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La première occupation nord-américaine

Les Guerres de l'Indépendance cubaine

D. La guerre hispano-cubano-américaine

2) La première occupation nord-américaine

Ils ne le seraient pas non plus lors des discussions puis de la signature du Traité de Paris, le 10 décembre 1898. L’Espagne remettrait les derniers vestiges de son empire colonial aux Etats-Unis. Porto Rico, Guam et les Philippines leur seraient cédées. Cuba serait « mieux » lotie : le Traité lui reconnaîtrait le droit à un gouvernement, après une période indéfinie de pacification pendant laquelle le pays serait administré par une autorité militaire nord-américaine. Le 1er janvier 1899, l’Armée espagnole quittait officiellement la terre de Cuba. A La Havane, au cours d’une cérémonie solennelle, le drapeau espagnol céda la place au drapeau nord-américain.

L’établissement des Nord-américains allait s’opérer en deux temps. Entre juillet et décembre 1898, le commandement militaire allait poser les bases destinées à assurer son maintien dans l’île après la signature du traité de paix. La durée et la forme que prendrait dans l’avenir cette permanence restaient encore à définir. Cette méthodique prise du pouvoir s’appuya sur la neutralisation de l’Armée de Libération, sur le démantèlement des institutions gouvernementales révolutionnaires et sur l’alliance avec certains groupes de pression économique ou politique cubains. Quant à la période de « pacification » légale, à compter du 1er janvier 1899, comme prévu dans le Traité de Paris, elle prépara, sous la pression des patriotes cubains et de lobbies nord-américains, non plus l’annexion que certains avaient

souhaitée, mais la constitution d’une relation de dépendance organique entre une République formellement indépendante et sa nouvelle métropole.

a) De l’Armistice au Traité de Paris

Tout en s’assurant de son soutien civil sur le sol cubain, l’état-major nord-américain allait s’acharner à démanteler l’armée nationale objectivement en mesure de prendre possession de son propre pays si les consignes de collaboration dont nous parlions plus haut étaient remises en cause ou si elle décidait de les ignorer. Cela fut accompli de pair avec un travail de sape visant à briser et la cohérence des institutions républicaines et l’unité, quelquefois fragile, des principales figures révolutionnaires.

L’état-major s’appuya sur le maintien dans la plupart des places fortes des officiers et des contingents de l’armée coloniale espagnole. Sous le prétexte d’assurer ainsi une transition en douceur et de s’épargner vengeances et exactions de la part des « Mambis », l’Armée de Libération fut privée de son droit d’entrer dans les villes au nom de la République de Cuba. L’état-major nord-américain évitait que les « Mambis » prissent l’avantage stratégique et symbolique en assurant les missions et les devoirs d’une Armée nationale.

Pour les mêmes raisons, l’état-major nord-américain désigna, en vertu de l’autorité qu’il s’était arrogée, des gouverneurs civils à la tête des agglomérations dénuées de garnison. Là encore, la règle fut de favoriser la continuité avec la période antérieure et d’évincer les personnalités indépendantistes. Ainsi, à côté de la nomination de Bacardí à Santiago de Cuba (capitale de l’Oriente, où nommer un gouverneur militaire ou une personnalité autrefois hostile à l’indépendantisme aurait, plus qu’ailleurs, pu créer des troubles), d’anciens Autonomistes, voire des intégristes (ce fut le cas de Gener à Las Villas) furent désignés pour assurer le gouvernement pendant cette période de transition.

Enfin, le Général Brooke ébaucha les bases politiques de l’Occupation et ménagea son soutien à Cuba auprès de divers groupes de pression susceptibles de la soutenir. Ainsi, bien des Autonomistes qui avaient participé à l’expérience du statut autonomique, furent maintenus à des postes-clefs. Les partisans de la conservation de l’intégrité du territoire national espagnol tiraient leur épingle du jeu. Mais leur permanence ne doit pas étonner. Du point de vue nord-américain, il était certainement plus aisé de s’entendre avec ces « hacendados » et ces « doctores » issus d’une bourgeoisie créole blanche et conciliante plutôt

qu’avec des Indépendantistes compromis avec le peuple, avec la population de couleur, et faisant preuve d’intransigeance. D’autre part, les Autonomistes, qui n’avaient jamais cru en l’existence d’une Nation cubaine et encore moins à la capacité des Cubains à se gouverner, s’accommodaient aisément de ce nouveau pacte. Les Etats-Unis garantissaient ce que l’Espagne avait garanti ; de plus, ils offraient la marge de manœuvre que l’ancienne métropole avait tant tardé à octroyer ; enfin, ils étaient la nation émergente du monde capitaliste moderne ce qui, somme toute, n’était pas à négliger. Leur alliance, destinée à perdurer, fut un des appuis de la future ingérence nord-américaine.

