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Les objectifs des pouvoirs publics à l’origine du développement de ces pratiques de rupture

Encadré 3.1 : La reconnaissance juridique du départ volontaire

1.2 Les objectifs des pouvoirs publics à l’origine du développement de ces pratiques de rupture

Pour les deux types de mesures publiques, préretraites et dispositifs d’accompagnement,

mises en place pour gérer les restructurations économiques et la hausse du chômage qui s’en suit, on retrouve une gestion particulière des salariés qui viennent de perdre leur emploi. Les

pouvoirs publics semblent en effet s’appuyer sur une logique de retrait temporaire ou

définitive du marché du travail de ces travailleurs, induisant une moindre hausse des chiffres du chômage (1.2.1). Mais devant le maintien des difficultés économiques et du chômage à un

niveau élevé dans les années 1980, les dispositifs d’accompagnement des restructurations s’insèrent également dans une politique de l’emploi visant à favoriser le reclassement et/ou la

reconversion des travailleurs (1.2.2). Enfin, tout au long du développement de ces types de rupture avec accord du salarié, un objectif semble présent tant dans les politiques des pouvoirs

publics, que dans les pratiques des entreprises : celui de la recherche d’une moindre

contestation de la perte d’emploi, qui se traduit par une plus grande difficulté à contester

judiciairement le motif économique de la rupture (1.2.3).

1.2.1 Une politique centrée sur le niveau statistique de la population active et du chômage

Les dispositifs publics de préretraite, comme les indemnisations chômage spécifiques créées dans les années 1970, semblent s’insérer dans une politique des pouvoirs publiques centrée

sur l’exclusion définitive ou temporaire d’une partie de la population active, dans un contexte

économique difficile marqué par une forte montée du chômage. En réalité, on retrouve également cette logique d’action sur les statistiques du chômage dans les dispositifs publics

d’accompagnement des restructurations, par le biais du statut de stagiaire de la formation professionnelle qui est donné aux salariés acceptant d’entrer dans ces dispositifs.

Les mesures incitatives à la cessation anticipée de l’activité, étudiées précédemment (1.1.1), apparaissent comme un outil de gestion des restructurations industrielles, s’appuyant sur une logique de retrait du marché du travail des salariés les plus âgés (Freyssinet, 2010 ; Colin et al., 1981). Cette politique, de type malthusien, permet d’agir sur le niveau de la population active et par conséquent sur le niveau statistique du chômage. L’adhésion du salarié à une

allocation spéciale du FNE et l’acceptation des garanties de ressources licenciement ou

démission, donnent en effet au salarié le statut d’inactif en préretraite. Il n’apparaît donc pas

dans les statistiques des demandeurs d’emploi de l’ANPE, ni dans le calcul du taux de chômage de l’INSEE qui s’appuie sur la définition plus restrictive du BIT. Le nombre

relativement important des bénéficiaires des ASFNE (44 200 au mois de septembre 1982, cf. Lenormand et Magnier, 1983) et celui rapidement croissant du nombre des individus bénéficiant des garanties de ressources (cf. Graphique 3.1 ci-dessous), montrent bien un certain succès de ce type de politique.

Graphique 3.1 : Evolution du nombre de bénéficiaires des garanties de ressources

Source : Colin et al. (1981), p. 15.

De fait, ces dispositifs semblent bien avoir eu un impact sur la variation du chômage, notamment au début des années 1980. Cherchant à expliquer la faible progression du chômage au cours des années 1981-1983, Colin et al. (1984) tentent d’évaluer la contribution

des dispositifs de cessation anticipée d’activité à l’évolution du chômage sur cette période. A partir de l’application d’un coefficient d’impact sur le chômage106

à la variation des effectifs bénéficiaires moyens de chaque dispositif de préretraite étudié, les auteurs estiment que

l’ensemble de ces quatre dispositifs aurait permis d’éviter entre 50 000 et 60 000 chômeurs107

(cf. Tableau 3.1 ci-dessous).

Tableau 3.1 : Effets des dispositifs de préretraite sur la variation du chômage En milliers de

personnes

Variation du stock moyen de

bénéficiaires d’une annéesur l’autre Effet sur l’accroissement moyen du chômage au cours de l’année

1981 1982 1983 1981 1982 1983 ASFNE 12 27 33 - 6 - 13,5 - 16,5 GRL 35 42 20 - 17,5 - 21 - 10 GRD 47 49 49 - 23,5 - 24,5 - 24,5 Convention sociale de la sidérurgie 8 2 2 - 4 - 1 - 1

Source : Extraits du tableau intitulé « Coûts et effets des politiques spécifiques d’emploi » p. 106 de Colin et al. (1984).

