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Anémies génétiques Hémoglobinopathies

Elles constituent la principale cause d’anémie héréditaire dans les zones tropicales.

La drépanocytose est caractérisée par la présence d’une hémoglobine anormale (S) responsable de la déformation des hématies en faux. Du fait de leur rigidité, la viscosité sanguine augmente, en occasionnant des thromboses, mais aussi une hémolyse due à leur fragilité accrue. Elle touche essentiellement les Noirs afri-cains en zone intertropicale et leurs descendants émigrés aux États-Unis et aux Antilles. Cette maladie, dont la persistance est attribuée à une protection contre le paludisme, est transmise sur un mode autosomique codominant et s’exprime soit :

n sous forme homozygote cliniquement grave (souvent létale avant l’âge adulte en zone tropicale), dans un tableau de crises vaso-occlusives douloureuses et d’hémolyse sévère sur fond d’hémolyse chronique ;

n sous forme hétérozygote asymptomatique, n’entraînant en général pas d’anémie.

Les facteurs déclenchants sont souvent une hypoxie ou une déshydratation.

Des infections bactériennes sont souvent associées à la drépanocytose du fait d’une exclusion fonctionnelle de la rate et de foyers d’infarcissement viscéraux post-thromboses.

D’autres hémoglobinopathies plus rares (hémoglobinoses C en Afrique, D en Inde, E en Asie du Sud-Est) peuvent entraîner sous leur forme homozygote des syndromes anémiques discrets.

Le diagnostic des hémoglobinopathies se fait par électrophorèse de l’hémo-globine. Il n’existe pas de traitement spécifique, mais une amélioration importante de la qualité de vie des drépanocytaires homozygotes dans les pays industrialisés a été obtenue par une prise en charge adéquate des épisodes infectieux (antibio-thérapie) et des crises vaso-occlusives.

Thalassémies

Elles sont caractérisées par un déficit de synthèse d’une ou plusieurs chaînes polypeptidiques ( ou ) de l’hémoglobine, entraînant la formation d’hémoglo-bines anormales (A2 ou F remplaçant l’hémoglobine A dans les -thalassémies, Bart’s ou H dans les -thalassémies). Transmises sous forme autosomique codo-minante (-thalassémies) ou plus complexe (-thalassémies), elles ont une expression clinique très variable selon le nombre de gènes touchés. Elles affec-tent de très nombreuses populations, essentiellement dans le Bassin méditer-ranéen, l’Extrême-Orient et l’Afrique subsaharienne pour les -thalassémies, alors que les -thalassémies sont particulièrement répandues en Asie. Elles réalisent

des tableaux d’anémie hypochrome microcytaire, avec de nombreuses anomalies morphologiques des globules rouges dans le cas des -thalassémies majeures.

Le diagnostic se fait par électrophorèse de l’hémoglobine.

Déficit en G6PD

Les déficits enzymatiques héréditaires, dont le plus répandu est le déficit en G6PD (glucose 6-phosphate déshydrogénase), sont également responsables d’anémies hémolytiques le plus souvent aiguës, le risque étant proportionnel à l’intensité du déficit enzymatique. Cette affection héréditaire liée au sexe (gène porté par le chromosome X) est extrêmement fréquente, surtout répandue chez les sujets noirs (Afrique, États-Unis), mais également dans les pays du pourtour méditerranéen, du Moyen-Orient et dans certaines zones d’Extrême-Orient. Les accès d’hémolyse fébrile sont presque toujours consécutifs à la prise d’un médi-cament oxydant (dont les sulfamides et la primaquine). L’anémie, d’expression variable selon les sujets, est de type hémolytique, normochrome et régénérative.

Lors des crises aiguës, on peut trouver des corps de Heinz caractéristiques dans les hématies, mais c’est la mesure de l’activité enzymatique qui établit définiti-vement le diagnostic.

Hyperéosinophilie

Olivier Bouchaud L’hyperéosinophilie, qui se définit par un compte de polynucléaires éosino-philes supérieur à 500/mm3, est un motif de consultation courant dans le cadre de la médecine tropicale d’importation. S’il faut garder à l’esprit qu’une origine non parasitaire est évidemment possible (cf. infra), la recherche d’une helmin-those (les protozooses, à l’exception de la toxoplasmose, n’entraînent pas d’hy-peréosinophilie) dans un contexte de séjour en zone tropicale doit être un réflexe. La découverte d’une hyperéosinophilie se fait soit dans un contexte clini-que évocateur (primo-invasion ou phase d’état), soit de façon fortuite (parasi-tose asymptomatique). Dans le cadre des helminthoses, le raisonnement étiologique s’organise principalement autour du niveau de l’hyperéosinophilie : lorsqu’elle est élevée (en règle, supérieure à 1500 ou 2000/mm3 avec dans cer-tains cas des valeurs allant jusqu’à 8000 et plus), cela traduit a priori une infec-tion au stade de primo-invasion (en règle, dans les 6 à 8 semaines suivant l’infestation), le nombre de polynucléaires éosinophiles étant d’autant plus élevé que le parasite en stade larvaire a un cycle tissulaire profond (ascaridiose, schis-tosomose, trichinellose, toxocarose, etc.). Une fois le parasite parvenu au stade adulte (phase d’état), l’éosinophilie baisse progressivement jusqu’à des niveaux entre 500 et 1000/mm3, voire jusqu’à une éosinophilie normale ( 500/mm3) même si le parasite est toujours présent. Il est donc important de surveiller la cinétique de l’hyperéosinophilie, a fortiori après traitement. Au stade de primo-invasion, seules les sérologies (deux examens à 2 ou 3 semaines d’intervalle pour objectiver au mieux la séroconversion ou l’ascension significative – au moins deux dilutions – des anticorps) peuvent conduire au diagnostic. À ce stade, la recherche d’œufs ou de larves à l’examen direct est inutile puisque la ponte par les parasites adultes n’a pas encore débuté. La figure 10.1 synthétise la conduite à tenir.

