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Des pratiques qui évoluent selon les périodes et la conjoncture économique

Encadré 2.1 : Présentation des deux sources de données : les E MMO D MMO et les EAE

3 Evaluation empirique des facteurs explicatifs du recours aux deux motifs du licenciement

3.2 Des pratiques qui évoluent selon les périodes et la conjoncture économique

L’empilement des dix bases de données biennales permet d’estimer un probit bivarié en

ajoutant des variables croisées entre chaque année et chaque variable explicative utilisée dans le modèle précédent (3.2.1). Les résultats vont nous permettre de comparer l’évolution des

liens entre les variables explicatives et le recours au LMP d’une part (3.2.2), puis d’étudier

des différences d’effets, selon l’état de la conjoncture économique, de ces mêmes variables sur le recours au LME d’autre part (3.2.3).

3.2.1 Le modèle empilé avec effet temporel

A partir du modèle probit bivarié sur données en coupe de la section précédente, le modèle suivant ajoute un vecteur de variables correspondant à l’ensemble des périodes biennales et le croisement de cette variable avec les trois vecteurs de variables explicatives présentés précédemment. Ce probit bivarié sur données empilées permet de comparer l’effet des variables explicatives selon les périodes, tout en contrôlant de l’interdépendance des décisions des deux types de licenciement. On spécifie donc le modèle de la manière suivante :

{ ∑ ∑ ∑ ∑ ∑ ∑ ∑ ∑ avec i l’entreprise ; t = 1999-2000, 2000-2001, …, 2008-2009 ; si t = 1999-2000, 0 sinon, si t = 2001-2002, 0 sinon, si t = 2002-2003, 0 sinon, etc. La période 2000-2001 a été choisie comme la période de référence78. Les vecteurs des coefficients (resp. ) correspondent aux effets des vecteurs de variables W, X et Z sur (resp. ) pour la période de référence ; tandis que les vecteurs , et (resp. , et ) donnent l’effet spécifique de chacune des neufs périodes relativement à la période de référence 2000-2001 sur (resp. ). Ainsi, l’éventuelle significativité des coefficients , et (et de , et ) va nous permettre de révéler l’existence d’effets périodes, alors que la valeur de ces coefficients nous indique si les effets des variables explicatives fluctuent ou non dans le temps. L’hypothèse principale recherchée est une

amplification de l’influence des variables économiques sur le recours au LMP, à travers

notamment le développement des formes de management par objectif (cf. 1.2.2).

3.2.2 Une évolution spécifique des liens entre les variables explicatives et le recours au LMP sur la période ?

D’après le Tableau 2.4 ci-dessous qui récapitule les résultats concernant le recours au LMP, il

semble difficile de conclure à une évolution générale à la hausse ou à la baisse de l’effet des

variables économiques sur le recours au LMP entre 2000 et 2009. Si l’on prend par exemple

78

Pour faciliter la comparaison entre périodes, 2000-2001 est choisie comme la période de référence car elle correspond à une période de conjoncture moyenne (1,8 %) au début de notre période d’étude.

le ratio RCAI/CA, il apparaît que l’effet de cette variable sur le recours au LMP est

sensiblement différent pour la plupart des périodes (sauf 2006-2007 et 2007-2008) par rapport à 2000-2001. Plus précisément, l’effet du RCAI/CA est toujours négatif mais moins fort pour les autres périodes que 2000-2001. Concernant l’effet du taux de croissance du CA lorsqu’il est positif et fort, seules les périodes 2001-2002, 2002-2003, 2003-2004 et 2006-2007 montrent un effet différencié de cette variable sur le recours au LMP qui devient même positif pour ces périodes là, mais reste non significatif si l’on se reporte aux résultats des probits bivariés en coupe.

Pour les indicateurs de gestion des ressources humaines, notamment la masse salariale par tête et la part des dépenses salariales par tête, il apparaît une différence d’impact sur le recours au LMP notamment à partir de 2003-2004. L’effet semble moins fort, devenant quasi-nul, en ce qui concerne la part des dépenses salariales par tête et pour certaines périodes. Il est au contraire plus marqué négativement pour la masse salariale par tête.

Ainsi, cette comparaison de la sensibilité des résultats selon les périodes pour le recours au LMP ne semble pas très concluante tant les effets semblent varier de manière aléatoire selon les périodes et les variables explicatives. Par rapport à l’hypothèse énoncée d’une influence des variables économiques sur le recours au LMP qui serait devenue plus forte ces dernières années, nos résultats ne permettent pas de la confirmer. En réalité, ce mouvement ayant

débuté dès les années 1990, cela pourrait expliquer que l’on ne puisse pas le saisir sur notre période d’étude.