Note : c’est l’accroissement du nombre des bénéficiaires de chaque mesure de préretraite d’une année sur l’autre

qui est pris en compte pour estimer l’impact de ces mesures sur la variation du chômage. C’est donc « une incidence à la marge en variation d’une année sur l’autre » qui est calculée ici, à partir de l’application d’ « un coefficient d’impact sur le chômage », estimé de manière hypothétique à 50 %.

106Les auteurs font l’hypothèse d’un coefficient de 50 % qui correspond aux « phénomènes de déperdition dus

au non remplacement des salariés partis ou à l'attraction de nouvelles populations sur le marché du travail » (p. 103).

107

Cornilleau et al. (1990) tentent également d’évaluer l’incidence macroéconomique du système des préretraites des années 1970 et 1980. Ils montrent que l’impact maximum des dispositifs de préretraites est atteint en 1982-1983 avec un nombre de chômeurs évités qui atteindrait les 200 000. Ce chiffre est bien supérieur à celui calculé par Colin et al., mais il comprend un ensemble plus large de dispositifs de préretraites (préretraites progressives et contrats de solidarité préretraite-démission). En outre, la méthode d’estimation peut différer entre les deux études.

Du côté des dispositifs publics d’accompagnement, le statut particulier de stagiaire de la

formation professionnelle donné aux adhérents à certains de ces dispositifs (conventions de conversion, CRP, CTP et CSP), semble participer, là encore, d’une volonté d’agir sur le niveau de la population active et donc sur le nombre de chômeurs108. En effet, en acceptant le

bénéfice de l’un de ces dispositifs, le salarié prend le statut de stagiaire de la formation

professionnelle, comptabilisé dans la catégorie D des DEFM109, ce qui signifie qu’il est considéré comme inactif dans les statistiques relatives au marché du travail. Ce n’est ainsi

qu’à la fin du dispositif, dans le cas où le salarié n’a pas trouvé un nouvel emploi, qu’il doit s’inscrire dans une des catégories A, B ou C des demandeurs d’emploi (pour le motif d’entrée

de licenciement économique110) et toucher les allocations chômage. Le développement de ces types de dispositifs (CRP, CTP) devrait donc entraîner une baisse de la population active, voire du chômage au sens statistique. Dans une analyse de l’évolution des statistiques des

demandeurs d’emploi entre 2005 et 2006, Debauche et al. (2007) estiment ainsi l’impact

comptable de la CRP sur les statistiques du chômage. Ils calculent un effet possible de -20

000 sur le nombre de DEFM (catégories 123 hors activité réduite) à la fin de l’année 2006.

Cette étude ne porte cependant que sur les seules CRP et, qui plus est, elle ne rend compte que du début de leur mise en place. Or, comme le montre le Graphique 3.2 ci-dessous, le nombre de bénéficiaires de ce type de dispositif s’est largement accru, notamment à partir de 2009

sous l’effet de la crise économique. D’un stock moyen en fin de trimestre de 25 000 à 30 000 entre 2006 et 2008, le nombre de CRP connaît un pic au début de l’année 2010 avec presque

100 000 bénéficiaires, sans compter les 15 000 bénéficiaires de CTP qui s’y ajoutent alors. Outre cette influence sur le nombre de chômeurs, ces dispositifs rendent plus complexe le

dénombrement statistique des licenciés pour motif économique, comme nous l’avions montré

dans le chapitre 1 (section 1, sous-partie 1.2).

108 A propos de la création des conventions de conversion, Freyssinet (2010) estime qu’elle « s’inscrit ainsi dans

la fiction juridique qui permet d’exclure des statistiques du chômage des travailleurs qui sont sans emploi, à la recherche d’un emploi et disponibles pour l’occuper », p. 201.

109 Catégorie statistique de Pôle emploi, DEFM : demandeurs d’emploi en fin de mois. Jusqu’en 2009, les

publications du ministère du travail (Dares) reposent sur 8 catégories de DEFM (1 à 8). Aujourd’hui, il n’en

existe plus que 5 (A à E).

