Elle se conçoit soit organisée par le médecin, soit le plus souvent gérée par le patient lui-même, si possible avec les conseils reçus lors d’une consultation pré-voyage.
Étape diagnostique
Si la reconnaissance de la diarrhée elle-même ne pose évidemment pas de pro-blème, l’aspect essentiel en est l’identification de facteurs de gravité (cf.
tableau 4.2, p. 20) qui influencent les choix thérapeutiques.
Dans les formes communes, les explorations ne sont en général pas nécessaires en première intention (faible « rentabilité » des coprocultures). Les examens coprologiques (coprocultures et parasitologie des selles) et, dans certains cas, la rectosigmoïdoscopie sont recommandées en cas d’échec d’un premier traite-ment (cf. infra : cas particulier de la diarrhée chronique).
Étape thérapeutique
Selon la sévérité, il y a trois alternatives, l’hydratation en étant la base. Le recours à l’hospitalisation dépend essentiellement du tableau clinique.
(Re)hydratation seule. Elle doit apporter de l’eau, du potassium, du sodium et du sucre (favorise l’absorption des électrolytes) : eau, thé, jus de fruits, gâteaux salés ou sels de réhydratation orale. Si vomissements, outre les anti-émétiques, il faut prendre de petites quantités répétées et il ne faut pas hésiter à avoir recours à une perfusion IV, même de quelques heures seulement, pour passer un cap difficile.
Hydratation traitements symptomatiques (utiles mais pas indispensables). Il faut limiter les ralentisseurs du transit (lopéramide et dérivés) illogiques (retar-dent l’élimination des germes) et souvent responsables d’une constipation secondaire généralement gênante, voire de complications rares mais graves (perforation colique) pour les réserver aux situations « d’urgence ». On leur préfère les antisécrétoires (racécadotril : Tiorfan®) ou les adsorbants (diosmec-tite : Smecta® ou équivalent) qui n’ont pratiquement pas d’effets indésirables.
Hydratationtraitement symptomatiqueanti-infectieux. Les antiseptiques intesti-naux n’ayant pas fait la preuve de leur intérêt réel n’ont plus leur place.
Les antibiotiques sont efficaces mais ont des indications limitées aux facteurs de gravité (cf. tableau 4.2). Le choix se limite pratiquement aux quinolones (mono-prise de 2 cp ou 1 cp, 2 fois/j pour 3 à 5 jours) et à l’azithromycine (monoprise de 1 g chez l’adulte). La rifaximine (non commercialisée en France) serait une alternative possible.
Cas particulier de la diarrhée chronique
La démarche doit commencer par des examens coprologiques avec notamment parasitologie des selles. En cas de négativité, on peut proposer un traitement d’épreuve associant du métronidazole à une quinolone (ou azithromycine).
Devant la persistance des troubles, le recours à un spécialiste est souhaitable pour discuter de l’intérêt d’une coloscopie (recherche d’une cause sous-jacente révélée par la DV, notamment colite inflammatoire) (cf. p. 34).
Prévention
Elle repose sur le lavage des mains (avant les repas et après le passage aux toilet- tes). Les précautions alimentaires (dont l’efficacité n’a jamais été prouvée !) peu-vent être simplifiées en disant aux voyageurs que tout ce qui est cuit et servi brûlant n’est pas à risque, que les aliments solides sont en général plus à risque que l’eau et que les hôtels « internationaux » ne sont pas par principe moins à risque que les restaurants de rue où l’on sert une nourriture cuisinée en extem-porané et servie chaude (cf. tableau 4.1, p. 19).
Pour la désinfection de l’eau, il est recommandé les produits de nouvelle gén-ération (Aquatabs®, Micropure Forte®) ou mieux, la filtration mécanique sur céramique, très efficace, existant maintenant avec des dispositifs individuels (sys-tème Katadyn®). Dans quelques rares cas où soit la survenue d’une diarrhée pourrait décompenser un état fragilisé (cf. tableau 4.2 des facteurs de risque potentiels), soit le voyageur ne peut pas se permettre une « indisposition » (signature de contrat, conférence, etc.), une quinolone prophylactique (1 cp/j) pendant la durée du séjour et 2 jours après le retour peut se justifier à condition que le séjour soit bref (15 jours maximum). Une alternative, plus séduisante en termes de limitation de risques iatrogènes, mais non validée, serait de proposer un traitement en monoprise dès la première selle diarrhéique.
