Les molécules efficaces dans l’histoplasmose sont l’amphotéricine B et certains azolés, dont l’itraconazole et le kétoconazole.
Dans l’histoplasmose à Hc, le traitement n’est pas systématique dans la primo-infection, dans la mesure où l’évolution est habituellement rapidement favorable chez l’adulte sain. Il n’est réellement justifié qu’en cas d’évolution prolongée, de très jeune âge, d’immunodépression. Il est par contre impératif dans les formes disséminées, les réactivations et dans l’histoplasmose pulmonaire chronique.
Il repose sur l’itraconazole, en première intention dans les formes modérées ou en relais de l’amphotéricine B dans les formes sévères, à la dose de 200 à 400 mg/j pendant 1 à 3 mois dans la primo-infection, et au moins 6 mois dans les autres formes. L’amphotéricine B par voie intraveineuse est par contre utilisée en première intention dans les formes sévères, à la dose de 0,7 à 1 mg/kg/j, relayée après 2 ou 3 semaines par itraconazole en cas d’évolution favorable. Un traitement d’entretien par itraconazole à demi-dose est indiqué chez les immu-nodéprimés, pour éviter les rechutes et tant que dure l’immunodépression.
Dans l’histoplasmose à Hd, le traitement repose sur l’itraconazole à la dose de 200 à 400 mg/j pendant une durée de 6 à 12 mois, éventuellement en relais de l’amphotéricine B (à la dose de 0,7 à 1 mg/kg/j). Le taux de rechute est élevé mal-gré le traitement, rendant nécessaire, dans certains cas, une chirurgie d’exérèse complémentaire.
Prévention
La prévention individuelle est limitée, elle consiste à éviter les activités à risque de contact avec de grandes quantités de poussière en zone d’endémie (comme la spéléologie, la visite de grotte…) ou à utiliser des masques.
Le réservoir étant tellurique pour Hc, aucune mesure de prévention collective ne s’avère réaliste.
Pour en savoir plus
Deepe GS. Histoplasma capsulatum. In : Mandell, Douglas and Bennett’s Principles and Practice of Infectious Diseases. 5th ed. Philadelphia : Churchill Livingstone ; 2000, 2718-33.
Gugnani HC. Histoplasmosis in Africa: a review. Indian J Chest Dis Allied Sci 2000 ; 42 : 271-7.
Kauffman CA. Histoplasmosis. Clin Chest Med 2009 ; 30 (2) : 217-25.
Panackal AA, Hajjeh RA, Cetron MS, Warnock DW. Fungal infections among returning trave-lers. Clin Infect Dis 2002 ; 35 : 1088-95.
Hydatidose
(Cystic echinococcosis, hydatidosis) Paul-Henri Consigny
Points essentiels
l Zoonose parasitaire, présente essentiellement dans les zones d’élevage extensif de moutons, liée à la larve d’un cestode, Echinococcus granulosus (ténia des canidés), qui se développe après ingestion accidentelle d’œufs embryonnés par consom-mation d’aliments souillés par des déjections de chiens, ou par contact avec des chiens infestés. Le cycle principal est domestique, incluant le chien et le mouton.
l Les lésions kystiques plus ou moins volumineuses, longtemps asymptomatiques (croissance lente) concernent surtout le foie. Leur révélation est souvent fortuite, plus rarement à l’occasion de complications (compression, infection, fissuration ou rupture responsable de manifestations allergiques parfois sévères).
l Le diagnostic repose sur l’imagerie (diagnostic différentiel principal : kyste biliaire) et la sérologie.
l La chirurgie reste la base du traitement, encadrée par un traitement médical par albendazole (utilisé seul si patient inopérable). Certains lui préfèrent la technique de « ponction–aspiration–injection–réaspiration ».
Ce qu’il faut savoir pour comprendre
L’hydatidose a une distribution géographique très large, sur tous les continents : les zones les plus endémiques sont le pourtour méditerranéen (Europe du Sud, Afrique du Nord, Moyen-Orient), l’Afrique de l’Est, l’Asie centrale, la Russie, l’Amérique du Sud (sud et ouest), et l’Australie. Elle touche particulièrement les régions où l’élevage extensif de moutons se fait à grande échelle.