110 Pour le CRP, Debauche et al. (2007) notent que l’inscription des sortants de CRP à l’ANPE n’est pas

Graphique 3.2 : Nombre de bénéficiaires de CRP, CTP et CSP

Source : Pasquereau (2012), Dares-Pôle emploi, STMT. Données brutes en fin de trimestre.

Champ : France métropolitaine.

Ce raisonnement semble moins vrai pour les dispositifs des congés étudiés précédemment. En

effet, l’entrée dans ces dispositifs entraîne d’abord la suspension du contrat de travail. Par

conséquent, le bénéficiaire garde son statut de salarié pendant la durée du dispositif, et c’est seulement à la fin de celui-ci, s’il n’a pas retrouvé d’emploi, qu’il peut s’inscrire comme

demandeur d’emploi. Néanmoins, il semble que le recours aux dispositifs des conventions soit

plus important que ces derniers congés111, car les employeurs préfèreraient les dispositifs qui entraînent la rupture immédiate du contrat de travail du salarié (Bruggeman, 2005). Le maintien du statut de salarié et les implications de l’entreprise en matière de participation financière et matérielle (gestion de la formation du salarié par exemple) peuvent expliquer ce choix. Finalement dans les deux cas, convention ou congés, la mise en place de ces dispositifs a bien permis de limiter, au moins temporairement, la hausse du nombre de chômeurs

consécutive à des sorties d’emploi pour motif économique. Ils participent ainsi d’une

politique agissant sur le niveau statistique du chômage.

S’il semble que les mesures de cessations anticipées d’activité et les dispositifs d’accompagnement des restructurations relèvent d’une politique de baisse temporaire ou

définitive de la population active et in fine du nombre de chômeurs, une évolution est visible dans la manière dont les pouvoirs publics tentent de gérer les effets des restructurations

111 Il reste cependant difficile de quantifier l’utilisation de ces dispositifs puisque pour les congés de

reclassement et de mobilité aucune information statistique n’existe, alors que le congé de conversion n’est plus

économiques. L’incitation pour que le salarié accepte la perte de son emploi n’est plus

seulement indemnitaire, mais elle comporte également un accompagnement en termes de

formation et de reclassement professionnel dans l’objectif d’accélérer le retour en emploi de

son bénéficiaire.

1.2.2 Le développement d’une politique de (re)conversion professionnelle

Les pouvoirs publics semblent changer de stratégie dans la gestion des restructurations

industrielles et des sorties d’emploi qu’elles provoquent, en passant d’une logique d’indemnisation et de retrait du marché du travail à une politique d’accompagnement renforcé à la recherche d’un emploi.

L’adhésion du salarié à la rupture de la relation d’emploi est rendue plus facile, dans l’ensemble des pratiques étudiées précédemment, par une incitation financière. En effet, l’allocation perçue par le salarié acceptant la perte de son emploi est toujours supérieure à ce qu’il aurait perçu dans le cas où il aurait connu une rupture d’emploi traditionnelle, tel un licenciement économique. Dans le cas des cessations anticipées de l’activité (ASFNE, GRL,

GRD), le préretraité touche 70 % de son salaire brut antérieur ; dans le cas de l’ASA, le

demandeur d’emploi touche 90 % de son salaire brut antérieur ; alors que dans le cas des dispositifs publics d’accompagnement des restructurations, l’individu reçoit entre 65 et 85 %

de son salaire brut antérieur112 (cf. Annexe 3.1 à Annexe 3.4 p. 307-310). Cette logique

d’incitation indemnitaire peut ainsi apparaître comme une solution pour « éviter d’aborder de front le problème de l’emploi » (cf. Beaujolin-Bellet et al., 2012) car c’est d’abord l’Etat qui est à l’origine de ce type de politique (cf. 1.1.4). L’ASA et les garanties de ressources

licenciement ou démission sont emblématiques de cette gestion indemnitaire des restructurations. Cependant, la persistance d’un chômage de masse va engendrer rapidement

un déficit important du régime d’indemnisation chômage et va pousser les pouvoirs publics à

abandonner ce type de politique. Si le régime d’assurance chômage continue néanmoins à

intervenir dans la gestion des restructurations à travers les dispositifs d’accompagnement du

type congés ou conventions, cela est justifié dorénavant par les mesures de formation ou

reconversion proposées en vue d’une accélération de la reprise d’emploi.

