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Partie 2. Un mécanisme de protection des droits

A) Une présentation théorique

26. DES DROITS DE LHOMME « VIVANTS ». Derrière l’idée d’une substance du droit connaissable « en tant que telle », il s’agit de considérer la substance dans sa matérialité, comme un véritable « objet » à part entière, inhérent à un droit en particulier77. A cette conception s’oppose celle d’une substance comprise en tant que pur concept de l’entendement, qu’il joue un rôle de mécanisme de protection des droits, ou soit considéré comme une simple formule, ou idée symbolique, n’ayant pas de portée pratique78. Ainsi que cela a été présenté, la substance du droit renvoie à la notion philosophique de substantialisme, autrement dit, de croyance dans la réalité de substances, entités véritables, et non pas les seules idées qu’elles sont pour certains. Notons que cette thèse substantialiste79 a été et reste largement débattue. Les nominalistes80 ont, par exemple, été de fervents opposants et détracteurs de ces entités voulues réelles qu’ils analysaient comme de simples concepts,

77 Selon GerhardVAN DER SCHYFF (Limitation of Rights : a study of the European Convention and the South

African Bill of Rights, Nijmegen, Wolf Legal Publishers, 2005, p. 165), il s’agit d’une « metaphysical reality that speaks for itself ».

78 Cette idée sera développée dans la Partie 2 ; nous verrons que de nombreux auteurs, dans la doctrine conventionnaliste et constitutionnaliste européenne partagent cette vision d’une notion « impraticable ».

79 Pour une définition (quoi que tautologique), voir A. LALANDE, Vocabulaire technique et critique de la

philosophie, op. cit., p. 1052.

80 Selon le Vocabulaire technique et critique de la philosophie, il s’agit d’une « doctrine d’après laquelle il

n’existe pas d’idées générales (…) mais seulement des signes généraux » (ibid., p. 686). – Voir, également, A.

VIALA, Philosophie du droit, Paris, Ellipses, coll. « Cours magistral », 2010, pp. 32 et s., au sujet de l’anti-substantialisme de LéonDUGUIT.

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³Ÿ´•’’¡  ‘— Ÿ ˜ ‘”µ– ‘ “ ‘ ‘¶”–—ž •˜ ‘ ’ •” ‘ “‘ ¶·– ••¶·‘ tels BERKELEY ou HUME81ont par suite rejeté leur existence. Derrière le recours à cette notion par le juge de la Convention, il y aurait donc une sous-partie ou sous-composante aux droits, nommée substance. Cette construction intellectuelle suppose que le droit en question soit appréhendé comme une structure générale, un droit « valise », contenant en son sein un ensemble constitué de sous éléments spécifiques : des propriétés, des caractères du droit.

27. LA PREMIERE DES COMPOSANTES DUN DROIT. La substance du droit se distinguerait ainsi des autres composantes concrètes identifiables au sein d’un droit en raison de sa valeur et de sa place essentielles, premières, dans le droit en question82. Ce sont précisément ces deux aspects – la détermination de la composante détenant cette valeur extraordinaire stricto sensu, d’une part, et l’enjeu de la place ensuite conférée à celle-ci, eu égard à l’ensemble des composantes du droit, d’autre part – qu’il conviendra d’analyser et de questionner, tout au long de ce Chapitre.

Mais avant toute chose, il faut se demander quelle est donc cette valeur qui confère un statut spécial à la composante « substance » au sein d’un droit ? L’étude des critères d’identification de celle-ci permettra de dégager les pistes majeures de réponse à cette question. On peut, cependant, dès à présent remarquer, usant d’un langage proprement tautologique, que la substance du droit est la partie ou composante essentielle de ce droit83. Afin d’éviter la

81 Sur le courant phénoméniste, voir C.GODIN, Dictionnaire de philosophie, Paris, Fayard, Editions du Temps, 2004, p. 1266 ; A.LALANDE, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, op. cit., pp. 767-768.

