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Carte 2 : Régions s’approvisionnant de la région de Khouribga

4) Pratiques commerciales et rôle dans la filière

Ventes et achats

L'achat constitue une fonction principale pour les maquignons, car c'est là qu'il faut faire des choix et prendre des décisions en matière de prix, choix des souks, de la catégorie et l’état des animaux à acheter et

qui dépend généralement du type de la clientèle et des périodes de l'année. Le volume de temps consommé par cette opération est très important surtout pour ceux qui s'approvisionnent sur des régions éloignées de leur résidence.

L'opération de vente constitue l’étape finale de leur activité et par conséquent ils lui accordent le maximum de soins et de temps. En plus du temps réservé strictement à la vente, s'ajoute celui des contacts et des déplacements.

Par ailleurs, les relations sociales dans cette activité constituent le point le plus fondamental pour la réussir et la mener à bien. A travers la ventilation de leur vente, il ressort que les maquignons de Khouribga entretiennent de bonnes relations avec les opérateurs externes, notamment ceux de l'aval de la filière. Aussi, leur déplacement en dehors de la région de Khouribga pour vendre leurs produits sur des souks externes constitue un autre indicateur de leur position dans les maillons des circuits de commercialisation des ovins.

La collecte des animaux

Ils assurent la collecte des animaux dans la zone de production en achetant sur les souks aux éleveurs ou aux maquignons locaux. Les catégories d’animaux achetés sont généralement le bélier, l’antenais, l’antenaise, l’agneau, l’agnelle et parfois les animaux d’élevage quand les conditions climatiques sont bonnes. L’achat des animaux maigres se fait généralement pendant les mois de Septembre- Octobre pour les préparer pour la période de forte demande et aussi pour l’Aid ; ils sont achetés engraissés ou maigre pendant les autres périodes en adoptant la stratégie de tri. Les animaux maigres sont gardés pour l’engraissement. Le tri peut être appliqué aussi sur les animaux engraissés en vue de les vendre sur les souks locaux ou externes sous forme de lots plus au moins homogène.

Cette collecte est très dépendante des variations saisonnières de la production locale et aussi de la production des autres régions, notamment celles du Moyen Atlas pour l’alimentation de la région de Khouribga par les agneaux et les agnelles pendant le printemps et les caprins durant la période de septembre à octobre.

Ajustements face aux aléas climatiques

En période de bonnes conditions climatiques, la marchandise offerte sur les marchés est plus rare. Les maquignons achètent et vendent sur place car ils sont très concurrencés par les éleveurs. Ceux-ci en effet retiennent leurs animaux aussi longtemps que leur alimentation ne leur coûte pas cher. Au printemps et en été, ils peuvent vendre quelques agneaux sans discuter le prix offert car ils sont contraints par les dépenses des moissons, du crédit et autres dépenses familiales en cette période.

Par contre, en mauvaises conditions climatiques, les maquignons optent pour l’achat de toutes les catégories d’animaux. Leur stratégie résulte de la disponibilité permanente de la marchandise sur les souks et ce pour des prix bas car l’éleveur en ces périodes s’intéresse beaucoup au cheptel reproducteur et vend tout le reste des catégories (surtout pour les ovins). Parfois, il décapitalise si les conditions climatiques sont très sévères. Les maquignons collectent les animaux maigres sur les marchés avec des prix très bas, font leur tri, pratiquent l’engraissement et mettent sur les marchés de la marchandise prête à l’abattage. Ils ont ainsi un rôle important de régulation des flux.

Stockage et/ou engraissement

En période de forte production, les maquignons ne font pas d’engraissement et par conséquent ils adoptent une nouvelle stratégie d’achat et de vente différente des autres périodes. Ils achètent et vendent directement aux souks mais en gardant les animaux maigres pour la constitution des stocks. De même, cette période se caractérise aussi par une forte concurrence entre les éleveurs et les maquignons du fait que les éleveurs ne cherchent pas des marges aussi élevées que les maquignons.

Les quantités d’animaux engraissés par les maquignons de la région de Khouribga, et la période d’engraissement constituent des éléments importants d’attraction des chevillards des autres régions surtout qu’il y a une coïncidence de cette période avec celle où ces derniers viennent sur la région à la recherche des animaux engraissés.