112Alors qu’aujourd’hui, l’allocation d’aide au retour à l’emploi versée par l’assurance chômage correspond à

Avec les dispositifs publics d’accompagnement des restructurations, la logique n’est en effet

plus celle du retrait définitif du marché du travail, comme cela était le cas avec les

préretraites, mais au contraire celle d’une accélération du reclassement du bénéficiaire grâce à

un accompagnement renforcé. Cet objectif apparaît dans les débats parlementaires ou sénatoriaux sur les projets de loi qui ont institué ces différents dispositifs. Par exemple, pour le congé de conversion, les députés de la majorité socialiste (gouvernement de L. Fabius, sous

la présidence de F. Mitterrand) considèrent qu’il va permettre d’« accroître les chances d’insertion ou de réinsertion social et professionnelle » des salariés impliqués dans des

restructurations économiques en les prenant en charge en amont de la rupture (M. Delebarre, ministre du travail, cf. JO, 1985, p. 2377). Sur la convention de conversion, le ministre du

travail de l’époque (J.-P. Soisson) déclare même que sa création « permet de fonder le droit à

la conversion » (JO, 1989, p. 1177). Cette mise en place d’un accompagnement spécifique sur la seule population des demandeurs d’emploi pour motif économique est justifiée dans ces débats politiques par le fait que les « licenciés économiques mettent plus de temps pour se

reclasser que la moyenne des demandeurs d’emploi » (Van Lerberghe, 1985), sans cependant

que cette justification soit étayée par de véritables faits empiriques113.

La mise en place par les pouvoirs publics de ces pratiques de rupture avec accord du salarié, et leur développement par les entreprises, semblent répondre, en parallèle, à un dernier objectif : rendre plus facilement acceptable pour le salarié la perte de son emploi.

1.2.3 La recherche d’une moindre contestation, sociale et judiciaire, de la perte

d’emploi

Dès la mise en place des dispositifs de cessation anticipée de l’activité utilisés dans le cadre d’une gestion des restructurations industrielles, les pouvoirs publics semblent rechercher de la

part des salariés une moindre contestation de la perte de leur emploi. Il s’agit à la fois d’une potentielle contestation sociale, à travers des mobilisations collectives de salariés qui peuvent

se déclencher autour des restructurations d’entreprise, mais aussi d’une contestation judiciaire

de la rupture et notamment de son motif économique.

113 Dans une analyse économétrique, Margolis (2002) montre, au contraire, que les travailleurs ayant perdu leur

emploi suite à un licenciement économique collectif dû à la fermeture de l’entreprise ont une probabilité de

retour en emploi plus élevé et plus rapide que les travailleurs qui se sont séparés de leur employeur pour d’autres

C’est la proposition de certaines contreparties à la rupture de la relation d’emploi qui va

amener les salariés à moins la contester. Dans le cas des préretraites, l’incitation au départ

anticipé avec l’assurance d’un revenu de remplacement jusqu’à la prise officielle de la retraite

apparaît comme une de ces contreparties, qui permet aux « responsables politiques [d’éviter] ainsi les tensions sociales » (Hairault, 2013, p. 516). Avec un accompagnement renforcé, en

plus d’une simple incitation financière, les dispositifs publics d’accompagnement social des

restructurations participent de cet objectif de rendre les restructurations économiques plus

socialement acceptables. L’ensemble des dispositifs mis en œuvre par les pouvoirs publics

semble ainsi s’inscrire dans une volonté de réduire les « résistances sociales aux licenciements économiques » (Freyssinet, 2010, p. 117) ou encore d’« obtenir la paix sociale,

que menaçait l’intensification de la destruction des emplois dans les secteurs les plus

densément peuplés » (Dalmasso et al., 2013, p. 251).