82 Cette conception apparaît plus ou moins directement dans la doctrine, tant spécialisée dans le droit conventionnel, que relative au droit des droits de l’homme généralement (international, comparatiste et national). – Quant à la première, voir S.VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de la Convention

européenne des droits de l’homme. Prendre l’idée simple au sérieux, Bruxelles, Bruylant, coll. « Publications

des Facultés universitaires Saint-Louis. Collection générale », 2001, pp. 354-356, sur la répartition des prérogatives contenues dans le droit, considérées essentielles ou accessoires. – Quant aux suivantes, voir E. BALLOT, Les insuffisances de la notion de droits fondamentaux, op. cit., pp. 437-438, précisant explicitement que le noyau intangible devrait être défini « a priori, de manière générale et abstraite » ; E.BREMS, Human

Rights : Universality and diversity, The Hague, Boston, London, Martinus Nijhoff, coll. « International studies

in human rights », 2001, pp. 410-411, distinguant le « cœur », qui ne doit jamais être affecté, et la périphérie d’un droit ; A.MACHERET, « Le noyau intangible des droits de l’homme : sources nationales et internationales », in P.MEYER-BISCH (dir.), Le noyau intangible des droits de l’homme…, op. cit., p. 33, renvoyant au « noyau

élémentaire de protection » ainsi qu’aux « standards minima » dont l’article 19 de la Loi fondamentale

allemande permet la garantie) ; J.-B. MARIE, « La quête du noyau intangible », in P. MEYER-BISCH (dir.),

Le noyau intangible des droits de l’homme…, op. cit., p. 14, évoquant le noyau irréductible requis pour que le

droit existe et fasse sens ; P.MUZNY, « Essai critique sur la notion de noyau intangible d’un droit », RDP, 2006, n° 4, p. 1002 notamment, faisant référence à un noyau fixé « ex ante » ; B.PETER, Des droits fondamentaux en

République fédérale d'Allemagne : limitation et protection, thèse dactylographiée, Université de Lille II, 1990,

pp. 390-391, le noyau substantiel du droit étant constitué, pour l’auteur, des « particularités qui résultent de sa

nature et de sa substance fondamentale » ; S.PLATON, La coexistence des droits fondamentaux constitutionnels

et européens dans l'ordre juridique français, op. cit., p. 615, affirmant que « la théorie du noyau dur signifie normalement qu’il existe une part intangible dans chaque droit fondamental, un ensemble de prérogatives auxquelles il ne pourrait être porté atteinte dans aucune circonstance ».

83 Pour un exemple cité par S.VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de la Convention

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6: _:Eition, on préférera le choix de l’adjectif « fondamental », qui retranscrit tant le caractère principal qu’indispensable de l’élément qualifié de substance. En effet, l’emploi analogue de termes tels que le « cœur » ou le « noyau dur » du droit, renvoie directement à l’idée de vitalité, prégnante dans la conception ici étudiée84. La substance est donc l’élément indispensable à l’existence effective même d’un droit. Ainsi, elle sera la composante ou propriété, ou bien le groupe de celles-ci, jouissant d’une protection spéciale, dérogatoire, absolue car elle ne peut et ne doit être affectée85.

28. D’AUTRES THESES RATTACHEES A LA CONCEPTION ABSOLUE. Cela étant établi, il importe de signaler que cette première hypothèse ne constitue pas l’unique façon d’interpréter la forme prise par la substance du droit, telle que comprise dans l’idéal ou conception absolue. – LE COUPLE « JOUISSANCE/EXERCICE ». A côté de celle-ci, il faut notamment évoquer une autre interprétation percevant la substance du droit non plus comme une composante matérielle définie au sein d’un droit, mais axée autour du couple « jouissance/exercice »86. Celle-ci consiste à rapprocher la substance de la capacité de jouir des prérogatives qui le composent, alors que l’exercice desdites prérogatives relève de la partie accessoire de ce droit87. Dans cette mesure, la seconde théorie peut être qualifiée d’hybride en ce que la substance du droit s’y définit relativement au niveau d’atteinte, tout en étant susceptible de protection absolue, ainsi que nous le verrons.

