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Une étape essentielle

Les Guerres de l'Indépendance cubaine

A. Origines historiques

II. Les Guerres : périodisation et continuité

2) Une étape essentielle

La « Guerra Chiquita » semblerait témoigner essentiellement de la permanence des aspirations indépendantistes. Pourtant – et c’est bien ainsi que l’interprétèrent les élites créoles blanches – elle était avant tout motivée par des causes sociales.

L’exigence de l’abolition fut en effet la raison première de la nouvelle insurrection, ceci s’inscrivant dans la continuité de Baraguá. Or le Zanjón avait montré que l’abolition immédiate ne serait réalisée que par la République indépendante. Cet objectif impératif était révélateur du caractère populaire de l’insurrection. Ses cadres militaires et civils ne provenaient plus des élites créoles mais appartenaient au contraire aux couches moyennes et populaires de la société. La « Guerra Chiquita » était l’expression de la volonté du peuple de Cuba par le peuple de Cuba. La réaction des mouvements légaux libéraux – les futurs Autonomistes – s’alliant au gouvernement espagnol et adoptant sa propagande qui réduisait cette guerre à une « guerre de race », confirme que c’était aussi la perte du contrôle des élites sur le mouvement révolutionnaire qui posait problème. De leur point de vue, les Créoles blancs ne pouvaient tolérer que la « populace » – ce peuple noir, blanc ou mulâtre – prît son destin et le destin de la collectivité en main.

D’autre part, la préparation de l’insurrection se démarquait des pratiques antérieures. Nous avons dit comment les séparatistes s’étaient réorganisés isolément et spontanément à Cuba et à l’étranger. L’union presque immédiate de leurs forces rendit possible la révolte. A l’inverse, la révolte reposait alors volontairement sur l’étroite collaboration des foyers séparatistes engagés. Ce fut le début d’une stratégie basée sur la coordination et la collaboration des émigrations. Máximo Gómez, puis Martí et Maceo consécutivement à l’échec de la « Guerra Chiquita », allaient défendre cette position raisonnée d’une période de préparation méthodique de la guerre dans l’émigration et sur le territoire cubain. Leurs avis souvent divergents sur d’autres thèmes, coïncidaient en ce qui touchait à la planification rigoureuse de la Révolution avant et après l’insurrection. Leur point de vue mettrait plusieurs

années à prévaloir au sein des communautés cubaines de l’étranger, du fait de l’existence de tendances que l’on pourrait qualifier de groupusculaires. A partir de 1886-1887, la nécessité de réunir tous les patriotes au sein d’un parti commença à s’imposer chez des dirigeants comme Maceo, Eusebio Hernández ou Martí. La structuration de toutes les composantes du mouvement s’accomplirait au moyen du Parti Révolutionnaire Cubain créé en 1892.

Pour finir, la « Guerra Chiquita » allait amener ses chefs révolutionnaires à tirer quelques leçons de leur échec militaire. Máximo Gómez, nous l’avons signalé, avait depuis longtemps posé le problème déterminant de la stratégie militaire. Il est vrai que, génie mis à part, sa connaissance et sa pratique de toutes les régions de l’île lui avaient permis d’acquérir une vision globale de la situation. Maceo réalisa, en 1880, que les « mambis » avaient besoin, pour gagner, non seulement d’armes et de soutien populaire, mais aussi d’une stratégie conquérante. Les Cubains ne pouvaient se contenter de mener une guerre de guérilla. Il fallait donc repenser cette question tactique, qui avait jusqu’alors été déterminée par les circonstances locales et conjoncturelles. A ce titre, l’apport de Máximo Gómez – le concepteur de l’Invasion – allait être fondamental. Son retour actif sur la scène révolutionnaire correspondait à la proposition du Programme de San Pedro Sula, le 30 Mars 1884. C’était, certes, un plan d’organisation de l’insurrection mais il soulignait également quelques exigences militaires. Maceo se rangea à ce projet et exigea ultérieurement la nomination de Gómez au Haut Commandement de l’Armée de Libération, ce qui équivalait à adopter sa vision tactique.