Cette alliance recoupait une entente avec la bourgeoisie cubaine exportatrice de sucre et de tabac. Bien que dans un premier temps, l’administration militaire ait négligé ce secteur et pris des mesures opposées à ses intérêts économiques (notamment la modification unilatérale des tarifs douaniers, qui favorisait les exportateurs nord-américains sans contrepartie pour les Cubains), elle fut ultérieurement amenée, pour mieux résister aux indépendantistes radicaux, à transiger et à concéder quelques avantages relatifs. Ce lobby considéra bien vite que les relations commerciales les plus avantageuses devraient avoir comme cadre une étroite dépendance, voire une annexion. Ainsi, paradoxalement en apparence, la Commission cubaine envoyée à Washington en décembre 1898, allait tenter de défendre les intérêts commerciaux de ces secteurs exportateurs, pendant que ces groupes soutiendraient les positions politiques les plus proches de l’annexion, une fois que les Etats- Unis auraient jugé bon de répondre partiellement à leurs doléances.

La campagne de dénigrement à l’égard de l’Armée de Libération nationale débuta, dans sa phase publique et systématique, au lendemain de l’armistice. Quelquefois par mépris, quelquefois par tactique, quelquefois pour couvrir leurs propres erreurs, les officiers de l’état- major tinrent des discours sur l’incompétence et l’indiscipline des Cubains. L’Armée nord- américaine devenait par leur voix l’unique chance de Cuba ; les Etats-Unis étaient les sauveurs des Cubains184

, affublés d’une armée de va-nu-pieds à demi sauvages185

. Cette propagande préparait également l’éviction de la représentation cubaine des négociations – ni l’Espagne ni les Etats-Unis ne reconnaissant le gouvernement légitime, le commandement officiel d’une telle armée ne pouvait être considéré. Elle préparait déjà l’occupation ultérieure destinée à « pacifier » le pays.

Sur ordre de l’état-major nord-américain – toujours sous le prétexte que les Cubains seraient source de troubles –, il fut interdit aux soldats de l’Armée de Libération d’entrer en

groupe et armés dans les villes de leur propre pays. Ces provocations et ces humiliations ne provoquèrent pas d’actes d’insubordination des « Mambis » à l’égard de leur chefs, ni d’actes de violence – ce qui peut-être était un des objectifs recherchés. Gómez, qui s’opposait dans l’immédiat à la démobilisation de l’Armée nationale, fut réduit à gérer la situation et à organiser le séjour des hommes dans des campements aux environs des agglomérations. Ce fut un des premiers motifs de dissension grave entre le Général en Chef et l’Assemblée, celle- ci se montrant peu disposée à soutenir son Armée. Le Manifeste que publia Máximo Gómez au lendemain du Traité de Paris, et dans lequel il assurait les Cubains de sa participation complète dans l’alternative où ils souhaiteraient mener à terme le combat pour l’Indépendance, fut par ailleurs interprété par les occupants comme un coup de semonce.

Le désarmement de l’Armée de Libération186

s’imposait par conséquent en priorité. L’état-major le négocia d’abord avec le Général en Chef puisque les instances gouvernementales cubaines n’étaient pas reconnues : Gómez accepta le principe de la transaction financière. La misère de l’Armée, des soldats, et donc de leur famille, était telle... Il le négocia ensuite avec l’Assemblée du Cerro, ce qui était susceptible de générer un affrontement avec Gómez. Le même principe fut accepté, mais on discuta de manière plus serrée du tarif de la remise des armes par les « Mambis ». A partir de là, l’opposition entre Gómez et l’Assemblée alla croissante187. Sur fond d’aménagement du paysage politique

cubain, les positions s’exacerbèrent.