– LES DIMENSIONS « OBJECTIVE/SUBJECTIVE ». Parallèlement, mentionnons l’existence dans les systèmes germanophones notamment de la théorie dite de l’institution. Cette notion

84 – Remarquons, à cet égard, que dans la jurisprudence dite « Droit de grève » (STC 11/1981, 8 avril 1981 (BOE nº 99 du 25 avril 1981)), fondement juridique 8, le juge constitutionnel espagnol envisageait le contenu essentiel d’un droit comme la partie « absolutamente necesaria para que los intereses jurídicamente protegibles,

que dan vida al derecho, resulten real, concreta y efectivamente protegidos » (nous soulignons). – Sur l’analogie

des notions de cœur, de noyau, avec la substance du droit, voir notamment P.MUZNY, « Essai critique sur la notion de noyau intangible d’un droit », op. cit., p. 979.

85 Yves RODRIGUEZ affirme ainsi qu’« il s’agit là d’un concept de valeur absolue quelles que soient les

circonstances invoquées pour limiter ce droit, on doit toujours lui conserver ses caractéristiques essentielles »

(P.BON, F. MODERNE, Y.RODRIGUEZ, La justice constitutionnelle en Espagne, Paris, Economica, Aix-en-Provence, Presses universitaires d'Aix-Marseille, coll. « Droit public positif », 1984, p. 246).

86 – Pour une réflexion globale autour de l’utilité du binôme, voir I. MARIA, « De l’intérêt de distinguer jouissance et exercice des droits », JCP G, 2009, I, n° 23-24, 149, pp. 17-21. – Pour des références au lien entre la notion à l’étude et un tel binôme, dans l’ordre interne : voir, par exemple, la note de E.GARAUD, Bull. Joly

Sociétés, 2003, n° 3, p. 282, sous Cass., 1ère Civ., 19 novembre 2002, Bull. civ. I, n° 275 ; complémentairement, J.RAYNAUD, Les atteintes aux droits fondamentaux dans les actes juridiques privés, thèse dactylographiée, Université de Limoges, 2001, pp. 111-112 ; dans l’ordre communautaire : voir, par exemple, les conclusions significatives de l’avocat général TRABUCCHI sur CJCE, 14 mai 1974, J. Nold, Kohlen und

Baustoffgroßhandlung c/ Commission des Communautés européennes, aff. 4/73, ECLI:EU:C:1974:27 ; et, dans

la doctrine, R.TINIERE, L’office du juge communautaire des droits fondamentaux, op. cit., p. 364 ; P. THIEFFRY, « Contentieux de la validité des mesures communautaires de protection de l'environnement : le retour », Gaz.

Pal., 15 avril 2006, n° 126, pp. 878-879.

87 S.VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de la Convention européenne des droits de

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Ee:V6=5 développée en Allemagne et en Suisse88 assimilant exclusivement la substance et sa protection à la dimension institutionnelle du droit, conçu « objectivement »89, c’est-à-dire eu égard à son rôle et à son importance dans la société. Il s’agit, explique Jörg-Paul MÜLLER « de ne pas supprimer l’effet général d’un droit fondamental »90. L’exemple le plus courant au sein de ces deux systèmes juridiques d’une institution juridique au sens précité est celle de la propriété91. A cette conception s’oppose celle soutenant qu’une atteinte à la substance du droit peut tout autant viser la dimension « subjective » d’un droit, alors même que l’institution se trouve garantie, s’attachant là à une perspective strictement individuelle ou personnelle du droit dont jouit et qu’exerce un individu (ou quelques-uns). Ainsi, outre l’aspect objectif, « il faut, de plus, que les droits fondamentaux d’une personne ne soient en aucune circonstance restreints au point d’être dépourvus de tout signification pour celle-ci »92. Néanmoins, ce couple conceptuel semble lui aussi renvoyer dans la doctrine davantage à la protection de la substance d’un droit qu’à la

88 Voir notamment, – concernant la doctrine allemande, B. PETER, Des droits fondamentaux en République

fédérale d'Allemagne…, op. cit., pp. 386 et s. ; S.VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de

la Convention européenne des droits de l’homme…, op. cit., p. 372 ; – concernant la doctrine suisse, J.-F.