Tableau 2.4 : Effet spécifique, selon la période, des variables économiques et de GRH sur le recours au LMP par rapport à 2000-2001 (période de référence) Période 1999- 2000 2000-2001 2001- 2002 2002- 2003 2003- 2004 2004- 2005 2005- 2006 2006- 2007 2007- 2008 2008- 2009 Coefficient de référence Ratio RCAI/CA 0,0033*** -0,0035*** 0,0019* 0,0027** 0,0026** 0,0019* 0,0022** 0,0007 0,0013 0,0030*** Taux de croissance du ratio RCAI/CA négatif -0,0280 0,0499 0,0319 -0,0880* -0,0280 -0,0480 -0,0507 -0,0087 0,0187 -0,0884* positif et fort -0,0730 0,0880** -0,0556 -0,1419*** -0,0889* -0,134** -0,0235 -0,0274 -0,0064 -0,0703 Taux de croissance du CA négatif -0,0388 0,0038 0,0715 0,0782* 0,0455 0,0345 0,0635 0,0615 -0,0090 0,0666 positif et fort 0,0686 -0,0575* 0,0865* 0,1040** 0,0830* 0,0213 -0,0120 0,1183** -0,0398 0,0028

Masse salariale par tête -0,1253** 0,0227 0,0115 -0,0852 -0,1015* -0,0996 -0,1185** -0,1215* -0,1569** -0,0638

Part des dépenses

salariales dans le CA -0,0002 -0,0025*** 0,0008 0,0004 0,0029*** 0,0019** 0,0020* 0,0018 0,0019* 0,0022** Taux d'entrée en CDD 0,0001 -0,0001 -0,0001 -0,0007*** -0,0004 -0,0006** -0,0003 0,0002 -0,0004 -0,0011***

Taux de démission -0,0019 0,0066*** 0,0012 -0,0006 0,0008 0,0039** 0,0062*** 0,0148*** 0,0005 0,0163***

Taux de départ en retraite 0,0091 0,0080 -0,0291** -0,0097 0,0025 -0,0156 -0,0146 -0,0106 -0,0295** -0,0124

Source : EMMO-DMMO et EAE, base empilée 1999-2009, calculs de l’auteur. Champ : entreprises de 10 salariés et plus du secteur marchand hors agriculture.

*** : significativité à 1 % ; ** : significativité à 5 % ; * : significativité à 10 %. L’ensemble des résultats des régressions est reporté en Annexe 2.12 à Annexe 2.17 p. 300-305. Note : dans la colonne 2000-2001 (période de référence), les coefficients significatifs sont indiqués en orange. Dans les autres colonnes, les coefficients significativement différents du coefficient de référence sont indiqués en jaune.

Lecture : avoir un ratio RCAI/CA d’autant plus élevé en 2000 diminue, toutes choses égales par ailleurs, la probabilité d’avoir recours au licenciement pour motif personnel en 2001. Par rapport à 2000-2001, l’effet de la variable RCAI/CA sur la probabilité de recourir au LMP est significativement différent pour la période 1999-2000 et plus faible (- 0,0035 + 0,0033 = 0,0002). Autre exemple de lecture : par rapport à 2000-2001, l’effet du taux de croissance du CA, lorsqu’il est positif et fort, sur la probabilité de recourir au LMP est significativement différent pour la période 2001-2002 et il devient même positif (-0,0575 + 0,0865 = 0,029).

3.2.3 Une sensibilité de l’influence des indicateurs économiques sur le recours au LME selon l’état de la conjoncture économique ?

Pour ce qui est du recours au LME (cf. Tableau 2.5 ci-dessous), en comparant les résultats des régressions entre périodes, on peut s’attendre à trouver des liens différents avec les indicateurs économiques pour les périodes marquées par une forte conjoncture, à la hausse ou à la baisse, par rapport à une période de conjoncture moyenne comme 2000-2001. Mais nous n’avons pas

formé d’hypothèses sur la manière dont la conjoncture peut affecter ces liens. De fait, ils

peuvent transiter par de nombreux canaux : modification de la hiérarchie des indicateurs face

au risque de liquidation, processus d’imitations et/ou d’opportunité lorsque la dégradation générale de la situation économique facilite l’acceptation des licenciements, impact des

politiques publiques contra-cycliques, etc. Ces questions ne sont pas traitées ici, de sorte que nous dressons seulement les constats obtenus, comme une première occasion d’induction sur cette problématique. Les résultats montrent ainsi par exemple que l’effet du ratio RCAI/CA est différent en 1999-2000 (forte croissance) et en 2008-2009 (crise) par rapport à la période 2000-2001, mais il l’est également pour des périodes de croissance « molle » (2004-2005, 2005-2006 et 2006-2007). Pour les périodes 1999-2000, 2004-2005 et 2008-2009, l’effet négatif du ratio RCAI/CA est plus faible, alors que pour les périodes 2005-2006 et 2006- 2007, l’effet négatif est plus fort. On retrouve également un effet différencié entre 2000-2001 et 2008-2009 pour le taux de croissance du RCAI/CA et du taux de croissance du CA

lorsqu’ils sont négatifs, l’effet étant plus fort pour la période de crise. Néanmoins, là encore, il apparaît des différences d’impact de ces variables économiques même pour des années de

conjoncture moyenne.

