optimis´es pour am´eliorer la

performance de cette m´ethode (Monte-Carlo conditionn´ee, Monte-Carlo par tirages d’impor- tances [Sellier, 1995]).