AUBERT,Traité de droit constitutionnel suisse. Supplément 1967-1982, Neuchâtel, Ides et Calendes, 1982, p.

209 ; M.HOTTELIER, « Le noyau intangible des libertés », in P.MEYER-BISCH (dir.),Le noyau intangible des droits de l’homme…, op. cit., pp. 72-73 ; M.HOTTELIER, « La garantie constitutionnelle de la propriété en droit fédéral suisse : Fondement, contenu et fonctions », RIDC, 1997, n° 1, spécialement pp. 149-151 ; C.-A. MORAND, « Le noyau intangible des droits constitutionnels », in P.MEYER-BISCH (dir.),Le noyau intangible des droits de l’homme…, op. cit., pp. 59-60 ; S.VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de la

Convention européenne des droits de l’homme…, op. cit., pp. 363-364 ; T.ZIMMERMANN, « Le noyau intangible des droits fondamentaux… », op. cit., pp. 311-316. Notons néanmoins que la doctrine espagnole, comme la jurisprudence du Tribunal constitutionnel espagnol (STC, 37/1987) s’est aussi saisie de cette notion (voir, par exemple, F.FERNANDEZ SEGADO,El sistema constitucional español, Madrid, Dykinson, 1992, pp. 450-452).

89 Notons que, pour David CAPITANT, la confusion des notions de noyau obligatoire de l’institution et de substance du droit (au sens de l’article 19-2) « conduit à adopter de la notion de substance une conception assez

peu protectrice », uniquement institutionnelle, alors même que les deux notions n’interviennent pas au même

niveau : celle de noyau jouant « lors de la définition du domaine protégé par le droit fondamental » dans le but de « limiter les possibilités d’aménagement », celle de substance permettant quant à elle « dans le cadre du droit

défini, de limiter les possibilités d’ingérence » (D.CAPITANT, Les effets juridiques des droits fondamentaux, Paris, LGDJ, coll. « Bibliothèque constitutionnelle et de science politique », 2001, p. 230).

90 J.-P.MÜLLER (dir.), Éléments pour une théorie suisse des droits fondamentaux,op. cit., p. 161.

91 Voir, – en droit constitutionnel allemand, BVerfGE 24, 367, 18 décembre 1968 ; – droit constitutionnel suisse, ATF 88 I 248 (255), 14 novembre 1962, « Dafflon » ; ATF 103 Ia 417 (418), 5 octobre 1977, considérant 2 ; également, dans la doctrine, M. HOTTELIER, « La garantie constitutionnelle de la propriété en droit fédéral suisse… », op. cit., notamment pp. 143 et s ; E. RONZANI, L'interprétation créatrice de la constitution par le juge

constitutionnel en France et en Suisse, op. cit., pp. 17-18 ; – parallèlement, l’usage du terme dans la doctrine

interne française (par exemple, F. TERRE, « L’évolution du droit de propriété depuis le Code civil », Droits, n° 1, 1985, p. 48).

– Remarquons, par ailleurs, que si la garantie de l’institution peut potentiellement concerner plusieurs droits (et libertés), elle ne semble pas être universellement applicable (voir, notamment, pour la jurisprudence allemande, B.PETER, Des droits fondamentaux en République fédérale d'Allemagne…, op. cit., pp. 407-408 ; et pour la jurisprudence suisse, J.-F.AUBERT,Traité de droit constitutionnel suisse. Supplément 1967-1982, op. cit., p.

209).

J.-P.MÜLLER (dir.), Éléments pour une théorie suisse des droits fondamentaux, op. cit., p. 161. Voir aussi,

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5D 5CC 5-même et pour elle-même93. Ce qui ne devra cependant pas empêcher de rechercher, tout comme pour la théorie « jouissance/exercice » précédemment présentée, si elle trouve une résonance dans la jurisprudence de la Cour européenne.