Un autre des enseignements tirés de la « Guerra Chiquita » fut celui de l’évaluation des concessions à faire pour complaire aux potentiels sympathisants. Nous l’avons dit, la propagande espagnole, dont les libéraux cubains se faisaient l’écho sur ce point, jouait sur la « peur du Noir ». Or, au sein des émigrations patriotiques, cette soi-disant menace – qui était d’autant plus imaginaire que la hiérarchie et le contingent des insurgés de 1879 étaient mixtes – provoquait de fortes réticences. Ce fut la raison pour laquelle Maceo fut écarté du Haut Commandement par le Comité, au profit du Brigadier Benítez – qui n’était pas reconnu en Oriente et n’était pas bien accepté au Camagüey. Ce fut également la raison pour laquelle Maceo fut démis de sa charge de Commandant de la Région orientale. Ce fut enfin la raison pour laquelle le Président García rejoignit Cuba pour diriger l’Armée alors que Maceo restait à Kingston. La Révolution, se privait une fois de plus d’un chef militaire de première qualité et au charisme inégalé en Oriente. Si ce genre de concession n’aurait pas lieu tant que Martí,

Maceo et Gómez se trouveraient aux commandes du mouvement insurrectionnel, il redeviendrait hélas d’actualité vers 1896170.

Ajoutons en guise d’épilogue que bien que l’Espagne ait tenté d’éliminer ces chefs insurgés irréductibles171

, et bien que l’émigration séparatiste ait été divisée pendant plusieurs années, la période du « Reposo turbulento », le bien-nommé, fut riche en projets et en tentatives insurrectionnelles.

Dans les années 1880-1886, d’une part, plusieurs entreprises – soutenues par le Comité patriotique de New-York partisan d’une reprise immédiate de la guerre – furent risquées : Bonachea en 1883, Agüero 1884, Limbano Sánchez en 1885. Mais sans réelle coordination, sans appui sur le terrain, ces insurrections isolées échouèrent. Ultérieurement, le phénomène se raréfia, conséquence de l’entreprise d’unification des émigrations et d’organisation des séparatistes à l’intérieur du pays, établies sur le constat de l’obligation d’une lente préparation. Néanmoins, depuis Cuba ou depuis l’étranger, quelques essais furent envisagés ou tentés, mais toujours voués à l’échec. Polavieja contraignit Maceo à renoncer en 1890, les frères Sartorius – anciens Autonomistes qui n’intégrèrent pas le mouvement martinien – furent vaincus en 1893, comme le fut le Général Periquito Pérez la même année. Pourtant, ces tentatives dispersées entretinrent certainement l’esprit de la rébellion. D’une certaine manière, elles préparèrent également la Révolution suivante.

C.

La « Guerra de 1895 »

L’insurrection du 24 février 1895 et la guerre qu’elle déclencha, préparées de longue date dans les émigrations et à Cuba, donnent le sentiment de ne rien avoir laissé au hasard. Martí considérait que le signal de l’insurrection devrait être donné depuis Cuba et que le Parti Révolutionnaire Cubain se devrait alors de l’appuyer. En 1893-1894, les séparatistes de Cuba – leur réseau172 étant étendu sur l’île entière depuis fin 1892 – montraient des signes

d’impatience. L’espionnage espagnol se montrait en alerte. Au même titre que des tentatives insurrectionnelles isolées, une offensive espagnole visant à démanteler ce tissu conspirateur, compromettrait tout le projet.

Le Délégué du Parti décida alors de mettre à exécution le Plan de Fernandina, qui réglait le débarquement, si possible simultané, des chefs révolutionnaires et de leurs troupes.

Les autorités nord-américaines arraisonnèrent les navires cubains le 6 janvier 1895, ruinant apparemment l’espoir d’une insurrection prochaine. Cependant, Enrique Collazo et Mayía Rodríguez, chef de l’état-major de Gómez, soutinrent l’option du déclenchement immédiat de la Révolution, et donnèrent à Juan Gualberto Gómez l’autorisation du soulèvement pour la fin février. La « Junta de La Habana », après avoir reçu les rapports des émissaires envoyés dans les régions, fixa la date au 24 février 1895.