Le 6 janvier 1899 immédiatement après la prise de pouvoir, légalisée par le Traité de Paris, des Nord-américains, le désarmement de la population fut décrété188

. Gómez, considéré comme une menace par certains représentants, fut désavoué par l’Assemblée, le 12 mars 1899, date à laquelle elle le démit de ses fonctions de Général en Chef189

.

Le second volet tactique de la désunion des Indépendantistes reposait sur ses querelles. Les autorités militaires et le gouvernement nord-américain cherchaient conjointement à affaiblir les Cubains dans le rapport de force les opposant à eux. Ils s’employèrent à briser la solidarité qui unissait les officiers supérieurs de l’Armée cubaine et les instances civiles.

Revenons en arrière pour renouer avec la chronologie politique. Le 9 août 1898, Salvador Cisneros Betancourt était entré à la tête de son régiment cubain dans le village de Santa Cruz del Sur. Dans cette enclave cubaine, le 14 août, le Président Masó avait appelé à l’élection des Représentants de la nouvelle Assemblée constituante. L’Assemblée avait

commencé à siéger en octobre 1898 alors que l’état-major nord-américain menait déjà son entreprise d’insinuation et de discorde. Très vite, dès le 24 octobre, Masó avait fait son rapport devant l’Assemblée, récapitulant les manœuvres des interventionnistes. Au cours des mois suivants, l’assemblée se trouverait contrainte à repousser son travail initial d’élaboration de la Constitution de la République Indépendante, pour assurer une gestion intérimaire des questions de politique nationale, et tenter, par conséquent, d’imposer son existence légitime aux Nord-américains.

Mais comme elle se trouvait objectivement marginalisée par les Nord-américains, qui l’ignoraient et prenaient leurs marques dans le pays, ses initiatives allaient s’inscrire de plus en plus en décalage avec la réalité de l’exercice effectif du pouvoir. L’Assemblée de Santa Cruz fut bientôt réduite à l’accepter, et à négocier, en position de faiblesse avec les Nord- américains. Ainsi, après l’échec de la nomination de sa propre commission diplomatique en novembre 1898, la nouvelle commission de décembre partit avec une mission de négociation, qui s’inscrivait déjà dans la recherche d’un consensus autour des mesures unilatérales de Brooke ou de Wood et non plus dans la démarche d’imposer la gestion du pays par les instances politiques légitimement élues. Les marchandages autour de l’Armée de Libération, puis la rupture avec Gómez détournèrent de cette représentation l’appui populaire dont elle aurait eu besoin. L’Assemblée du Cerro se dissolvait d’elle-même le 4 avril 1899, quelques jours avant la date de mise en application du Traité de Paris, et sans avoir rempli sa mission constitutionnelle.

Outre la question du désarmement, qui opposait Gómez et l’Assemblée, d’autres manipulations visaient à semer discorde et zizanie entre Calixto García, Gómez et l’Assemblée.

Le Général Wood, qui avait succédé à Shafter, reconnut officiellement le caractère décisif de la participation du Général Calixto García dans la prise de Santiago et le laissa entrer dans la ville à la tête des troupes le 22 septembre 1898. Cet apparent revirement faisait de l’attitude de Shafter un problème de personne, effaçant le sens et le motif réel de ses agissements. Par là, on cherchait à disposer favorablement García – alors la personnalité cubaine la plus populaire après Gómez : le 16 octobre, ce fut García qui inspecta les troupes cubaines ; ce fut à lui que Wood proposa de représenter les intérêts cubains à Washington. Il est vrai que le Général en Chef se maintenait dans une attitude de franche et sourde hostilité vis-à-vis des occupants.

García informa de ces propositions la nouvelle Assemblée législative révolutionnaire. L’Assemblée et le Conseil de Gouvernement prirent l’initiative de nommer une Commission190

afin de remplir le mandat que les Etats-Unis souhaitaient laisser à García. Cette Commission, nommée par des institutions que les Etats-Unis ne voulaient pas considérer, ne fut jamais reconnue par leur gouvernement. Seul García, finalement envoyé par une Assemblée contrainte par les réalités d’un rapport de force en sa défaveur à transiger, partit pour Washington début décembre191

. Il était mandaté pour négocier le désarmement de l’Armée, et la révision des tarifs douaniers imposés par Brooke en 1898. Pendant ce temps, l’Espagne et les Etats-Unis scellaient à Paris le destin de Cuba.