Du côté des liens entre le recours au LME et les indicateurs de GRH, il semble comme pour le LMP, que les variables de masse salariale par tête et celle de part des dépenses salariales dans le CA se différencient sensiblement de la période de référence 2000-2001. Pour la première

variable, la masse salariale par tête, l’effet positif est moins fort pour les périodes 2002-2003,

2004-2005, 2007-2008 et 2008-2009. Pour la seconde variable, l’effet positif est plus fort pour six périodes différentes (1999-2000, 2002-2003, 2003-2004, 2004-2005, 2005-2006 et 2007-2008). Il reste ainsi difficile de conclure à une tendance générale de l’effet des

indicateurs économiques ou de GRH sur le recours au LME sur notre période d’étude.

Ainsi, peu de résultats pertinents ressortent de cette comparaison de l’effet des variables

recours au LME entre les périodes étudiées. De plus, il reste difficile de les interpréter sans un travail plus approfondi sur les liens attendus.

Tableau 2.5 : Effet spécifique, selon la période, des variables économiques et de GRH sur le recours au LME par rapport à 2000-2001 (période de référence) Période 1999- 2000 2000-2001 2001- 2002 2002- 2003 2003- 2004 2004- 2005 2005- 2006 2006- 2007 2007- 2008 2008- 2009 Coefficient de référence Ratio RCAI/CA 0,0034*** -0,0048*** 0,0002 -0,0014 0,0018 0,0028** -0,0101*** -0,0059*** -0,0026 0,0040*** Taux de croissance du ratio RCAI/CA négatif -0,0421 0,0756 0,0430 -0,0219 -0,0209 0,0080 -0,0726 -0,0494 -0,0504 0,1471** positif et fort 0,0480 0,1047** 0,1530** -0,0077 0,0845 0,1023 -0,0755 -0,0421 -0,0717 0,0803 Taux de croissance du CA négatif 0,0228 0,2842*** 0,0189 0,0881 0,0286 0,0785 0,1141** 0,0221 0,1029* 0,1952*** positif et fort -0,0481 0,0214 0,0308 -0,0037 -0,1291** -0,1381** -0,1374** -0,2088*** -0,0990 0,0873

Masse salariale par tête -0,0355 0,2295*** -0,1021 -0,1718** -0,0917 -0,1337* -0,0815 -0,0673 -0,1403* -0,1659**

Part des dépenses

salariales dans le CA 0,0037*** 0,00001 0,0003 0,0034*** 0,0021* 0,0028** 0,0051*** 0,0023 0,0042*** 0,00002

Taux d'entrée en CDD 0,0004 -0,0003 -0,0003 0,0001 -0,0005 0,0001 0,0005 0,0003 0,0002 -0,0007

Taux de démission -0,0002 0,0040*** 0,0003 -0,0050 0,0003 0,0005 -0,0037 -0,0026 -0,0041* 0,0030

Taux de départ en retraite 0,0458*** -0,0420*** 0,0311 0,0155 0,0531*** 0,0334** 0,0285 0,0336* 0,0343* 0,0234

Source : EMMO-DMMO et EAE, base empilée 1999-2009, calculs de l’auteur. Champ : entreprises de 10 salariés et plus du secteur marchand hors agriculture.

*** : significativité à 1 % ; ** : significativité à 5 % ; * : significativité à 10 %. L’ensemble des résultats des régressions est reporté en Annexe 2.12 à Annexe 2.17 p. 300-305. Note : dans la colonne 2000-2001 (période de référence), les coefficients significatifs sont indiqués en orange. Dans les autres colonnes, les coefficients significativement différents du coefficient de référence sont indiqués en jaune.

Lecture : avoir un ratio RCAI/CA d’autant plus élevé en 2000 diminue, toutes choses égales par ailleurs, la probabilité d’avoir recours au licenciement pour motif personnel en 2001. Par rapport à 2000-2001, l’effet de la variable RCAI/CA sur la probabilité de recourir au LMP est significativement différent pour la période 1999-2000 et plus faible (- 0,0048 + 0,0034 = 0,0014).

Cette sensibilité des résultats aux bases de données utilisées, et donc aux différentes périodes, reste difficile à expliquer, mise à part par une modification des pratiques en réaction à des changements conjoncturels mais qui ne correspond pas toujours à la logique attendue. L’une

des hypothèses que l’on peut envisager face à la disparité des résultats obtenus est relative à l’ensemble des éléments susceptibles d’influer sur ces décisions, mais que les bases de

données ne permettent pas de caractériser, des caractéristiques inobservables ou des effets spécifiques individuels. C’est ce que nous tentons d’examiner en exploitant la dimension

panel de nos données à partir de l’empilement des dix bases biennales et l’estimation d’un

probit à effets aléatoires pour chacun des deux types de licenciement.

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A la recherche d’un modèle structurel pour chacun des deux types de

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