Pour en savoir plus
Cailhol J, Bouchaud O. Turista: travelers’ diarrhea. Presse Med 2007 ; 36 (4) : 717-22.
Hill DR, Ryan ET. Management of travellers’ diarrhoea. BMJ 2008 ; 337 : a1746. doi : 10.1136/
bmj.a1746
Distomatoses
(Distomatosis, flukes infection, food-borne trematodiasis)
Sophie Odermatt-Biays
Ce qu’il faut savoir pour comprendre
Les distomatoses sont des parasitoses provoquées par la présence de douves adultes dans les poumons, les voies biliaires ou les intestins. Ce sont des zoono-ses : plus de 1000 espèces de douves parasitent les animaux dont plus de cent
parasitent aussi l’homme, touchant plus de 40 millions d’individus dans le monde. Elles se répartissent principalement en zone tropicale et surtout en Asie.
Seule la fasciolose est cosmopolite.
Les douves sont des vers foliacés – qui ont l’aspect d’une feuille – présentant deux ventouses leur permettant de se fixer à l’épithélium biliaire. Elles appartien-nent à la classe des trématodes. Elles sont assimilées aux food-borne trematode par opposition aux water-borne trematode que sont les schistosomes. Elles sont donc transmises par l’ingestion crue du second hôte intermédiaire (HI) qui héberge des métacercaires ou d’un hôte paraténique, animal ayant consommé le 2e HI et dans lequel les larves ne se développent pas mais demeurent infestan-tes pour le prédateur suivant.
Le cycle des douves passe par deux hôtes intermédiaires obligatoires (figure 13).
Le premier est toujours un mollusque, le second est un animal (poisson, crabe, écrevisse) ou une plante aquatique (cresson, lotus, liseron d’eau…). L’hôte définitif varie selon la douve. L’homme n’est le plus souvent qu’un hôte définitif accidentel.
La répartition des distomatoses se fait par foyers déterminés par la présence de plusieurs facteurs : le goût pour la consommation d’aliments crus, la proximité des hommes et des animaux, le manque d’installations sanitaires et l’utilisation des engrais humains et animaux pour fertiliser les mares… Du fait des habitudes alimentaires, il y a souvent plusieurs autres helminthiases acquises par la nourri-ture (food-borne helminthiases) dans ces communautés (tableau 2).
Figure 13
Cycle des distomatoses.
Forme adulte de la douve
Hôte intermédiaire
Mollusque d'eau douce
Clonorchis sinensis Paragonimus
westermani Fasciolopsis buski
Miracidium (dans l'eau) Poisson
Cercaire Crabe
Châtaigne d'eau douce
Cycle parasitaire de FASCIOLOPSIS BUSKI, PARAGONIMUS WESTERMANI et CLONORCHIS SINENSIS
La taille des douves adultes varie de 1 à 75 mm. Les adultes d’Heterophyes sp.
sont de l’ordre du millimètre. Paragonimus, Opisthorchis, Clonorchis et Echinostoma ont environ 1 cm de long. Fasciola sp. et Fasciolopsis buski sont plus grandes et mesurent de 2 à 7 cm de long.
La taille des œufs de douves est aussi variable selon l’espèce. Les œufs peuvent être facilement confondus s’ils ont la même taille, car ils sont d’aspects similaires.
Les œufs de Opisthorchis viverrini, Clonorchis sinensis, Heterophyes sp. sont petits (environ 30 ), ceux de Paragonimus sont de taille moyenne (environ 100 ) et ceux de Fasciola sp., Fasciolopsis et Echinostoma sp. sont grands (plus de 120 ).
Toutes les distomatoses se traitent avec prédilection par le praziquantel, à l’excep-tion de la fasciolose dont le traitement d’élection est le triclabendazole (tableau 3).
Tableau 2
Distomatoses humaines d’importance médicale Douves 2e hôte
intermédiaire Tropisme Hôte definitive
Comparaison des dose curatives de praziquantel pour les distomatoses
Distomatoses Dosage du praziquantel