Au lendemain de la signature de ce Traité, Estrada Palma, voulant considérer que celui-ci garantissait l’indépendance de Cuba, dissolvait précocement le Parti Révolutionnaire Cubain.

Par sa dissolution, Estrada Palma contribuait volontairement et de façon déterminante à affaiblir le front indépendantiste vis-à-vis des aspirations de leur « sauveur ». D’une part, il détruisait la seule organisation destinée depuis sa création à fédérer les Cubains et la dernière autorité à être encore en mesure d’atteindre cet objectif. D’autre part, il excluait du débat politique le monde ouvrier : les militants indépendantistes, syndicalistes et politiques, majoritairement émigrés de Tampa et de Cayo Hueso, étaient regroupés dans les Clubs, à leur tour fédérés par le Parti Révolutionnaire Cubain. Ils se retrouvaient donc, de fait, dans des unités déconnectées les unes des autres, satellisées par l’éloignement géographique et l’absence de relais organisationnel, bref, complètement marginalisées de la scène politique cubaine. La dissolution du Parti martinien répondait à l’ambition de neutraliser l’élément populaire.

Joel James Figarola a constaté de manière très synthétique la situation des Cubains fin 1898 :

« Sin PRC, sin Asamblea de Representantes y sin General en Jefe, el tríangulo de autoridades de la manigua ha dejado un vacío no susceptible de ser ocupado por nadie. »192

b) L’occupation légale

Brooke, puis Wood, conjointement à leurs démarches visant à neutraliser le bras armé de la République cubaine, à la diviser politiquement et à s’assurer des appuis à Cuba auprès de certains groupes sociaux et politiques ciblés, accordèrent aux questions sociales un relatif soin.

Après les années de guerre, qui avaient rajouté à l’état de grande pauvreté des populations rurales, années de guerre sur lesquelles se greffaient la misère consécutive à la Reconcentration et aux mois de blocus, les mesures sanitaires du gouverneur militaire John R. Brooke, fraîchement débarqué de Porto Rico, prirent des allures de manne publique. Cependant, il faut reconnaître que les déclarations de l’état-major au sujet de l’aide alimentaire et sanitaire apportée par les Etats-Unis furent plus importantes que l’aide elle- même. En fait, l’aide financière dont le gouvernement nord-américain se targuait aux yeux de Cuba et du monde se limita aux trois millions de dollars débloqués pour racheter les armes de l’Armée de Libération. Toutes les autres dépenses furent financées par la collecte de l’impôt193

. L’objectif de ces distributions, sous des dehors humanitaires, consistait tout de même à alléger les peines de la population afin d’y créer un courant de sympathie et de reconnaissance envers les généreux donateurs. Elle consistait aussi à éloigner cette population d’une attitude de mécontentement et de protestation, qui aurait pu renforcer le Gouvernement provisoire révolutionnaire et son bras armé.

Les Etats-Unis, et leurs partisans à Cuba, feraient également valoir ultérieurement l’effort éducatif consenti pendant les années Brooke. Le Gouverneur militaire lança, c’est vrai, les fondations d’une alphabétisation et d’une éducation primaire inaccessible du temps de la colonie à la grande majorité de la population. Mais hormis le fait qu’un gouvernement indépendant cubain aurait pris aussi, en toute logique, ces mesures essentielles, il faut remarquer que cette entreprise éducative mettait en place l’enseignement particulier d’un pays sous influence: la langue anglaise y était enseignée préférentiellement à la langue maternelle, l’enseignement de l’histoire des Etats-Unis remplaçait celui de l’histoire nationale. S’il y eut effort d’éducation, ce fut comme élément stratégique d’une préparation à l’annexion culturelle puis politique. Les phrases écrites par Martí dans « Nuestra América » au sujet de la

culture et de l’enseignement des jeunes nations hispano-américaines, se trouvaient confirmées par leur négation.