29. LA STRUCTURE COMPLEXE DES DROITS. Enfin, il faut revenir à la première interprétation proposée, afin d’en clore la présentation par une dernière remarque. Notons qu’au découpage « substance / accessoire » du droit précédemment exposé, doit être ajoutée la prise en considération de la structure complexe des droits prévus par la Convention, qui reçoivent une désignation large dans les articles de cet instrument. De tels droits se voient ainsi composés de différentes strates de droits, puisqu’ils sont subdivisés en diverses garanties ou sous-droits particuliers, eux-mêmes fréquemment re-subdivisés tant que de besoin, telles des poupées russes. Cette approche est observable dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, ayant largement développé les garanties attenantes aux droits protégés (en parallèle des divers développements en matière de champ d’application, et d’obligations particulières contenues)94.

30. SCHEMA SYNTHETIQUE DE LHYPOTHESE. En vue d’expliciter ces propos, il semble possible de recourir au schéma suivant, empruntant à l’idée d’une représentation graphique proposée par SébastienVAN DROOGHENBROECK dans sa thèse de doctorat95 :

93 Au-delà de la perception du droit « en tant » qu’institution ou droit subjectif qui renseigne très abstraitement sur la substance, MichelHOTTELIER semble toutefois suggérer l’existence d’une substance déterminable en soi au travers ses propos relatifs à la garantie de l’institution. Cette dernière renvoie ainsi à des « éléments

objectifs de l’ordre juridique », ou à un « ensemble de principes directeurs de l’activité étatique » (ibid., p. 72 ;

voir également, M.HOTTELIER, « La garantie constitutionnelle de la propriété en droit fédéral suisse… », op. cit., p. 143). Il s’agit, précisément, de « la sauvegarde des droits essentiels de disposition et de jouissance » du propriétaire (ibid., p. 150), introduisant, néanmoins, un aspect variable dans l’identification de la substance du droit en cause.

94 – Quant à cette thématique en générale, voir F.SUDRE, « A propos du dynamisme interprétatif de la Cour européenne des droits de l’homme », JCP G, 2001, I, n° 28, 335, pp. 1365 et s. ; F.SUDRE, « La réécriture de la Convention par la Cour EDH », in Mélanges en l’honneur de Jean-PaulCOSTA.La conscience des droits, Paris,

Dalloz, 2011, pp. 597-605. – Quant à un exemple particulier, pertinent qui plus est en matière de protection de la substance, on pense en premier lieu au « travail » effectué par la Cour sur le terrain de l’article 6 de la Convention (voir, spécifiquement, F.SUDRE, « A propos du dynamisme interprétatif de la Cour européenne des droits de l’homme », op. cit., p. 1367). Ainsi, le droit protégé par l’article 6 se compose d’un ensemble de garanties (Cour EDH, 17 janvier 1970, Delcourt c/ Belgique, req. n° 2689/65, série A11, § 25), ou « sous-droits », qui ont été largement développées par la Cour ; de sorte qu’ « au volet central des garanties

procédurales stricto sensu, énoncées implicitement (égalité des armes) ou expressément (indépendance et impartialité du tribunal, publicité, célérité de la procédure) dans le texte de l’article 6, sont ajoutés deux droits « matériels », le droit d’accès un tribunal, d’une part, et, d’autre part, le droit à l’exécution des décisions de justice » (F. SUDRE, Droit européen et international des droits de l'homme, Paris, PUF, coll. « Droit fondamental. Classiques », 13e éd. refondue, 2016, p. 577). – Pour des précisions sur l’une de ces garanties majeures, constituant le terrain le plus actif parmi les autres garanties à propos desquelles la Cour a expressément interdit l’atteinte à la substance du droit (plus de 50 % des arrêts rendus), voir L.MILANO, Le droit

à un tribunal au sens de la Convention européenne des droits de l’homme, op. cit.

95 S.VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de la Convention européenne des droits de

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31. Il convient maintenant d’éprouver cette hypothèse à l’aune de la jurisprudence

européenne. Or, comme l’a constaté Sébastien PLATON, « s‘il est possible de concevoir abstraitement l’existence d’un ensemble de prérogatives qui ne peut en aucunes circonstances faire l’objet de limitations, il est en revanche délicat de déterminer concrètement ce que sont ces prérogatives « absolues », qui seraient totalement à l’abri de toute ingérence ». 96

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