Pancytopénie

Paul-Henri Consigny La démarche diagnostique devant une pancytopénie, associant une leuconeu-tropénie, une anémie et une thrombopénie ne se fait qu’au regard des données cliniques, anamnestiques et épidémiologiques. La pancytopénie peut être d’ori-gine périphérique, le plus souvent dans un contexte de paludisme, aigu sévère ou chronique, ou d’hypersplénisme par cirrhose, ou d’origine centrale, néces-sitant une exploration médullaire (myélogramme, myélocultures, voire biopsie

Rechercher NFS antérieure (hyperéosinophilie ancienne?)

Séjour court (< 1 mois) au retour ou semaines qui suivent

>1 500/2 000/mm3 (2)

±signes de primo-invasion (3)

Sérologie (4) (seìon contexte)

Si + :

persistance 1 mois après

ex. parasito. selles

< 1 500/mm3

Hyperéosinophilie (> 500/mm3)

helminthoses +++ [ou autres causes (1)]

Séjour long ou à distance d’ un voyage

±symptômes

• 3 ex. parasitologiques des selles

• 1 ex. parasitologique des urines si séjour africain

• anguillules (S.stercoralis) : ivermectine

• ankylostomes : flubendazole, albendazole

• ascaris : flubendazole, albendazole

• schistosomes : praziquantel

• trichocéphales (T. trichuira) : flubendazole, albendazole

• oxyures (E. vermicularis) : flubendazole, albendazole

• taenia : praziquantel sérologies (4) ± microfilarémie

(5) ± biopsie cutanée exsangue (6)

+

Figure 10.1

Conduite à tenir devant une hyperéosinophilie.

(1) Principales étiologies non parasitaires des hyperéosinophilies :a. allergie/

atopie ; b. hémopathies malignes et néoplasies/syndromes paranéoplasiques (poumon, rein, estomac, utérus, etc.) ; c. maladies auto-immunes (polyarthrite rhumatoïde, périartérite noueuse, angéite, sclérodermie, etc.) et MICI (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique) ;d. médicamenteuses ; e. hépatites virales chroniques et maladies infectieuses (VIH…).

(2) Peut aller jusqu’à 8000/mm3 et plus dans les helminthoses à cycle tissulaire profond ou les syndromes de larva migrans viscéral.

(3) Associe diversement : fièvre, prurit, érythème cutané, urticaire, douleurs abdominales, toux sèche  dyspnée…

(4) Filariose (réaction croisée avec les nématodoses digestives), schistosomoses, toxocarose, trichinellose, distomatose, cysticercose, hydatidose (cf. fiches maladies correspondantes).

(5) Si suspicion de loase (séjour au Cameroun ou bloc forestier centre-africain ; prélèvement vers midi) ou de filariose lymphatique (prélèvement en milieu de nuit) (cf. fiches maladies correspondantes).

(6) Si suspicion d’onchocercose (cf. fiche maladie, p. 195).

médullaire), afin d’authentifier une cause infectieuse, le plus souvent dans un contexte d’infection disséminée, hématologique ou médicamenteuse.

Démarche diagnostique : la pancytopénie associe une leucopénie (leucocytes

 4000/mm3), avec neutropénie (polynucléaires neutrophiles  1500/mm3), une anémie (hémoglobine  12 g/dL) et une thrombopénie (plaquettes

 150 000/mm3).

La démarche diagnostique devant une pancytopénie ne se fait qu’au regard du contexte clinique qui a motivé la réalisation de la NFS (signes cliniques, anamnèse, épidémiologie) : rarement de découverte fortuite, elle l’est plutôt à l’occasion d’un bilan de syndrome fébrile, d’adénopathies, de splénomégalie, de syndrome anémique (pâleur, asthénie) ou thrombopénique (hémorragies) au retour d’un voyage, éventuellement à distance de ce dernier. Dans ce cadre, les étiologies infectieuses sont prépondérantes, devant les causes hématologiques et médicamenteuses.

Devant une pancytopénie vraie :

n il convient tout d’abord d’éliminer une origine périphérique (hyperdestruction périphérique des trois lignées), en particulier un paludisme (paludisme sévère, paludisme viscéral évolutif) ;

n si cette dernière est éliminée, la cause est, dans la grande majorité des cas, centrale (défaut de production des trois lignées), d’origine infectieuse, héma-tologique ou néoplasique, ou médicamenteuse, et nécessite un myélo-gramme, des myélocultures, particulièrement en contexte infectieux (syndrome fébrile), voire une biopsie médullaire, en cas de moelle pauvre, afin de voir l’architecture médullaire.

Les principales causes de pancytopénie sont rapportées dans le tableau 10.2.

Elles n’incluent pas les cytopénies combinées mais d’origine multiple.

Pour en savoir plus

Lavigne C, Lavigne E, Massenet D, Binet C, Bremond JL, Prigent D. Place des étiologies caren-tielles dans les pancytopénies à Djibouti : à propos de 81 patients consécutifs. Médecine Tropicale 2005 ; 65 (1) : 59–6365 (1) : 59–6359–63

Diagnostic parasitologique direct et examens