Ces démarches sociales, allaient, on le voit, dans le sens du projet annexionniste nord- américain concernant Cuba. Les groupes économiques de pression qui s’étaient ralliés aux Etats-Unis y trouvèrent leur compte, dans la mesure où elles contribuaient à éloigner le pays du radicalisme social du projet de Martí. Les secteurs modérés de l’indépendantisme – dont Estrada Palma allait se révéler le leader –, tout en soutenant de bonne foi l’indépendance de Cuba et sans rechercher l’annexion aux Etats-Unis, virent, dans ces formes éventuelles d’indépendance sous tutelle, la garantie du maintien de l’ordre social et de l’évolution économique194. Ils voteraient ultérieurement l’Amendement Platt.

Autrement dit, toute l’aile indépendantiste opposée à un quelconque bouleversement social allait se retrouver dans un schéma réactionnaire admettant les liens organiques de la dépendance avec la nouvelle métropole politique et économique. Cet arrangement était prévisible depuis les premiers mois de l’occupation, si ce n’est depuis plus longtemps encore.

A partir du 1er Janvier 1899, le gouvernement militaire nord-américain légitimé allait continuer sa stratégie de scission des forces politiques révolutionnaires et de recherche d’appui chez les Cubains. Le destin de Cuba alors n’était pas encore scellé puisque, malgré les intentions ouvertement annexionnistes de Mac Kinley, puis de T.Roosevelt, la décision demeurait dans les mains des institutions politiques des Etats-Unis. Elle dépendait également, il ne faut pas l’oublier, de l’attitude des Cubains eux-mêmes. Or, nous l’avons dit, malgré la désunion des indépendantistes, malgré leur position de faiblesse, malgré les alliances de certains groupes d’intérêt avec les Etats-Unis, les Cubains se montraient réticents et rebelles.

Ce fut pourquoi le Général Wood appela, le 25 juillet 1900, à l’élection d’une Assemblée constituante. Les Etats-Unis renonçaient donc à instaurer un gouvernement civil dirigé par un Nord-américain avec une collaboration cubaine, comme cela venait d’être fait à Porto Rico après que le Congrès nord-américain eut voté le « Foraker Act », le 12 avril 1900. Signalons que le mode de suffrage imposé à Cuba, que l’on aurait pu qualifier de censitaire s’il n’avait reconnu, par force, le droit de vote aux anciens soldats de l’Armée de Libération, était élitiste et restrictif : il excluait la majorité populaire. Signalons également que dans sa convocation officielle, le gouverneur donnait explicitement ses consignes quant au contenu de la Constitution. Elle devait comporter une partie concernant les relations qui devraient exister entre les Etats-Unis et Cuba.

Le profil de l’Assemblée Constituante se dessinait comme une continuation de l’Assemblée du Cerro195. Le 5 novembre, elle débutait ses travaux. D’entrée, le groupe à

l’indépendantisme le plus « radical » – représenté par Manuel Sanguily, Juan Gualberto Gómez et Salvador Cisneros Betancourt – se refusa à inclure dans la Constitution une question relevant de la politique extérieure de la Nation. Ils réussirent à imposer cette perspective, et à faire reculer le gouvernement militaire. Le 24 février 1901, la Constitution, qui resterait en vigueur jusqu’au 11 mai 1928, fut votée et promulguée.

Le travail des Commissions parlementaires continuait. L’une d’elles étudiait le problème nord-américain. Cette Commission, dans laquelle les Indépendantistes étaient représentés par Juan Gualberto Gómez, maintint la position de principe au sujet du cadre gouvernemental de l’établissement des relations internationales. Entre naïveté et bluff, les Cubains tentaient d’imposer leur autonomie en s’appuyant sur la « Joint Resolution » ou le Traité de Paris, textes qui reconnaissaient le principe de l’Indépendance de Cuba. Devant la résistance cubaine, et l’évidente impossibilité d’imposer à l’Assemblée l’acceptation d’une dépendance constitutionnelle, Mac Kinley, Elihu Root et Platt, contournèrent le problème en élaborant un amendement – fort discutable du point de vue des principes du droit international – que le Congrès des Etats-Unis voterait le 2 mars 1901196

.

Inclus dans le budget militaire, il imposait légalement le principe de l’intervention des