Plus récemment, dans le contexte de la crise débutée en 2008, la multiplication des plans de départs volontaires par les entreprises qui font face à des difficultés économiques peut également répondre à cet objectif de pacification des destructions d’emploi. Les PDV

semblent en effet constituer une nouvelle voie pour organiser des réductions d’effectifs. Ils peuvent contenir de simples ruptures à l’amiable accompagnées d’indemnités supra-légales ou

supra-conventionnelles (cf. 1.1.2.2), ou s’intégrer dans un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) lorsque sont également notifiés des licenciements pour motif économique. Dans tous

les cas, si l’employeur doit respecter la procédure de consultation-information des

représentants du personnel, ce type de plans permet d’éluder certaines dispositions encadrant les licenciements collectifs. Par exemple, les entreprises ne sont plus obligées de respecter

l’ordre des licenciements puisque ce sont les salariés eux-mêmes qui répondent à l’appel au volontariat émis par l’entreprise. De plus, si aucun licenciement en tant que tel n’est prévu

dans le plan de réduction d’effectifs (prenant alors la qualification de PDV), l’employeur est dispensé de mettre en place un plan de reclassement (cf. Géa, 2010 ; et Favennec-Héry, 2010). Enfin, l’intérêt est à situer sur le plan médiatique : un PDV sera moins nuisible pour

l’image de l’entreprise qu’un PSE114

. Du point de vue des conséquences médiatiques, par exemple, la contrepartie indemnitaire et la démarche individuelle du salarié qui répond favorablement à une offre de départ volontaire peuvent le désinciter à participer à une

mobilisation collective contre les suppressions d’emplois de son entreprise. Cela complique

également le rôle des syndicats dans la contestation de la destruction des emplois car ils ne

peuvent aller à l’encontre de ces décisions prises individuellement par des salariés prêts à

partir volontairement de l’entreprise. Leur rôle se trouve, dans ce cas, cantonné à la recherche d’une meilleure indemnisation supra-légale (ou supra-conventionnelle) et/ou d’un meilleur

accompagnement du salarié.

Au-delà de la contestation sociale des suppressions d’emplois, c’est à une diminution de la contestation judiciaire que l’on peut s’attendre avec les pratiques de rupture avec accord du salarié. Cela est particulièrement vrai dans le cas des préretraites du FNE où le salarié perd le

droit de contester la régularité et le motif du licenciement, sauf s’il parvient à établir une fraude de l’employeur ou un vice de consentement (Morvan, 2005) ; ou encore dans le cas des

départs volontaires sous forme de résiliations amiables pour motif économique, développés par les entreprises, puisqu’elles ne donnent pas lieu à la définition explicite et écrite du motif économique tel que défini par l’article L. 1233-3 et donc contestable par le salarié115.

Dans le cas des dispositifs publics d’accompagnement des restructurations (congés ou conventions), l’analyse est plus complexe car même si le départ du salarié prend la forme

d’une rupture d’un commun accord, ce dernier garde le droit de contester le motif économique à l’origine de la suppression de son emploi116. Néanmoins, l’accord du salarié sur

le principe et les modalités de la rupture rendent moins probable la possibilité de contestation du salarié sur le motif de la perte de son emploi. De plus, le délai de contestation est relativement court, d’un an pour la CRP, le CTP ou le CSP, autrement dit égal à la durée du dispositif (cf. Annexe 3.4 p. 310). Ces éléments laissent penser que le risque de contentieux

pour l’employeur peut se trouver diminué avec ces dispositifs.

Cet objectif de diminution de la contestation judiciaire en cas de ruptures pour motif économique est principalement recherché par les entreprises qui craignent un risque contentieux qui peut leur être coûteux en termes de dommages et intérêts si la rupture est

reconnue sans cause réelle et sérieuse. L’argument d’une insécurité juridique est, en outre,

diffusé par certains économistes qui préconisent un assouplissement des règles sur le licenciement économique (cf. chapitre 1, section 2.2.3 et introduction générale). Pourtant,

d’autres chercheurs (Serverin et Valentin, 2009 ; Munoz-Perez et Serverin, 2005) ont montré

115 Selon Morvan (2005) et confirmé par Géa (2010). En réalité, ce sont les seules règles de nature individuelle

qui sont inapplicables aux « départs volontaires » sous forme de résiliations amiables, comme celles de

l’entretien préalable, de la notification du licenciement, des indemnités de licenciement et de l’exigence d’une

cause réelle et sérieuse.

116 Malgré une incertitude initiale concernant cette possibilité : cf. 1.1.3.2 et les débats parlementaires sur la

convention de conversion ; mais aussi un arrêt de la cour de cassation de 1992 qui décide que la convention de conversion implique l’existence d’un motif économique, et enfin un autre arrêt de 2008 qui prend la même

que les contentieux post-licenciements pour motif économique sont faibles aujourd’hui et

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