La contamination de l’homme se fait par l’ingestion d’œufs embryonnés d’Echinococcus granulosus, par consommation d’eau ou d’aliments souillés par des déjections de l’hôte définitif, dans la majorité des cas le chien, ou par contact direct avec un chien infesté ou des objets ayant été en contact avec ses déjections.
Le cycle du parasite le plus important sur le plan épidémiologique est domes-tique, incluant un hôte définitif, le chien, et un hôte intermédiaire, le bétail d’élevage, tout particulièrement le mouton, mais qui peut être accidentellement l’homme. À côté de ce cycle domestique coexistent des cycles sauvages, quanti-tativement moins importants (tableau 5), et qui peuvent interagir avec le cycle domestique. Tous ces cycles reposent sur le carnivorisme.
L’hôte définitif, porteur du parasite adulte au niveau de son tube digestif, émet des œufs embryonnés dans le milieu extérieur, qui peuvent rester viables
pendant plusieurs semaines ou mois, en environnement humide, à toute tempé-rature (ces œufs sont cependant sensibles à la dessication). Ces œufs sont ingérés par l’hôte intermédiaire, lysés au niveau gastrique, libérant un embryon hexacanthe qui traverse la paroi digestive et se fixe au niveau viscéral, pour don-ner une larve (ou kyste) hydatique, qui grossit lentement et s’entoure d’une réaction fibro-conjontive de l’hôte (périkyste). À maturation, le kyste hydatique comprend de l’extérieur vers l’intérieur deux membranes : une membrane externe anhiste, puis une membrane interne nucléée, la membrane germinative ou proligère, qui donne naissance par bourgeonnement à des vésicules proli-gères sphériques contenant des protoscolex, le contenu central du kyste étant liquidien. Les kystes ont un diamètre de 1 à plus de 20 cm, et sont le plus sou-vent uniloculés, sauf en présence de vésicules filles en leur sein. Pour les kystes anciens, la réaction de l’hôte peut évoluer vers la calcification.
L’hôte intermédiaire est consommé par un hôte définitif, chez qui le protosco- lex se dévagine dans le tube digestif et donne un parasite adulte en 4 à 7 semai-nes. Chez l’homme, le parasite se retrouve en impasse parasitaire.
Principales manifestations cliniques et principes du diagnostic
L’infestation initiale par Echinococcus granulosus est toujours asymptomatique et le reste longtemps, ce qui explique la fréquente révélation fortuite de l’hydatidose qui, à l’inverse, peut devenir symptomatique à l’occasion d’une complication : compression d’organes de voisinage, rupture ou infection de kyste. En cas de fissuration ou de rupture, de la fièvre et/ou des réactions allergi-ques, parfois inaugurales, peuvent être observées (urticaire, œdème de Quincke, Tableau 5
Nature des hôtes d’Echinococcus granulosus
Cycle Hôte intermédiaire Hôte definitive
Domestique Mouton
Bétail, porc, chèvre, chameau, buffle, cheval… Chien Sauvage Cervidés, marsupiaux, zèbre, antilopes,
phacochère, gnou, buffle… Loup, dingo, chacal, hyène, lycaon, renard
bronchospasme, choc anaphylactique…). Il y a alors un risque important de dis-sémination locorégionale ou à distance (hydatidose secondaire).
Les kystes hydatiques, uniques (40–80 % des cas) ou multiples, peuvent être retrouvés dans tous les organes y compris l’os : les deux organes les plus fré-quemment atteints sont le foie (70 % des cas), puis le poumon (20 %).
Le diagnostic repose sur l’imagerie et la sérologie, l’hyperéosinophilie étant inconstante, sauf en cas de fissuration ou de rupture, où elle peut devenir majeure.
L’échographie, scanner ou IRM, montre la ou les lésions kystiques avec parfois paroi dédoublée en cas de décollement de la membrane proligère (figure 17).