Tri

Cette opération est très importante du fait que les éleveurs vendent leurs troupeaux aux maquignons sans faire des tris. Par contre, les professionnels qui font l’engraissement des animaux maigres et la revente directe sur les souks des animaux engraissés sont donc obligés de trier leur troupeau en vue de constituer des lots homogènes.

Mise en relation des chaînons amont et aval de la filière

Leur rôle principal est la collecte d’animaux sur les souks des régions avoisinantes pour approvisionner le souk de Lagfaf, les bouchers et les maquignons de Khouribga (60% de leurs ventes d’ovins) et les chevillards des grandes villes du Maroc (20% de leurs ventes d’ovins).

Sur le souk, les petits et les moyens maquignons qui font la collecte des animaux soit par petit lot ou un par un, achètent de leurs homologues petits et moyens éleveurs qui vendent eux aussi par petit lot ou un par un.

Il faut distinguer d’une part les animaux finis et d’autre part les animaux maigres. Les animaux qu’ils vendent aux maquignons de Khouribga sont des animaux maigres destinés à l’engraissement : 3 000 têtes ovines, 1 800 têtes caprines et pas de bovins. Le reste est constitué d’animaux prêts à l’abattage. La collecte du reste des animaux finis s’effectue auprès des éleveurs engraisseurs.

L’expédition d’animaux vers les autres zones du pays, jouant ainsi le rôle d’intermédiaire pour les acheteurs lointains (51% des caprins), reste minoritaire pour les activités ovines et bovines en dehors de la fête.

Rôle financier

Dans d’autres régions, les maquignons jouent un rôle financier important en faveur de leurs clients, comme il est joué en leur faveur par les producteurs (Khalil, 1997). Les maquignons locaux ne jouent pas ce rôle au sein de la filière de la région de Khouribga. Les opérations de vente et d’achat se paient en général le jour même.

Informations sur les prix

Les maquignons adoptent une stratégie en matière d’information sur les prix qui consiste à des contacts personnels avec leurs homologues de la région et parfois ceux des autres régions par téléphone. Les informations s’échangent dans les deux sens, surtout si la demande est très forte, en plus des contacts et des investigations auprès de ceux qui ont des relations avec tous les souks de la région économique de Casablanca et Rabat.

La veille du souk, l’arrivée de certains maquignons externes sur la région constitue une autre source de comparaison d’information sur les prix. Pour les maquignons, il s’agit d’une sorte de sondage sur la quantité et l’état des animaux qui vont être présentés sur le souk.

Ensuite, très tôt le matin, le maquignon fait une tournée au souk pour sonder la qualité, les prix, l’état des animaux présentés au souk et le nombre de maquignons externes présents sur le souk. C’est à partir de ces éléments qu’il prend ses décisions d’achat. Bien que parfois certains d’entre eux n’ont plus le choix car ils ont des commandes.

De même, le fait que les maquignons veulent acheter très tôt le matin avant l’entrée au souk, constitue aussi un autre indicateur sur les prix.

Pour les transactions lointaines, les communications téléphoniques jouent un rôle non négligeable en matière d'informations sur les prix.

4.4.2. Activité commerciale des chevillards

Il s’agit d’opérateurs implantés sur un abattoir de grande ville, qui achètent des animaux vivants, les font abattre et vendent la carcasse à des détaillants. L’enquête a porté sur 5 chevillards, dont 3 chevillards de Casablanca, un de Rabat et un de Tanger. Ces opérateurs traitent environ 18 000 têtes ovines et 200 têtes

bovines. Parallèlement à leurs activités de commerce, ces opérateurs sont tous éleveurs, petits, moyens ou grands. Certains d’entre eux habitent en ville. L’activité d’éleveur leur permet de pratiquer le stockage et le report d’animaux vivants. Contrairement aux maquignons, ils sont tous équipés de moyens de transport (camions) propres.

Les achats sur les souks constituent la totalité du volume de leurs activités. La plupart des achats sur les souks (90%) se font auprès d’éleveurs directement. Le recours aux maquignons est un appoint. Cette situation leur permet de profiter de la faiblesse du pouvoir de négociation et des besoins immédiats en argent liquide des petits et des moyens éleveurs. Par leur approvisionnement d’une part et leur métier d’autre part, ces chevillards entretiennent de très fortes relations avec l’amont de la filière « producteurs ». Ils achètent généralement des béliers, des antenais, des antenaises, des agneaux, des agnelles et parfois quelques un d’entre eux achètent des brebis de réforme notamment pendant l’été car elles sont bien engraissées.