La campagne militaire fut une campagne magistrale, quoi qu’en aient dit par la suite la propagande des « sauveurs » nord-américains ou celle des Cubains désireux de justifier la permanence de leur tutorat. Du point de vue politique, la République en Armes, établie dans la « manigua » et destinée à assurer la continuité du projet démocratique lors de la transition de la guerre à la paix, allait acquérir une dimension exemplaire. Enfin, du côté de l’émigration, elle assura d’abord son rôle d’auxiliaire des révolutionnaires, avant qu’Estrada Palma n’infléchisse sa politique. Ce sont ces trois aspects – le militaire et le politique à Cuba, l’émigration essentiellement aux Etats-Unis – que nous allons aborder à grands traits, afin d’en mettre en relief les caractères essentiels, dans les lignes qui suivent.

1) Périodisation

Du point de vue tactique, la guerre de 1895 fut menée en deux temps. La première phase se joua dans les régions. Il s’agissait d’une part d’asseoir la Révolution dans les régions-clefs et particulièrement l’Oriente. Il s’agissait par ailleurs de permettre et de protéger les débarquements des contingents de renfort et des dirigeants politiques et militaires de la Révolution. La deuxième phase débuta avec la fin de la Campagne d’Invasion, qui avait amené les « Mambis » jusqu'à l’extrémité occidentale de l’île. La guerre acquérait alors une dimension nationale.

Le soulèvement en Occidente ne remplit pas les espérances initiales : non seulement il ne fut pas massif, mais il fut de plus limité par des arrestations ou des disparitions précoces173.

Dans la province de Las Villas, il y eut également des défections ou des contretemps dus à la répression et à l’intervention du Parti Autonomiste. En Oriente, en revanche, l’insurrection se révélait un succès éclatant. Dans les premières semaines, Guillermo Moncada et Bartolomé Masó en furent les garants. Face à la réponse armée espagnole, et aux tentatives de

déstabilisation et de conciliation du Parti Autonomiste – conformément à ses interventions en 1893-1894, et qui aboutirait au Manifeste, publié dans El País du 5 avril, condamnant l’insurrection – il fallait assurer la résistance. Mais dès le 29 mars 1895, Maceo arrivait à Cuba. Crombet accostait le 1er Avril. Le 11, Máximo Gómez et José Martí débarquaient à Playitas. Leur retour sur le territoire national fut déterminant : il provoqua en quelques semaines l’intégration de centaines de combattants et un fort soutien populaire174.

Le 5 mai, Martí, Gómez et Maceo se réunissaient dans la propriété de La Mejorana, afin de planifier le cours de la Révolution dans ses versants politiques et militaires. Il fut accordé que Maceo regagnerait l’Oriente, y organiserait l’Armée afin de prendre la région. Máximo Gómez partirait pour le Camagüey afin d’y renforcer l’insurrection et de préparer les bases avancées de l’Invasion prochaine.

La Campagne d’Oriente débuta le 6 mai, sous le commandement unique d’Antonio Maceo. Du premier combat victorieux à Jobito, en passant par la bataille déterminante de Peralejo le 13 juillet – au cours de laquelle l’Armée de Libération défit une importante colonne espagnole commandée par Martínez Campos lui-même l’obligeant à se replier – jusqu’au terme de la Campagne, Maceo et ses troupes remportèrent victoire après victoire. L’Armée espagnole était contrainte de se maintenir sur des positions défensives : elle se révélait incapable, cette fois, d’isoler les troupes insurgées dans la région. Bien au contraire, début octobre 1895, l’Oriente était « mambí ».

Entre-temps, Máximo Gómez, après la mort de Martí le 19 mai 1895 à Dos Ríos, avait rejoint la province de Camagüey. Sa campagne circulaire se soldait positivement. Gómez put ainsi organiser le Troisième Corps de l’Armée de Libération, celui de la région de Camagüey. Il se consacra ensuite à préparer la route pour que Maceo puisse le rejoindre. Ce fut le cas en Octobre.

Le 22 octobre, alors que Maceo était déjà en route, Gómez franchit la Trocha et partit vers Las Villas pour créer une diversion. Le 24 novembre, Maceo, à son tour, franchissait la Trocha – la « passoire » préférée des auteurs que nous étudierons. Les deux Corps de l’Armée se réunirent au lieu-dit Lázaro López, le 29 novembre. L’Armée de Libération se composait alors de quelques milliers d’hommes. L’Invasion d’Occidente débutait, l’Armée de Libération entrait dans une période difficile. Envahir l’Occidente, c’était d’abord traverser la région de Las Villas, sur laquelle Martínez Campos s’était replié et dont il comptait faire un rempart infranchissable : plus de trente mille hommes l’occupaient.