Au niveau hépatique, le diagnostic différentiel avec un kyste biliaire est parfois très difficile. Une radio standard peut montrer des calcifications arciformes (cf.
figure 9.3, p. 67).
La sérologie (ELISA, hémagglutination indirecte, immunofluorescence puis confirmation par immuno-électrophorèse avec mise en évidence de l’arc 5) a des limites : réaction croisée avec les autres cestodoses, voire avec d’autres hel-minthiases, faux négatifs surtout dans les « vieux » kystes (10–20 % dans les atteintes hépatiques, 40 % dans les atteintes pulmonaires).
L’examen anatomopathologique de la pièce opératoire met en évidence les structures parasitaires. Les gestes de ponction ou de biopsie sont contre- indiqués en raison du risque de dissémination.
Principes du traitement (en milieu spécialisé)
Il repose sur la chirurgie d’exérèse, surtout en cas de kystes volumineux, superfi-ciels, proches de structures vitales ou compliqués (fissuration, compression, surinfection). Il est recommandé d’encadrer le geste opératoire par au moins une cure d’albendazole. Dans les cas où la chirurgie n’est pas indiquée (kystes multiples, atteinte pluriviscérale, risque opératoire), des stratégies alternatives sont développées, moins invasives :
n « ponction–aspiration–injection–réaspiration » (PAIR), consistant en une ponction–
aspiration initiale d’une partie du contenu hydatique, sous contrôle échogra-phique (par un opérateur entraîné), puis en l’injection intrakystique d’éthanol concentré (70–95 %) ou d’un autre protoscolicide, et la réaspiration après un Figure 17
Hydatidose hépatique : kyste volumineux.
Photo : O. Bouchaud.
temps de contact de 15 minutes. L’utilisation du traitement antiparasitaire autour du geste est nécessaire pour minimiser les risques d’hydatidose secondaire. Cette technique est contre-indiquée en cas de kyste communiquant avec les voies biliai-res, de kyste calcifié, ou pour certaines localisations (poumon, cerveau, cœur) ;
n traitement antiparasitaire par albendazole : 10–15 mg/kg/j en 2 prises (400 à 800 mg/j pour un adulte), par cures de 28 jours séparées d’un intervalle libre de 14 jours, à raison en général de 3 à 6 cycles, voire en traitement continu.
Le praziquantel, à la dose de 25 mg/kg/j, en combinaison avec l’albendazole, pourrait être supérieur à l’albendazole seul.
Pour les patients asymptomatiques, la tendance est à la chirurgie systéma-tique, mais une surveillance simple régulière peut se discuter.
La réponse au traitement s’évalue sur l’imagerie et sur la décroissance sérologique progressive (après une ascension sérologique postopératoire pendant 2 à 3 mois), jusqu’à négativation habituellement obtenue en 2 ans, en l’absence de récidive.
Prévention
En zone d’endémie, la prévention individuelle repose sur les règles d’hygiène : lavage des aliments potentiellement souillés par des déjections canines (ou abs- tention des crudités pour le voyageur), lavage des mains après contact (ou abs-tention du contact) avec un chien potentiellement porteur de parasite adulte, utilisation de gants pour le jardinage.
La prévention collective vise à interrompre le cycle domestique par contrôle vétérinaire des élevages de moutons et des abattoirs, parcage des animaux d’élevage dans des enclos non accessibles aux chiens, incinération des cadavres ou viscères d’animaux infectés, traitement systématique et régulier des chiens domestiques vivant en zone d’endémie.
La vaccination des moutons ou d’autres animaux d’élevage contre Echinococcus granulosus est une solution prometteuse pour l’avenir.
Pour en savoir plus
Eckert J, Deplazes P. Biological, epidemiological, and clinical aspects of echinococcosis, a zoo-nosis of increasing concern. Clin Microbiol Rev 2004 ; 17 : 107-35.
Morar R, Feldman C. Pulmonary echinococcosis. Eur Respir J 2003 ; 21 : 1069-77.
Moro P, Schantz PM. Echinococcosis: a review. Int J Infect Dis 2009 ; 13 (2) : 125-33.
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