La clientèle des chevillards est constituée des bouchers (Casablanca, Tanger, Rabat).

Comme les maquignons, les chevillards assurent les fonctions de collecte, de tri, et d’ajustement face aux aléas du marché et du climat, stockage en vif et engraissement. De par leur position au sein de la filière, ils remplissent aussi d’autres fonctions:

1) Régulation du marché et mise en relation de marchés lointains

En achetant aux éleveurs ou aux maquignons locaux de façon régulière dans la région de Khouribga, ils engendrent pour l’amont de la filière une certaine stabilité dans l’écoulement de la marchandise ce qui permet aux éleveurs de s’occuper pendant certaines périodes de l’année de leur capital productif.

Par ailleurs, de par les ventes de leurs stocks aux différents opérateurs notamment à l’aval de la filière, les chevillards contribuent en partie à la régulation du marché des viandes rouges dans les grandes agglomérations urbaines (Casablanca, Tanger et Rabat etc.) et pendant les fêtes nationale et musulmanes.

2) Rôle financier

Les circuits, tels qu'ils sont organisés, mettent ces opérateurs en contact avec l'ensemble des intervenants de la filière. Leur position dans cette filière leur impose d’être plus souple dans leurs achats, parfois par crédit vis à vis de leurs clients et de leurs fournisseurs.

Cependant, les intervenants dans la filière des viandes rouges de la région de Khouribga ne préfèrent pas les ventes à crédit car ils peuvent créer des problèmes en cas de non paiement ou des paiements retardés, ce qui peut affecter le déroulement normal de leurs activités ainsi que leurs relations (sauf pour le chevillard qui vend par confiance aux bouchers).

3) Vente en confiance

Les chevillards la pratiquent couramment. Cette pratique exige de disposer de moyens financiers importants. Le délai généralement consenti aux bouchers est d’une à deux semaines.

4) Information sur les prix

En matière d'information sur les prix, les chevillards sont très organisés de telle manière qu'ils connaissent même le prix en Kg carcasse et Kg en détail. Cette situation leur est facilitée par l’intensité des relations qu'ils entretiennent avec l'amont et l'aval de la filière.

4.4.3. Le comportement commercial des éleveurs. 1) Partenaires de la première mise en marché

Les éleveurs de Aït Ammar vendent la totalité de leurs animaux sur le souk de Lagfaf, sauf une partie des animaux préparés pour l’Aïd El Kebir et vendus dans les grands centres urbains (Rabat, Salé, Tanger). Aucune vente ne se fait à la bergerie, comme c’est le cas dans l’Oriental.

La répartition des 2 533 ovins vendus par les éleveurs enquêtés est la suivante :

ÿ Vente directe au consommateur, (Aïd El Kebir) : 911 têtes 36%

ÿ Vente à des chevillards de Casablanca, Rabat, Tanger : 1442 têtes 57%

ÿ Vente à des maquignons extérieurs : 167 têtes 7%

ÿ Vente à des maquignons locaux : 12 têtes 0,4%

Il est très important de noter que la plupart de ces éleveurs vendent directement aux chevillards (aval de la filière). Cette pratique est acquise vu leur proximité des grandes agglomérations urbaines de consommation et que la zone dispose d’un souk de bestiaux très connu à l’échelle nationale (Lagfaf). Les éleveurs de la zone de Lagfaf sont connus comme des éleveurs engraisseurs pour les bovins et les ovins. Et constitue un pôle d’attraction pour les chevillards et les maquignons. Ceci prouve que cette catégorie d’éleveurs devient de plus en plus consciente de l’ouverture sur l’économie du marché pour mieux valoriser leurs produits.

Les éleveurs de la zone de Lagfaf vendent aussi plus de la moitié de leurs ovins à des chevillards. Mais la vente directe lointaine d’ovins pour l’Aïd El Kebir semble de moindre importance : 10%, contre 36% à Aït Ammar.