L’inventivité – le génie – des stratèges « mambis », dont les audaces tactiques reposaient en partie sur la mobilité des bataillons et leurs « charges à la machette », révéla, mi-décembre, à Mal Tiempo, que l’Armée espagnole n’était plus invulnérable. Martínez Campos se replia avec son Quartier Général à Colón. Le 20 décembre, les Cubains pénétraient dans le centre de la zone de Matanzas. C’était un moment crucial pour l’Invasion : Matanzas, en effet, était une des régions de plus grosse production sucrière ; elle était par conséquent quadrillée par des infrastructures – voies ferrées mais aussi voies de communication – aux mains de l’Armée espagnole dont la présence était massive et les déplacements aisés. Gómez et Maceo scindèrent l’Armée de manière à ce que ses différents Corps puissent se couvrir respectivement. Ils progressèrent ainsi jusqu'à la fin de l’année.

Pour la nouvelle année, le 1er Janvier, l’Armée de Libération entrait dans la province de La Havane. Cette Campagne qui durerait jusqu’au 22 février, est caractérisée par l’extrême mobilité de Gómez, refusant les combats qu’il ne souhaitait pas. Pendant ce temps, Maceo progressait et dépassait Pinar del Río. Le 22 janvier 1896, le drapeau de la République en Armes flottait sur la ville la plus occidentale de l’île : Mantúa.

En quelques mois, l’Armée de Libération était présente dans toute l’île : la guerre était devenue nationale. L’Armée était en mesure de freiner ou d’empêcher la production sucrière qui, pendant la Guerre de Dix Ans, avait financé les Espagnols : la « Tea » se pratiquait à nouveau. L’impôt révolutionnaire était l’alternative proposée aux planteurs pour que leurs champs ne soient pas brûlés. Partout, l’Armée pouvait compter sur l’appui des populations civiles. Elle était, de plus, devenue une armée nationale dans la mesure où les officiers et leurs contingents n’étaient plus affectés préférentiellement dans leur région d’origine, mais opéraient, réunis sous un commandement supérieur, partout où l’on avait besoin d’eux sur le territoire.

L’arrivée de Weyler à Cuba, en remplacement de Martínez Campos, le 10 février 1896 fut fort bien accueillie par les intégristes. Le gouvernement espagnol de Cánovas del Castillo répondait par l’intransigeance, assurant que l’Espagne défendrait son territoire jusqu’au dernier homme et jusqu'à la dernière peseta. Weyler fut l’exécuteur de cette décision de guerre massive et à outrance. Dès le 16 février, il avait commencé sa politique de « Reconcentration » des populations civiles, autour des centres urbains tenus par les Espagnols : il s’agissait de priver les « Mambis » du soutien effectif – alimentaire, matériel, informatif – des civils. La population était rassemblée et maintenue dans des sites qui

deviendraient de véritables mouroirs, du fait des conditions inhumaines de misère et d’abandon dans lesquelles les autorités laissèrent ces gens. La Reconcentration traduisait le profond mépris avec lequel était considérée la vie des Cubains d’origine populaire. Elle s’appuyait aussi sur la fortification des cités. Sur le plan militaire, son objectif premier était le renforcement du front occidental. Cela était destiné à permettre la reprise des activités économiques : la nécessité de permettre la « zafra » était permanente chez Weyler puis chez Blanco. Il s’agissait également de contraindre progressivement les « Mambis » à se replier sur l'Oriente, de les y circonscrire, et de « pacifier » ce qui deviendrait le dernier bastion des indépendantistes. Pour mener à bien le premier volet de son opération, Weyler créa un réseau de fortifications et de tranchées, destinées à gêner les mouvements des « Mambis » et à isoler les troupes les unes des autres. Les efforts de Weyler portaient donc essentiellement sur les provinces de La Havane, de Matanzas et de Pinar del Río : elles étaient extrêmement équipées, particulièrement fortifiées et occupées par des troupes exceptionnelles en nombre .

Maceo et Gómez ne purent se rencontrer avant le 10 mars. Ils décidèrent de scinder l’Armée « mambise » en plusieurs corps, affectés dans différentes régions du pays. Néanmoins, à leurs yeux comme à ceux de Weyler, la région déterminante était toujours l’Occidente. Maceo, à la tête du Sixième Corps, fut affecté à la cruciale Campagne d’Occidente. Au fil des mois, du fait des efforts de Weyler et des problèmes d’approvisionnement de l’Armée de Libération, sa situation allait devenir très critique. Néanmoins, Maceo et son armée tenaient depuis les montagnes de la région. Gómez, lui, était reparti vers le Camagüey et Las Villas, provinces qui constituaient les arrières de Maceo. De là, il tenta d’obtenir du gouvernement, les aides nécessaires, avant de rejoindre son Lieutenant Général en Occidente. Le gouvernement cubain tardait à renforcer Maceo et à envoyer des renforts. Nous reviendrons sur ce conflit qui amena Gómez à mettre sa démission dans la balance.

En 1896, la situation du front oriental, qui n’était pas mauvaise, allait s’améliorer et compléterait un bilan plutôt positif pour les révolutionnaires. Calixto García débarqua enfin le 24 mars 1896, avec l’expédition du « Bermuda ». Il prit le commandement militaire de la région, dont il réorganisa les troupes qui avaient tendance à se disperser. Il concentra également ses efforts sur l’asphyxie du commerce régional (cacao, café) et l’isolement des villes. Parti à la rencontre du Général en Chef Máximo Gómez, à La Yaya (Camagüey), ils élaborèrent là un plan de coopération stratégique de quelques mois pour la région de Holguín. Pour la première fois, à Loma del Hierro, les Cubains utilisèrent de l’artillerie lourde.

Début septembre, Calixto García se préparait à rejoindre les forces de Máximo Gómez au Camagüey afin d’y lancer une nouvelle offensive : à la fin du mois d’octobre, les troupes espagnoles s’étaient retirées de plusieurs forts et abandonnaient les zones rurales aux « Mambis ». García rejoignit alors l’Oriente, et appliqua la même tactique. Par les attaques de convois et de colonnes en manœuvre, il affaiblissait l’Armée espagnole, lui interdisait les campagnes, la cantonnait dans les villes avant de s’en emparer.

La mort de Maceo, le 7 décembre, remit la stabilité du front occidental en cause. Pour soulager l’Armée du Lieutenant Général, Máximo Gómez préféra renoncer à une nouvelle avancée vers l’Occidente et attira les troupes de Weyler – qui estimait qu’une fois Maceo disparu, il ne restait qu’à éliminer Gómez pour que l’Espagne sortît victorieuse. Cette campagne, dite de La Reforma, dura pendant une année dans le Centro. Elle paralysa l’activité économique et libéra le front occidental. Avec l’été, la mobilité de l’Armée « mambise » et son endurance, contrastaient avec l’épuisement de troupes espagnoles décimées par les maladies tropicales175.

Pendant ce temps, les Etats-Unis s’intéressaient de plus en plus près au conflit hispano-cubain. La neutralité annoncée par les autorités le 12 juin 1895 n’avait jamais été réelle. Les Nord-américains – l’affaire de la Fernandina en était une des premières manifestations –, n’avaient eu de cesse de poursuivre et d’empêcher les activités des Cubains de l’Emigration. Vis-à-vis de ses relations avec l’Espagne, le gouvernement des Etats-Unis s’était montré favorable à une solution négociée interne.

Puis le conflit à Cuba s’était radicalisé ; des contacts s’étaient établis entre la bourgeoisie cubaine qui venait s’abriter à New-York et ses homologues. L’on avait commencé à trouver toutes sortes d’intérêts à Cuba. La campagne de presse de Randolph Hearst avait débuté en janvier 1897. En mars, Mac Kinley prenait ses fonctions présidentielles. Son gouvernement intervint auprès de l’Espagne pour la pousser à proposer une solution qui éviterait l’Indépendance de Cuba : l’autonomie ou le rachat (une proposition fut faite en juin). Le gouvernement espagnol de Cánovas del Castillo avait commencé à étudier la solution politique qui lui permettrait, pensait-il, de garder Cuba, en s’appuyant sur la bourgeoisie et les Autonomistes historiques : l’octroi d’un statut autonomique à Cuba. La disparition de Cánovas, soutien de Weyler, amena un autre changement. Le 31 octobre,